Pierre d'Angkor : La Vie est Créatrice

Dieu a créé le monde, nous dit le traditionalisme religieux. Comme il n’y a ici aucune « adéquation » entre la cause et l’effet, entre l’Infini créateur et les limitations de toute forme créée, on ne voit pas comment cette création serait possible. Un hiatus formidable oppose les deux termes et la dualité paraît irréductible puisqu’il n’y a aucune commune mesure, aucun rapport de nature, entre le Créateur et sa création.

Pierre d'Angkor : Le pourquoi des choses

0 toi qui réfléchis sur le pourquoi des choses,

Et qui le long des jours te promènes songeur
Connais-tu la raison de nos métamorphoses,
Et pourquoi chaque fruit procède de sa fleur ?

Pierre d'Angkor : Tat twam asi

Tous nous avons conscience de cette réalité mystérieuse, la vie en nous. Nous ignorons pourtant, je le répète, ce qu’elle est, quoiqu’elle nous apparaisse comme le principe même de notre être. La vie en nous est donc distincte de la conscience que nous en avons. Pour la vie elle-même, la mort n’existe pas. Mort et vie sont deux termes antinomiques, deux idées qui s’excluent mutuellement.

Pierre d'Angkor : L'immanence divine en l'homme et la théologie catholique

La sagesse antique se montrait plus clairvoyante que nos philosophes et nos hommes de science matérialiste. De temps immémorial, elle nous a enseigné que Dieu, l’Etre pur, est unité, mais que sa manifestation dans l’univers et l’homme apparaît comme dualité et trinité. Elle nous enseigna donc la dualité des pôles opposés en notre nature même, en précisant que notre moi conscient n’est que la réflexion inférieure dans le cerveau d’une Réalité plus intime, plus profonde, de nous-même, L’Esprit, l’Etincelle divine en nous.

Pierre d'Angkor : L'Homme et son Destin - Pessimisme moderne ou optimisme antique ?

A notre époque de décomposition sociale, où les cadres moraux et religieux qui maintenaient les hommes sont fortement ébranlés, sinon même détruits, ce fond secret et vaseux des individus remonte à la surface et déborde au dehors dans les mœurs, les tendances et les goûts avoués du public. C’est ce dont témoignent à suffisance — sans même parler des guerres et autres catastrophes publiques qui en dérivent — l’immoralité générale de notre temps, l’augmentation inquiétante de la criminalité, et la vogue croissante d’une certaine littérature qui est comme le reflet de toute cette pourriture sociale.

Pierre d'Angkor : Sagesse d'Orient et d'Occident

Est-il certain que nos activités mentales soient ainsi, toujours et nécessairement, inspirées par un désir ou un sentiment égoïste ? L’homme serait-il donc incapable d’oubli de soi-même et d’une pensée sincère de désintéressement personnel ? Nos conceptions philosophiques et religieuses sont-elles nécessairement aussi le produit de ces causes subjectives, désir ou crainte, du « moi » ? Sont-elles ces constructions factices d’un mental toujours avide ? N’apparaissent-elles pas, plutôt et depuis les premiers âges, comme les intuitions naïves, vagues encore, et toutes approximatives et symboliques d’une vision directe de l’univers où nous vivons, vision que le mental primitif des hommes s’est efforcé de traduire en des formules le plus souvent puériles ?