(Revue CoEvolution. No 10. Automne 1982)
Si les Grecs de l’Antiquité recouraient volontiers à la thalassothérapie, les Occidentaux modernes durent attendre 1750 pour qu’un médecin anglais, le Dr Richard Russel préconise l’eau de mer comme traitement de diverses affections. En France, c’est vers le milieu du XIXe siècle que l’attention se tourna vers une vieille nourrice qui obtenait des résultats étonnants : elle faisait prendre aux enfants rachitiques qu’elle gardait des bains sur la plage de Berck, où fut créé le premier hôpital hélio-marin. Mais il fallut attendre 1899 pour que soit fondé le premier véritable centre d’hydrothérapie marine, à Roscoff par le Dr Louis Bagot. Le développement de la chimiothérapie, ou industrie pharmaceutique, survenu au cours des deux guerres mondiales, fit oublier ce moyen naturel. Et le centre de Roscoff ne fut réouvert qu’en 1953 par le Dr René Bagot, fils de son fondateur. Aujourd’hui, les cures de thalassothérapie sont remboursées par la Sécurité sociale et elles offrent en même temps l’avantage du dépaysement de vacances. Elles demeurent toutefois assez onéreuses de par leurs structures d’accueil qui peuvent s’assimiler par certains aspects à une industrie hôtelière accompagnée de régimes diététiques le plus souvent à base de poisson. Gastronomie et tourisme cherchent à se concilier la santé !
Il y a quelques quatre milliards d’années, la vie naissait dans les eaux primordiales de notre Mère la Terre. L’eau de mer contient tous les éléments chimiques de notre planète et elle est particulièrement riche en oligo-éléments, ces sels minéraux présents à l’état de traces (c’est pourquoi, en anglais, on les appelle les « trace-éléments », tandis que les Français se sont inspirés du grec « oligo » = « peu abondant »).
Cette teneur en oligo-éléments varie selon les saisons, les lieux et la profondeur. Parmi eux, viennent en tête de liste le Sodium (ou sel), le Magnésium, le Calcium et le Potassium.
L’homme, échangeur d’ions
En 1912, un Français, Gabriel Bertrand, découvre que les sels minéraux présents dans les végétaux se retrouvent également dans le corps humain, à doses infinitésimales. Ce sont les oligoéléments. En 1939, un jeune médecin, le docteur Ménétrier, soutient une thèse qui relance l’idée de terrain, concept-clé de la médecine hippocratique. Sa thèse, intitulée : Considérations sur les réceptivités aux maladies, lui vaut une médaille d’or. Il y jette les fondements de ce qui deviendra la théorie fondamentale de la « médecine fonctionnelle ». Pour le Dr Ménétrier, le comportement psychophysique et intellectuel d’un individu dépend en grande partie de ses échanges ioniques avec son environnement. Ainsi, la respiration si importante dans le yoga, Tai Chi, etc… fait de l’homme avec ses 500 m2 de surface pulmonaire, un véritable échangeur d’ions. Constatant que la médecine classique ne connaît que les maladies avancées, ou bien ne s’intéresse qu’aux malades souffrant d’une certaine déchéance organique, tout en abandonnant en réalité tous les malades fonctionnels, le Dr Ménétrier cherche à déterminer quels oligoéléments permettent de corriger ces états dits « fonctionnels ». Il détermine cinq diathèses, ou tendances à certaines maladies. Puis il démontre comment un état de disfonctionnement générique (ou ensemble de « petits maux ») peut s’améliorer grâce à la prescription d’un oligo-élément ou d’une association de plusieurs.
L’océan primordial intériorisé
Un autre chercheur français, le biologiste René Quinton, s’inspira de la théorie du « milieu intérieur » selon laquelle Claude Bernard démontra qu’au fur et à mesure de leur évolution, les êtres vivants ont « intériorisé le milieu marin qui fut leur bain nourricier en sève, lymphe, sang, etc. ». René Quinton eut l’idée de remplacer ce bain nourricier intériorisé par de l’eau de mer. Il démontra la validité de cette idée dans les laboratoires du Collège de France en réanimant un chien saigné à blanc par des injections d’eau de mer, en quantité égale à celle du sang prélevé. Cette expérience eut un très grand retentissement, prouvant ce qu’il avait avancé dans son livre, L’eau de mer, milieu organique (paru en 1904) : « Dans notre organisme, le milieu intérieur, et lui seul, a le même faciès marin que l’eau de mer. »
L’eau de mer (non polluée !) peut donc être considérée comme le liquide spécifique de la cellule humaine, ainsi que de toute cellule vivante du monde animal. Et c’est pourquoi René Quinton eut aussi l’idée d’utiliser l’eau de mer en traitement prénatal des tares héréditaires (une forme de bio-eugénique qui peut accompagner synergétiquement le traitement d’eugénisme prénatal homéopathique, ou « bioeugénique », — mot que j’ai forgé il y a quelques années lorsque j’aidais dans ses travaux Madame Jenny Jordan-Desgain grâce à qui cette méthode mise au point par Léon Vannier a pu se propager). L’eau de mer permet aussi de soulager la déshydratation, si dangereuse chez les nourrissons. Ainsi, une diarrhée peut entraîner chez les tout-petits une déshydratation très rapide et intense qui, non traitée, est mortelle. L’état d’athrepsie est cet état de déchéance profonde de l’organisme qui marque le début de déshydratation constituant la phase ultime de la dénutrition chez les enfants de moins de quatre mois. La graisse cutanée disparaît, la peau du visage se ride « à la Voltaire », la température atteint 35 °C, la respiration devient très lente et les muscles rigides. Si l’O.M.S. a mis aujourd’hui au point une formule simple et peu onéreuse de sels de réhydratation fort utiles dans les pays en développement, le Plasma de Quinton, ou eau de mer non polluée, permet lui aussi une rapide réhydratation complétant les autres thérapeutiques. A ses qualités de sérum salé, il ajoute son précieux apport en oligo-éléments.
