Jean Chevalier : Deux évènements pour l’histoire des religions

On est généralement enclin à juger une donnée sociale, politique, artistique ou religieuse, par référence à ses origines, au lieu d’en apprécier la force actuelle ou potentielle, manifeste ou occulte. Aussi dit-on que l’histoire est maitresse de vie, alors que c’est la vie qui est génératrice d’histoire. On distingue ainsi deux catégories d’esprits : ceux qui, tournés vers le passé, s’en tiennent à l’histoire des faits ; et ceux qui, regardant plutôt le permanent et l’avenir, considèrent le rôle privilégié que peuvent avoir des faits sur le cours d’une histoire, toujours inachevée. On aborde dès lors l’étude du fait religieux de deux façons différentes : comme révélateur d’un passé ou comme porteur d’un avenir.

Jean Chevalier : De Mahomet à l’âge des réformes

Ce n’est pas en restant au niveau des généralités faciles que Mircea Eliade se montre un incomparable défricheur de sens. Il examine les mythes, rites et croyances jusque dans leurs menus détails, ne négligeant aucun trait qui puisse solliciter l’intervention de l’herméneute, pour démasquer son rôle particulier dans un ensemble traditionnel. La somme d’érudition incorporée dans cette Histoire des Croyances et des Idées religieuses est vraiment prodigieuse! Ce qui est le plus étonnant, c’est la réussite qui, loin de ressembler seulement à une savante compilation, constitue une intelligente exploration des profondeurs, la projection d’un faisceau de lumière sur ce qu’on a justement appelé «la conscience des anciens et l’inconscient des modernes». Nous sommes loin d’un James George Fraser, avec ses hâtives et superficielles généralisations.

Ioan P. Couliano : Mircea Eliade et son œuvre - L'histoire vraie du mythe

La fonction du mythe, cette histoire que l’herméneutique rend vraie, est de créer un puissant obstacle entre l’homme et le rien, d’empêcher que celui-ci s’empare du monde humain. Le mythe, c’est l’humanité de l’homme, ce qui le tire du rien, ce qui l’oppose au néant. Sur le plan de l’herméneutique, le mystagogue se transforme en vrai magicien et pécheur des consciences à la dérive, qui risquent d’être englouties par le rien. Le mystagogue sauve.