Patrice Sammut
Médecine et énergie

(Revue Le chant de la licorne. No 28. 1989) On utilise de plus en plus fréquemment le terme de médecine énergétique, mais qui le comprend vraiment ? Aujourd’hui, toutes les pratiques thérapeutiques ne relevant pas de la médecine officielle se parent de ce qualificatif, de l’acupuncture à la chromothérapie, de la guérison par les cristaux […]

(Revue Le chant de la licorne. No 28. 1989)

On utilise de plus en plus fréquemment le terme de médecine énergétique, mais qui le comprend vraiment ? Aujourd’hui, toutes les pratiques thérapeutiques ne relevant pas de la médecine officielle se parent de ce qualificatif, de l’acupuncture à la chromothérapie, de la guérison par les cristaux à l’imposition des mains. Or, quels points communs relient ces différentes disciplines, qui à première vue semblent bien distinctes les unes des autres ? De plus, si chacune de ces pratiques peut être abordée à un niveau énergétique, il est facile pour l’utilisateur de leur faire perdre ce caractère et de les ramener à un ensemble de recettes symptomatiques, plus matériel et moins riche en potentialités.

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Les fondements de la médecine énergétique

Pour tenter de cerner ce qui ca­ractérise la médecine énergétique, il est utile de la comparer à la mé­decine classique, universitaire, qui, nous le verrons, lui est en bien des points opposée. La première dis­tinction fondamentale entre ces deux approches médicales réside dans l’explication donnée sur les origi­nes de la vie.

Pour la médecine officielle, la vie découle d’interactions entre élé­ments chimiques qui, un jour, par hasard, ont généré des assemblages un peu plus complexes qu’à l’ordi­naire, des molécules qui se sont elles-mêmes organisées en ensem­bles doués de propriétés de croissance et de reproduction. La vie, l’énergie, le mouvement, ne seraient de ce point de vue que le résultat de ces interactions moléculaires. Les phénomènes subtils comme émotions ou conscience sont aussi des conséquences de processus chimi­ques chez des êtres parvenus à un grand degré de complexité, sur une chaîne évolutive ayant probablement débuté par des organismes mono­cellulaires. De ce fait, pour remé­dier aux différents problèmes pou­vant affecter cet assemblage, on se bornera à considérer le plan maté­riel et on essaiera d’en modifier les proportions ou la structure. C’est ce qui explique la place importante prise par les analyses chimiques et la radiologie, souvent au détriment d’un abord humain du malade. Ce système médical peut donc être qua­lifié de matérialiste.

Il n’en est pas de même des mé­decines énergétiques, qui s’accor­dent sur le fait que la vie ne naît pas de la matière seule et donnent une place prépondérante au rôle de la conscience dans cette constitution. Autour et avec la conscience s’éla­borent des structures de densité et complexité variables. Ainsi, chez l’homme sont développés un corps physique, des structures énergéti­ques (permettant le métabolisme, la reproduction, les sensations, la régulation…) émotionnelles, intel­lectuelles et on considère que tou­tes ces structures sont reliées entre elles. Dans ce cas de figure, on ne se contente pas d’attribuer la mala­die à des causes physiques mais on tient aussi compte, dans l’étiologie comme dans le traitement, de tous ces niveaux plus subtils. L’appro­che énergétique n’exclut donc pas l’approche matérialiste mais va simplement au-delà de ce cadre concret.

Le niveau énergétique

On peut donner à la notion d’énergie deux significations quel­que peu différentes. Au sens large, il s’agit de tout ce qui cause le mou­vement et les transformations. Dans ce cas, l’énergie englobe les émo­tions mais également la matière dont on sait qu’elle contient des potentia­lités dynamiques importantes. Tou­tefois, lorsqu’on parle de corps énergétique, ou de niveau énergé­tique, on entend le plus souvent une strate précise entre conscience et matière, qui assure les liens entre ces deux pôles. L’importance de cette strate réside justement dans cette position et cette fonction d’in­termédiaire. Cette situation lui con­fère des propriétés que le théra­peute va utiliser. Le corps énergéti­que est en effet suffisamment dense, structuré, pour qu’on puisse agir de manière précise à ce ni­veau, suffisamment subtil pour que cette action retentisse rapidement sur les autres couches, physiques mais aussi émotionnelle, mentale ou spirituelle.

