Maud Forget
Les maux de notre époque se forgent dans les écoles

Le hatha-yoga est une véritable chiropractie lorsqu’il est pratiqué avec discernement. L’étude de cette discipline, les bienfaits que j’en ai ressentis m’ont incitée à créer une école de formation pédagogique pour que ne soit pas perdu ce que j’avais découvert. Ce sont les étudiants que j’avais initiés à leur demande à l’Université de Nanterre qui m’ont poussée à cette réalisation. J’ai été surprise par l’état de la colonne vertébrale d’êtres jeunes dont la santé semblait souvent compromise. Scolioses et lordoses se découvraient chez la plupart d’entre eux, des 89 élèves dont j’avais examiné le dos, 2 seulement étaient en parfait état.

(Revue 3e Millénaire. Ancienne série. No 11. 1983)

Dans ce bref article, Maud Forget lance un cri d’alarme quant à la santé physique et psychique des enfants. Il ne suffit pas en effet de se préoccuper de leur alimentation, il faut aussi – et tout autant – s’attaquer aux conditions de vie dans les classes. Ici, Maud Forget ne rabâche pas ce que l’on sait concernant les salles surchargées aux plafonds trop bas, aux fenêtres qui ne permettent pas une aération suffisante, au chauffage excessif qui conduit les élèves à somnoler après une demi-heure de cours. Aujourd’hui c’est à la respiration qu’elle s’intéresse ou plutôt à l’inaptitude à respirer convenablement qu’elle a constatée chez nombre d’élèves. S’ajoutant aux effets nocifs des vêtements synthétiques qui captent l’électricité statique, aux chaussures molles qui entraînent un affaissement de la voûte plantaire donc des déformations de l’aplomb de la colonne vertébrale sans parler de la pollution psychique due à la télévision, ce manque d’oxygénation convenable du corps est un fléau dont on constate beaucoup plus tard – à l’âge adulte – les effets pernicieux. Il est alors bien tard et bien difficile d’y remédier. Un peu de yoga ou d’exercices adaptés et couramment pratiqués à l’école épargneraient beaucoup de souf­france à l’adulte et feraient des élèves beaucoup plus attentifs et réceptifs.

Qui se souvient du saint dont le nom était invoqué après les moissons lorsque le dos, endolori par le ma­niement de la faux et de la faucille, réclamait son intervention ?

Qui peut prétendre que la médecine allo­pathique, dont les seuls remèdes sont les analgésiques peut venir à bout d’une lancinante lombalgie ?

Combien d’opérations pourraient être évitées si l’on recourait à la chiropractie encore décriée par le monde médical, celle-ci n’ayant pas obtenu un droit de cité officiel en France, alors que les écoles de formation existent dans tous les pays anglo-saxons, lesquels donnent un diplôme d’état offrant toute garantie.

La vie citadine est néfaste pour les dos dégénérés, les sports ne suffisent pas pour donner au squelette les haubans musclés dont il a besoin pour conserver sa rectitude, encore moins lorsque les sports sont compétitifs.

Aux derniers entretiens de Bichat, il a été dit que 87 % de la population française souffre de lombalgie, j’aurais tendance à arrondir jusqu’à 100 %.

Qui n’a pas connu une fois dans sa vie cette douleur insupportable qui, sans être atroce, limite nos mouvements, interrompt nos occupa­tions et pose un masque de souffrance sur nos visages.

Après un malencontreux accident de plon­geon, j’ai connu la lombalgie, j’ai eu le temps de méditer sur la colonne vertébrale pendant trois mois de lit auxquels j’ai été contrainte jusqu’à ce que par miracle je découvre le seul chiropracteur français de l’époque (nous étions en 1942). Je me dois de citer son nom par reconnaissance : le docteur Lavezzari. Quelques conversations avec lui m’ouvrirent les yeux sur l’intérêt que représente une recherche sur la colonne vertébrale. Le hatha-yoga, que je découvris quelques années plus tard, m’apporta la réponse à bien des questions que je m’étais posées, alors je compris la vénération en laquelle la colonne vertébrale était tenue dans de nombreuses traditions. Colonne Djed chez les Égyptiens, Caducée chez les Sémuriens et les Grecs, l’Arbre de vie cité dans la Bible, Mont-Meru, axe du monde, dans les Védas représentent la colonne vertébrale. La liste pourrait encore s’allonger de bien d’autres noms, car cette vénération est universelle.

Le hatha-yoga est une véritable chiropractie lorsqu’il est pratiqué avec discernement. L’étude de cette discipline, les bienfaits que j’en ai ressentis m’ont incitée à créer une école de formation pédagogique pour que ne soit pas perdu ce que j’avais découvert. Ce sont les étudiants que j’avais initiés à leur demande à l’Université de Nanterre qui m’ont poussée à cette réalisation.

J’ai été surprise par l’état de la colonne vertébrale d’êtres jeunes dont la santé semblait souvent compromise. Scolioses et lordoses se découvraient chez la plupart d’entre eux, des 89 élèves dont j’avais examiné le dos, 2 seulement étaient en parfait état.

Sachant que les déviations se fixent irrémé­diablement après la puberté, je poursuivis mon investigation auprès de groupes d’enfants qui m’avaient été confiés dans le CES Jean-Moulin à Meudon-la-Forêt ainsi que dans le CES Heinrich de Boulogne-Billancourt ; le mal était déjà fait, 3 élèves sur 14 avaient un dos bien constitué, ils étaient les meilleurs de leur classe.

Les capacités scolaires qui nécessitent une concentration mentale étaient inexistantes chez ceux dont la respiration était insuffisante. Le fort en thème a le dos droit et respire large­ment. Nous savons que les insuffisances respira­toires associées au stress sont à l’origine des déviations vertébrales.

Toutes les respirations (inspir et expir) doi­vent se faire exclusivement par le nez. L’obstruction des narines provoquée par les végétations, les allergies, les déviations de la cloison nasale et les sinusites ne sont pas les seules causes d’insuffisance. Il en est d’autres sur lesquelles le professeur Raymond Lautié donne des précisions alarmantes :

Le saturnisme : maladie provoquée par l’absorption de plomb qui se trouve dans l’air ambiant pollué par les gaz d’échappement pousse l’être humain à respirer au minimum pour assurer sa survie. La cote d’alerte est largement dépassée (86 fois la teneur en plomb, avenue des Champs-Élysées à six heures du soir – 36 fois dans les lieux de passage s’ouvrant vers les banlieues).

On peut s’étonner que les gouvernements soucieux de la santé publique n’aient pas encore pris des mesures qui limitent la pollution de l’air comme cela est déjà fait dans d’autres capitales. Les changements véritables consistent à re­donner à l’humain la possibilité de vivre en harmonie avec le Cosmos dont il est l’occupant privilégié.

Les revendications de 1968 n’avaient pas d’autre objet.

La pratique du yoga qui se répand dans le monde est la réponse à cette demande. Véritable thérapie préventive, on peut recourir à cette remarquable discipline pour retrouver équilibre, harmonie, santé et joie de vivre.

Maud Forget : présidente du Cercle du Vedanta, directrice de l’École normale de yoga
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