Sylvain Loisant
Théorie des cycles dans l'histoire de l'art

(Revue Le chant de la licorne. No 17. 1987) L’histoire de l’art peut-elle, grâce aux postulats de la sagesse traditionnelle, devenir une science avec des lois précises qui permettent de définir le rôle que l’art joue dans le développement de la conscience humaine ? Existe-t-il une analogie entre l’organisation intérieure de l’Homme et les différents […]

(Revue Le chant de la licorne. No 17. 1987)

L’histoire de l’art peut-elle, grâce aux postulats de la sagesse traditionnelle, devenir une science avec des lois précises qui permettent de définir le rôle que l’art joue dans le développement de la conscience humaine ? Existe-t-il une analogie entre l’organisation intérieure de l’Homme et les différents courants artistiques qui se sont succédés ?

On ne pourra pas facilement répondre à ces questions avec les conceptions classiques de l’histoire de l’art. En effet, celle-ci est souvent présentée comme une collection d’événements artistiques qui sont répertoriés et analysés a posteriori. De ce point de vue, l’art est totalement imprévisible dans son évolution ; les mouvements, les courants nouveaux sont considérés comme une continuité des conceptions plus anciennes, mais aucune logique ne les relie et ne peut déduire la forme que prendra l’art à court, moyen et long terme (tout au plus des intuitifs font-ils des suppositions qui se révèlent rarement exactes sur ce sujet). Or, sans s’égarer dans la subjectivité facile de l’histoire mystérieuse, — avec laquelle on peut prouver n’importe quelle théorie — mais en partant de l’histoire officielle de l’art, nous avons une matière suffisante et un langage relativement universel à partir duquel nous pouvons constater des faits troublants, susceptibles de donner un fil conducteur. Ces faits concernent notamment la répétition cyclique de certains courants artistiques, ainsi que leur alternance régulière entre deux polarités. Cependant, bien que ces observations constituent un soutien expérimental précieux, seules elles ne peuvent expliquer la logique interne de l’histoire de l’art. Il manque en effet une trame générale, un aspect théorique qui permettra d’en comprendre les mécanismes profonds. La démarche théorique que nous développerons s’appuie sur deux points familiers des étudiants en science traditionnelle.

La théorie des ères zodiacales

Celle-ci permettra de définir et de superposer deux périodes zodiacales avec les quatre millénaires assez bien connus de l’histoire de l’art.

La constitution occulte de l’Homme

De toute évidence, avant l’art se trouve l’artiste. Nous verrons que les différents véhicules constituant l’être humain se manifestent successivement, dans un ordre précis, au long de l’Histoire, chacun au travers d’un type expression artistique.

Dans une première partie nous développerons ces deux aspects théoriques, puis nous les soumettrons à l’épreuve des faits historiques.

En Orient, les événements historiques ont beaucoup moins d’importance que les symboles véhiculés par ces événements. Notre objectif est de montrer que l’histoire de l’art courante est la forme extérieure d’un plan parfaitement organisé du développement de la conscience humaine. Nous tenterons avec prudence de tirer les règles plus générales de cette histoire de l’art pour comprendre comment les artistes peuvent s’intégrer harmonieusement et consciemment à ces grands mouvements de création. Pour simplifier notre recherche, nous nous limiterons dans cet article aux arts plastiques dans le monde Occidental, bien que, de toute évidence, les mêmes cycles se retrouvent dans l’art Oriental.

LES ÈRES ZODIACALES

Depuis quelques décennies, dans les revues spécialisées et dans toute une littérature, on parle beaucoup des ères zodiacales, notamment de l’ère du Verseau qui doit succéder à l’ère des Poissons.

Mais à quoi ces ères correspondent-elles ?

