N°112 - L'Éveil et après ?

N°112 - Eté 2014 - L'Éveil et après ? - Anne-Gaëlle, Yolande, Denis Marie, Dayana, Gérard, Sahaj Neel, Lionel Cruzille, Isabelle Padovani, E. Salim Michael, Betty, Patrice Bailly, Marianna Caplan, Phillip Charles Lucas, Alexandre Kimpe, Janick

NUM112
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N° 112   -   Eté 2014

Thème :   L'Éveil et après ?

 

Sommaire

 

3e millénaire : Le fil d'Ariane
Anne-Gaëlle : Voir et désillusion
Yolande : La Réalisation du Silence
Denis Marie : Le Ciel absolu
Dayana : Clarification
Gérard : Tout commence
Sahaj Neel : L'”enlèvement” tantrique dans l’espace non duel
Lionel Cruzille : “L'éveil est le début du chemin”
Isabelle Padovani : Actualisation de l'“Éveil initial”
E. Salim Michael : Connaître un instant d'éveil, et le rendre permanent
Betty : La machine à rêver est cassée
Patrice Bailly : Vers la relation sans distance
Document :
Marianna Caplan : Déguisement spirituel
Étude :
Phillip Charles Lucas : Les gourous de l'Advaita moderne non traditionnel et leurs critiques par l'Advaita moderne traditionnel
Témoins d’Éveil :
Alexandre Kimpe : Expériences d'éveil
Janick : Le chemin vers la réalisation
BD :
Anna Guégan : Super Siddhis
Approches de la Méditation :
Dayana : Petit guide pour la présence
Portfolio :
Frédéric Dupont : Photographies
Sukhi Barber : Série Désillusion  

Fil d'ariane

 

Toujours plus nombreuses sont les personnes qui témoignent d’“état modifié de conscience”. Plus simplement, certains parlent d’“éveil” comme étant « l’état naturel » de l’esprit, « l’arrière-plan » vacant et silencieux. Devenus “éveillés” à leur « propre nature », beaucoup enseignent, s’entretiennent avec des chercheurs de vérité autant qu’avec des “curieux”. Et un plus grand nombre assistent à des conférences, des entretiens, des séminaires, donnés par les nouveaux éveillés en voie de popularité. L’“Éveil” est le nouvel eldorado de l’intériorité qui change, en un instant, le regard sur la vie, la souffrance, le monde,… Cette libération intérieure par effacement (momentané) de l’ego est incontestablement une réalité dans le champ des possibles de la conscience… mais qu’en est-il après l’Éveil ?

L’éveil des illusions !

Alexandre Kimpe témoigne d’“étapes” dans son processus d’éveil, car « après l’éveil […] le moi tente de se reconstruire ». C’est dans cette perspective que Edouard Salim Michael va jusqu’à faire remarquer que « Connaître un moment d’éveil, c’est une chose, mais le rendre permanent, c’est le travail d’une vie, et encore ».

Il ne s’agit pas ici de minimiser cette révélation première, qui transforme le regard intérieur – comme le dit Janick par son témoignage – et induit la “possibilité” d’un réel équilibre du corps et de l’esprit, mais au contraire d’ouvrir honnêtement une enquête sur l’authenticité et la véracité de l’éveil… et après !… Car, nous dit Lionel Cruzille « Il règne dans le milieu spirituel beaucoup de flous concernant la question de l’éveil et aussi beaucoup de rêves, d’extrapolation et de purs fantasmes ».

L’article de fond de Phillip Charles Lucas (dont nous publions ici une première partie) vise à soulever, en cinq points, les illusions concernant l’éveil et ceux qui s’arrogent l’autorité d’enseigner sur le mode de la non-dualité.

D’ailleurs, souligne Anne-Gaëlle, il ne s’agit pas « de laisser penser que celui qui partage n’est pas de même nature que celui qui accueille ce partage » ; l’éveil à notre vraie nature passe par « l’abandon de sa prétention à savoir, à connaître, à croire »… et non pas l’inverse.

Marianna Caplan nous livre sa rencontre avec un ami imbu de concept de non-dualité, plongé dans l’ignorance de ses propres mécanismes psychologiques. Edouard Salim Michael mentionne une telle situation dépressive, lorsque l’expérience de l’éveil est devenue « seulement la mémoire de cet état qu’elle a touché à ce moment donné, mais qui n’est plus vécu ».

