Swami Hridayananda Sarasvati
Enseignements 5 : Le mental

Ce qu’on appelle le mental individuel n’est en fait pas individuel du tout. Aucun d’entre nous a un esprit séparé, toutes nos facultés pensantes sont reliées les unes aux autres. Mais comme chacun ressent des sentiments, des émotions, des désirs différents, etc…, les vibrations de chacun n’étant pas semblables, elles créent des tourbillons différents. Si bien qu’on a l’impression que ces tourbillons n’ont rien de commun, de la même façon que lorsque vous voyez des tourbillons dans l’eau, vous avez l’impression que chacun est différent, mais en même temps il vous est impossible d’en prendre un en le séparant des autres. C’est l’eau elle-même qui est devenue tourbillon et il y a continuité de l’eau. Cependant, bien qu’il y ait continuité de l’eau, il nous est possible de compter les tourbillons comme s’ils étaient séparés.

(Revue Panharmonie. No 200. Octobre 1984)

ENSEIGNEMENT DONNE A L’ÉCOLE NORMALE DE YOGA  Roscoff – Juillet 1983

Je crois qu’il est nécessaire de savoir quelque chose au sujet du mental selon la philosophie indienne.

Le mental est nommé « Antahkarana », c’est-à-dire « l’organe interne », « le sens interne », parce qu’il est considéré comme faisant partie des sens, comme étant un aspect matériel. Il a quatre aspects : Manas, Buddhi, Ahamkara, et Chitta. Manas est la partie du mental qui reçoit les impressions extérieures, et qui accomplit aussi les fonctions de penser, douter, etc. En fait, il apporte les informations au mental. C’est Buddhi qui décide de la qualité bonne ou mauvaise de l’information, c’est-à-dire que c’est l’intellect doué du pouvoir de discrimination, il décide si quelque chose est réel ou irréel, si c’est bon ou mauvais, laid ou beau, etc. Mais l’intellect ou la faculté discriminative ne fonctionne pas seule mais de concert avec Ahamkara ou ego. Dès que la discrimination de ce qui est bon ou mauvais est faite, immédiatement s’ensuit la pensée : « Est-ce bon ou mauvais pour moi ? » ; « Dois-je l’accepter ou dois-je le rejeter ? ». Et finalement Chitta inclut le subconscient et l’inconscient.

Tous ces aspects doivent fonctionner en même temps. Ce ne sont pas en fait quatre parties différentes du mental. La partie la plus dense est appelée Manas, ensuite un peu moins dense est la Buddhi, ce qui est encore plus subtil est appelé Ahamkara ou ego, et la plus subtile est appelée Chitta.

Si ces quatre aspects ne fonctionnent pas simultanément, nous pouvons commettre des erreurs. Si l’un ne fonctionne pas, cela crée des complications dans notre vie. Voyons par exemple comment cela fonctionne :

Vous allez vous promener au crépuscule et vous voyez un homme marchant avec vous. Le Manas a immédiatement pris le moule de cet homme et l’information en est donnée à l’intellect. C’est exactement comme l’eau qui n’a pas de forme, mais qui semble être carrée lorsqu’elle se déverse dans un champ carré. Elle prend la forme de ce en quoi elle coule. De même la conscience n’a pas de forme par elle-même, mais prend la forme de ce avec quoi elle entre en contact et elle rapporte l’information à l’intellect, Buddhi. Donc l’information concernant cet homme a été transmise à l’intellect. A présent vous avez en vous les impressions subconscientes d’un homme que vous avez connu, vous vous souvenez de sa taille, de sa forme, de son allure et de sa démarche, de même que du plaisir éprouvé lorsque vous l’avez rencontré et toutes ces impressions deviennent conscientes et sont stimulées, si bien que l’intellect décide qu’il s’agit là de cet ami et il approuve que vous vous approchiez de lui. L’ego s’est aussi mis en action en disant : « c’est mon ami et je dois aller le trouver ». Par conséquent vous courez vers lui, vous l’embrassez et vous éprouvez une très grande joie, et cette joie forme à son tour une impression dans votre subconscient, et cette impression subconsciente se trouve renforcée à chaque fois que vous rencontrez à nouveau cet ami. Après quelques jours vous retournez vous promener et vous voyez un homme ayant la même silhouette se diriger vers vous. Et la joie que vous aviez éprouvée la fois précédente est si forte qu’elle vous submerge. Si bien que vous ne laissez pas à votre intellect le temps d’arriver à une conclusion correcte. Dès que vous voyez cette personne, la joie est stimulée de même que les impressions subconscientes, et vous courez à sa rencontre. Mais lorsque vous vous en approchez, vous vous apercevez que c’est un ivrogne et pas du tout votre ami ! A ce moment-là vous vous trouvez en danger.

