Wei Wu Wei
Lâchez-prise

Certainement. Mais si « il » ou « elle » est las des consé­quences pitoyables d’un tel conditionnement, ne serait-ce pas la voie directe ? Même la seule voie pour sortir de la situation déplorable, malheureuse qui en résulte, est de faire face au fait, lequel est simple et évident quand il est aperçu. Ce fait est qu’il n’a jamais été, n’est pas, et ne sera jamais, une telle « factualité »…

(Revue Être. No 3. 1ère année. 1973)

Si je n’essaye plus d’être ce que je ne suis-pas

je serai Ce-Que-Je-Suis :

aucune action n’est à « faire ».

NB. : Quand je cesse de me considérer comme un `je’ — Je SUIS.

Si j‘entendais ce que je dis…

Ne sommes-nous pas enclins à oublier

que le nom de Dieu est « je suis ? » [Exode III,14]

N’en faisons-nous pas, chaque jour de notre vie,

en le disant l’application à notre « soi » ?

Quiconque l’a-t-il jamais trouvé blasphématoire ?

Peut-être ne l’entendons-nous pas ainsi ?

« Ne l’entendant pas ainsi » ne serait-ce pas

la raison pour laquelle nous nous croyons en servitude ?

IMPLOSION

S’il pouvait y avoir un concept tel que « celui d’une exagération démesurée » ne serait-ce pas la locution courante disant que X se prend trop au sérieux ?

Trop au sérieux ? Ne serait-ce pas « au sérieux » déjà la limite ? N’est-ce pas suffisamment ridicule de se « prendre » du tout, même avec hilarité ?

Il a été conditionné depuis l’enfance à le faire ? Sans doute, donc pas blâmable ? Certainement. Mais si « il » ou « elle » est las des consé­quences pitoyables d’un tel conditionnement, ne serait-ce pas la voie directe ? Même la seule voie pour sortir de la situation déplorable, malheureuse qui en résulte, est de faire face au fait, lequel est simple et évident quand il est aperçu. Ce fait est qu’il n’a jamais été, n’est pas, et ne sera jamais, une telle « factualité » (en opposition à une actualité apparente) comme un soi-même à prendre du tout au sérieux ! Un tel concept, s’il est pris comiquement — ce qui en fait ne doit pas être difficile — se dissoudra et se perdra dans la gaieté d’un rire.

D’après cela, la notion d’aucun phénomène qui prend au sérieux son soi entièrement conceptuel ne pourrait guère faillir à évoquer quel­que chose entre un sourire et un éclat sain et naturel de rire.

Un rire est spontané, immédiat, une expression de la Subjectivité qui se manifeste subitement par implosion dans le monde solennel et absurde de l’extension apparente de l’espace-temps.