Vincent Monteil : L’Islam - La révélation du dernier Prophète

La doctrine de l’islâm est contenue dans le Coran et dans la Sunna, c’est-à-dire la Tradition vécue et enseignée par le Prophète, autrement dit, l’ensemble des « dicts » ou logia ou hadith de Muhammad. Le mot Qur’ân signifie « récitation ». Le texte révélé à Muhammad est considéré, par les musulmans, comme le Verbe même de Dieu – selon l’expression de Louis Massignon, « comme une dictée surnaturelle enre­gistrée par le Prophète inspirées ». D’abord retenu par cœur, puis transcrit sur des fragments de poteries, des peaux, des palmes, des omoplates de mouton, une version définitive, la Vulgate », en fut établie après la mort du Prophète, puis fixée au IXe siècle, en notant les « points diacritiques » qui permettent de distinguer les consonnes au « squelette » com­mun, ainsi que les signes des voyelles brèves. Matériellement, c’est une suite de cent quatorze chapitres ou sourates, les plus longues au début, les plus courtes à la fin, subdivisées en plus de six mille versets. Vingt-neuf sourates commencent par des lettres isolées, dont le véritable sens est controversé (les mystiques en font grand cas). Les orientalistes ont cherché à classer les sourates en suivant l’ordre chronologique le plus vraisemblable, c’est ce qu’a fait, en particulier, Régis Bla­chère, en 1949-1950. Longtemps, les musulmans ont répugné à traduire le Coran arabe. Aujourd’hui, il en existe de nom­breuses versions dans les principales langues du monde de l’islâm, du wolof du Sénégal au swahili de l’Afrique orientale, du turc au malais-indonésien. Certaines de ces traductions sont peu satisfaisantes, soit que, pour mieux coller au texte original, elles se réduisent à un mot à mot incompréhensible, soit, au contraire, qu’elles l’interprètent de façon contestable. Il faut pourtant reconnaître qu’il est indispensable de traduire le Coran pour le rendre intelligible à la masse des fidèles, qui l’apprend par cœur sans le comprendre.

Jean During : L'ascension du Prophète

Le mi’râj, voyage céleste de Mohammad, est un des événements les plus marquants de sa mission prophétique, ou de ses miracles. De cette (ou ces) expérience intérieure il ne parla guère, car rares étaient ceux qui pouvaient en saisir la nature réelle. Ainsi, on débattit vai­nement pour savoir si ce voyage eut lieu phy­siquement ou seulement en esprit. Ceux qui voulaient croire à un voyage physique ne comprenaient pas que le mi’râj était une vision, non un rêve, donc une expérience beaucoup plus forte que toute expérience sen­sible, comme le suggère la parole : « Les hommes sommeillent, quand ils meurent, ils s’éveillent. » Il aurait dit aussi qu’il stationnait entre le sommeil et l’état de veille lorsque l’ange vint le trouver. ‘Aysha, sa femme, affirmait que son corps était resté sur place, mais en admet­tant l’existence d’un ou plusieurs corps subtils d’autres interprétations seraient possibles.

Hazrat Inayat : Le message prophétique

La réponse est celle que Roumi donne: « Il y a des objets que l’homme fabrique pour s’en servir comme instruments et il y a des objets qui lui tombent dans la main et qui ont été faits pour son usage, comme son instrument, par la nature ». Ceci montre qu’il y a des cœurs qui viennent déjà tout prêts à percevoir la condition de l’Esprit Divin. On pourrait demander: « qu’est-ce que l’Esprit Divin? » L’Esprit Divin est la collectivité de l’Esprit, celui de chacun et de tous; mais cependant plus profond que l’esprit de quiconque et plus vaste que tout esprit connu.

Djime Momar Gueye : L'islam et la tolérance

C’est le lieu de dire que beaucoup de cœurs honnêtes ignorent l’attitude tolérante de l’Islam et ne connaissent souvent à cet égard l’Islam d’autre visage que celui de la guerre sainte : la Djihâd. La Djihâd n’est pas selon la loi religieuse le droit ou l’obligation de soumettre à l’Islam par la guerre. C’est le droit et l’obligation, chaque fois que cela est nécessaire et possible de secourir toute communauté islamique qui voit entraver par des moyens brutaux le libre exercice de son culte et la vie selon sa foi. Mais cette loi n’a pas toujours été rigoureusement respectée. Des conquêtes ont été faites au nom de l’Islam dans des circonstances qui n’étaient pas toujours celles que prévoit la loi.