C’est ce qui se passe si vous ne permettez pas aux différents aspects de votre mental de fonctionner simultanément en coopération. A ce moment vous pouvez commettre une erreur dont vous vous repentirez par la suite. Cela se produit la plupart du temps, nous faisons des choses que nous ne voulions pas faire, et nous nous demandons pourquoi nous avons agi ainsi. On dit souvent : « Je ne voulais vraiment pas blesser cette personne, je me demande bien pourquoi j’ai dit cela ! ». Ainsi tous les aspects du mental doivent être maintenus dans un état parfait, ils doivent être en équilibre et cet équilibre ne peut être acquis que par la réflexion et la méditation. Sinon nous devenons les victimes des impressions subconscientes. Car, en effet, toutes les pensées que nous avons proviennent du résultat des stimulations des impressions subconscientes. Une pensée vraiment neuve ne vient que lorsqu’agit en nous l’Intelligence Cosmique, c’est-à-dire qu’à ce moment vous agissez par intuition.

Donc notre devoir est de maintenir notre mental autant que possible dans le silence lorsque nous avons à penser ou à réfléchir à quelque chose de vraiment important. Ce n’est que dans ce cas que nous obtiendrons l’aide du pouvoir d’intuition. Ce qu’on appelle le mental individuel n’est en fait pas individuel du tout. Aucun d’entre nous a un esprit séparé, toutes nos facultés pensantes sont reliées les unes aux autres. Mais comme chacun ressent des sentiments, des émotions, des désirs différents, etc…, les vibrations de chacun n’étant pas semblables, elles créent des tourbillons différents. Si bien qu’on a l’impression que ces tourbillons n’ont rien de commun, de la même façon que lorsque vous voyez des tourbillons dans l’eau, vous avez l’impression que chacun est différent, mais en même temps il vous est impossible d’en prendre un en le séparant des autres. C’est l’eau elle-même qui est devenue tourbillon et il y a continuité de l’eau. Cependant, bien qu’il y ait continuité de l’eau, il nous est possible de compter les tourbillons comme s’ils étaient séparés.

C’est l’Intelligence Cosmique qui prend l’apparence de créer le mental humain séparé. Si vous parvenez à faire cesser les oscillations du mental, vous pourrez entrer en contact avec l’Intelligence Cosmique, c’est-à-dire que vos pensées seront dues à l’Intuition Cosmique et non à l’intellect humain. L’intellect humain est basé sur toutes les impressions de toutes les pensées qui ont été les nôtres, celles que nous avons eues non seulement dans cette vie-ci, mais aussi dans de nombreuses vies précédentes. Et comment les pensées naissent-elles dans l’intellect humain ? Toutes ces pensées sont soumises à la croyance que nos intellects sont séparés, elles sont donc égoïstes. Il y a toujours ce sentiment de séparation et tout ce que nous avons pensé est basé sur cette impression de séparation. Et dès que nous pensons être séparés des autres, automatiquement il y a égoïsme, égotisme. Et lorsque les pensées sont basées sur l’égoïsme, nous essayons d’obtenir tout ce que nous pouvons pour nous-mêmes, sans aucune considération pour les autres.

Voici donc le type d’impressions que nous avons accumulées, si bien que lorsque nous voulons décider quelque chose, nos sentiments égoïstes, inconscients sont agités et les résultats que nous obtiendrons seront évidemment influencés par ces impressions et seront entachés d’égoïsme. C’est pourquoi, lorsque nous faisons usage de cet intellect individuel, nous n’arrivons pas la plupart du temps à la conclusion correcte. Lorsque nous avons parlé du Karma Yoga, nous avons dit que toutes les actions avaient pour but le bien de tous. Telle est la Volonté Cosmique. Or toutes ces impressions subconscientes vont à l’encontre de cette Volonté Cosmique. Vous n’êtes plus en harmonie avec le Pouvoir Cosmique et c’est cela qui crée des complications et des problèmes dans vos vies. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire de méditer et d’essayer continuellement de maintenir le mental dans un état de calme aussi profond que possible.