Nous ne nous étendrons pas sur des explications astronomiques fastidieuses que l’on peut facilement trouver dans de nombreux ouvrages. Retenons seulement que les points équinoxiaux ne se présentent pas d’années en années exactement au même endroit de la sphère céleste. Ces points équinoxiaux se déplacent sur le zodiaque naturel de 50 secondes 1/3 par an dans le sens des aiguilles d’une montre. Pour faire un tour complet il leur faut 25 868 ans. Ce phénomène se nomme précession des équinoxes. Le zodiaque est constitué de 12 signes de 30° ce qui implique que le parcours d’un signe correspond à 2160 ans. Ainsi à l’équinoxe de printemps, le soleil entre dans le signe du Bélier selon le zodiaque intellectuel, mais se trouve en fait à la fin du signe des Poissons selon le zodiaque naturel.

Quand commence une ère zodiacale ?

Il n’y a pas de références astronomiques précises qui permettent de déterminer le début d’une ère zodiacale, cependant on sait que l’ère des Poissons qui se termine a commencé à l’époque du Christ. De même l’ère précédente du Bélier a débuté environ 2200 ans avant J.-C. Certains auteurs donnent des dates sensiblement différentes pour les limites de ces périodes.

La détermination exacte du commencement des ères zodiacales n’est pas indispensable au développement de notre thèse.

ÉLÉMENTS DE RECHERCHE

Nous disposons donc de deux éléments de recherche bien définis :

1) Deux périodes de temps que nous supposons dans notre hypothèse avoir un rapport analogique.

2) Une connaissance précise des événements de l’histoire de l’art correspondant à ces deux périodes.

Nous allons associer ces deux paramètres, et pour clarifier la démonstration nous n’utiliserons que les courants artistiques les plus importants.

Quelques remarques avant d’aborder notre démonstration :

L’art est un phénomène universel et tous les peuples ont leurs propres traditions artistiques, cependant on peut constater que ces expressions ne se situent pas au même niveau. Ainsi l’art primitif dont l’évolution est presque nulle, ne peut être comparé aux arts de la Grèce ou de l’Égypte antique, qui ont modifié la face du monde. De même, on ne peut comparer les arts de la Grèce et de l’Égypte antiques à ceux de la Grèce et de l’Égypte actuelles qui ne jouent plus un rôle mondial important.

Première constatation : dans l’histoire de l’art il existe des courants prépondérants qui se succèdent.

Dans les manuels, on retrouve presque systématiquement l’ordre suivant :

– L’art Égyptien

– L’art Crétois

– L’art Grec

– L’art Romain

– L’art Byzantin

– L’art Moyenâgeux (roman, gothique)

– L’art de la Renaissance

– L’art classique

– L’art romantique

– L’art moderne

– L’art contemporain

A certaines époques, plusieurs courants coexistaient. C’est ainsi que l’on trouve au Moyen-âge, d’une part l’art Byzantin, brillant, mais extrêmement traditionaliste, conservateur, donc peu évolutif, fruit perfectionné de l’art Gréco-romain et du Christianisme, d’autre part l’art Occidental passé en quelques siècles d’une quasi barbarie à l’art romain, puis gothique, ceci dans une évolution fulgurante et novatrice.

Deuxième constatation :

TROIS TYPES DE COURANTS ARTISTIQUES

Il existe trois types de courants artistiques :

1) Un art de « vieillesse » statique, qui est la conséquence d’une décadence et d’une perte de substance (le plus souvent liée à une invasion).

2) Un art de maturité, courant extrêmement brillant, traditionaliste, mais aussi statique, qui meurt plutôt que de s’adapter (ex : Moyen et Nouvel Empire Égyptien et culture Byzantine.)

3) Un art de jeunes souple et adaptable qui n’est pas forcément spectaculaire dans sa genèse, mais est porteur d’une énergie annonciatrice d’une mutation dans les conceptions du monde. Exemples : Art de la Renaissance, du Moyen-âge Occidental, Art Grec.

Ce type d’art est constant. Il absorbe toutes les influences pour les intégrer dans une forme totalement nouvelle et originale.

THÉORIE DES CYCLES

Pour vérifier, dans les faits, notre hypothèse, nous devons :

1°) associer deux civilisations :

– séparées par une période de 2160 ans (une ère zodiacale),

– possédant des analogies évidentes au niveau de leur forme, de leur fonctionnement spirituel ou politique.

