Catherine Anne
Le symbolisme du tarot 6 : Le pape

C’est la dernière lame d’une série. Il représente un initié qui a fait son choix une fois son évolution parcourue et terminée, de redescendre, de revenir sur terre pour aider. Le Pape c’est quelqu’un qui ne tranche pas. C’est quelqu’un avant tout de spirituel, c’est la lame de la prière et de la bénédiction. Nous parlerons à la fin de respiration car sur le plan cabalistique (la cabale juive) c’est la lame de la respiration. Chaque lame représente un moyen d’arriver à la spiritualité, à l’intemporel, les Indiens diraient au Nirvana, les Chrétiens au Paradis. C’est l’Initié qui connaît tous les secrets du monde, il les a découverts par lui-même — il n’y a pas de secrets que l’on ne découvre par soi-même, quelles que soient les Traditions —. C’est la fin des cinq premiers arcanes, fin de la marche ascendante de l’homme vers le Divin.

(Revue Panharmonie. No 202. Avril 1985)

Je vous rappelle ce que je vous ai déjà dit sur le Tarot : le UN c’est le point, le DEUX une ligne, le TROIS c’est la première surface, le QUATRE le premier volume, et le CINQ c’est enfin le nombre de l’Homme. Il y a beaucoup d’explications différentes, je vais vous en donner deux :

— Le TROIS, c’est le chiffre divin ; associé au DEUX qui est l’intelligence divine, c’est-à-dire la femme, les deux ensemble donnent le CINQ, c’est-à-dire l’homme, le Pentagramme; les quatre éléments dominés par l’homme, la matière dominée par l’homme, c’est-à-dire par l’esprit, donnent le pentagramme, l’étoile à cinq pointes. En haut la tête, sur les côtés les deux bras, en bas les deux jambes, le nombril étant au centre exact du pentagramme (ou pentacle). Léonard de Vinci a utilisé le pentacle pour y inscrire l’homme tridimensionnel.

LE PAPE

C’est la dernière lame d’une série. Il représente un initié qui a fait son choix une fois son évolution parcourue et terminée, de redescendre, de revenir sur terre pour aider. Le Pape c’est quelqu’un qui ne tranche pas. C’est quelqu’un avant tout de spirituel, c’est la lame de la prière et de la bénédiction. Nous parlerons à la fin de respiration car sur le plan cabalistique (la cabale juive) c’est la lame de la respiration. Chaque lame représente un moyen d’arriver à la spiritualité, à l’intemporel, les Indiens diraient au Nirvana, les Chrétiens au Paradis. C’est l’Initié qui connaît tous les secrets du monde, il les a découverts par lui-même — il n’y a pas de secrets que l’on ne découvre par soi-même, quelles que soient les Traditions —. C’est la fin des cinq premiers arcanes, fin de la marche ascendante de l’homme vers le Divin.

Le Pape est un vieux monsieur barbu, assis sur un trône, deux colonnes derrière lui ; nous y reviendrons à la fin, nous en avions déjà parlé au sujet de la Papesse, cette fois nous les aborderons sur un plan ésotérique à travers toutes les traditions et plus particulièrement une des traditions juives.

Le Pape est coiffé d’une tiare à trois étages, la couronne pontificale ; à son visage serein, contrairement  celui de l’Empereur, regarde en face. Il n’est pas habillé en blanc, car il ne représente en aucun cas une autorité temporelle sur un monde spirituel, il n’est pas le Pape que nous connaissons ou un Pape historique, il est un Pape. Étant donné l’origine médiévale et ancienne du Tarot, c’est la plus haute instance spirituelle incarnée et, en fait, notre Pape est habillé de blanc et celui-ci de couleurs différentes, ce qui démontre qu’il n’a rien à voir avec celui de Rome.

Le Pape tient dans sa main gauche, près de la colonne de gauche, une croix papale avec trois traverses. Nous allons nous attarder sur cette croix. Les anciens Papes avaient une croix à trois traverses de signification ésotérique. De l’autre main, il fait le geste de la bénédiction, c’est un rituel. Devant lui, sont agenouillés deux petits clercs, l’un dans une attitude de crainte respectueuse, et l’autre dans une attitude de compréhension et d’ouverture. On constate que la main qui bénit, qui émet, correspond à la main du clerc de gauche qui reçoit. Il n’y a bénédiction que si quelqu’un est en face pour la recevoir.

