Douglas E. Harding
Recherche-toi toi-même

Êtes-vous capable de voir, par vous-même, sans l’ombre d’un doute ou d’une difficulté que vous n’êtes pas votre corps, que vous n’êtes pas un « objet » du tout ? Autrement dit, les citations de Ramana Maharshi données ci-dessus vous sont-elles évidentes, en cet instant même, d’après votre propre expérience à vous ? Dans ce cas, point n’est besoin pour vous de lire le reste de cet exposé. Si, d’autre part, vous ne saisissez pas de quoi il parle et n’en éprouvez aucun désir, vous perdriez votre temps à lire plus avant. Mais si, au contraire, vous ne comprenez pas, mais éprouvez le désir de faire n’importe quoi qui vous permette de comprendre, alors il vous est proposé de consacrer les instants qui suivent à faire quelques simples expériences.

(Revue Être. No 3. 3e année. 1975)

Regarder vers l’extérieur est chose facile; regarder en soi est difficile ! Quelle absurdité ! C’est le contraire qui est vrai.

L’illusion qui consiste à dire « je suis le corps » est la cause de tous nos maux. Cette illusion doit disparaître. C’est là, la réalisation. La réalisation ne consiste pas à acquérir quoi que ce soit de neuf, pas plus que ce n’est une nouvelle faculté. Cela consiste à supprimer tout ce qui est camouflage.

La vérité suprême est si simple… Mais les gens ont soif de quelque chose de sophistiqué, d’attrayant et d’énigmatique.

Découvrez si vous êtes quelque chose de physique. L’Être éternel est l’état d’où vous êtes absent…

Vous ne vous manifestez plus mais vous n’êtes pas perdu.

Même dans la plus complète obscurité quand un homme ne voit pas sa propre main, il répond tout de même « je suis ici ».

L’homme spirituel n’est pas son corps. Il est sans limites et sans formes.

Toute forme, tout aspect est cause de troubles. Le Soi est chose évidente. Qu’attendez-vous ?

Extrait de causeries avec Sri Ramana Maharshi.

Êtes-vous capable de voir, par vous-même, sans l’ombre d’un doute ou d’une difficulté que vous n’êtes pas votre corps, que vous n’êtes pas un « objet » du tout ? Autrement dit, les citations de Ramana Maharshi données ci-dessus vous sont-elles évidentes, en cet instant même, d’après votre propre expérience à vous ? Dans ce cas, point n’est besoin pour vous de lire le reste de cet exposé.

Si, d’autre part, vous ne saisissez pas de quoi il parle et n’en éprouvez aucun désir, vous perdriez votre temps à lire plus avant.

Mais si, au contraire, vous ne comprenez pas, mais éprouvez le désir de faire n’importe quoi qui vous permette de comprendre, alors il vous est proposé de consacrer les instants qui suivent à faire quelques simples expériences. Il est plus qu’inutile, il serait même nuisible de vous contenter de lire. Ces expériences doivent être faites. Les questions suivantes doivent être résolues d’après vos seules consta­tations actuelles sur ce qui vous est évident en ce moment même, sans qu’interviennent votre imagination, vos souvenirs ou tout on-dit.

1 – Lève-toi, regarde devant toi, reste immobile (cela peut t’aider d’avoir un ami qui te lise les questions à haute voix, mais tu n’as pas besoin d’y répondre de même). Combien as-tu de pieds pour autant qu’il te soit possible d’en juger ?

Évidemment, tu éprouves des sensations, mais à quoi ressem­blent-elles vraiment ? Vont-elles jusqu’à constituer des pieds ? Telles que tu les ressens, ne pourraient-elles pas représenter des griffes, des sabots ou des nageoires ? Combien de jambes trouves-tu, combien de troncs, de têtes ? Où et comment se délimite la surface de ton corps ? Es-tu grand ou petit ? Quel est ton âge ? Ton sexe ? Es-tu vraiment quelque chose ou simplement l’espace dans lequel se déroulent différentes choses ?

Incapable de dire « je suis ceci ou cela »; n’es-tu pas capable néanmoins de dire je suis?

2 – Réponds aux mêmes questions en tenant les yeux fermés.

3 – Regarde ta main. Es-tu en elle ou est-elle en toi ? As-tu quelque indication actuelle de comment on s’y sent ?