2°) comparer dans le détail les arts de ces deux civilisations.

1/ Civilisation séparées par 2160 ans

Prenons une civilisation du début de l’ère du Bélier : le Moyen et le Nouvel Empire Égyptien (2052 av. J.C. – 965 av. J.C. selon l’Encyclopédie Larousse). La civilisation que nous allons lui comparer doit se situer dans la période commençant l’année 100 après J.C. et se terminent en 1200 après J.C.

Voyons maintenant si nous trouvons une civilisation possédant les caractéristiques de la première soit :

– Un empire puissant et riche,

– gouverné par un monarque ayant un rôle spirituel (comparable à celui des pharaons),

– au caractère très traditionnel,

– soucieuse de porter à la perfection des principes établis depuis l’origine,

– essentiellement dirigée vers des objectifs spirituels exprimés sous forme symbolique (L’empire étant considéré comme la contrepartie terrestre d’un monde céleste)

– prêts à disparaître plutôt que de s’adapter.

Nous pourrions continuer l’énoncé de ces critères, mais ce qui précède suffit pour déterminer que la civilisation correspondant au Moyen et Nouvel Empire Égyptien, dans l’ère des Poissons, est l’Empire Byzantin.

2/ Comparaison des deux conceptions artistiques

Moyen et Nouvel Empire Égyptien font sans cesse référence à l’Ancien Empire dont ils sont issus. L’Empire Byzantin, quant à lui, est né de l’Empire Romain. Il est à noter que ces civilisations-mères se caractérisent l’une et l’autre par des constructions mégalomanes.

Dans les civilisations qui nous intéressent aujourd’hui, les prêtres étaient tout puissants. La peinture était au service de l’image sacrée. Elle obéissait à des règles tellement strictes qu’un artiste qui les aurait bafouées risquait d’en perdre la vie. A Byzance, à l’époque iconoclaste et en Égypte, sous le règne d’Akhenaton, l’image divine devint même objet de guerre civile.

Par la suite l’art Égyptien comme l’art Byzantin atteignirent des sommets. Les deux civilisations illustrent ce type d’art dont nous parlions : évoluant très peu et disparaissant plutôt que de s’adapter, car il repose sur un dogme religieux monolithique.

Pour conclure ce paragraphe, nous pouvons citer un texte sur l’art Égyptien, mais qui pourrait très bien s’adapter à l’art Byzantin.

« Art profondément national des centres religieux, l’art égyptien ne pouvait se concilier avec d’autres expressions artistiques… L’art égyptien a pour point de départ les intentions utilitaires, pour mission la défense de certains intérêts liés au système politique et social de la monarchie pharaonique, mais surtout de ses croyances religieuses. »

Autres civilisations

a) La Crête et la civilisation gallo-romaine

A l’époque du Moyen Empire Égyptien, une civilisation jouait un grand rôle dans le domaine de l’art : celle de la Crête. (2000 av. J.-C. – 1500 av. J.-C.).

Ses caractéristiques :

Art de palais au service de la vie privée.

Recherche d’esthétique et de jouissance.

Société peu tournée vers la religion.

2160 ans après, la civilisation romaine (150 après J.-C. – 500 après J.-C.) possède les mêmes caractéristiques.

Dans ces deux mondes, la peinture était utilisée pour la décoration de maisons et de palais privés. Les œuvres étaient au service de la sensualité au travers d’une conception très profane. Une architecture religieuse existait, mais elle n’était pas prépondérante.

b) La Grèce et l’Europe occidentale

La civilisation grecque s’est étendue sur une très longue période (du XVIIIe siècle av. J.-C. à l’invasion romaine du IIe siècle après J.-C.).

Toutes les influences, les invasions que la Grèce a subies ont contribué paradoxalement à lui donner son originalité. Le génie grec a assimilé avec facilité tout ce qui venait de l’extérieur. C’est une caractéristique des peuples jeunes à l’esprit guerrier. Nous verrons dans le détail des courants artistiques que les différentes phases de l’histoire de la Grèce correspondent presque intégralement aux phases de l’histoire de l’Europe Occidentale.