Le Pape est donc un maître supérieur, mais uniquement exotérique. L’équivalent, c’est-à-dire le Pape ésotérique, c’est la lame Neuf, l’Hermite. Le maître cache la lumière pour que ceux qui ne sont pas appelés à la recevoir, ne soient pas éblouis par elle. Le Pape est à la portée de tout le monde, pas seulement de ceux qui sont « justes », mais aussi de ceux qui n’ont rien compris, et ne sont pas dans un chemin spirituel. Il n’a pas le droit de bouger ; assis, il envoie sa bénédiction sur le monde. Certains en font un maître. L’Occident est actuellement à la recherche de Gurus, on désire suivre un maître, ce choix peut mener à l’illusion. Le Pape est un maître, mais il ne se fait pas reconnaître, il n’a pas les signes de la Connaissance ou de la reconnaissance. C’est le maître de toutes les religions exotériques, non seulement du monde occidental. Il signifie aussi bien le Dalaï-lama ou le Grand Rabbin, c’est un « Connaissant », il sait tout, mais il n’enseigne pas, car les gens ne sont pas prêts à l’entendre.

Je rappellerai une anecdote de Mataji que plusieurs d’entre vous connaissent, peut-être. Elle a été reçue en audience privée par le Pape Paul VI. Elle lui a demandé : « Pourquoi n’enseignez-vous pas tout ce que moi j’enseigne en Inde et que vous savez ? », et Paul VI lui a répondu : « Oui, c’est certain, mais les gens ne sont pas prêts, il faut qu’ils trouvent par eux-mêmes ».

Il y avait deux démarches, face à face, la démarche occidentale et la démarche orientale. Le Pape en général est celui qui connaît.

LES SYMBOLES

Il est habillé avec des vêtements de toutes les couleurs. Les manches sont bleues : élan vers la Sagesse ; le manteau rouge (élan vital) est doublé de vert (l’occulte, il connaît l’occulte et les quatre éléments) ; son manteau est bordé de jaune, parce qu’il sait que toute sa connaissance passe par des vies successives, et il est agrafé à la hauteur de la gorge par le signe solaire posé sur le point vital, le chakra de la gorge. Je rappelle que les anciens faisaient de la gorge le siège des émotions et du cœur. Il est ganté de blanc ; les gants blancs se retrouvent dans toutes les traditions sans exception. Autrefois, quand les gants n’existaient pas (ils sont apparus à la fin du Moyen Age), le prêtre qui prenait un objet sacré dans ses mains utilisait les pans d’un voile ou d’un vêtement spécial, il en est resté le Pallium que les prêtres portent autour du cou pendant la bénédiction. Ce vêtement spécial était blanc, c’est-à-dire pur. Les gants blancs sont un symbole de pureté. En plus la main émet des vibrations, notamment le bout des doigts. Quand le Pape bénit, ici, ses vibrations sont suffisamment fortes pour qu’il garde son gant, encore que dans le Tarot de Marseille, il n’ait qu’un gant à la main qui tient la croix, l’autre main bénissant étant nue pour que l’influx vital se répartisse mieux ; mais le Pape est toujours ganté de blanc avec des croix bleues sur les mains, exactement à l’endroit des stigmates du Christ ; ce sont encore des chakras, ce sont les points de puissance d’où émane le magnétisme. Quand vous voyez dans des images les mains ouvertes, soit ils reçoivent les stigmates (Saint François d’Assise par Giotto), soit les mains sont jointes en prière. Là le Pape porte une croix bleue. C’est un des symboles les plus puissants, les plus anciens de l’Horizontal et du Vertical, dont nous reparlerons à la fin de l’exposé. C’est l’endroit où le dynamisme vital sort (ou rentre) et qui rappelle les stigmates.

Dans toutes les traditions donc, on retrouve le gant blanc, pour empêcher que les objets sacrés soient profanés. Parfois aussi on fait une chaîne, on se donne la main, c’est ce que l’on appelle un chaîne d’union, cela se fait dans le monde entier. Mais alors on retire les gants pour que le fluide vital pénètre entre les assistants.