Nous arrivons maintenant à un autre aspect de notre être : nous possédons trois corps : le corps physique, le corps astral, et le corps causal. Et chacun de ces trois corps doit être en harmonie avec les autres. Le corps physique est constitué de la nourriture que nous absorbons, il est composé de ce que nous appelons « Annamaya Kosha » ou la gaine de la nourriture.

Mais avant de continuer ce chapitre, avez-vous des questions à poser au sujet du mental ? Est-ce que, ce que je vous ai dit au sujet du mental, est clair pour vous ?

Question : Je n’ai compris que certaines choses, pas toutes. Comment se fait-il que Chitta soit constitué par l’aspect le plus subtil de la conscience, alors que lorsque nous dormons l’inconscient et le subconscient se manifestent par des choses sombres et denses ? Les deux aspects peuvent-ils être présents, l’aspect subtil et l’aspect dense ?

Mataji : Je ne voulais pas entrer dans trop de détails. La véritable signification de Chitta est « tissu mental ». La matrice, tout le tissu mental, c’est cela qu’on appelle Chitta. Et dans cette matrice il y a différents degrés de densité et on sait très bien que la partie la plus consciente du mental, la partie la plus claire, a les vibrations les plus denses. L’intellect a des vibrations moins grossières et l’ego est à peu près au même niveau de densité tout en étant tout de même un peu plus subtil. Et finalement les vibrations de l’inconscient et du subconscient sont très subtiles. C’est assez compliqué du fait que Chitta c’est tout le tissu mental, et c’est dans Chitta qu’il y a une partie plus subtile qui forme le conscient et le subconscient. Nous ne parlons qu’au point de vue des vibrations, de vibrations plus subtiles et moins subtiles.

Toute la faculté pensante est issue de la Conscience Absolue qui se trouve partout, il n’y a absolument rien en dehors de cette Conscience. Le mental en est une manifestation. On peut dire que ce qu’on appelle le mental ou Manas est cet aspect de la Conscience Absolue à travers lequel passent des ondes, des vibrations de pensées. D’après l’exemple que je vous ai donné, Manas est la partie qui ramène les informations de l’extérieur. Comme il est difficile de traduire exactement Manas, nous l’appelons le mental, mind en anglais. Mais ce n’est pas vraiment ce que les Anglais appellent « mind » et nous « esprit », qui inclut tout, tandis que Manas c’est simplement cet aspect qui ramène les informations de l’extérieur. Par la faculté de discrimination, un tri se fait dans ces informations, et cette faculté de discrimination fait partie de l’intellect. Les informations apportées par l’intellect sont triées, classées, et supposées bonnes ou mauvaises. Mais l’intellect ne fonctionne pas tout seul ; l’ego immédiatement fonctionne en même temps que lui, et tout de suite la discrimination se fait par rapport à soi : c’est bon pour moi, c’est mauvais pour moi. C’est l’ego qui nous fait croire que nous sommes absolument différents des autres. Donc toutes les pensées accumulées par nous sont basées sur le sentiment de notre totale différence d’avec les autres.

Or chaque fois que vous exprimez une opinion, que vous pensez que ceci est bon ou mauvais pour vous, il y a une nouvelle impression qui se fait immédiatement, automatiquement, dans le subconscient. C’est exactement comme un magnétophone qui serait branché tout le temps. Tout ce que vous dites, tout ce que vous pensez, est tout de suite enregistré. Ainsi les pensées que vous avez forment immédiatement une impression et les futures actions et les futures pensées que vous aurez seront en fait dues à la stimulation de ces impressions que vous avez accumulées. Si vous avez une pensée soudaine, ne croyez pas que ce soit une pensée indépendante, neuve, elle est de toute façon due à la stimulation d’une impression subconsciente. C’est pourquoi nous insistons beaucoup dans la méditation sur le fait qu’il faut épuiser les impressions subconscientes, car elles forment un obstacle pour entrer en état de méditation.

Lorsqu’il y a de plus en plus d’impressions subconscientes, il arrive un moment où celles-ci sont refoulées profondément au niveau de l’inconscient. Vous pouvez raviver le souvenir de bien des impressions qui sont dans le subconscient, ce n’est pas très difficile, mais il est beaucoup plus difficile de raviver des souvenirs situés dans l’inconscient, on ne peut y arriver que dans une méditation extrêmement profonde. Ceci est très important, parce que ces impressions sont responsables de votre réincarnation suivante. Car, en effet, ce que nous nommons « karma » n’est que l’activation de ces impressions subconscientes.