Comparaison des différentes époques de la Grèce et des différentes époques de l’Europe Occidentale (avec surtout la France qui en était le cœur).

Le Moyen Age grec

L’histoire de la Grèce antérieure au VIIIe siècle av. J.-C. est peu connue. Pour cette raison, il est difficile de rechercher des analogies avec la période de l’ère des Poissons correspondante. Nous ferons cependant quelques remarques à partir du peu d’informations que nous fournit l’histoire de l’art.

On sait que, pendant cette période obscure (du XIIIe au IXe siècle av. J.-C.) s’est épanoui un art géométrique (surtout dans la décoration de poteries). Mais cette forme d’art était-elle le signe d’une civilisation grossière ou, au contraire, l’expression d’une sagesse, d’une religion tournée vers les mathématiques (rappelons le rôle fondamental de cette science dans la philosophie grecque) ? Dans ce dernier cas, les figures géométriques symboliseraient l’ordre universel et pourraient être rapprochées des Icônes.

Fin du Moyen Age grec

Dès le VIIIe siècle av. J.-C. apparaissent les longs temples à colonnes axiales (le VIIIe siècle correspond au XIVe siècle européen). Il semble qu’il y ait une analogie entre ces grands temples grecs et les églises, les cathédrales gothiques.

La Renaissance orientalisante

En se séparant de l’art géométrique, l’art grec a tendance à devenir un art renaissant. La période orientalisante amorce une mutation. En effet, peinture et sculpture figuratives apparaissent. Malgré leur aspect figé, elles représentent une étape dans la recherche d’une forme idéale.

Notons ce que dit l’encyclopédie Larousse sur cette période « à cette puissance d’extension démographique et économique, à cette faculté d’adaptation et de renouveau correspond un sens artistique profond ; les images et les formes venues de l’Est libèrent les forces créatrices latentes, et cette poussée féconde est à l’origine d’un développement qui occupera des siècles ». Ce texte pourrait très bien s’adapter à exposer les conditions de la renaissance. Byzance avait eu autant d’influence sur l’art occidental que l’Égypte sur l’art de la Grèce orientalisante. Citons toujours l’Encyclopédie Larousse « cette diffusion de modes et de techniques orientales provoque en Grèce une véritable renaissance ». L’analogie est assez nette avec les tout début de la Renaissance italienne.

La maturité de l’archaïsme

« Le VIe siècle est une période des plus fécondes : les sanctuaires s’agrandissent et s’emplissent d’offrandes dans les cités économiquement prospères, les ateliers d’art fleuris, les monuments civils, les constructions sacrées se développent. La colonisation consolide son emprise dans le Bassin Méditerranéen, les voies du commerce se régularisent, le pouvoir passe souvent dans telle ou telle Province aux mains de Tyrans éclairés qui mènent une politique de prestige et dont le mécénat favorise en même temps que la restructuration scientifique, philosophique, la création littéraire de l’art statuaire ou l’architecture. Mais cette animation de cité à cité, de dynastie à dynastie, si elle amène une heureuse diversité et un progrès constant, ne brise jamais l’unité profonde de l’art grec, qui avance dans chaque canton et amène l’idéal ».

Ce texte officiel de l’histoire de l’art est suffisamment parlant pour établir un parallèle entre l’époque archaïque et le XVe siècle italien où des cités puissantes et rivales sont gouvernées par des despotes qui furent aussi de grands mécènes.

La sculpture décorative qui était exceptionnelle auparavant, connaît à partir du VIe siècle un développement régulier. Il s’est passé un phénomène analogue à partir de la Renaissance italienne.

L’époque préclassique

A l’époque préclassique grecque correspond le maniérisme du début du XVIe siècle.

« Peu après 490, des sculpteurs grecs s’appliquent à déceler la structure du corps humain, à tel point que l’on s’est demandé, tant sont fouillés les détails anatomiques, si ce n’était pas sur l’écorché que ces artistes avaient acquis leur science. Les figures s’animent et s’assouplissent… A la fixité des attitudes, aux schémas de l’archaïsme, succède l’expression de plus en plus sûre du modelé anatomique ». Certains artistes commencent à avoir une grande célébrité, tel Polygmote de Thasos. Il y a, à cette époque, une grande innovation dans la peinture : une recherche de perspective par la superposition de certains plans.