En médecine chinoise, on attri­bue à l’énergie cinq propriétés es­sentielles :

  • La mobilité, et la capacité à mobi­liser la matière, la forme corporelle : sang, muscles, diffusion et assem­blage des matériaux constitutifs des tissus.

  • Les capacités de transformation : du fait de sa situation intermédiaire, l’énergie transforme le subtil en dense, par exemple une émotion en mouvement musculaire, ou le dense en subtil, par exemple un aliment en énergie motrice.

  • L’énergie possède également une fonction nutritive, elle assure l’entretien et la perpétuation des structures physiques, le renouvel­lement des tissus, etc.

  • La protection est la quatrième propriété de l’énergie et s’exprime par rapport aux énergies extérieu­res, climatiques (chaleur, froid, humidité…), physiques ou chimi­ques (chocs, brûlures…), mais aussi par rapport aux déséquilibres inté­rieurs qui peuvent créer des trou­bles, des anomalies qu’il faudra neutraliser.

  • L’énergie contrôle la forme physique ; que ce soit la stature cor­porelle, la tonicité des muscles et des organes, ou les liquides du corps : larmes, sueur, urine, sang… Une insuffisance d’énergie saine peut se manifester par des pertes li­quidiennes diverses, des relâche­ments tissulaires, des ptoses…

L’énergie entretient avec le sang des rapports privilégiés. Des fonc­tions précédentes découlent les propriétés de l’énergie à produire le sang, à lui conférer des qualités nutritives et défensives et à le mobi­liser. Dans le couple sang/énergie sont présents tous les constituants de l’être : matériaux physiques et nutriments, liquides, énergie sous toutes ses formes et, le sang étant considéré comme le support de la conscience, émotions et capacités intellectuelles et spirituelles.

Le niveau énergétique est carac­térisé par son impermanence, les continuelles métamorphoses qui l’animent. Néanmoins, il a été né­cessaire, pour pouvoir travailler sur ce niveau, d’élaborer des systèmes dialectiques permettant de structu­rer et de caractériser cette réalité subtile. Malgré l’originalité de cha­que système (chinois, tibétain, in­dien, occidental…), on retrouve entre eux de nombreuses analogies.

L’analogie microcosme macro­cosme

Comprendre avec finesse la ma­nière dont s’élaborent et se structu­rent les énergies au sein de l’orga­nisme n’est pas concevable sans le support que représentent les rela­tions entre le microcosme, monde intérieur, et le macrocosme, l’uni­vers extérieur. Ces relations sont résumées par les principes d’Her­mès « ce qui est en haut est comme ce qui est en bas » et « tout est dans tout ». Contrairement à l’idée mo­derne qui place l’homme au-dessus et en dehors de la nature (avec tou­tes les conséquences que cela pro­voque sur l’environnement), on considère en médecine énergétique que l’être humain est totalement intégré au milieu dans lequel il vit et bâti selon les mêmes principes, d’où cette analogie entre notre monde intérieur et l’univers exté­rieur. Les relations existantes entre le grand monde et l’homme sont peu perceptibles pour celui qui n’a des choses qu’une vision matérialiste. Par contre, plus l’observateur peut percevoir les subtilités dont la forme n’est que le reflet, plus il se rend compte des points communs entre certains objets. Ces analogies peu­vent être morphologiques mais el­les apparaissent surtout sur le plan du dynamisme. Ainsi, on retrouve l’énergie appelée martienne aussi bien dans la colère que dans une inflammation, une guerre, l’accé­lération d’une puissante voiture, ou les effets stimulants et échauffants de plantes comme le girofle ou l’orange amère. En médecine chi­noise, on rapproche par exemple les modalités énergétiques des cinq organes principaux et le dynamisme des saisons. Ainsi, le mouvement bois caractérise tout autant les for­ces printanières qui permettent à la nature de jaillir et contiennent déjà le projet de son développement, que l’énergie siégeant dans le foie qui nous fait bondir du lit le matin, stimulés par le plan de la journée qui commence. Cette conception de l’homme intégré à l’univers per­met également de concevoir son dynamisme cyclique. Tout comme il existe dans la nature des phases de développement, d’épanouisse­ment, de déclin et de repos, l’homme passe par ces cycles, à l’échelle d’une journée, d’un mois, d’une année mais aussi pour des temps plus courts (un cycle cardiaque ou respiratoire) ou plus longs (plusieurs dizaines d’années).

