René Fouéré
Spiritualité et parapsychologie

Plusieurs d’entre eux furent, en certaines cir­constances, très péniblement affectés par ces forces inattendues et importunes, sinon indési­rables, qui, se manifestant en eux ou par eux, faisaient de leur personne un objet de curiosité, venaient les distraire ou les détourner, en quelque sorte, de leur recherche essentielle et risquaient de les faire trébucher sur le chemin simple et direct de leur accomplissement, ce che­min central et vertical qu’on voit sur le dessin de saint Jean de la Croix illustrant son livre La Montée du Carmel. Comme ils n’avaient nulle soif de l’empire de ce monde, les prodiges dont ils étaient l’objet ou la cause involontaires leur apparaissaient, au regard de leur entreprise cru­ciale, comme une sorte de divertissement futile ou comme le masque séduisant d’une tentation de puissance susceptible de compromettre ou même de ruiner irrémédiablement tous les résul­tats de leurs efforts antérieurs. Ils pouvaient voir encore dans ces phénomènes, par lesquels ils étaient parfois jetés dans un très cruel embar­ras, les brillantes scories de cette fusion de leur être qui devait les amener à leur transfiguration spirituelle.

René Fouéré était un des profonds écrivains sur le sujet de la vie intérieure. Les articles et livres De René Fouéré sur le site de 3e Millénaire sont publiés avec l’accord et l’encouragement de sa veuve Francine Fouéré

(Revue Psi International. No 5. Mai-Juin 1978) (Texte réédité dans Francine Fouéré: Bienveillance, livre en hommage à René Fouéré. Le courrier du livre 2005)

« Un esprit libéré a l’avantage d’agir comme un miroir dans lequel un esprit non-libéré peut se voir lui-même tel qu’il est réellement ».

« Un autre peut vous indiquer le sentier, mais c’est vous qui devez accomplir le trajet ».

« Le temps est court, mais le sujet est vaste ».

Yogaswâmi

(à propos du livre « Hommage à Yogaswami » de Susunaga Weeraperuma)

L’original du livre « Hommage à Yogaswâmi de Susunaga Weeraperuma » avait été aimablement confié à René Fouéré par son auteur. René Fouéré, très impressionné par sa lecture, obtint que les édi­tions du « Courrier du Livre » publient une version française à laquelle il a travaillé en coopération avec le regretté Louis Pouilliart. Ce petit ouvrage qui est le récit d’une singulière entrevue, récit dont René Fouéré garantit l’authenticité.

Ce récit ne se borne pas à nous restituer en termes souvent poétiques l’atmosphère tradi­tionnelle de la spiritualité indienne, il évoque aussi, en raison des faits insolites qu’il rapporte — c’est ce qui justifie sa publication dans la pré­sente revue —, le vaste problème des rapports entre le mysticisme et la parapsychologie, nous dirions plutôt entre la spiritualité et la parapsy­chologie.

Ce problème est loin d’être nouveau. C’est un fait historiquement constaté, et depuis des millénaires, que des hommes qui, s’inspirant généra­lement des traditions religieuses de leur époque, s’efforçaient d’atteindre une certaine réalisation spirituelle — et sont devenus, lorsqu’ils l’ont atteinte, ce qu’on a appelé, en Occident, de grands mystiques ou de grands saints et, en Orient, des maîtres ou des libérés — ont mani­festé, au cours de leur ascèse ou après qu’elle fût parvenue à son terme, des dons paranormaux et, parfois, miraculaires.

Il est, certes, parfaitement naturel que soient étudiées — comme le seraient n’importe quels autres phénomènes physiques, biologiques ou psychologiques — les manifestations paranormales qu’on observe chez quelques sujets privi­légiés et qu’on peut même, à certains égards et dans une certaine mesure, susciter ou intensifier, grâce à un entraînement approprié, chez des personnes pouvant passer pour normales.