Bien sûr, ce commentaire pourrait aussi bien s’appliquer à l’époque de la Renaissance : le maniérisme, l’apparition des styles individuels, la grande précision anatomique, la célébrité immense de certains artistes (Léonard de Vinci, Raphaël) la continuité des recherches sur la perspective.

Le classicisme grec :

Il correspond au classicisme européen. Périclès est une sorte de Louis XIV grec et Phidias, son principal maître d’œuvre, a mis au point des doctrines artistiques : une création de canons officiels imposés. Cela ressemble tout à fait à l’emprise du Roi Soleil sur l’art à la fin du XVIIe siècle. L’originalité, la nouveauté des sujets, ainsi que la grâce, la passion et la galanterie prennent une place prépondérante.

En Grèce apparaissent de plus en plus des objets de luxe tels que les boîtes à fards et les sujets sont de plus en plus sensuels : Aphrodite, des amours et des enlèvements plus galants que brutaux.

Dans la sculpture les visages, les gestes trahissent la douleur. Bien sûr cette présentation du classicisme grec est exactement comparable à celle que l’on pourrait faire du classicisme européen.

Le XVIIe siècle voit la naissance des académies, un art de luxe à la gloire d’un roi absolu. Les thèmes de la peinture et de la sculpture sont souvent la galanterie et l’Amour.

Le second classicisme grec :

L’art grec s’adresse à cette époque à l’individu et s’efforce d’exprimer des sentiments personnels. L’œuvre doit être émouvante, dramatique. Les dieux sont humanisés. On porte beaucoup d’intérêt au portrait et on assiste à la naissance d’une peinture de paysage. Les expressions sont vivantes et l’on peut dire que c’est le siècle de la peinture en Grèce.

Au XVIIIe siècle, l’art a sensiblement les mêmes caractéristiques : sensualité, recherche esthétique, expressions vivantes ainsi que développement de la peinture de paysage (par exemple le XVIIe siècle hollandais qui est à sa manière le témoin de l’opulence, de la jouissance du monde matériel).

L’art hellénistique

Il correspond à 2160 ans de distance, à l’art du XIXe siècle. L’ordre corinthien devient très prisé à partir de la fin du IVe siècle av. J.-C. La vie privée tend à l’emporter sur les obligations civiques.

Dans l’Europe du XIXe siècle, on observe le développement d’un art bourgeois, qui est un art de décoration, d’opulence, comme à l’époque hellénistique.

Notons qu’à cette époque, la Grèce n’est plus qu’une Province de Rome et que c’est Rome qui est le centre artistique prépondérant.

Comparaison de l’art romain du IIIe au IIe siècle av. J.-C. avec l’art des États-Unis

Après l’étude de l’art grec et de ses relations avec l’art de l’Occident chrétien, nous devons découvrir la civilisation de l’ère des Poissons correspondant à la République romaine du IIIe au IIe siècle av. J.-C. (donc à 2160 ans de distance).

Cette civilisation doit avoir les caractéristiques suivantes :

Empire matérialiste puissant,

qui a de nombreuses racines en Europe (de même que Rome a de profondes racines dans la culture grecque),

très tolérant et accueillant pour les forces d’art et de culture étrangères, tant que sa puissance économique et politique n’est pas menacée.

Les États-Unis d’Amérique possèdent ces caractéristiques.

Dans les deux civilisations, nous trouvons un art essentiellement matérialiste et utilitaire. Ce sont des constructeurs un peu mégalomanes qui ont absorbé sans sélection une infinité d’influences artistiques.

RECHERCHE D’UNE LOGIQUE INTERNE

On observe, dans l’histoire de l’art, des courants artistiques de natures extrêmement diverses. Certains sont essentiellement religieux, d’autres essentiellement mondains. La peinture, la sculpture ont été tour à tour au service de la sensualité, de la religion, d’un idéal. De même, l’art témoigne d’une manière de penser collective ou est un moyen d’exprimer des émotions individuelles.

