Dagpo Rimpoché
Le Karma selon le bouddhisme Tibétain

En général tout ce qui est « action » peut être appelé « karma ». Mais quand on parle « d’accumulation du karma », on parle de karma bon ou de mauvais karma. On peut présenter trois divisions ou trois sortes de karma :
— Karma physique, accumulé au moyen du corps.
— Karma oral, accumulé au moyen de la parole.
— Karma mental, accumulé par l’esprit.

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Le titre est de 3e Millénaire

(Revue Panharmonie. No 187. Juillet 1981)

Compte rendu de la rencontre du 7.1.1981

Il sera aujourd’hui question du Karma. Il y a plusieurs conceptions du karma, la conception hindouiste et la conception bouddhiste, nous ne parlerons que de cette dernière.

Le Bouddha a toujours donné ses enseignements en fonction des capacités, des potentialités et des qualités de ses disciples et comme celles-ci varient, quatre Écoles philosophiques bouddhistes sont apparues, avec des conceptions légèrement différentes. Nous nous en tiendrons à l’École MADHYAMIKA PRASANGUKA.

En général tout ce qui est « action » peut être appelé « karma ». Mais quand on parle « d’accumulation du karma », on parle de karma bon ou de mauvais karma. On peut présenter trois divisions ou trois sortes de karma :

— Karma physique, accumulé au moyen du corps.

— Karma oral, accumulé au moyen de la parole.

— Karma mental, accumulé par l’esprit.

Une autre façon d’étudier le karma, c’est de prendre pour base d’observation la nature même du karma. Là encore on trouve trois divisions :

— Le Karma formel.

— Un Karma qui se traduit sous la forme d’empreintes karmiques.

— Un Karma mental.

Une autre façon encore de faire cette étude présente, deux variantes :

— Le Karma vertueux ou plus simplement Karma favorable.

— Le Karma non vertueux ou plus simplement Karma défavorable.

Il y a donc de très nombreuses divisions possibles. Mais si on veut tout résumer en ce qui concerne le karma, on peut le faire en dix points à étudier, qui sont :

— Trois Karma du Corps.

— Quatre Karma de la Parole.

— Trois Karma de l’Esprit.

Chacun de ces points sera vertueux ou non vertueux, ce qui nous fait finalement arriver à vingt points.

Commençons par les dix karmas non vertueux, défavorables. Il y a trois karma non vertueux : 1° Prendre la vie – 2° Voler c’est-à-dire prendre ce qui n’a pas été donné – 3° Pratiquer l’adultère (inconduite sexuelle).

Il y a quatre karmas non vertueux effectués par la Parole : 1° Le Mensonge – 2° Les Paroles inutiles – 3° La Calomnie – 4° Paroles désagréables et dures.

Et enfin, il y a trois karmas non vertueux, effectués par l’Esprit : 1° La Convoitise – 2° La Malveillance – 3° Les Vues Fausses.

Une manière d’étudier ces deux sortes de karma consiste à prendre un exemple, lequel, lorsqu’il a été bien compris, sera également valable pour les neuf autres. Prenons comme exemple du premier karma non vertueux, du corps, celui de prendre la vie, c’est-à-dire, tuer.

Il faut toujours considérer quatre aspects du karma non vertueux :

1° La Base.

2° La Pensée (Motivation).

3° L’Action.

4° L’Accomplissement.

La Base : En l’occurrence est un être animé. Il faut qu’il possède la vie, c’est lui que l’on va vouloir tuer.

La Pensée : Se présente sous trois formes : Motivation (intention), Reconnaissance, la ou les Passions.

L’Action : Le fait de tuer et la façon dont on tue : poison, arme, etc.

L’Accomplissement : Tout se termine dès que l’être est bien mort, c’est-à-dire par la mort de l’objet.

Lorsque ces quatre aspects ont été réunis, il est dit que le karma est complètement accompli et que c’est une Voie karmique complète, entière. Si, par contre, un de ces quatre aspects manque, l’action de tuer a été accomplie, mais la Voie karmique n’est pas complète, pas entière.

Le premier de ces aspects la Base est facile à comprendre, il faut simplement qu’il y ait un être que, par la suite, on veuille tuer. Il faut un être qui soit doté de vie, que ce soit un être différent de nous. Le suicide n’est pas considéré comme le fait de prendre la vie, on tue bien, mais il n’y a pas le karma du meurtre. Celui-ci alors n’est pas accompli.

Le deuxième de ces aspects, la Pensée, se présente sous trois formes : Reconnaissance – Motivation – Passion(s).