Nous ne saurions donc contester le bien-fondé et l’intérêt des recherches parapsychologiques. D’autant que leurs résultats pourraient ouvrir à la pensée humaine des horizons nouveaux et nous conduire à une mise en question profonde, et peut-être dramatique mais enrichissante, à une révision inattendue et surprenante des valeurs que nous avions traditionnellement acceptées.

Or, les chercheurs s’intéressant aux phénomènes parapsychologiques ont eu leur attention tout naturellement attirée par ceux que manifestaient en eux-mêmes ou déclenchaient autour d’eux les grands mystiques et les grands saints de nos Églises ou les ascètes et les maîtres orien­taux.

Il n’était donc pas surprenant que l’Institut Métapsychique International eût organisé un Colloque sur le thème « Mystique et Parapsy­chologie », qui s’était tenu le 25 juin 1967 au Centre Vêdantique Ramakrishna, de Gretz-­Armainvilliers (Seine-et-Marne), qui est l’« ashram » du Swâmi Ritajânanda de la Ramakrishna Mission. Au cours de ce Colloque, auquel nous avons assisté, la plupart des ora­teurs parapsychologues parlèrent des phéno­mènes paranormaux qui s’étaient manifestés chez les grands mystiques et les saints et on sen­tait, à travers leurs propos, qu’ils se deman­daient, en leur for intérieur, si, en étudiant les circonstances dans lesquelles ces phénomènes avaient été observés chez ces spirituels d’Europe ou d’Asie, on ne parviendrait pas à concevoir des méthodes permettant de provoquer leur appari­tion chez d’autres sujets.

Cette attitude d’esprit était, en un sens, très compréhensible et justifiée dans la perspective où ils se plaçaient, mais, dans son allocution de clôture du Colloque de Gretz, le Swâmi Rita­jânanda, s’adressant aux parapsychologues qu’il avait accueillis, insista sur le fait que, si des chercheurs pouvaient s’efforcer de provoquer ces phénomènes pour les étudier comme tels, ils avaient plutôt été, pour les spirituels qui les avaient rencontrés au cours de leur ascèse, des éléments de perturbation, de trouble, sinon de malaise et, pourrait-on dire, de désagréables, d’inquiétantes surprises.

Il apparaît donc que si les phénomènes para­normaux présentés par les mystiques sont, pour les parapsychologues, un légitime sujet d’étude, la plupart de ces phénomènes ont été et res­tent, pour les mystiques eux-mêmes au cours de leur ascèse, des éléments indésirables, des fac­teurs de désorganisation de leur recherche spiri­tuelle.

On ne peut que souscrire sans réserve au bien-fondé de la remarque — qui est d’importance — du Swâmi Ritajânanda. Si légitimes soient-elles l’une et l’autre, l’ascèse spirituelle pure et la recherche phénoménologique n’ont guère de commune mesure, même lorsque la seconde prend pour objet d’étude les manifestations paranormales qui surviennent au cours de la première, et l’histoire du mysticisme religieux nous offre maints exemples d’ascètes qui furent pris de désarroi ou terriblement gênés par ces phénomènes insolites qui se produisaient en eux ou par eux et qu’ils n’avaient pas appelés.

Dans l’Église catholique, le cas de Thérèse d’Avila constitue l’un de ces exemples, des plus représentatifs. Cette sainte, nous dit Roger Bas­tide dans son remarquable ouvrage Les pro­blèmes de la vie mystique, prie Dieu de ne plus lui envoyer des extases qui la frappent devant tout le monde, pendant la messe, à la sortie de l’église, qui sont, pour ses proches, un motif de scandale plus que d’édification religieuse, dont son humilité d’ailleurs est mortifiée.

Pour les grands ascètes, chrétiens ou orientaux, qui n’étaient pas encore parvenus à ce sommet spirituel qu’ils s’efforçaient d’atteindre et pour­suivaient, pour nous servir du langage de saint Jean de la Croix, leur difficile « montée du Car­mel », la plupart de ces phénomènes insolites [1], qu’ils n’avaient pas délibérément recherchés et dont ils se trouvaient être soudainement le théâtre ou l’origine, prenaient à leurs yeux un caractère parasitaire sinon dangereux.