Mais ces types d’expression spirituelle, mentale, émotionnelle, matérielle s’imbriquent-ils dans une logique globale, objectivable, ou bien s’enchaînent-ils sans lien apparent ? Et, si logique il y a, quelle est cette logique ?

Nous allons tenter de répondre à ces questions.

La première étape consiste à définir quels différents types d’expression artistique existent.

Hypothèse : il y a autant de grands types d’expression artistique que de véhicules à l’intérieur de l’homme.

Pour créer une œuvre d’art, il faut une volonté de créer (issue de l’Esprit), celle-ci doit se manifester dans une idée, une composition (plan mental), puis les émotions vont mettre en mouvement (plan émotionnel) le corps qui va agir sur la matière (plan physique).

Toute œuvre d’art est le fruit de ces niveaux simultanément. Cependant on peut remarquer que chaque artiste avec sa personnalité met plus particulièrement l’accent sur un niveau que sur un autre.

Ainsi tel artiste préférera une pratique essentiellement intellectuelle, avec une composition complexe, un souci de détail, alors que tel autre préférera une expression émotionnelle moins réfléchie, plus sensible. De même chaque courant de l’histoire de l’art met l’accent plus particulièrement sur un de ces niveaux.

Pour poursuivre, il nous faut définir :

1) Les différents plans dans lesquels évoluent les véhicules de l’homme (de l’artiste).

2) la constitution globale d’un type d’art associé à chacun de ces plans,

3) un classement contribuant à la découverte d’une logique interne éventuelle.

Toujours dans le même esprit, nous tentons de vérifier une hypothèse reposant sur les postulats de la science occulte en la soumettant aux faits de l’histoire officielle de l’art.

1) Les différents plans correspondants aux différents véhicules de l’homme.

Nous nous contenterons de les énumérer :

L’esprit

Le mental

Le monde émotionnel

Le monde éthérique

le monde physique

2) Définition de la nature d’un art correspondant à chacun de ces plans.

a) Art s’adressant essentiellement au plan de l’esprit :

C’est un art profondément religieux qui à pour but d’incarner les grandes forces spirituelles, pour provoquer la fascination et l’ouverture mystique, c’est-à-dire, de relier l’homme à sa source la plus subtile. La pratique de ce type d’art passe par la dissolution des exigences de la personnalité. Celle-ci n’est qu’un canal et la réalisation dans cette pratique est le signe de la transparence totale de l’artiste. Pour cette raison, dans cette forme, la signature est totalement exclue (sauf si elle a un rôle symbolique particulier). Cet art se transmet par la lignée à travers la tradition. La forme extérieure est beaucoup moins d’importance que l’intention qui précède l’acte artistique. Le temps n’a pas de prise sur lui et on ne peut pas parler de mode dans les arts sacrés. Le respect de règles symbolisant l’ordre universel a pour conséquence de donner une certaine stabilité matérielle. Plusieurs courants artistiques répondent à cette définition :

L’art byzantin

L’art égyptien

L’art du Moyen-âge occidental

b) Définition d’un art qui s’exprime sur le plan mental :

Ce type d’art se caractérise par une certaine virtuosité, une grande complexité, une indépendance relative des artistes par rapport à leur maître et à la tradition. Ceux-ci ont le sens de la curiosité et donc le sens de l’invention. A ce moment la signature fait son apparition (signe de l’imprégnation de la personnalité).

Les grands principes artistiques sont exposés par des théories diverses, fouillées, portes ouvertes à l’analyse et à la polémique.

La compréhension intellectuelle du monde se manifeste par une représentation intellectuelle.

Quand ce plan est prépondérant, les mathématiques, la géométrie ont une grande importance (figurations, compositions). Ce courant s’est particulièrement manifesté à la Renaissance occidentale, mais aussi à la Renaissance orientalisante grecque, puis à l’époque archaïque.