Si par exemple vous avez un désir qui n’a pas été réalisé, l’impression est là et elle s’active, c’est-à-dire qu’elle veut être satisfaite. Si bien que ce type-là de vibrations attirera les cinq éléments et vous êtes aimantés vers des parents donnés, grâce auxquels ce désir, pourra être satisfait dans la vie suivante. C’est ce processus qui est appelé « karma ». « Karma », en fait, veut dire « action », or chaque action porte en soi une réaction. En physique, c’est pareil. On vous apprend que toute action comporte une réaction égale et opposée. Ceci est également vrai pour le mental. Donc, lorsque l’impression est là, elle provoque nécessairement une réaction, chaque action contenant en elle-même une réaction.

Je vous donne un exemple approximatif : vous lancez avec une force définie une balle de tennis contre un mur. Vous, vous n’avez fait que l’action de lancer la balle, mais la balle va revenir, va rebondir vers vous avec la même force avec laquelle vous l’avez lancée, voilà la réaction. Vous n’avez rien fait pour qu’elle revienne vers vous, le simple fait de la résistance rencontrée a fait revenir la balle. Cela explique à peu prés comment chaque action contient en elle-même une réaction. Vous ne pouvez pas lancer la balle en lui demandant de rester contre le mur, ce n’est que lorsqu’elle reviendra et qu’elle tombera par terre qu’elle restera immobile. Il en est de même en ce qui concerne l’action et la réaction.

Question : Si un désir prend forme en moi, comment puis-je l’assouvir ou le refouler, afin qu’il ne devienne pas une impression subconsciente ? Vaut-il mieux satisfaire le désir afin qu’il ne s’imprègne pas dans le subconscient ?

Mataji : Je n’ai cité le désir que comme un exemple, mais tout sentiment et toute émotion agissent de même. C’est pour cette raison que nous avons le pouvoir de discrimination. C’est-à-dire que, lorsqu’un désir naît en nous, nous devons savoir s’il est bon ou mauvais. Or qu’est-ce qui est bon et qu’est-ce qui est mauvais ? Tout ce qui nous empêche de prendre conscience de l’Absolu, c’est-à-dire tout ce qui fait obstacle à notre prise de conscience de la Conscience Cosmique, est mauvais d’un point de vue spirituel. Est considéré comme bon, tout ce qui nous aidera à prendre conscience de ce Pouvoir Absolu. Si on veut analyser davantage, toute pensée égoïste fait obstacle à la prise de conscience de l’Absolu. Essayez donc d’avoir des désirs aussi peu égoïstes que possible. C’est là que doit entrer en jeu votre pouvoir de discrimination. Lorsque vous êtes sur le point d’agir, vous ne pouvez pas vous poser la question : est-ce que cela va m’empêcher de prendre conscience de l’Absolu ou au contraire favoriser cette prise de conscience ; c’est trop en dehors de vos possibilités, mais en analysant vos pensées vous pouvez découvrir si votre action est égoïste ou non. Mais cela n’est pas possible si vous éprouvez de trop grandes émotions ; en plus le mental a le pouvoir de vous faire faire quelque chose qui n’est pas bien, tout en vous faisant croire que c’est bien. C’est-à-dire que l’intellect individuel justifie l’action, car votre désir est si grand qu’une partie de votre mental vient à la rescousse. Il est parfois très difficile de faire la discrimination, mais il y a une façon très simple de s’en sortir, c’est de se dire chaque fois : « Fais aux autres ce que tu voudrais qu’ils te fassent et évite de faire aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’ils te fassent ».

Question : Le critère n’est pas le même pour un homme que pour une femme. On peut agir envers une femme d’une façon qui ne serait pas indiquée pour un homme.

Mataji : A ce niveau-là il n’y a pas de différence entre un homme et une femme. C’est ce qui ne blessera pas qu’il faut chercher à faire, ne faire de mal à personne, homme ou femme. Nous ne sommes pas là sur un plan sentimental. Sur un plan sentimental, ce sera différent. De toute façon il y a une autre voie, celle d’accomplir une action qui procurera le maximum de bénéfice au maximum de personnes. De même, ne commettez pas une action que vous ne feriez pas en présence d’autres. C’est un peu compliqué, car il y a certaines actions que vous n’aimeriez pas faire en public, certaines choses demandent la solitude, vous avez besoin d’être seul. Mais, par contre, ce qu’il ne faut pas c’est faire quelque chose seul, sans témoins, parce qu’on a le sentiment que si on était vu, on serait blâmé ou accusé. Il faut donc s’élever à un degré supérieur, selon vos possibilités, en partant du niveau sur lequel vous vous trouvez.