Précisément parce que ces étranges pouvoirs qui se manifestaient en eux ou par eux n’étaient pas l’objectif qu’ils poursuivaient, ne s’inscrivaient pas dans le droit fil de leur quête spirituelle, leur apparition imprévue et leurs effets, souvent spectaculaires, les surprenaient et les déconcer­taient, créaient dans leur esprit un trouble et presque un malaise.

Les plus sérieux, les plus profonds d’entre eux s’étaient voués à la recherche exigeante et déli­cate, méditative et silencieuse, d’une Présence ineffable, celle du principe même de leur vie et de toute vie.

Ils n’étaient pas avides de pouvoirs les rendant capables d’accomplir des prodiges extérieurs. Ils n’avaient nul souci de se parer de cette auréole de gloire personnelle, dont s’entourent les mages et les thaumaturges. Dans l’honnêteté de leur cœur, dans leur consécration totale à leur suprême dessein, ils n’avaient pas désiré ­c’eût été si puéril ! — s’enorgueillir de posséder d’extraordinaires, d’indiscrets pouvoirs, susceptibles de conférer à leur personne un éclat mon­dain.

Plusieurs d’entre eux furent, en certaines cir­constances, très péniblement affectés par ces forces inattendues et importunes, sinon indési­rables, qui, se manifestant en eux ou par eux, faisaient de leur personne un objet de curiosité, venaient les distraire ou les détourner, en quelque sorte, de leur recherche essentielle et risquaient de les faire trébucher sur le chemin simple et direct de leur accomplissement, ce che­min central et vertical qu’on voit sur le dessin de saint Jean de la Croix illustrant son livre La Montée du Carmel. Comme ils n’avaient nulle soif de l’empire de ce monde, les prodiges dont ils étaient l’objet ou la cause involontaires leur apparaissaient, au regard de leur entreprise cru­ciale, comme une sorte de divertissement futile ou comme le masque séduisant d’une tentation de puissance susceptible de compromettre ou même de ruiner irrémédiablement tous les résul­tats de leurs efforts antérieurs. Ils pouvaient voir encore dans ces phénomènes, par lesquels ils étaient parfois jetés dans un très cruel embar­ras, les brillantes scories de cette fusion de leur être qui devait les amener à leur transfiguration spirituelle.

Mais comment interpréter l’irruption de ces phé­nomènes paranormaux au cœur de l’ascèse spirituelle authentique ?

Des théologiens, des philosophes et des psy­chologues se sont penchés sur le problème de l’origine de ces étranges, de ces étince­lantes « bavures » de la recherche spirituelle pro­fonde.

Nous pensons personnellement que l’on peut retenir sur ce point l’explication proposée par l’abbé Henri Brémond et d’autres auteurs. Explication selon laquelle la pénétration, si l’on peut dire, d’une présence spirituelle grandiose, souveraine, à l’intérieur du psychisme humain serait comme l’absorption d’une liqueur trop forte venant perturber le fonctionnement de la psyché ainsi que celui de l’organisme, et donnant lieu à des phénomènes psychologiques et phy­siques secondaires qu’on pourrait justement qualifier de paranormaux.

Mais, avec le temps, l’espèce de déséquilibre ini­tial disparaît, une sorte de cohabitation s’éta­blit. L’organisme et la psyché s’adaptent à cette présence intérieure indicible. Un état de contact tranquille, d’accoutumance survient. Au cœur de cette visitation spirituelle qui hante l’individu humain, un équilibre apparaît, un équilibre dans l’intensité. C’est ce qu’Henri Delacroix appelle « l’état théopathique » (voir le chapitre VII de l’ouvrage de Roger Bastide déjà cité).

Dans la plupart des cas, les phénomènes para­normaux cessent de se manifester. Les visita­tions supérieures ne provoquent plus aucun trouble visible de la conscience ou du corps, qui se sont familiarisés avec ces visitations.