ÈRES ZODIACALES ET COURANTS ARTISTIQUES

COMPARAISON CHRONOLOGIQUE DES COURANTS

ARTISTIQUES DES ÈRES ZODIACALES DU BÉLIER

ET DES POISSONS

ÈRE DU BÉLIER

ÈRE DES POISSONS

Art du Moyen Empire et du Nouvel Empire Égyptiens.

Art de l’Empire Byzantin

Art Crétois

Art de l’Empire Romain

Art Grec

Art de l’Occident chrétien

Art géométrique

Art du début du Moyen-âge occidental

Renaissance orientalisante

Première esquisse de la Renaissance italienne

Archaïsme

Renaissance italienne

Époque préclassique

Maniérisme

Classicisme grec

Classicisme Européen

Deuxième classicisme

XVIIIe siècle

Art hellénistique

Romantisme

Impressionnisme

Expressionnisme

Art Romain

Art américain U.S.

c) Définition d’un art s’exprimant sur le plan émotionnel

Un art qui s’exprime plus particulièrement sur le plan émotionnel témoigne d’un souci d’harmonie, de sensualité. La démarche mystique, la justesse des symboles, la perfection technique, l’explication du monde laissent la place à une esthétique mondaine dont le but est de plaire ou de faire appel à diverses passions.

Le plan émotionnel est très important dans le domaine artistique. Il oscille entre deux extrêmes. L’un, encore imprégné du plan mental, et dans lequel on trouve équilibre, harmonie, douceur. L’autre, proche du plan éthérique, où la passion, l’expression spontanée et violente du sentiment sont essentiels.

Ce type d’art émotionnel se répand en Grèce, du VIe siècle av. J.C. au IIe siècle av. J.C., mais aussi dans l’Europe occidentale du XVIe au XIXe sans coupures très marquées. [1]

d) Forme d’un art s’exprimant particulièrement sur le plan éthérique

C’est un art d’expression, au caractère gestuel et très énergétique. Cette énergie peut être maîtrisée ou désorganisée. Si elle est maîtrisée, la forme est le témoin d’un écoulement parfait de l’énergie. Si elle n’est pas maîtrisée, les pulsions prennent possession d’une forme totalement anarchique. Exemple : l’art moderne.

e) Expression d’un art exclusivement matériel

C’est un art qui a pour principale finalité le monde matériel. Exemples: l’art minimal, l’art publicitaire.

CORRESPONDANCES

Après ces définitions nous pourront rechercher dans l’histoire de l’art des courants artistiques correspondant à ces différents plans :

Esprit :

Moyen Empire et Nouvel Empire Égyptien, Empire Byzantin, Moyen-âge occidental (peinture mystique traditionnelle pratiquée comme une prière à la gloire de ou des Dieux).

Plan intermédiaire Esprit-mental :

Renaissance orientalisante grecque correspondant à la première Renaissance italienne. Dans ces deux formes d’art, il y a une imprégnation mentale importante, bien que l’on détecte encore une influence très spirituelle de l’époque précédente.

Plan mental :

Archaïsme grec. Renaissance italienne (XIVe siècle). A ces deux époques, les artistes se sont signalés par leur clarté mentale et ils inventent sans cesse de nouvelles formes artistiques.

Plan mental émotionnel élevé :

Pré-clacissisme grec et maniérisme. A ces deux époques, progressivement, la figure humaine perd son caractère hiératique pour exprimer les sentiments élevés. On commence à idéaliser l’Homme.

Plan émotionnel supérieur :

Première période classique grecque ainsi que XVIe siècle occidental. La peinture devient plus sensuelle en Grèce comme en Occident. On peint des femmes nues et bien en chair, sensuelles. On évoque l’amour et les sentiments élevés.

Monde émotionnel intermédiaire :

L’art devient de plus en plus paisible, posé, mais il représente en même temps un idéal de jouissance. Exemple : la peinture hollandaise du XVIIe, mais aussi le deuxième classicisme grec.