4 – Continue à regarder ta main. Peux-tu voir sa couleur si tu es toi-même coloré ? Comment pourrais-tu recevoir sa forme si tu avais une forme ?

Comment pourrais-tu enregistrer ses mouvements si tu n’étais pas immobile ? Comment pourrais-tu la contenir si tu n’étais vide ?

Comment pourrais-tu saisir toute sa complexité si tu n’étais pas absolument uni et simple ? Comment pourrais-tu sentir en elle la souffrance (comme quand tu appuies l’ongle de ton pouce dans le bout de ton doigt) s’il n’y avait en toi un arrière-plan de non-souffrance ? Comment entendre le bruit qu’elle fait (si tu fais claquer tes doigts) s’il ne résonnait pas sur le fond de ton silence ?

5 – De combien d’yeux regardes-tu ? Vois ce qu’il se passe si tu mets lentement tes lunettes. Dessine de tes mains le contour de ton « œil« . Que se trouve-t-il derrière lui ?

6 – Montre du doigt tes pieds, tes jambes, ton ventre, ta poitrine, puis ce qui se trouve plus haut. Continue à regarder ce que tu montres du doigt.

7 – Vois si tu peux te mettre face à face avec un autre ? N’es-tu pas en face d’une non-face ?

8 – Observe où tu tiens ton visage ? Est-ce que tu le trouves toi-même ou bien est-il là-bas dans ton miroir, où ton ami peut recevoir son image (et par conséquent t’en parler) et où il tient son appareil photographique pouvant ainsi en faire une image ?

9 – En caressant, en cognant, en pinçant, cherche à construire un objet coloré, opaque, complexe, limité. Cherche à y pénétrer et à décrire son contenu. N’es-tu pas encore immense et n’es-tu pas tout un espace ?

10 – Tu es couché par terre et regardes le ciel, ta corporalité matérielle n’est-elle pas vidée tout comme la notion de corps masculin, de figure et d’œil ont été vidés ? Ce par quoi tu regardes ne doit-il pas être toujours vide pour que le vu soit vu ?

11 – Que ton ami vérifie ton vide à 0 pieds (mètres) en tournant vers toi l’ouverture de son appareil (un trou dans une feuille de papier fera l’affaire). Ne se tient-il pas tout d’abord en un endroit depuis lequel (mettons 2 mètres) il te voit comme étant un homme, puis placé à un mètre de toi, il voit la moitié d’un homme, puis une main, une tête, une étendue de peau, et finalement une tache brouillée ? Supposons qu’il dispose du microscope voulu, etc. La tache ne deviendrait-elle pas un ensemble de cellules, puis des particules en ordre de diminution pour finir comme un espace apparemment vide (sans distinction, transparent, incolore) ? N’est-il pas vrai que plus il se rapproche de toi, plus tu es vu comme n’étant rien ? Es-tu maintenant capable de te voir, quand tu le veux et sans l’ombre d’un doute, comme n’étant pas ton corps, n’étant pas un objet, mais Être pur et simple ? Dans ce cas les citations suivantes du Maharshi pourront t’aider.

Disciple : Après toutes vos pénitences, vos austérités, couvrant tant d’années, où en êtes-vous ? Qu’avez-vous obtenu ?

Maharshi : J’ai obtenu ce qui est à obtenir. Je vois ce qui doit être vu.

Disciple : Tous ne peuvent-ils voir la même chose ?

Maharshi : Je ne vois que ce que tous voient. L’expérience est la même pour celui qui réalise une fois le Soi et pour le jnâni qui y est établi définitivement.

La réalisation du Soi ne comporte aucune notion de progrès.

La première expérience par laquelle on sent (je ne suis pas le corps, mais je suis Être pur) est passagère, mais par une attention soutenue, elle peut devenir permanente.

Disciple : La connaissance peut-elle être perdue ?

Maharshi : Il faut un certain temps pour que l’expérience de la connaissance faite une fois se stabilise. L’attention vigilante et constante permettra de ne plus retomber dans les vacillations. Le samâdhi aux yeux fermés est certes une bonne chose, mais il faut aller plus loin et se rendre compte que non-action et action ne sont pas hostiles l’une à l’autre. La peur de perdre le samâdhi dans l’action est un symptôme d’ignorance.

Traduit de l’anglais par Annette Duché