1° Reconnaissance : On voit un être bien distinct. Il existe en tant qu’être, il est vivant. On va bien reconnaître l’être que l’on va tuer, afin de ne pas se tromper en tuant un autre, Michel au lieu de Pierre. Si, par erreur on a tué Michel, on a bien tué, mais la Voie karmique n’est pas complètement accomplie, puisqu’on s’est trompé de personne. Mais, par contre en cas de guerre, où la motivation est de tuer le plus de gens possible, ce genre d’erreur ne peut pas se produire. A chaque fois que l’on tue une personne (inconnue) la Voie karmique est quand même totalement accomplie puisque la motivation qui anime celui qui tue en temps de guerre, est de tuer le plus d’êtres possible.

2° Motivation : Elle est facile à comprendre, c’est simplement le désir d’ôter la vie, le désir de tuer.

3° Passion(s) : Il s’agit de passions qui peuvent conduire au meurtre, qui sont susceptibles d’entraîner le meurtre. Il peut y avoir trois passions de l’Esprit : l’Ignorance – la Haine – l’Attachement.

a) L’ignorance est présente dans n’importe quel meurtre.

b) Le fait de tuer par haine ou aversion est facile à comprendre.

c) On tue par attachement quand on veut se procurer de la chair animale, quand on tue des animaux pour les manger ou pour obtenir leur peau, quand on veut prendre des perles des huîtres, par exemple. Il y a encore bien d’autres exemples.

Le troisième de ces aspects est l’Action. Elle peut être accomplie par n’importe quel moyen : arme, poison ou toute autre méthode. Enfin, lorsque l’être qu’on désirait tuer est bien mort, l’Action est accomplie.

Le quatrième de ces aspects est l’Accomplissement. Au moment même où meurt la victime, la personne qui a tué, accumule le karma de tuer. Lorsque cela se manifeste dans la conscience, apparaît un certain « Facteur Mental » qui constitue le karma de tuer. Au premier moment, ce karma est un karma mental, mais il ne peut pas rester longtemps à ce niveau, car le facteur mental disparaît rapidement de la conscience et se transforme alors en « Empreinte Karmique » qui est déposée sur la conscience de la personne. Cette empreinte karmique fait partie de la catégorie qu’on appelle en général « Formation Dissociées de l’Esprit ». Il y a donc des empreintes karmiques qui sont déposées sur l’esprit.

Question : Quelle est la différence entre conscience et esprit ?

Réponse : Dans ce cas c’est la même chose. Ce serait mieux et plus clair d’utiliser toujours le mot conscience.

Lorsqu’on dit qu’une empreinte karmique est déposée sur la conscience, il ne s’agit pas de déposer un objet comme on le ferait sur cette table. Cela signifie que la conscience se trouve dotée d’une certaine potentialité et la personne aura, par la suite, à subir les effets de l’action faite précédemment. En ce qui concerne le meurtre, cela veut dire que lorsque l’empreinte karmique arrive à un certain stade, la personne doit en subir les conséquences. Ce résultat sera évidemment désagréable.

Mais pour que ce résultat se produise, certaines causes et conditions doivent se retrouver, sinon il se peut que l’empreinte karmique demeure extrêmement longtemps sur la conscience (en l’état de sommeil, en l’état latent). Par contre dès que les causes sont réunies, le résultat apparaîtra aussitôt. Tant que ces conditions permettant au résultat de se produire, ne sont pas effectives, le résultat karmique ne se manifestera pas, il est différé.

Lorsqu’il s’agit d’actes karmiques non vertueux, il faut s’efforcer de les éliminer, de les purifier. Cela ne peut évidemment se faire que lorsque les conditions n’ont pas été réunies. Mais dès que ces conditions sont toutes réunies, il n’y a plus rien à faire pour éliminer le karma défavorable, le résultat fera obligatoirement son apparition.

RIMPOCHE, ayant déjà expliqué le karma mental, le karma qui s’est produit des Formations dissociées de l’Esprit, il reste à traiter le karma qui est apparenté à la Forme.

Question : Est-ce que toutes les attitudes corporelles sont des karmas ?

Réponse : Non, ce n’est pas le cas, elles ne sont pas toutes des karmas vertueux ou non vertueux. Il faut faire des distinctions.

Questions : Mais d’après l’apparence physique, selon que le corps exprime de la surprise, de la colère, donc d’après les réactions du corps, on peut comprendre ce que pense quelqu’un.