Question : Le Samadhi crée-t-il un karma ?

Mataji : Le Samadhi ne crée pas de karma.

Question : Mais le Samadhi doit provoquer des impressions très fortes ?

Mataji : Nous ne les appelons pas karma. Ainsi par exemple vous avez atteint le SAVIKALPA Samadhi, le Samadhi dans lequel les impressions subconscientes n’ont pas encore été complètement effacées, certaines impressions sont toujours là. Avec le Samadhi vous créez une impression, la joie que vous expérimentez peut créer une impression. Cela vous donnera ce que nous nommons l’aspiration à continuer dans la vie suivante. Là il n’y a rien à effacer. Le karma, au contraire, est quelque chose qui doit s’effacer par sa réaction. Le karma c’est la réaction. Karma, cela veut dire qu’il y a obstacle à votre évolution spirituelle à cause des impressions formées par le subconscient. Par la réaction, vous essayez de les effacer, qu’elles soient bonnes ou mauvaises. Il y a un bon karma et un mauvais karma, de toute façon c’est un obstacle. Toute oscillation mentale est une obstruction, qu’elle soit bonne ou mauvaise. Tandis que dans le Samadhi ce n’est pas une obstruction, mais une aide pour aller de plus en plus loin. C’est pourquoi à ce moment-là on l’appelle aspiration.

Au sujet du Samadhi : Lorsque les oscillations du mental cessent au niveau du conscient et que la plupart des impressions subconscientes sont effacées, certaines impressions demeurent néanmoins. La qualité du SAVIKALPA Samadhi dans lequel vous entrez dépendra des impressions subconscientes qui demeurent encore en vous. Il y a plusieurs degrés à l’intérieur du SAVIKALPA Samadhi qui dépendent de la qualité des impressions subconscientes qui persistent encore. Pourtant dans ce Samadhi le mental est transcendé et vous devenez conscient de l’état supraconscient. Mais à cause de la force de ces impressions supraconscientes, vous revenez à la conscience terrestre et, dans le degré inférieur du SAVIKALPA Samadhi, lorsque vous revenez à la conscience ordinaire, vous ne conservez pas la supraconscience, mais vous vous en souvenez. Et plus vous progressez, plus vous êtes capables de connaître en même temps un état de conscience terrestre et d’autres états de conscience plus élevés. Mais lorsque vous entrez dans le NIRVIKALPA Samadhi, toutes les impressions subconscientes sont effacées à tous les niveaux du mental subconscient et inconscient. A ce moment-là vous n’êtes plus dans la dualité, il n’y a plus qu’identité de votre conscience personnelle avec la Conscience Absolue, et cela continue à tout moment. C’est pourquoi je suis personnellement opposée à l’école de pensée selon laquelle on peut encore garder son corps physique après le NIRVIKALPA Samadhi. Car selon moi, si toutes les impressions subconscientes ont été effacées, qui est-ce qui peut encore garder sa vie, dans la vie terrestre, même pour guider le monde ? A moins que l’on ne pense que cet être vivant est devenu une incarnation divine, car dans ce cas le corps physique est toujours là, mais il y a conscience permanente de l’Absolu. Et alors on ne se trouve plus sous l’emprise de Maya, au contraire, on a maîtrisé Maya. Une autre école de pensée dit que lorsque vous avez atteint le NIRVIKALPA Samadhi, il n’y a plus rien qui puisse maintenir votre corps en vie, vous n’avez plus ni faim ni soif, ni besoin de dormir, il n’y a plus conscience du monde terrestre, bien que le corps continue à exister, à vivre, jusqu’à ce que le Prarabda Karma soit venu à terme. Comme on l’a dit, le Prarabda Karma est la seule chose que l’on ne puisse pas effacer. Dès l’instant où le Prarabda Karma est terminé, le corps physique meurt.

Question : Quel est le processus par lequel les impressions conscientes sont effacées ?

Mataji : Lorsque vous méditez, toutes les énergies mentales dispersées sont ramenées à un seul point, et ce faisceau d’énergie est extrêmement puissant, bien plus puissant que l’énergie atomique, il n’y a aucune comparaison, et c’est cette énergie qui affine de plus en plus le taux vibratoire mental jusqu’au moment où toutes les impressions disparaissent. Et l’on arrive ainsi à l’état originel de Conscience Absolue. Ce ne sont que les vibrations qui créent la différence entre la Conscience Absolue et la conscience individuelle.