Le Pape a une tiare, la tiare pontificale surmontée d’une croix, parce qu’il est spirituel, et c’est une tiare à triple couronne, représentant une quantité de significations. D’abord un rappel des trois mondes, des trois corps, des trois états de la matière et surtout des trois états de la nature humaine, c’est-à-dire l’évolution, c’est tout à fait Pythagoricien. Les deux premiers étages sont des étages de fleurons de couronnes : couronnes marquisale et ducale l’une sur l’autre, et tout en haut, un ensemble de triangles et de demi-cercles qui ne représentent absolument pas une couronne héraldique. Ces trois étages signifient à la fois : foi, espérance et charité, les trois règles des ordres cloîtrés : obéissance, pauvreté, chasteté. Partout on retrouve un chiffre trois, les trois étages de la tiare le rappellent.

Les trois couronnes de cette tiare donnent le pouvoir sur les trois mondes, c’est-à-dire que le Pape peut agir sur les deux premiers mondes, mais en ce qui concerne le troisième monde, il n’y a que Dieu seul. Le premier monde est celui de la matière : la nature aussi bien végétale que minérale, et si on prend la loi d’évolution pythagoricienne, ou de Teilhard de Chardin, vous avez l’évolution du minéral en végétal, du végétal en animal, et de l’animal à l’homme. C’est ce que l’on appelle la matière. Le deuxième monde est le monde humain, les hommes entre eux, et le troisième monde est le monde strictement divin où l’homme n’a accès qu’à partir d’une évolution très serrée, vigilante et en général sévèrement suivie.

La troisième couronne est la plus importante : le triangle représente Dieu. Sa pointe en haut pointe vers le monde spirituel et ses trois faces (en particulier le triangle équilatéral, le plus stable) symbolisent les trois mondes à parcourir pour parvenir à la Divinité. Elles signifient aussi la Trinité : cela se trouve dans toutes les religions, pas seulement dans la religion chrétienne, et particulièrement dans la religion indienne, on retrouve les trois états de la Divinité. Chez les Chrétiens, vous en connaissez le vocabulaire : le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

Le demi-cercle : le cercle représente l’univers, c’est-à-dire le serpent qui se mord la queue, c’est ce qui est sans fin. Le cercle c’est la limitation totale à partir d’un centre et dans toutes les directions. On ne sort pas d’un cercle puisqu’il n’y a ni ligne brisée, ni angle. C’est sans fin. Le demi-cercle, c’est l’image du soleil qui se lève à l’horizon et qui vient éveiller et animer la matière. C’est pour cette raison que cette troisième couronne est faite de triangles images de DIEU, et en même temps de demi-cercles, c’est-à-dire d’éveil de la matière par lequel nous parviendrons au Divin. Là j’ai utilisé un vocabulaire occidental, mais je vais vous lire quelques séquences de la Bhagavad-Gita où on retrouve exactement cette explication ; c’est typiquement oriental avec un vocabulaire oriental. Il s’agit des trois Gunas. Les gunas ce sont les trois états de la matière : c’est-à-dire Tamas, le premier monde, le plus grossier, Rajas, le monde intermédiaire, plus subtil, l’homme, et enfin Sattva, le Divin.

Krishna dans son char a pris la place du cocher d’Arjuna qui va se battre contre sa famille: cousins, frères, parents et autres. Il est complètement affolé et il dit à Krishna que cette bataille est impossible, c’est la non-violence qui détermine le monde, c’est par elle qu’on arrive au Nirvana. Il est donc impossible d’aller se battre, et Krishna lui répond : « Il est nécessaire de te défendre contre qui que ce soit, tu n’as pas à reculer, il faut te battre ». La Bhagavad-Gita est le récit de leur dialogue avant la bataille. Krishna parle : « Tes chaînes sont d’innombrables illusions, ainsi Arjuna, à chaque forme ses chaînes. Sattva est la chaîne de tout être heureux, car percevoir n’est jamais suffisant et le vrai bonheur est au-delà de toute forme. Rajas est la chaîne de tout être d’action, car agir implique aussi de finir et de recommencer à zéro, l’action menant l’être et non l’être l’action. Tamas est la chaîne de tout être pour qui rêver est plus facile que vivre et qui, noyé dans ses propres illusions, ne peut plus déceler la vérité ».