Réponse : Cette apparence physique exprimant un sentiment sera un karma. Si, par exemple, quelqu’un fait « la tête », on peut voir le non-contentement. Cette attitude physique est donc un karma, mais cette conception du karma n’est pas acceptée par les quatre Écoles philosophiques bouddhistes. Deux de ces quatre Écoles qui l’acceptent, exposent le karma de la façon suivante : Nous avons pris l’exemple du meurtre. Lorsque celui-ci est accompli, que la victime est morte, la Voie karmique est totalement achevée. Si, dans ce genre de Voie karmique, telle que le meurtre, on ne pratique pas la confession ou la purification afin d’éliminer l’action mauvaise lorsque les causes et conditions seront réunies dans l’avenir, les résultats karmiques apparaîtront. Dans le cas du meurtre il peut y avoir trois sortes de résultats karmiques :

— Résultat à maturité.

— Résultat en concordance avec les causes.

— Résultat d’environnement, c’est-à-dire qui influence l’environnement

Le résultat à maturité dépend de la force des actions accomplies. Si celles-ci sont particulièrement fortes, la renaissance suivante sera tout à fait défavorable. Elle aura lieu dans des conditions très pénibles. Si la voie karmique est un peu moins forte, moins lourde, le résultat, c’est-à-dire la renaissance sera légèrement moins défavorable. Si la voie karmique est relativement légère, la renaissance ne sera pas trop pénible.

Le résultat en concordance avec les causes se présente sous deux aspects ; en ce qui concerne le meurtre il aura ces deux résultats 1) une vie courte ; 2) on prendra toujours plaisir à tuer.

C’est facile à comprendre. Il suffit pour cela d’observer certains êtres humains ou certains animaux. Certains petits enfants prennent déjà plaisir à tuer. Cela vient donc de cette cause.

Le résultat qui influence l’environnement : le pays habité est toujours en guerre ou encore on est perpétuellement entouré de gens qui ne cessent de se disputer, enfin des troubles de ce genre.

Nous avons pris l’exemple du meurtre, il en est de même pour les neuf autres actions karmiques.

RIMPOCHE nous expliquera plus en détails le fait que, selon la force du karma, le résultat à pleine maturité sera plus ou moins fort. En résumé il y a trois karma :

Un karma mental – un karma formel – un karma apparenté aux formations dissociées de l’Esprit, pour être plus clair : un karma constitué par les empreintes karmiques.

Question : Le résultat karmique se manifeste-t-il toujours d’une vie à une autre, ou peut-il se produire dans une même vie ?

Réponse : Le résultat karmique peut être subi dans cette vie ou dans les vies suivantes. Mais en général, en ce qui concerne le meurtre, c’est plutôt dans la vie suivante, sauf si le meurtre accompli est particulièrement horrible, le résultat peut se produire dans cette vie. Il y a cinq crimes haineux : tuer son père, sa mère, un arhat ; faire avec malveillance couler le sang d’un Bouddha, occasionner un schisme dans la Sangha.

Question : A partir de quel moment considère-t-on qu’il y a vie et conscience ?

Réponse : Pour répondre à cette question il faut se reporter à ce que RIMPOCHE a dit la dernière fois sur le processus de la mort et l’entrée dans le Bardo (l’état intermédiaire). RIMPOCHE avait expliqué le processus de la mort avec la disparition progressive de toutes les capacités du corps. A un moment l’esprit se sépare du corps, ils n’ont plus aucun contact. C’est à ce moment précis que se produit la mort. Actuellement notre corps est capable de servir de support à l’esprit. Lorsque le corps s’affaiblit, il tombe de dégénérescence en dégénérescence et finalement il ne s’avère plus capable de servir de support à l’esprit. Et lorsque l’esprit n’a plus de contact avec le corps, qu’ils ne sont plus en relation, on perd sa vie. Ce qui reste du corps n’est plus que matériel. Quant à l’esprit il est parti ailleurs.

Réponse à une question : De tous les karmas le plus important sera le karma mental, c’est tout ce qui se passe dans l’esprit. C’est lui qui a accumulé le plus de karma. Qu’il s’agisse de karma oral ou physique, il faut de toute façon qu’il y ait eu un karma mental. Il faut d’abord penser à la chose avant de passer à l’action.

Il y a une différence entre le karma physique ou oral. Pour la voie karmique accomplie par un karma physique, il y aura une action physique et pour un karma oral des paroles seront prononcées. Il y a encore beaucoup d’aspects à étudier lorsqu’on parle du karma.

Question : Pourrait-on parler de la confession et de la purification ?