Question : N’a-t-on pas de perceptions des impressions subconscientes ?

Mataji : En sanskrit, on dit que les impressions subconscientes sont « cuites » par ce rayon, ce faisceau d’énergies mentales dans l’état de méditation et on ne se rend pas compte que c’est dissous. Plus on se rapproche d’un état supraconscient, et plus l’état supraconscient est sain, plus on comprend qu’elles disparaissent. De même on rêve de moins en moins. Les rêves sont causés par les impressions subconscientes. D’abord ce sont les rêves superficiels qui disparaissent et après vous n’avez plus que des rêves très profonds et finalement les rêves que vous avez proviennent d’un niveau plus élevé. Là on est à la limite de l’intelligence personnelle et de l’Intelligence Cosmique.

Question : Les impressions qui disparaissent vont-elles quelque part ?

Mataji : Non, non, elles sont réduites d’abord par les vibrations les plus grossières, les plus denses, puis par des vibrations plus subtiles, ensuite de plus en plus subtiles, jusqu’au moment où elles sont transformées dans l’Absolu. Il n’y a rien de détruit dans cet univers, la matière est indestructible. Si une chose disparaît, c’est qu’elle change de nom et de forme, tout se transforme, rien ne se perd. Cela redevient l’Absolu.

Question : N’y a-t-il pas de risque d’erreurs dans tout cela ? Je voudrais savoir aussi quelles sont les relations entre les gens qui sont sensibles à tout cela ? Quelles sont les interférences des vibrations ? Que pense Mataji des personnes qui se servent de leurs vibrations pour guérir ou pour faire du mal ?

Mataji : Si on regarde la vie d’un rebouteux jusqu’à la fin, il est probable qu’il souffrira à un moment ou à un autre de sa vocation, parce qu’il prend sur lui les mauvaises vibrations. Action et réaction ont à être maintenues puisque l’équilibre cosmique en dépend. Donc, si quelqu’un retire des vibrations négatives d’un autre, il prend d’une certaine façon ces vibrations négatives en lui. C’est aussi la raison pour laquelle de très grands saints ont souffert très sévèrement sur la terre.

Question : Peut-on réduire soi-même les mauvaises vibrations ?

Mataji : Uniquement par la méditation, c’est la seule façon.

Question : Avant d’entrer en SAVIKALPA Samadhi, en a-t-on des signes précurseurs ?

Mataji : Vous perdez complètement conscience de votre corps, tout le corps devient rigide, vous êtes dans un état merveilleux et pendant un certain moment vous pouvez n’avoir aucune expérience, sinon celle de la connaissance. La connaissance n’est pas une expérience, la joie est une expérience, la félicité est une expérience, car à ce moment-là il y a celui qui expérimente et l’objet de l’expérience. Au début vous pouvez perdre pour un court moment le sentiment de la dualité. Néanmoins ce n’est pas le NIRVIKALPA Samadhi parce qu’il y a toujours une impression subconsciente qui demeure, qui est transcendée momentanément.

Pour mieux vous le faire comprendre, je vais vous parler de moi : la première fois que j’en ai fait l’expérience, j’étais avec Ma Anandamayee, je ne savais pas ce que c’était, j’étais assise et tout à coup il me fut impossible de bouger mon corps, je ne pouvais même pas ouvrir les yeux.

Au début j’avais les yeux ouverts et je regardais. Et tandis que mon corps devenait rigide, je vis son corps physique se transformer en une forme lumineuse, c’était très précis, très fort, puis la lumière devint de moins en moins forte et soudain disparut, et je n’eus plus que la connaissance. Je ne sais pas combien de temps je suis restée assise ainsi. Petit à petit j’ai entendu parler dans la pièce, je voulais ouvrir les yeux, mais je ne le pouvais pas, je ne pouvais pas bouger mon corps, puis très doucement mon corps a pu bouger à nouveau et finalement j’ai ouvert les yeux. Et elle, elle savait bien sûr ce qui se passait et soudain elle m’a demandé : « Est-ce que vous voulez me parler en privé ? ». J’ai dit oui, et je lui ai parlé en privé, je lui ai expliqué ce qui s’était passé pour moi et je lui demandai : « Pourquoi vous ai-je vue d’abord physiquement, puis comme une lumière très forte, puis cette lumière s’est estompée peu à peu et finalement a disparu tout à fait ? ». Elle m’a répondu : « Lorsque vous étiez dans votre conscience physique, vous avez vu mon corps physique ; lorsque vous êtes arrivée à la conscience astrale, vous avez vu mon corps astral lumineux, et lorsque vous êtes arrivée à la conscience causale, cette lumière a disparu et finalement vous n’aviez plus de perception, vous ne vous trouviez plus dans la dualité ». Voilà ce que j’ai pu vous dire de mon expérience !