C’est exactement la signification de la tiare aux trois couronnes qui se retrouve dans toutes les traditions. Surmontée d’une croix, c’est la prééminence du spirituel sur le temporel, la tiare est en or, donc imputrescible et solaire. Le Pape tient à la main un sceptre à trois traverses surmontant un globe vert signifiant le monde. Donc l’action représentée par le sceptre à triple croix se situe sur le monde. Il comporte sept petites boules. Et c’est sur ce symbole que je vais m’arrêter un moment pour insister sur le fait que le Pape n’est pas uniquement un maître, mais qu’il est tout un symbole d’alchimie.

La boule la plus haute du sceptre à triple croix signifie évidemment le soleil. Les sept boules sont reliées aux sept planètes connues alors des anciens : Soleil, Lune, Mercure, Vénus, Mars, Jupiter, Saturne. Les deux en dessous sont la Lune et Mercure, les deux suivantes représentent Vénus et Mars et les deux en dessous Jupiter et Saturne.

Le Pape touche du bout de son index le monde sur lequel il règne, mais sur lequel il n’agit pas parce qu’il n’en a pas le droit. Il ne tient pas la triple croix comme la tenait l’Empereur, il s’appuie dessus, c’est tout. Tout le côté gauche (qui est à droite pour le spectateur) est l’intellect, et la colonne de droite, c’est le psychisme qui amène au spirituel. Chaque planète correspond à un jour de la semaine, à un métal, à un son. C’est typiquement pythagoricien, mais cela a été repris par tous.

Dimanche :

Jour du Soleil (Sunday)

Métal : or

Chiffre : 108 (nombre des grains du chapelet indien et bouddhique)

Son : le Si

Symbole astrologique : Soleil

Lundi :

Jour de la Lune (Monday)

Métal : argent

Chiffre occulte : 216 (108 X 2)

Musique : Ré

Symbole astrologique : Lune

Couleur : n’a pas de couleur, elle les reflète toutes

Le Soleil et la Lune représentent, à eux deux, le Yin et le Yang, ils sont l’antenne de la terre, l’équilibre.

Mardi :

Jour de Mars

Couleur : orange

Métal : fer (guerre)

Chiffre : 72

Musique : Sol

Symbole astrologique : Mars

Mercredi :

Jour de Mercure

Couleur : vert

Chiffre : 27

Musique : La. (C’est Mercure qui a inventé la lyre, en mythologie grecque, avec une carapace de tortue évidée, et il en a fait don à Apollon.)

Symbole astrologique : Mercure

Jeudi :

Jour de Jupiter

Couleur : violet

Métal : étain

Chiffre : 24

Musique : Do

Symbole astrologique : Jupiter

Vendredi :

Jour de Vénus

Couleur : rouge

Métal : cuivre

Chiffre : 54

Musique : Mi

Symbole astrologique : Vénus

Toute l’antiquité, le vendredi, jour de Vénus, mangeait du poisson, car Vénus était née de la semence d’Ouranos et de l’écume des flots (voir « la naissance de Vénus » de Botticelli). C’est donc en hommage à Vénus qu’on mangeait du poisson. Les Papes ont récupéré cette coutume car ils ne parvenaient pas à la supprimer.

Samedi :

Jour de Saturne

Couleur : jaune (couleur de la mort)

Métal : plomb

Chiffre : 7

Musique : Fa

Symbole astrologique : Saturne.