Réponse : Dans la tradition bouddhiste, la confession est à faire mentalement. Cela signifie qu’il ne faut pas obligatoirement aller se confesser à quelqu’un. Qu’on soit entrain de manger, de marcher, que l’on soit couché, il est possible de le faire. Il faut simplement réunir quelques conditions et si celles-ci sont réunies, à n’importe quel endroit, à n’importe quel moment, on peut pratiquer la confession. Voici les conditions qui doivent nécessairement être réunies :

— La peur du résultat à pleine maturité de l’action qui a été accomplie.

— Il faut également éprouver des remords.

— Il faut prendre la décision de ne plus jamais dorénavant, accomplir ce genre d’action défavorable.

En réunissant ces trois conditions, on peut toujours pratiquer la confession de n’importe quel karma. Quand on prend la résolution de ne plus faire ce genre d’action défavorable, on peut, pour gage de cette décision, faire telle ou telle action vertueuse, comme par exemple aider des animaux, des malades. Toujours avec ce genre de motivation, il est possible de décider également de faire des prosternations, d’étudier le Dharma, de réciter des Mantra. Le fait de ces pratiques avec des motivations préalables, sont de la nature de la confession.

Question : Quel est le moyen de se purifier ?

Réponse : Si on réunit ces trois mêmes conditions et si l’on fait des prosternations, l’étude du Dharma, etc., ce sera une confession et donc une méthode de purification, de même, quand on réunit ces trois conditions et qu’on médite sur la compassion pour tous les êtres. Pour pratiquer la purification il est également possible de célébrer certains rites selon les Sutras ou les Tantras.

(Revue Panharmonie. No 188. Octobre 1981)

Compte rendu de la rencontre du 04.02.1981

Rimpoché continue à nous parler du KARMA selon la tradition bouddhiste. On peut observer trois genres de Karmas : le Karma favorable, le karma défavorable et le Karma ni favorable, ni défavorable, c’est-à-dire neutre. D’autre part il y a trois sortes de Karmas : le Karma vertueux, le Karma non-vertueux et le Karma neutre. Ayant expliqué la dernière fois ce qu’était le Karma défavorable qui consiste à tuer, Rimpoché nous parlera du Karma non-vertueux. Il y en a un très grand nombre, mais on peut les résumer en dix Karmas non-vertueux les plus importants.

Les trois premiers de ces Karmas sont des Karmas effectués par le corps, donc des Karmas physiques, corporels.

Deuxième Karma du corps : « Prendre ce qui n’a pas été donné », (Voler). De même que pour le meurtre, il faut réfléchir à l’acte de voler selon quatre points :

1 — La base — la pensée — l’action — l’accomplissement.

I1 faut tout d’abord penser à la BASE sur laquelle pourra s’effectuer un vol, une substance, une matière. D’autre part, il faut que cet objet ne vous appartienne pas, mais à quelqu’un d’autre.

2 — En ce qui concerne la PENSEE, le processus est identique à celui concernant le meurtre, c’est-à-dire qu’elle se présente sous trois formes : intention, reconnaissance, la ou les passions ou facteurs perturbateurs de l’esprit. Ceux-ci sont de trois sortes : motivation de voler, de prendre quelque chose qui ne vous appartient pas, reconnaître sans se tromper l’objet à voler, attachement pour quelque chose qui appartient à quelqu’un d’autre.

3 — ACTION : le fait de prendre, de voler, que ce soit par des méthodes habiles en trompant les autres ou en allant dérober chez quelqu’un. Mais cette action de voler peut aussi se faire sans vraiment aller voler chez quelqu’un, par exemple demander à un ami de vous prêter un livre que l’on ne rend pas. Puisqu’on décide de le garder, il s’agit de vol.

4 — L’ACCOMPLISSEMENT : pour que l’action de voler soit totalement accomplie, il faut que l’on garde l’objet en pensant de façon très précise : « Cet objet est à moi ». Dès qu’on a cette pensée, l’action de voler est totalement accomplie. Au moment où apparaît en nous cette pensée : « Désormais cet objet est à moi », va naître en notre esprit une autre pensée, un facteur mental dont le rôle plus particulier est de diriger l’esprit vers son objet. Quand ce facteur mental est né, le Karma a été totalement accompli.

Supposons un dirigeant, un gouverneur d’un pays quelconque et qu’une personne fasse une action contraire à la loi. S’il fait l’objet d’une amende en accord avec la loi, il ne s’agit pas là d’une action défavorable pour le gouverneur. Mais si, profitant de son pouvoir, il lève des impôts et inflige des amendes d’une façon arbitraire, il s’agit d’un vol. D’autre part, bien des actions de voler se présentent lorsqu’on est commerçant. Ne pas vendre les objets à leur prix normal et d’en tirer un bénéfice exorbitant.