L’Éveil ne peut être un acquis, c’est l’usure de l’ego et l’érosion de ses souffrances qui conduisent à ne plus confondre l’Être et l’avoir, l’Être et les états d’âme évanescents.
Éveil et/ou Réalisation

    Pour Phillip Ch. Lucas, le reniement de la « sadhana ou effort spirituel » est la première critique des partisans de l’advaïta moderne traditionnel à l’encontre des “enseignants” actuels de la non-dualité. La problématique de l’effort ou du non-effort, qui mérite vivement d’être posée, ne peut se résoudre que dans l’engagement intérieur – toute argumentation étant vaine dans le domaine de l’Esprit.
    Toutefois, comme certains le préconisent, telle Sahaj Neel, il convient de différencier « “éveil” et “libération” ». Même s’il est question de bien comprendre, avec Gérard, que « ce n’est pas l’éveil qui s’approfondit, c’est la conscience que l’on en a ».
    Distinguer « ce qu’on nomme éveil et la Réalisation » est pour Lionel Cruzille un premier point à considérer afin de ne pas s’illusionner plus avant sur un chemin qui ne peut aucunement aboutir à la réalisation d’un ego fortifié.
    Gérard précise « que la fréquentation de cette réalisation se fait quotidiennement et que, généralement, du point de vue de l’organisme, elle s’approfondit ». Car, pour Anne-Gaëlle, la réalisation est « une véritable dissolution de soi et non un échange ou une négociation avec l’existence ».
    Pour Betty, l’Éveil étant « la fin du rêve d’individualité », il « est définitif » et « c’est ce qui le différentie d’une expérience dans le monde du rêve ». Yolande associe l’Éveil à « la mort psychologique » qui est « la non-identification spontanée, sans effort, à cette idée d’être une personne déconnectée qui donne vie à toutes les croyances ».
    Si l’Éveil est certes définitif, radical et sans effort, le « rêve d’individualité » et « l’identification à la personne » sont tenaces. D’ailleurs, entre l’Éveil et l’état de « rêve » ou d’illusion, « il peut y avoir, nous dit Dayana, une sorte de balancement. Il y a ancrage de la reconnaissance d’être conscience, mais la mémoire, la pensée sont toujours fonctionnelles et il arrive que la distraction revienne, c’est-à-dire l’accroche à la pensée ». Dayana indique cependant un point fondamental : « c’est que l’inconfort engendré par cette distraction ramène l’attention à elle-même ».
    « Le plus important, témoigne Patrice Bailly, étant toujours d’être ici et maintenant, dans l’absence de l’ego, sans quoi, rien n’est possible. Il faut donc rester vigilant. Tout se résume au silence du “moi” pour entendre le Soi. »

L’Éveil : un commencement ?

    Dans l’esprit d’une « sadhana » nécessaire et indispensable, mentionnée par la démarche critique de Phillip Ch. Lucas, Lionel Cruzille pose clairement sa vision pragmatique : « La Voie commence après l’éveil. Sous cet angle, nous voyons que l’éveil est tout à fait différent de la Réalisation qui est l’intégration de ce même éveil ».
    Cette conception repose évidemment sur la différenciation entre Éveil et Réalisation, et donc sur l’idée qu’il existe des stades de l’Éveil ; il ne s’agit alors pas de prendre « le premier stade d’éveil », que les bouddhistes nomment « l’entrée dans le courant » pour l’ultime réalisation.
    Après ce que Isabelle Padovani appelle « “Éveil initial” le premier rappel de la Conscience à elle-même […] dévoilant au rêveur son identification habituelle aux objets sensoriels, émotionnels et mentaux […] Commence le temps de l’actualisation de cet Éveil initial dans la vie quotidienne, celui-ci n’étant que le commencement, le début d’une exploration attentive de chaque instant, en tant que conscience éveillée au cœur du conditionnement ».
    Gérard nous dit d’ailleurs « j’assiste, autant chez moi que chez d’autres, à cet approfondissement. Les constructions mentales continuent à s’effondrer et, de façon plus ou moins rapide… »
    L’inscription de l’Éveil dans la temporalité n’est pas réellement judicieuse. Sahaj Neel fait remarquer qu’« après l’éveil serait justement un état d’être qui ne conçoit plus cet avant et cet après d’une façon classique ». Ce n’est donc pas seulement des concepts nouveaux qu’il suffirait d’élaborer, c’est une toute nouvelle manière d’être conscient, sans l’interaction de la pensée conditionnée qui ramène automatiquement nos vécus à des moments qui passent, des instants de présence, des états intérieurs apparaissant et disparaissant.
    Dayana soulève ainsi le non sens qu’il y a à réduire l’Éveil à un vécu temporel : « Chaque être, chaque regard ne vit que dans la spontanéité de l’instant. Autrement dit il n’y a pas un avant “une réalisation” où l’on vivrait dans la durée et un “après” où cela ne se ferait plus. Cela n’a aucun sens. »
    C’est dans ce même esprit que Denis Marie nous dit que : « poser le renoncement comme une condition à notre libération, c’est donner beaucoup d’importance à ce qui n’a pas de réalité ».
    L’ouverture est abrupte, c’est une magnifique intuition terrassant nos images du temps et de l’instant, de l’avant et de l’après… Elle marque l’éternel Commencement qui ne saurait être séparé de la fin du moi et donc de la Réalisation.
    La question de l’Après l’Éveil ne soulève pas de vains paradoxes, elle invite à une mutation de la conscience par une libération de son fonctionnement dualiste. C’est ce que présentent, selon leur propre réflexion et inspiration, les auteurs de ce numéro d’été.

 

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