Cette analogie microcosme macrocosme est la base de l’astrologie médicale qui, loin d’être une prati­que horoscopiste à la petite semaine, inclut par exemple la science des pouls et permet une compréhen­sion fine de l’évolution ou de la résolution des maladies selon les cycles naturels. C’est la même ana­logie qui permet, à partir de l’étude d’une partie d’un organisme, d’avoir une connaissance de l’ensemble de son fonctionnement. L’observation du visage, par exemple, est le reflet de l’énergie des organes et entrailles et son observation peut apporter de précieux renseignements. L’obser­vation de la langue, la palpation de l’abdomen, pour lequel il existe de nombreuses cartographies, a le même intérêt. L’iridologie ou l’au­riculothérapie sont également quelques-unes des nombreuses prati­ques basées sur ce principe, utile tant pour le diagnostic que pour le traitement.

Les caractéristiques de l’énergie

L’étude des énergies de l’homme implique tout d’abord d’en connaî­tre l’origine.

La première distinction con­cerne ce qui est inné et ce qui est acquis. L’inné caractérise tout ce qui a été transmis par les géniteurs et tout ce qui s’exprime à partir de la conscience organisatrice. Ces énergies, en germe dès la première cellule, comportent les informations concernant la morphologie, le sexe, la race, l’espèce de l’individu, soient toutes les caractéristiques archétypales, c’est-à-dire idéales, qui découlent de l’union de la semence et de la conscience. De plus, est transmis un potentiel vital, un capital énergétique qui, après la naissance, est à l’origine de toutes les autres acquisitions d’énergie, et donc qui conditionne directement l’espé­rance de vie de la personne. Si l’on exclut tout problème extérieur (ac­cident, qualité ou quantité de nour­riture insuffisante, problèmes d’en­vironnement…), la longévité dé­pend en effet de la plus ou moins bonne gestion de ce capital.

La qualité de ces énergies innées varie selon l’état de santé des pa­rents et ancêtres. Ainsi, des patho­logies peuvent être transmises avec les informations nécessaires à la vie. C’est le cas pour les affections génétiques, chromosomiques, mais ce peut être plus subtil encore. Ain­si, une personne ayant eu un pro­blème portant atteinte à sa vitalité profonde (tuberculose, syphilis…), même guérie, peut transmettre des tares à sa descendance. Les vaccins pourraient également avoir une telle répercussion néfaste.

Alors que l’inné provient de fac­teurs antérieurs à la naissance et apparemment peu dépendants de l’individu lui-même, l’énergie ac­quise est directement liée aux facul­tés de transformation et d’assimila­tion du sujet. Chez l’homme ordi­naire, cette énergie provient essen­tiellement de deux sources : la respi­ration, processus de condensation et d’intégration de l’énergie de l’air, et la digestion, par laquelle les ali­ments sont rendus plus subtils et assimilables. Pour que ces mécanis­mes aient lieu, et en particulier pour permettre une individualisation de ces énergies externes, l’apport d’une faible quantité d’énergie in­née est nécessaire.

S’il lui est difficile d’agir sur les énergies innées, l’individu est en grande partie responsable de ses énergies acquises, par le choix de son mode de vie, de la qualité de son alimentation, de son environne­ment, selon la manière dont il entre­tient ses fonctions respiratoires, qu’il pratique ou non de l’exercice physique… Il peut ainsi gérer plus ou moins habilement son capital de départ.