Il est donc nécessaire pour que le Karma soit accompli, de réunir les quatre points énumérés : Base — Pensée — Action — Accomplissement.

Les différents Karmas d’une même catégorie peuvent avoir une gravité plus ou moins lourde selon l’objet (ici la personne volée).  En effet, si on vole les biens de quelqu’un qui a été particulièrement bon et bienveillant pour nous, le Karma est beaucoup plus grave que s’il s’agit de quelqu’un qu’on ne connaît pas. Ou encore, le Karma est plus grave si l’action est dirigée vers une personne dans la misère, si le vol est perpétré sous l’emprise d’un très fort attachement pour l’objet dérobé ou si celui-ci est considéré comme très précieux par son possesseur.

On ne dit pas cela sans base. Il y a des raisons qui permettent certaines actions sont plus nuisibles que d’autres pour la personne qui d’affirmer que le poids du Karma peut être plus ou moins grave si a été volée, si celle-ci aimait beaucoup l’objet volé et en était très affectée.

Le 3eme Karma du Corps : l’INCONDUITE SEXUELLE.

Parfois on rencontre aussi le terme d’adultère, mais il ne recouvre pas exactement la question. Il y a également quatre points :

1 — La BASE : tout être de sexe féminin ou masculin ou… un animal. Des personnes déjà engagées dans le mariage ou simplement fiancées. Des personnes qui sont sous la protection ou la garde des parents.

2 — La PENSEE : Motivation : vouloir accomplir l’acte sexuel.

Passions (Facteurs perturbateurs de l’esprit) : en général attachement, mais il peut arriver que ce soit la haine ou l’aversion. Dans tous les cas il y aura « ignorance ».

Reconnaissance : reconnaître que la personne sur laquelle on a jeté son dévolu est déjà mariée ou non.

Action : l’acte sexuel lui-même.

Accomplissement : ressentir de la joie à ce moment-là.

Là aussi le Karma peut être plus ou moins grave, par exemple si le partenaire est un(e) parent(e), c’est-à-dire une personne avec un lien de parenté allant jusqu’à la septième génération, si la personne est engagée dans la vie religieuse, moine ou nonne. Également si la femme est enceinte et si l’acte est accompli dans un temple ou devant des représentations du Bouddha.

Des trois Karmas défavorables, meurtre, vol, inconduite sexuelle, le premier le meurtre, est le plus défavorable, puis la gravité va en décroissant.

IL Y A TROIS ACTIONS KARMIQUES ACCOMPLIES PAR LA PAROLE : le mensonge, la calomnie, la parole dure, désagréable, les bavardages inutiles.

1 — Le MENSONGE :

BASE : la parole qu’on va prononcer, le mensonge, les paroles mensongères qui sont dites (par exemple affirmer que l’on a vu une chose que l’on a pas vue, ou l’inverse).

Il y a trois formes de PENSEES : la motivation, les passions (facteurs perturbateurs de l’esprit), reconnaissance.

Motivation : vouloir tromper l’autre, vouloir dire un mensonge.

Passions : les facteurs perturbateurs de l’esprit entrent en action. En conséquence, n’importe quoi peut pousser à dire un mensonge, attachement, jalousie, etc.

Reconnaissance : c’est savoir pertinemment ce qui est vrai et vouloir dire le contraire.

ACTION : le fait de mentir, de prononcer des paroles mensongères.

Mais il y a possibilité de mensonge sous une autre forme que celle des paroles. Il peut être suggéré quand par exemple quelqu’un pose une question à laquelle on évite de répondre et quand le questionneur en tire certaines conclusions. La suggestion peut aussi être faite par une attitude ou une expression corporelle qui veut faire croire qu’une chose dont on est convaincu est mensongère.

ACCOMPLISSEMENT : quand la personne à qui le mensonge a été destiné est convaincue, qu’elle croit ce qui a été dit ou suggéré. Il y a différents degrés de gravité dans le mensonge : il est plus grave de mentir à une personne qui a été bienveillante envers nous que de mentir à ses parents. Faire croire qu’on a obtenu des réalisations spirituelles très élevées, alors que cela n’en est pas le cas, est particulièrement mauvais dans le Bouddhisme. S’il s’agit de quelqu’un engagé dans la voie religieuse, moine ou nonne, et qu’il a proféré ce genre de mensonge, ses vœux sont brisés. Mais, en règle générale, le simple fait de mentir ne leur fait pas perdre leur qualité de religieux, de toute façon il y a Karma. Quand la personne à qui on a menti est convaincue de ce qu’on lui fait croire, la Voie Karmique est simplement achevée.