Il n’en reste pas moins que des pouvoirs excep­tionnels qui s’étaient manifestés au cours de l’ascèse peuvent subsister, de façon permanente ou intermittente, lorsque le sommet de cette ascèse a été atteint. Il peut même en apparaître d’autres.

Quelle signification peut-on dès lors attribuer à ces pouvoirs persistants ? Il semble qu’ils ne soient plus, à ce moment, qu’un simple élargisse­ment des possibilités d’action du sujet, élargissement qui n’entraîne aucun péril pour lui-même ou pour autrui. On peut les tenir pour des apti­tudes nouvelles s’ajoutant à celles que les indivi­dus ordinaires possèdent. Tout orgueil personnel s’étant effacé au sommet de la vie spirituelle [2], ces nouvelles aptitudes ne sont plus au service de celui qui les détient, mais au service d’une action désintéressée, manifestement ou subtilement charitable et généreuse.

On peut penser que les pouvoirs de Yogaswâmi, si déconcertants qu’ils pussent être dans leur expression extérieure, étaient de cette sorte et traduisaient la compassion qu’il éprouvait pour ses visiteurs, dont il lisait les pensées, à livre ouvert.

Nous pourrions ajouter que la spiritualité est aussi, en elle-même, une « parapsychologie », si l’on entend par « parapsychologie » la science des aptitudes qui se situent en marge, débordent ou dépassent, sur le plan perceptif ou sur le plan moteur, le domaine des aptitudes usuelles de l’être humain. Mais la « parapsychologie » que représente la spiritualité est d’un tout autre ordre que celle qu’on désigne communément par ce terme.

Chez ceux pour qui la spiritualité n’est pas un phénomène purement intellectuel, mais une réalisation de l’être équivalente à une sorte de mutation psychologique, il semble que cette réalisation débouche, lorsqu’elle devient effective, sur des états de conscience qu’on pourrait qualifier de paranormaux ou, peut-être, de supranormaux. Tout en ne cherchant pas à accomplir des actes insolites, des prodiges extérieurs, la conscience de l’homme parvenu à la plus haute spiritualité pourrait passer par des états incon­nus de l’homme ordinaire, effectuer une plongée dans ce qu’on pourrait appeler une autre dimen­sion de l’univers. Dimension que les individus répondant aux normes habituelles ne soupçon­nent pas, dont ils n’ont pas l’expérience et qui, de ce fait, correspond à un domaine de percep­tion intérieure ou d’action qui peut passer pour parapsychologique.

Encore que les faits inclus dans ce domaine ne relèveraient d’aucune recherche matérielle organisée, d’aucun système de tests utilisant un appareillage de détection ou de contrôle et justifiant le recours aux méthodes statistiques.

Qui plus est, une telle « parapsychologie » ne pourrait être décrite dans aucune de nos langues coutumières, puisque notre langage usuel ne peut être compris que par des lecteurs ou des auditeurs qui ont eu, pour l’essentiel, l’expé­rience de ceux des états que les mots de ce lan­gage ont pour mission de traduire.

Si, néanmoins, des spirituels et des mystiques parviennent à se comprendre en utilisant le langage usuel de manière analogique ou symbo­lique, c’est parce qu’ils ont vécu les uns et les autres les mêmes expériences intérieures.

Selon divers auteurs, dont Henri Delacroix (Roger Bastide, Les problèmes de la vie mys­tique), il y aurait, chez les mystiques, des « phé­nomènes de compréhension sans compréhension véritable », c’est-à-dire illusion de compréhen­sion.

En est-il toujours ainsi, même pour les plus grands mystiques occidentaux ou orientaux ? Nous n’en sommes pas si sûrs.

Il n’est pas certain, en effet, que l’intelligence commune, l’intelligence usuelle, celle qu’évoque le mot « comprendre », soit, tout délire mis à part, la seule forme d’intelligence que l’individu humain puisse connaître.