De l’autre main, le Pape donne la bénédiction. C’est le geste sacré par excellence, que tous les anciens employaient. Elle n’est donnée que si elle est reçue. En effet, il y a un des deux clercs qui ne regarde pas, mais l’autre a la main ouverte pour recevoir, et c’est lui qui va être béni. La bénédiction, c’est la chose sacrée, elle vient des Dieux ; la croix est un symbole de prière, de méditation et la bénédiction, c’est ce qui monte vers le ciel et que le ciel vous restitue. Le geste de la bénédiction, c’est un Mudra : le doigt de Saturne et Jupiter sont en l’air ; on capte les énergies par la paume de la main et on les restitue par le bout des doigts. Normalement un geste de bénédiction bien fait ne s’effectue pas directement avec les deux doigts levés : tous les doigts d’abord levés, ensuite les deux derniers doigts se replient et il reste l’index et le majeur dressés, afin que ce qui est entré par la paume de la main, ne sorte pas par la paume, mais par les deux doigts les plus importants, ceux dits philosophiques : Saturne et Jupiter (la philosophie et la religion). Le doigt de Mars bloque sur la paume le doigt du Soleil et d’Apollon. Les deux doigts religieux qui sont en l’air transmettent sur terre à tous ceux qui sont aptes à recevoir cette transmission de prana, d’énergie vitale ou divine. En Occident, on fait en bénissant le signe de la croix, ailleurs on ne bouge pas. Ce geste est un rituel, on a déjà parlé du rituel avec l’Impératrice : c’est utiliser en même temps le symbole, le geste et le mot. Par ces trois éléments, il donne le maximum d’impact aux énergies qui nous rattachent à l’Absolu. Recevant ce maximum d’impact, on peut se mettre soit en prière, soit en méditation (la méditation, c’est l’exercice du silence, c’est un état de non-demande, de vide absolu ; c’est se mêler au Divin, en harmonie avec l’Absolu, ceci quelle que soit la religion ou la tradition observée).

Les deux colonnes sont derrière le Pape. Nous avons déjà rencontré deux colonnes avec la Papesse. Nous allons les interpréter sur un deuxième niveau, celui de la technique respiratoire. Je rappelle qu’autour d’une colonne se réunissent les gens du premier degré, autour de l’autre ceux du deuxième degré, et au milieu ceux qui savent, le troisième degré, et ceci aussi dans toutes les traditions. Les deux colonnes sont évidemment la frontière entre le monde profane et le monde religieux.

Ces deux colonnes, ici, sont de toutes les couleurs ; elles sont surmontées par le feu, il est jaune, c’est la couleur occulte de la mort, le milieu est vert, couleur de l’occulte, il y a une partie rouge qui les sépare et qui représente l’élan vital. On retrouve toujours le cycle du devenir.

D’après la tradition cabalistique, comme la tradition hermétique, assez semblables dans ce domaine, ces colonnes représentent ici la respiration Divine. Le jour et la nuit sont, à un premier degré, la respiration de Brahman chez les Hindous ; chez nous une colonne représente le jour, l’autre la nuit, et elles transmettent ici, avec le Pape, un rythme respiratoire. Il y a une colonne qui bénit et l’autre qui transmet la bénédiction. Dans un premier temps c’est l’alternance prière-bénédiction, les prières montent et se transforment en bénédictions qui descendent. Les deux clercs devant (il y en a un devant chaque colonne) ont un geste différent : il y en a un qui lève la main, l’autre qui la baisse.

Les deux colonnes symbolisent d’abord ce courant, montant et descendant. Le Pape tient la triple croix de la colonne de prière, et il lève la main droite devant la colonne dite de bénédiction. Ce sont Yakin la colonne de miséricorde, de bénédiction, et Boaz la colonne de rigueur, de prière. C’est aussi le sang rouge et le sang bleu, ce qui monte, le sang bleu, et ressort purifié, et toute la tradition occulte du Moyen Age s’est retrouvée dans la notion de sang bleu qui représente la noblesse, ce qui monte, tandis que ceux qui sortent sont le vulgaire sang rouge, sans importance ; c’est une tradition qui a été déformée.

Donc, du côté des colonnes, vous avez deux respirations, c’est-à-dire une respiration horizontale et une respiration verticale. La respiration horizontale, c’est celle qui se fait au dedans, et au dehors c’est celle qui vous lie au monde par la respiration normale, c’est « aimez-vous les uns les autres, aime ton frère comme toi-même », c’est ce qui vous entoure, c’est l’absence de jugement total envers qui que ce soit. La respiration verticale c’est le côté en haut et en bas, c’est-à-dire non plus « aime ton prochain » mais « ton Dieu, celui qui est, qui vit et qui n’a pas de fin ».

Ces deux colonnes, prises sous le sens de la pulsion respiratoire, sont un symbolisme qui se retrouve dans la croix papale et qui symbolise les trois niveaux de la respiration :

—    respiration horizontale : introversion, extraversion ;

—    respiration verticale : les trois plans de Dieu.