2 — La CALOMNIE :

BASE : toutes personnes qui s’entendent bien, qui sont en harmonie.

PENSEE : même genre de pensées que pour le mensonge.

Passions (facteurs perturbateurs de l’esprit) : n’importe quelle motivation, le désir de semer la discorde, la zizanie entre les personnes.

Reconnaissance : reconnaître que ces personnes s’entendent bien entre elles.

ACTION : prononcer des paroles qui tendent à semer la discorde parmi ces personnes, à leur nuire.

ACCOMPLISSEMENT : lorsque les gens qui étaient en pleine entente ont compris la signification des paroles. Il ne faut pas obligatoirement que les gens concernés se séparent. Il est tout à fait évident que si l’on cherche à séparer les gens qui nous sont tout particulièrement bienveillants, ou à séparer nos parents ou des gens qui s’entendent très bien, le Karma est particulièrement lourd.

3 — PAROLES DURES, DESAGREABLES, INJURES, INSULTES

BASE : ce n’est pas forcément un être, cela peut aussi être un objet. (Si on bute sur une pierre, on peut jurer !)

PENSEES :

Passions (facteurs perturbateurs de l’esprit) : les trois poisons de l’esprit peuvent intervenir, Ignorance, Attachement, Haine.

Motivation: vouloir prononcer des paroles dures, blessantes, désagréables.

Reconnaissance : bien reconnaître l’objet concerné comme base de nos injures.

ACTION et ACCOMPL1SSEUENT : ils sont identiques. Le simple fait de prononcer des paroles désagréables suffit pour que le Karma soit totalement accompli.

4 — BAVARDAGES INUTILES (PAROLES FUTILES):

BASE : une personne avec laquelle on parle ou le fait de parler seul.

PENSEES:

Passions (facteurs perturbateurs de l’esprit) : les trois poisons de l’esprit : Ignorance, Attachement , Haine.

Motivation : avoir envie de parler (de bavarder).

Reconnaissance : le fait d’être conscient que ce qu’on dit n’est pas tellement important. Prendre conscience qu’on prononce des paroles inutiles.

ACTION et ACCOMPLISSEMENT : ils sont identiques. Dès qu’on bavarde, qu’on prononce des paroles inutiles, des propos légers, le Karma est accompli. Mais, par contre, tâcher de plaisanter, de remonter quelqu’un qui est démoralisé, ne constitue pas des paroles inutiles, si celles-ci ont une motivation, un but précis qui leur donnent une signification particulière. Il se peut aussi qu’on soit fatigué et que l’on chante ou s’amuse de cette façon pour se détendre, ce ne sera pas non plus des « paroles inutiles ».

Les paroles inutiles sont d’autant plus graves qu’elles sont prononcées sous l’emprise de certaines passions, comme par exemple la paresse.

De même que pour les trois Karmas accomplis par le corps, la gravité va en décroissant. En effet, le mensonge, premier Karma non-vertueux de la Parole, est plus grave que le Karma non-vertueux des Paroles Inutiles.

LES TROIS KARMAS DEFAVORABLES DE L’ESPRIT :

1 — CONVOITISE : c’est le premier des trois Karmas accomplis par l’esprit.

BASE : richesse (biens) pouvant appartenir aussi bien à nous qu’à d’autres.

Objet : n’importe quoi.

PENSEE

Motivation : il ne faut pas avoir de motivation particulière. Le simple fait d’éprouver de la convoitise suffit.

Passions (facteurs perturbateurs de l’esprit) : c’est surtout l’attachement qui domine.

Reconnaissance : considérer que l’objet en question, convoité, est vraiment très bien.

ACTION et ACCOMPLISSEMENT sont identiques. C’est simplement éprouver de la convoitise, désiré avoir pour soi les richesses convoitées. Mais éprouver de la convoitise ne signifie pas qu’on pense : « Oh, cet objet est vraiment très bien et très beau ! ». Cette pensée n’est pas de la convoitise. Pour qu’il y ait convoitise il faut, en plus, désirer obtenir cet objet pour soi. Quand on va dans un magasin, la convoitise peut naître très facilement en notre esprit. La plus ou moins grande gravité de la convoitise dépend de la force de nos passions.

2 — MALVEILLANCE :

BASE : tous les êtres.

PENSEE : une certaine passion qui peut être diverse mais assez semblable à la jalousie.

Motivation : le désir de faire du mal, d’être néfaste, nuisible à « cette personne ».