Pour qu’il pût être cet « animal technique » dont parlent Henri Bergson et Édouard Le Roy, il a fallu que l’être humain fût doté d’une intelligence sans laquelle il n’aurait pu façonner les outils ou construire les engins qui ont fait de lui le maître biologique de sa planète natale.

Nous avons appelé « intelligence technique » cette forme d’intelligence et, dans notre ouvrage Du temporel à l’intemporel — Intelligence technique et conscience personnelle —, nous nous sommes efforcé de montrer que cette intelligence technique, qui est une intelligence spécialisée dans la production d’objets, avait en quelque sorte tragiquement déteint sur la conscience que l’homme se fait de lui-même et de ses sem­blables.

Cette intelligence technique a des limites et d’étranges singularités. Il est, par exemple, remarquable que, bien que pouvant aisément concevoir, grâce à elle, des objets à plus de trois dimensions et en établir les propriétés géomé­triques, les projections, nous sommes, selon toute apparence, absolument incapables de les imaginer, de nous en donner une représentation concrète, de les voir.

Si elle a des limites perceptibles, qu’est-ce qui nous assure que ces limites ou ces déficiences ne pourraient pas être dépassées ?

Pour la conscience de l’enfant de moins de trois ans, le langage de l’adulte est, en règle générale, inintelligible.

L’expérience mystique véritable pourrait débou­cher sur une vision du monde qui n’est pas celle de la plupart d’entre nous, sur une forme d’intel­ligence qui échappe à la généralité des hommes, qui n’est pas apparue en eux dans les conditions d’éducation par lesquelles ils sont passés, et serait aussi intraduisible avec notre langue cou­tumière que le sont les propos d’un adulte pour la conscience d’un enfant qui n’a pas encore acquis le sentiment d’existence personnelle séparée.

Après tout, « comprendre », n’est-ce pas, pour chacun de nous, une certaine manière de voir, l’exercice d’un « sens » psychologique ?

Nous disons nos très vifs remerciements à la revue PSI INTERNATIONAL, dont nous appré­cions beaucoup la qualité, pour l’accueil qu’elle a bien voulu réserver à nos précédents ar­ticles et pour nous avoir permis de faire paraître dans son présent numéro, non seule­ment le texte du petit livre de notre ami cingha­lais Susunaga Weeraperuma, mais encore l’ar­ticle que la parution de son texte dans une telle revue nous a suggéré. Nous avons été très touché de ces attentions, de l’honneur qui nous est fait. Nous tenons également à exprimer toute notre cordiale gratitude à notre éditeur et ami Gérard Nizet, directeur des éditions Le Courrier du Livre, qui nous a obligeamment autorisé à faire publier dans PSI INTERNATIONAL le texte intégral de l’ouvrage de Susunaga Weerape­ruma dont il a édité la version française en 1975.

L’édition originale anglaise de ce petit livre avait été publiée à Londres, en 1970, par Poets’ and Painters’ Press, sous le titre Hommage to Yogas­wami.

À la fin du texte original, sorti des presses, comme nous venons de le dire, en 1970, il était indiqué — et cette indication a été reproduite dans la version française du livre — que Yogaswâmi était mort quelques années avant la rédac­tion de ce texte. Dans ces conditions, ce swâmi ceylanais a été, pour beaucoup d’entre nous, un contemporain.

[1] La plupart, mais non pas tous. Un saint catholique, dont nous avons oublié le nom, assista, à grande distance, par percep­tion extra-sensorielle, à la mort d’un pape qui était son ami. Ce saint ne dut certainement pas souffrir de ce que ce pouvoir, tenu pour miraculeux, lui eût été, en pareille circonstance, octroyé. Il dut plutôt y voir une faveur de la grâce divine. Mais nous nous sommes surtout intéressé jusqu’à présent aux phénomènes para­normaux survenus au cours de l’ascèse et le saint était peut-être parvenu au terme de la sienne lorsqu’il eut cette vision.

[2] Comme le note Roger Bastide, les grands mystiques parve­nus au sommet de leur ascèse disent volontiers : « Ce n’est pas moi qui vis, mais Dieu qui vit en moi. »