Lorsque vous êtes dans cet état, il y a juste conscience, connaissance, et vous n’êtes plus là pour faire l’expérience. Et dans le NIRVIKALPA Samadhi cet état est constant, on n’en revient jamais. Ainsi que je vous l’ai dit tout à l’heure, il y a différents degrés dans le SAVIKALPA Samadhi qui sont de plus en plus subtils, jusqu’à ce qu’on arrive au plus subtil du SAVIKALPA Samadhi et enfin au NIRVIKALPA Samadhi.

Question : Si vous souffrez physiquement, cela n’empêche-t-il pas la méditation du fait que vous êtes tout le temps en proie à cette souffrance ?

Mataji : Si la douleur est très forte, vous ne pouvez pas entrer en état de méditation ; si la souffrance n’est pas très forte, vous pouvez entrer en état de méditation et à ce moment-là il n’y a plus de souffrance, même après la méditation vous vous apercevez que la douleur est moins forte.

Question : Quel est l’avantage d’entrer en SAVIKALPA Samadhi, sinon en tant que référence pour savoir si notre manière de vivre est bonne et si nous évoluons ?

Mataji : De toute façon, on ne provoque pas le Samadhi, c’est un état qui se produit lorsque le mental est purifié. D’un point de vue utilitaire, on acquiert plus d’équilibre, on peut tolérer les défauts des autres, vous avez de la sympathie pour eux, vous percevez votre unité avec les autres et vous les aimez malgré leurs défauts. Donc, de plus en plus vous prenez conscience de votre unité, l’égoïsme décroît et parce que l’égoïsme décroît votre vie devient de plus en plus simple, de plus en plus sans heurts. Car, en effet, tout problème en ce monde est dû à l’égoïsme. Si vous arrivez à surmonter votre égoïsme, vous devenez plus heureux, plus paisibles, vous n’êtes plus le jouet des impulsions sexuelles. Cela ne veut pas dire pour autant que vous deveniez impuissant, mais vous connaissez d’autres joies.

Nous parlions au début du corps physique, de la gaine de nourriture : Annamaya Kosha, puis vient le corps astral ou subtil que l’on appelle Sukshma Sharira qui, lui, consiste en différentes enveloppes. J’entrerai dans les détails la prochaine fois, mais je voudrais vous faire comprendre d’abord certaines choses : correspondant à nos organes physiques, il y a les organes des sens subtils. Pour mieux comprendre cela, pensez à un rêve. Vos oreilles ne sont pas bouchées et certaines personnes dorment aussi avec les yeux ouverts. Mais, pendant le rêve, l’œil physique et l’oreille physique ne fonctionnent pas. Pendant que le dormeur est en train de rêver, si quelqu’un arrive avec un instrument pointu et s’approche de son œil ou de son oreille, le dormeur ne bronche pas et ne cille même pas. Pourquoi ? Parce que ses organes physiques ne fonctionnent pas. En même temps le dormeur, dans son rêve, peut entendre de la musique très belle et très douce, et il peut voir un jardin merveilleux plein de fleurs admirables. Pourquoi ? Parce que ce sont ses organes internes qui fonctionnent. On appelle les sens subtils des organes subtils Indriyas pour les différencier des organes physiques grossiers.

Puis vient un état dans lequel vous ne rêvez, ni n’expérimentez des choses physiquement, c’est l’état de sommeil profond, car en effet pour que les Indriyas fonctionnent il faut que le mental leur soit attaché. Donc, dans l’état de veille et dans l’état de rêve, il faut que le mental soit présent en plus des organes des sens physiques et des organes de sens subtils. Pourquoi dans l’état de sommeil profond n’est-on pas capable de voir, d’entendre ou de sentir quelque chose ? Parce que aucun de ces trois facteurs, ni le mental, ni les organes des sens physiques, ni les Indriyas, ou organes des sens subtils, n’existent par eux-mêmes. Par eux-mêmes ils sont inertes, ils ne sont activés que par la Conscience Absolue, ils doivent tous leurs pouvoirs à l’Absolu par le truchement du Prana. Or ce pouvoir, qui vient de l’Absolu, dans le sommeil profond, se retire au centre de l’être. C’est la raison pour laquelle, lorsqu’on s’endort, la tête tombe vers la poitrine. Tous ces éléments deviennent inertes, sans vie, dans le sommeil profond. Cette information est très nécessaire pour vous faire comprendre ce dont nous parlerons la prochaine fois. Je vous parlerai la prochaine fois du corps subtil et du corps causal et de leurs différentes gaines ou enveloppes.