Reconnaissance : bien déterminer, sans erreur, à qui on veut faire du mal, à qui on veut nuire tout particulièrement.

ACTION : vouloir faire du mal à quelqu’un.

ACCOMPLISSEMENT : il aura lieu quand on aura accompli un acte malveillant vis-à-vis de quelqu’un. La malveillance sera plus ou moins grave selon la force de la pensée.

3 — VUES FAUSSES (Vues ERRONEES): c’est le dernier des Karmas défavorables. Que sont les « vues erronées » ? C’est nier l’existence de ce qui existe.

BASE : tous les phénomènes existants, tout ce qui existe.

PENSEE

Motivation : vouloir entretenir ce genre de vues fausses, ne pas vouloir s’en séparer.

Passion prédominante, plutôt l’ignorance.

Reconnaissance : déterminer un point particulier qu’on va nier.

ACTION et ACCOMPLISSEMENT : c’est d’avoir ces vues fausses.

Voici pour les trois Karmas défavorables. Contrairement aux sept Karmas précédents, la gravité va en croissant. Le plus grave étant en effet le dernier : les Vues Fausses.

Il faut faire attention au mot Karma qu’on utilise mal généralement. Les dix Actions Défavorables sont des VOIES KARMIQUES. Karma signifie : Action et concerne donc les sept premières Actions Défavorables qui sont accomplies par le corps (trois) et la Parole (quatre). Les trois derniers sont des Passions, on ne peut pas les appeler Actions, mais des Voies Karmiques. La gravité des Voies Karmiques, n’importe laquelle des dix, sera plus grande si elle est répétée constamment. Au contraire, il y aura une différence de gravité si on la commet rarement. Par contre, elles seront considérées comme plus graves si elles sont accomplies à l’encontre de gens qui nous sont bienveillants et qui nous comblent de bienfaits.

Il y a une autre façon d’envisager toutes les Actions Défavorables ou Favorables :

1 — Les Karmas faits (accomplis) et non achevés.

2 — Les Karmas accumulés et non faits.

3 — Les Karmas faits et accumulés.

Lorsque, en ce qui concerne les Actions Défavorables, les quatre points : base, pensée, action et accomplissement sont réunis, on dit que les Karmas sont faits et accomplis.

Dans le cas du meurtre, par exemple, s’il y a un très fort désir de tuer, mais qu’on ne parvienne pas à mettre le projet à exécution, le meurtre n’est pas accompli. Si le meurtre n’est pas accompli, le Karma du meurtre sera accumulé, mais pas fait. Et si, n’ayant pas envie de tuer, on tue par mégarde (par exemple par accident) le Karma est fait, mais non accumulé. Si, contre notre gré on doit tuer, si on y est forcé, si on nous oblige à accomplir un meurtre, le Karma est fait, mais non accumulé. Il peut arriver qu’en marchant on écrase beaucoup d’insectes par inadvertance et non sciemment, le Karma est fait, mais non accumulé.

Une autre distinction peut être faite :

1 — Un Karma peut être fait avec une bonne motivation, mais avec une action mauvaise.

2 — Ou avec une mauvaise pensée, mais une action bonne.

3 — Il se peut qu’un Karma réunisse une bonne pensée et une bonne action, ou une pensée mauvaise et une action tout aussi mauvaise.

On dira en général que tout Karma favorable est « blanc » et que tout ce qui est défavorable est un « Karma noir ». Une pensée blanche et une action blanche constituent le Karma blanc.

Si on manifeste de la générosité en ayant un réel désir de venir en aide, pensée et action sont blanches. Mais si on pratique la générosité dans le seul but d’asservir les autres, de les mettre sous notre domination, la pensée est noire et l’action est blanche.

Si des parents, dans le but de bien élever leurs enfants, les punissent, la pensée est blanche et l’action noire. Et si, sous l’emprise d’une passion défavorable quelconque (désir, attachement, haine, aversion, ignorance, etc.) on tue, pensée et action seront noires. Et, selon les différentes façons d’envisager le Karma blanc et le Karma noir, il y aura de nombreuses catégories de Karmas et des divisions qui sont énumérées dans les enseignements du Bouddha.

Réponse à une question sur les stupéfiants : Pour déterminer si c’est favorable ou non, il faut déterminer la motivation par laquelle on va les prendre. C’est, bien sûr, défavorable sous l’emprise de l’attachement et dans le but de « se sentir bien ». Cela entre alors dans la catégorie des « Vues Fausses ».

Question : On a caché à une malade très grave la mort subite de son mari. Est-ce un mensonge à éviter ?