La partie verticale de la croix qui supporte les trois traverses horizontales qui coupent la croix en trois parties :

Respiration horizontale :        amour de la nature,

amour du prochain,

amour du Divin.

Respiration verticale : trois stades ou étapes à franchir :

premier niveau, purification qui donne accès au souffle Divin ;

deuxième niveau, illumination qui vous oriente vers la lumière ;

troisième niveau, union mystique avec le feu Divin qui est symbolisé par les flammes dorées qui sont en haut des deux colonnes.

Dans les trois lames du tarot, qui comportent deux colonnes : la Papesse, le Pape et la Justice, nous constatons qu’aucune des colonnes n’a la même terminaison. Pour la Papesse elles sont surmontées de fleurs de lys, pour le Pape c’est le feu Divin, et pour la Justice… nous le verrons en son temps.

Voilà pourquoi on a la triple croix tenue par le Pape du côté de la colonne de prière ; les trois traverses qui divisent la ligne verticale en trois, c’est la croix du triple amour, amour du prochain (inférieur), la nature, les plantes, les élémentaux, des êtres humains quels qu’ils soient et quoi qu’ils puissent dire ou faire, l’amour du prochain supérieur : le Divin, les êtres Divins quels qu’ils soient.

C’est la croix du triple amour de Dieu, le souffle qui est la foi, la lumière, qui est l’espérance et le feu qui est l’amour universel (la charité chez les Chrétiens).

Je voudrais préciser que tous les termes chrétiens ou christianisants que j’ai employés ici sont dus forcément à la forme chrétienne de cette lame, mais j’ai cité exprès des notions d’alchimie et d’hermétisme pour bien faire comprendre que ce n’est absolument pas une notion chrétienne. Ce Pape du tarot n’a strictement rien à voir avec un Pape ayant déjà existé. C’est un maître, c’est tout. Et c’est à nous de nous en rendre compte. C’est-à-dire que choisir un maître — pourquoi pas le Pape — ne peut se faire que lorsque l’on est prêt. La recherche d’un maître ou d’un Mouvement est souvent la recherche de béquilles ; il se peut que l’on en ait besoin, mais en fait, ce n’est pas à nous de chercher un maître cela peut donner lieu à bien des erreurs, car le maître n’arrive que lorsqu’on est prêt. On peut emmagasiner tout le savoir possible et imaginable, il est parfaitement accessible, mais si vous n’êtes pas prêts, vous ne le comprendrez pas. Le Pape mène à la haute initiation, mais l’initiation n’est possible que par un travail sur soi-même, quelles que soient les confessions. Les rituels d’initiation Aztèques et Incas ont été connus, ils le sont moins maintenant ; ils relevaient d’une initiation humaine, et ensuite les initiés étaient envoyés tout seuls dans la montagne pour méditer et comprendre par eux-mêmes. Les rituels d’initiation des Égyptiens étaient au premier stade des rituels humains et ensuite ils travaillaient et avaient accès à la prêtrise. Chez les Chrétiens c’est pareil, l’ordination ne fait pas le prêtre, c’est le prêtre qui se fait lui-même.

Je voudrais surtout dire, à propos du Pape, que sa signification dépasse de très loin l’image. Dans chaque lame, il y a une image, celle-là est extrêmement simple : un Pape tient une croix devant deux personnes auxquelles il donne sa bénédiction. C’est simple mais cela atteint des niveaux extrêmement complexes, qu’on ne peut intégrer qu’après avoir médité, pendant longtemps. Ce n’est pas l’accumulation de connaissances qui compte, c’est l’intelligence du cœur qui doit parler.

Je finirai sur ce mot de Saint Jean qui est connu. Je répète que Saint Jean était connaissant, c’est-à-dire que dans tout l’Évangile de Saint Jean on trouve la cabale hermétique, c’est-à-dire les trois clous du Christ, les quarante jours de jeûne dans le désert, les quarante heures au tombeau, les cent-vingt-trois poissons du miracle de la multiplication, tout est dans Saint Jean. Je finirai donc sur le mot de Saint Jean qui est exactement le message du Pape, c’est-à-dire : « Aimez-vous les uns les autres », le Pape n’étant pas le distributeur du Karma mais prônant l’acceptation du Karma tel qu’il est donné par les énergies supérieures.