Plan émotionnel inférieur :

La période hellénistique grecque et le romantisme européen. A ces époques, l’art s’est mis au service des grandes idées philosophiques et politiques, instruments passionnels. Notons également l’apparition de ce que l’on appelle l’art pompier.

Remarque sur l’art correspondant aux plans éthérique et physique

A partir de ce moment, nous ne pouvons plus comparer l’ère du Bélier à l’ère des Poissons, car les nombreux courants artistiques de l’époque moderne n’ont pas encore été décantés par le temps. Peut-être seront-ils considérés comme insignifiants dans deux millénaires…

Plan éthérique émotionnel :

Les impressionnistes

Il y a un rejet de l’académisme et un désir d’expression des passions par une prise directe de l’énergie. Notons que la couleur est « la matière » du monde émotionnel et on voit l’importance qu’elle a eu pour les impressionnistes.

Plan éthérique:

Le postimpressionnisme, l’expressionnisme, et le cubisme, l’art abstrait.

Plan matériel :

C’est un art qui utilise les objets sans aucune liaison apparente sans aucune intention. Exemple : certaines formes d’art contemporain.

Nous voyons donc qu’à partir du Moyen-âge grec et du Moyen-âge occidental, les principes essentiels de l’art descendent de manière progressive du plan de l’Esprit au plan matériel.

Les catégories que nous avons définies sont schématiques. Il peut, en effet, y avoir des nuances. Un artiste abstrait (dont nous avons placé l’action principale sur un plan éthérique) peut être mystique et utiliser son œuvre comme une méditation (plan de l’Esprit).

De même, une personne qui réalise une Icône de manière mécanique, en pensant uniquement au bénéfice matériel qu’elle en tire, agit sur le plan émotionnel et éthérique… et nullement sur celui de l’Esprit.

RÉFLEXION SUR L’AVENIR DE L’ART

Poursuivons notre analyse. Nous ne nous aventurerons pas dans le domaine peu stable des prédictions. Mais si l’analogie entre l’Empire romain et les États-Unis se révèle exacte, on peut supposer que demain les artistes seront de plus en plus attirés par la puissance d’une civilisation naissante et que l’art sera plus quantitatif que qualitatif (conséquences de l’esprit matérialiste de la société).

En même temps, comme Rome, il y aura certainement la résurgence et la synthèse des arts qui se sont exprimés dans l’ère des Poissons. Et c’est peut-être de cette synthèse que naîtra une expression artistique nouvelle.

ÉVOLUTION ET INVOLUTION DE L’ART DANS LES ÈRES ZODIACALES

CONCLUSION

Après avoir vérifié, dans les faits historiques, nos hypothèses, nous pouvons déterminer deux lois :

1) Une loi d’analogie liée aux cycles zodiacaux : les impulsions artistiques se répètent analogiquement d’une ère zodiacale à l’autre.

2) Une loi de polarité : L’art à travers ses différentes manifestations subit un processus d’évolution et d’involution à l’intérieur d’une ère zodiacale.

Ces deux lois nous laissent pressentir qu’il existe une stratégie globale orientant les multiples manifestations de l’art au long de l’Histoire.

Il semble que lorsque des artistes croient avoir une totale indépendance et un pouvoir absolu sur leur création, ils ne soient en fait que des vecteurs prédestinés d’une volonté supérieure.

L’humanité est une entité analogiquement comparable à un être humain et l’histoire de l’art est un témoin de sa quête initiatique.

Le manque de maturité de l’humanité est certainement à l’origine de la dualité dans laquelle l’art s’est développé depuis des millénaires, oscillant alternativement de la décadence à la grandeur, mais de même qu’un être éveillé conserve son unité, quelles que soient les contingences dans lesquelles il évolue, on peut imaginer une parfaite unité des principes de l’art, malgré les inévitables influences cycliques.

La véritable décadence semble être la conséquence d’une coupure avec les racines spirituelles.

BIBLIOGRAPHIE

Jean Carigan : l’histoire liée au cosmos. Ed. de l’auteur

Histoire Larousse,

Encyclopédie Universalis.

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1 Pour le détail des courants artistiques, voir le tableau.