Réponse : Cela n’entre pas dans la catégorie des mensonges, mais plutôt dans celle des omissions, parce qu’on n’a pas annoncé la mort du mari pour éviter d’aggraver encore l’état de la malade. Il n’était pas utile de le faire. Pour qu’il y ait mensonge, il faut vouloir mentir, tromper quelqu’un de façon délibérée, afin d’obtenir un avantage personnel.

Question : Mais, dans ce cas, n’entrave-t-on pas le Karma normal de la malade en ne la mettant pas en face des réalités de l’existence ?

Réponse : On peut aussi répondre qu’elle a aussi accumulé le Karma de ne pas entendre cette nouvelle !

Il ne suffit pas d’avoir accumulé un Karma pour devoir obligatoirement en expérimenter le fruit. On peut avoir accompli certains Karmas et avoir gardé les causes en soi. Pour que les causes donnent leur résultat, il faut réunir un certain nombre de conditions, sinon le fruit ne peut pas arriver à maturité. C’est comme pour une graine qui pourrait rester des centaines d’années sans pousser. Mais si la graine se trouve mise dans des conditions favorables et appropriées, elle peut alors donner un résultat.

Au sujet de l’étude du Livre des Morts Tibétains : Disons que ce livre présente un enseignement qu’on peut mettre en pratique uniquement quand on a réuni certaines conditions. Étant donné que le niveau qu’il faut atteindre et que les conditions qu’il faut réunir sont très difficiles à obtenir, à notre niveau il n’est pas indispensable de l’étudier.

Question : Peut-on donner une explication du terme PRATYEKA BOUDDHA ?

Réponse : Pratyeka Bouddha est traduit en français par Bouddha solitaire. Il s’agit d’un être engagé sur la voie bouddhique et qui, par cette pratique, développe certaines qualités qui lui permettent certaines réalisations spirituelles. Ici « Bouddha » ne signifie pas Bouddha au sens habituel du mot (le Parfait qui a atteint l’éveil, la libération totale, l’illumination suprême). Il s’agit d’un être qui a compris ce qu’était la vacuité, le non-soi des phénomènes et des êtres. En pratiquant une certaine méthode, il peut en cette vie, obtenir le rang de Pratyeka Bouddha et alors il n’a plus besoin de Maître(s). C’est pour cette raison qu’il s’appelle : « Bouddha solitaire ».

Question : Peut-on le considérer comme un Bodhisattva ?

Réponse : Non, il est exclus qu’il le soit, car le Pratyeka Bouddha s’efforce d’obtenir certaines qualités et réalisations uniquement pour lui-même, tandis que le Bodhisattva s’efforce de développer toutes ces qualités pour aider tous les êtres sans exception.

Question : Est-ce la voie du Théravada ?

Réponse : C’est en effet l’enseignement du « Petit Véhicule » encore nommé Hinayana.

Question : Vous n’avez pas parlé du Karma collectif.

Réponse : Ce qui est collectif c’est le résultat, mais le Karma lui-même est forcément individuel. C’est-à-dire que des personnes, ayant accumulé individuellement des Karmas relativement semblables, se trouvent réunies pour subir un résultat identique. Pourquoi ce Karma est-il individuel ? Parce qu’il est accumulé et fait par l’esprit. Or l’esprit est forcément individuel pour chacun de nous.

Le rôle du Bodhisattva est de nous aider, de nous inciter à faire plutôt le bien. Le Bouddha Sakyamuni a dit qu’il avait développé des qualités, mais qu’il ne pouvait absolument pas prendre ou ôter de ses mains tous les défauts des autres êtres. Il a dit que ce qu’il peut faire, c’est montrer le chemin, la voie. Il peut enseigner ce qu’il est bien de faire, ce qu’il est correct de développer, de pratiquer et ce qui est mauvais, nuisible et préférable d’éliminer.

Il est encore question d’ « âmes-groupes » : Ce qu’on peut dire en général, c’est qu’il y a des êtres qui se rassemblent à un certain endroit parce qu’ils ont un Karma semblable. Ils vont en quelque sorte « créer » cet endroit. Quant à la notion de l’âme-groupe des animaux, elle est spécifiquement occidentale et étrangère au Bouddhisme. Pour un Bouddhiste, les animaux ou les hommes ont une certaine forme d’esprit qui est sans différence intrinsèque. De plus, à cause de la croyance en la renaissance, un homme quittant cette vie peut devenir un animal et un animal peut très bien reprendre une naissance humaine. Quelque soit l’être, n’importe lequel a en lui la possibilité de devenir Bouddha, donc de se développer spirituellement.

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