XXX : Répétitions

Comment connaître ce qui, comme le message de l’exemple analogique précédent, n’est ni matière, ni énergie ? Tant qu’on reste dans le domaine intellectuel ou affectif, on ne peut procéder que par distinction donc par séparation. Le monde de l’intellect humain par sa nature ne peut être que dualiste. Lorsqu’on se trouve placé dans la dimension essentielle il est impossible d’en rendre compte au moyen de l’intellect et du langage. Telle est la situation paradoxale dans laquelle on se trouve. D’un côté rien ne peut vous aider et de l’autre rien ne peut être dit. Pourtant il n’existe qu’une seule réalité inséparable. Comme pour une pièce de monnaie on ne peut demander à quelqu’un de vous donner seulement soit le côté pile, soit le côté face à l’exclusion du reste…

Daniel Verney : Esquisse pour une théorie de la relativité ontologique

Cela ne signifierait évidemment pas qu’il faut abandonner l’idéal d’une unité de la connaissance et de l’être, mais qu’il faut abandonner la prétention de l’orgueilleux mental humain à conceptualiser « le tout », et admettre que l’unité ne peut pas être atteinte par une démarche uniquement conceptuelle ; bien plus, qu’elle ne peut être éventuellement vécue qu’à travers l’acceptation et le dépassement des multiplicités. C’est d’ailleurs ce qu’enseignent toutes les traditions de l’humanité.

le Dr Dimitri Viza : Pour sortir de l'état de vérité

La maladie qui atteint l’intelligence de ceux qui deviennent les porte-paroles de telle ou telle idée politique ou scientifique, qui deviendra doctrine pour se transformer en dogme, est sans doute un trait congénital de l’organisation cérébrale humaine au stade actuel de son évolution. Ainsi, les représentants de chaque vision s’enfermeront chacun dans leur vérité, se rendant imperméables à toute autre. Cela est un trait fondamental de l’homme et il suffit d’écouter pendant quelques minutes un militant de n’importe quelle obédience (communiste, chrétien, juif, musulman, athée, fasciste) pour se rendre compte de l’ampleur de la déformation intellectuelle qu’une idée est capable d’imposer à ses partisans.

Daniel Verney : Vers un nouveau paradigme scientifique : ontologies et logiques selon Gotthard Günther

L’une des originalités essentielles de la pensée de Gotthard Günther est en effet de ne pas hésiter à entrelacer les points de vue métaphysique et logique, non pas pour diluer la science dans la métaphysique, ni, comme l’imaginent les scientifiques qui restent attachés au paradigme de la science classique, pour évacuer de la science ce qui pourrait y rester de métaphysique, mais au contraire pour essayer de construire une science nouvelle qui n’exclurait pas une réflexion sur la nature — les natures — des êtres.

Dr. Dimitri Viza : Réflexions sur les paradigmes en biologie

Il faut se rappeler comment un paradigme se crée et vit dans la société actuelle, incarné par des hommes. Sa maturation, c’est-à-dire son épuisement, suit un chemin similaire à la « maturation » du scientifique et peut rappeler certains aspects de la différenciation cellulaire pendant le développement de l’embryon. Ainsi, au cours des divisions cellulaires successives s’opère une restriction, une diminution progressive de l’éventail des possibilités. Aux « mitoses créatrices » (mitose : division cellulaire) capables de donner naissance à quelque chose de nouveau, succèdent les « mitoses monotones » reproduisant des copies conformes des cellules qui ne se divisent que pour résister à l’usure du temps. L’instabilité, créée par une division, doit toujours précéder toute différenciation cellulaire : il en va de même pour la différenciation du paradigme.

Daniel Verney : Quelques hypothèses de recherche à propos du psychisme dans le monde et dans l'homme

La première révolution copernicienne – celle de Copernic – n’a pas consisté uniquement (comme on le répète trop souvent) à remplacer une conception « fausse » du monde physique (centrée sur la Terre) par une conception « vraie » (centrée sur le Soleil), mais à relativiser le géocentrisme de sorte qu’il devint insoutenable en tant que dogme et qu’il apparut enfin comme ce qu’il était, c’est-à-dire un point de vue. Point de vue privilégié, certes, puisqu’il est jusqu’à nouvel ordre celui auquel nous oblige notre situation d’hommes sur la Terre, mais justement point de vue sur une réalité qui n’est pas centrée sur ce point : nous, ou moi.

Jean Varenne : L'hindouisme : des renaissances successives

Brièvement exposée, la doctrine hindoue de la transmigration enseigne que tout être vivant est formé d’une âme (en sanskrit : âtman) et d’un corps. Ce dernier n’est qu’une dépouille mortelle cependant que l’âtman est impérissable. Emanant, au commencement du monde, de la source unique de toute vie, le « brahman », l’âme, entreprend un long voyage, pour retourner à l’Absolu. Il faut admettre que la première étape est tout au bas de l’échelle des êtres, parmi les formes les plus élémentaires de la vie cosmique. Progressivement, cette entité migrante qu’est l’âtman gravit les échelons et se réincarne dans des corps de plus en plus complexes : animaux supérieurs, hommes.

la méditation : Le bouddhisme, l'éveil

[…] le nirvâna n’est pas du domaine des sens, il ne peut être connu de quelque façon que ce soit, car, disent les bouddhistes, il est du domaine de l’inconnaissance ; de la même façon, ils assurent que l’homme est sans âme, sans rien de permanent en lui, mais qu’il doit s’efforcer d’échapper à la transmigration ; or, puisque, de toute évidence, ce n’est pas le corps qui renaît et qu’il n’y a pas d’âme immortelle, comment comprendre ? Justement, rétorquent les théologiens de l’un et l’autre Chemins, il n’y a rien à comprendre…

Dimitri Viza & Christine Boucheix : Une coévolution spirale

Le concept de l’évolution a suivi les changements survenus dans notre représentation du monde. Ainsi, la Genèse, malgré une création apparemment instantanée, introduit l’idée d’évolution en six étapes consécutives. Cette évolution figée, linéaire et discontinue, dirigée par la rigueur d’un déterminisme absolu et divin sera à l’origine des principes qui vont régir et limiter les démarches de la science et de la philosophie occidentales jusqu’au XIXe siècle. Dans ce domaine comme dans bien d’autres, la pensée judéo-chrétienne exerça et continue d’exercer son influence dévastatrice ; ses conséquences continueront de se faire sentir encore bien longtemps en politique et même en science.