La mer guérisseuse
Voici l’un des tout premiers cas observés (cf. Le Plasma de Quinton, Paris et Bordeaux, laboratoires de Quinton) : « Pierre, né le 27 février 1923, en perte de poids, a été adressé au Dispensaire marin de Lyon. Le 9 mars 1923, il pèse 2 kg, soit à un mois et dix jours : squelettique, athrepsique pur. Sans transition, l’enfant est mis au régime : 12 repas par 24 heures, 10 grammes de plasma de Quinton par jour. On arrive à un régime du 1/3, puis du 1/4 du poids en 10 repas parfaitement tolérés. A deux mois et vingt-cinq jours, l’enfant a doublé de poids. Il reçoit à ce moment 100 grammes de plasma par jour, pour lui permettre de tolérer un régime plus large malgré les chaleurs de septembre.
« Le traitement est suspendu à huit mois et deux jours ; l’enfant pèse alors 6,640 kg. Développement excellent à tous points de vue. Au total, ce nourrisson athrepsique s’est accru de 3,230 kg en trois mois, alors que, pendant le même laps de temps un enfant normal du même sexe et du même âge, se serait accru de 2,120 kg. »
Personnellement, j’ai vu deux malades dépressifs, qui se refusaient à prendre toute nourriture et dépérissaient à vue d’œil, reprendre un tonus physique et psychique (en même temps que leur poids normal !) en quelques semaines, n’ayant pour tout traitement que deux ampoules de plasma de Quinton de 50 cm3 chacune à ingérer matin et soir…
Le plasma de Quinton, ou eau de mer vendue en ampoules, est une véritable thalassothérapie à domicile pour ceux qui ne peuvent s’offrir une évasion curative dans un centre de thalassothérapie, même avec le support de la Sécurité sociale ! |
Certes, le plasma de Quinton n’est pas une panacée universelle. Mais on peut le considérer comme un soutien efficace, simple, peu onéreux, dans tous les cas où notre organisme est affaibli : en période d’intenses efforts physiques ou intellectuels, ou même émotionnels, lorsque nous nous sentons envahis par une fatigue sournoise qui nous met les nerfs à fleur de peau, lorsque les miasmes sournois de la « grippe » rôdent autour de nous pendant l’hiver, dans tous les cas où nous souffrons d’un état infectieux. L’eau de mer renforce nos défenses naturelles : elle rééquilibre notre milieu. Rééquilibrant notre milieu intérieur, elle contribue à rééquilibrer notre relation avec notre environnement. L’eau est, en poids, le constituant le plus abondant de notre organisme : 80 % du corps chez le nouveau-né et 72 % chez l’adulte.
L’eau de mer contient d’importantes traces de Magnésium et l’on sait que le chlorure de Magnésium renforce à plus de 300 % la phagocytose, ou processus par lequel les phagocytes (globules blancs) digèrent des agents infectieux, les « microbes », après les avoir encerclés. Le chlorure de Magnésium est également un régulateur du métabolisme du calcium et du potassium dont il facilite la fixation dans l’organisme.
De tous temps, certains gestes thérapeutiques simples ont utilisé avec succès l’eau de mer, c’est-à-dire ses propriétés antiseptiques et cicatrisantes :
— en gargarismes, pour les maux de gorges et inflammations gingivales ;
— en compresses imbibées d’eau salée pour abcès, panaris, furoncles, etc. ;
— en emplâtres (deux cuillérées à café de sel marin gris dissous dans le minimum d’eau, mélangé à de l’argile en poudre) sur une foulure (à garder 24 heures) ;
— en bains (1 kg de sel marin gris pour le bain d’un enfant, 2 kg pour celui d’un adulte) pour combattre la fatigue physique et nerveuse. Les bains hypersalés (10 g de sel marin par litre d’eau) sont un bon traitement adjuvant contre la cellulite ;
— en pulvérisations nasales dans les cas de sinusites, rhinites, etc…
Hélas ! La pollution d’aujourd’hui diminue fortement la vitalité, l’énergie, des eaux marines. Selon Alain Bombard et tous ceux qui se préoccupent de la pollution marine, la situation devient de plus en plus alarmante. La pellicule d’hydrocarbures qui recouvre maintenant les eaux marines de notre planète, non seulement bloque les échanges ioniques qui devraient normalement se produire au niveau de l’épiphase marine (surface de séparation entre la mer et l’atmosphère), mais elle bloque aussi la production d’oxygène fourni normalement en abondance par les algues. Ainsi, une fois de plus, nous sommes confrontés à l’évidence : la santé de notre planète et notre santé individuelle sont indissociables !