Question : Peut-on guérir quelqu’un en agissant directement sur le corps causal ?

Mataji : Oui, c’est possible.

Question : Est-il possible de savoir clairement comment agir soit sur le corps astral, soit sur le corps physique ?

Mataji : Oui, je vous en reparlerai quand il y aura la description des trois corps. Et actuellement je crois que sur le plan astral il y a des êtres qui peuvent nous aider. Ils essayent de nous aider en général quand nous sommes en état de sommeil profond. A ce moment-là il n’y a pas d’interférences, c’est plus facile.

Question : Si vous avez développé votre vigilance, vous savez exactement si vous ne devez pas dire ou faire telle chose ou si au contraire vous le pouvez, on est comme guidé.

Mataji : Oui.

Question : Comment peut-on déterminer si on est guidé par des entités supérieures ou si c’est par votre propre intuition ?

Mataji : En général, si on est guidé par des êtres supérieurs, on en a des indications : on peut entendre une voix intérieure ou bien avoir des visions. Ces êtres-là se trouvent au niveau du manifesté, donc ils peuvent se faire connaître d’une façon ou d’une autre, pas toujours, mais parfois. Pour ma part, j’ai été guidée par mon Maître ; non pas par une voix intérieure, parce qu’on n’entend pas, en tout cas pas par mon oreille physique, on peut l’entendre avec son Indriya, l’ouïe subtile, car on entend aussi clairement que par son oreille physique. Une personne assise à côté de vous n’entendra rien du tout. Donc, si vous recevez de semblables indications, vous savez que vous êtes guidés. La différence avec l’intuition provenant de la Conscience Cosmique, et un guide personnel, c’est que dans ce dernier cas, c’est localisé, il y a un individu à la base, tandis que dans l’autre cas, c’est cosmique.

Question : Pourquoi certaines personnes sont-elles conscientes d’être guidées et d’autres ne le sont pas ?

Mataji : Cela dépend de la purification de leur mental. Un mental purifié est un mental très calme ; moins il y a d’oscillations mentales, plus le mental est purifié. Vous êtes parfaitement maître de votre mental, cela ne veut pas dire que vous ne vous en servez plus, que vous ne riez plus avec les autres, mais vous avez la possibilité de le faire taire quand vous le voulez. Les gens qui veulent faire croire qu’ils ont atteint un niveau très élevé en ne riant plus, en ayant un air compassé, jouent en général la comédie.

Question : Peut-on développer l’intuition ?

Mataji : Par la méditation, et pour pouvoir méditer vous devez purifier le mental, tout cela se tient.

Je vais vous dire une chose importante, c’est que le fait de se droguer, de fumer, de prendre de l’alcool, tout cela ne vous permettra pas de purifier votre mental. Vous ne pouvez stimuler votre mental d’un côté et puis de l’autre espérer qu’il va se calmer. Grâce à une juste compréhension, vous devez abandonner tout cela.

Question : Si vous prenez un bébé et que vous le mettez dans un entourage très pur et que vous le préserviez de tout ce qui est nuisible et laid, que deviendra-t-il ?

Mataji : C’est ce qui a été fait avec le Bouddha !

Question : Et si vous ne lui enseignez pas la méditation ?

Mataji : Tout dépend naturellement des impressions avec lesquelles il est arrivé et du Prarabda Karma qu’il a apporté avec lui, tout cela joue un rôle. Mais lorsque le Prarabda Karma est très puissant, l’enfant sera mis en présence de toutes ces choses, c’est ce qui est arrivé au Bouddha. On raconte une histoire à ce sujet : une personne a été mordue par un serpent. On a, pour la protéger, construit une maison au milieu de la rivière afin que rien ne puisse y pénétrer, personne n’avait le droit d’y aller. Mais, un jour, l’homme qui vivait dans cet abri voulait un citron. On lui en donne un et quand le citron fut ouvert un insecte se trouvait à l’intérieur, et l’insecte se développa de plus en plus jusqu’à devenir un serpent qui mordit l’homme qui en mourut. On ne peut donc pas se protéger du Prarabda Karma, c’est impossible !