Rokaya Boubakeur : Aperçu sur le soufisme musulman

Peu importe le résultat pour le soufisme; ce qui compte c’est la lumière qui illumine un cœur ivre de Dieu, la sincérité de l’élan vers Lui. Le paradis et l’enfer que le commun des mortels considère comme une équitable rétribution, une récompense pour les justes et une sanction pour les pécheurs, le soufi les tient pour un bas commerce échangiste, indigne de Dieu, du croyant sincère et du véritable amour. Tout calcul doit être banni, à ses yeux, dans les rapports de l’homme avec Dieu ; la vraie dévotion ne consiste pas à multiplier les « actions rentables », à se livrer à « d’intelligents investissements » pour accéder au paradis qui n’a aucun rapport avec les transactions, la spéculation boursière. C’est être fou que de matérialiser l’immatériel et d’aimer pour mériter.

Michelle Reboul : Henry Corbin et le chiisme iranien

Le chiisme est l’ésotérisme de l’islam comme le rappelle ce propos du VIe imâm, Ja’far al-Sâdiq, mort en 765: « Notre cause est un secret qui reste voilé, un secret que peut seul enseigner un secret, un secret qui reste enveloppé dans le secret. » Le chiisme n’est pas marginal ou hétérodoxe par rapport au sunnisme, qui serait l’islam orthodoxe, fortement majoritaire dans les pays musulmans, excepté l’Iran chiite. Il n’y a pas en Islam d’autorité qui décrète des positions dogmatiques et lance des anathèmes contre ceux qui refuseraient d’y adhérer, mais la liberté de se soumettre (islam = soumission), de suivre (chîa, en arabe, d’où dérive chiisme, veut dire suivre) un aspect plutôt exotérique, extérieur, ou un aspect ésotérique, intérieur, du Coran : les deux aspects, étant deux faces de la même réalité, ont la même valeur.

Jean Chevalier : L'islam 2e religion en France

Dans tout discours, tout désir, toute sensation, ce qui compte, c’est l’intention, non pas la matérialité sensible. Grâce à l’intention seule, la dualité disparaît. Elle confère à l’acte son sens, très souvent caché par les apparences : « Dans le sens, tout s’accorde. » Penser et agir dans le même sens, c’est abolir les oppositions, même entre les dogmes et les éthiques différentes. A cet égard, le mystique est très libéral : on peut suivre, dit-il, la voie de Jésus (« s’abstenir de la satisfaction des désirs ») ou celle de Muhammad (« supporter la tyrannie, les soucis de la femme et du monde »). Atteindre au sens suprême, quelle que soit la voie, c’est l’essentiel, et c’est l’extase. Sortir de soi, c’est se trouver : c’est réaliser le sens de sa vie, s’unir dans l’amour.

Yves Dauge : Trois miroirs de la sagesse

Au départ, il y a les éveils prodigieux, les expériences fulgurantes, l’irruption des énergies divines à travers des personnalités pleinement réalisées. Il y a les Maîtres de sagesse, et l’invitation universelle à les imiter. Puis des disciples codifient le message, structurent une communauté, établissent des règles et des distances, s’interposant entre les hommes et la lumière. Divinisé, le maître s’éloigne ; il est remplacé par un clergé avide de puissance, qui s’approprie l’autorité et « cache les clefs de la connaissance ». L’église alors a éclipsé le Royaume : une religion — ou une secte — est née, déformation psychologique et sociale de l’unique Vérité, et un peuple domestiqué de fidèles, aliénant sa responsabilité au profit des hiérarchies, des dogmes et des rites, achève de dénaturer le Divin par son ignorance et ses passions. Cependant, au sein même des religions, la Gnose malgré tout persiste, se transmet, illumine, grâce à une petite élite de libres esprits ; régulièrement combattus et persécutés par l’orthodoxie officielle, ils lui évitent pourtant une complète pétrification.

Celui qui nous nourrit

L’aspect principiel que Tawhîd met en lumière contraste avec celui qui a été évoqué par le précédent. Alors qu’il y était question de la destruction et de la «transformation» de tout ce qui n’est pas la Face divine, c’est un principe «conservateur» des êtres qui est envisagé ici. La relation de ces deux tawhîd présente donc une analogie remarquable avec les deux voies de réalisation rapportées, dans l’Hindouisme, respectivement à Shiva et à Vishnu qui sont, eux aussi, dés aspects fondamentaux de la «Personnalité» divine…