Un deuxième niveau dialectique présent dans tous les grands systè­mes traditionnels concerne les modalités énergétiques. On attribue en effet à l’énergie quatre qualités de base.

La chaleur, qui tend à dynamiser, accélérer, favoriser les transforma­tions, dilater. Elle s’exprime par exemple dans le feu originel qui permet l’expression des qualités archétypales de l’individu et la re­production, dans le feu digestif qui assure la transformation des ali­ments en vue de leur intégration. La chaleur est opposée au froid, qui inhibe, ralentit, conserve, con­tracte. La santé résulte entre autres de cet équilibre entre énergies chaudes et froides, l’excès des unes pouvant provoquer consomption, inflammations, colère, orgueil…, l’excès des autres stases, scléroses, calcifications, mélancolie, dépres­sion… L’humidité, troisième qualité, participe également à la tempérance de la chaleur. Elle constitue le support nécessaire à la vie, elle sta­bilise, adoucit, facilite le mouve­ment. Son opposée, la sécheresse, est stérile, astringente. Alors que les excès d’humidité produiront muco­sités, œdèmes, réplétion, apathie, la sécheresse, résultant souvent d’une insuffisance d’humidité, pro­duira soif, irritation, nervosité…

Cette catégorisation facilite la compréhension de l’état physiologi­que, équilibré, mais permet aussi une distinction des différentes caté­gories de maladies, ce qui permettra une première orientation thérapeu­tique. Par exemple, le traitement pourra avoir comme principe d’éli­miner la chaleur, de résoudre les mucosités, d’humecter, de faire cir­culer, de réchauffer… Cette distinc­tion, associée à celle des différentes fonctions de l’énergie (transforma­tions digestives, défense, nutrition, information originelle…) est à la base de la physiologie et de la phy­siopathologie dans toutes les méde­cines énergétiques.

Les structures énergétiques

Après avoir défini les origines, la nature et les propriétés de l’éner­gie, il est important de connaître les structures dans lesquelles elle cir­cule. Les traditions ont des points de vue parfois divergents mais là en­core, on retrouve des notions com­munes, touchant des notions essen­tielles comme l’existence de voies privilégiées de circulation de l’énergie, méridiens de la médecine chinoise, nadis du système indien… Toutes ces écoles reconnaissent également l’existence de centres énergétiques, carrefours de nom­breuses voies et dépositaires de certains types de fonctions ou éner­gies : le chakra laryngé est ainsi en relation privilégiée avec la respira­tion et la phonation, le centre coccy­gien avec la reproduction et la créa­tivité. Chaque système a également établi une cartographie de points de commande permettant d’accéder à la régulation des différentes fonc­tions de l’organisme, des plus con­crètes, comme la production des tis­sus corporels, aux plus subtiles, comme l’équilibration de l’humeur, du sommeil, des émotions. Souvent, un même point a une action à la fois physique, énergétique et émotion­nelle. Enfin, chaque système a re­groupé en organes certains ensembles de fonctions énergétiques. Ces unités structurelles dépassent de beaucoup le cadre de leurs homo­logues physiques. Ainsi, la rate re­groupe en médecine chinoise des fonctions aussi diverses que l’assi­milation des aliments, la distribution des nutriments et des liquides cor­porels, l’élévation de l’énergie et des liquides jusqu’aux poumons, ce qui inclut la circulation veineuse et lymphatique, le maintien du sang dans les vaisseaux… C’est aussi la rate qui régit la mémoire, la concentration mentale, les capacités à ratio­naliser et à synthétiser, et l’équilibre émotionnel.

Santé et maladie

Pour pouvoir diagnostiquer ce qui est pathologique, il est d’abord nécessaire de définir une norme. Là encore, l’attitude des médecins matérialistes et celle des énergéticiens divergent totalement. Les premiers se basent sur des études statistiques et définissent donc une norme générale. À partir de dosa­ges effectués sur le sang de dix mille malades, on décrète que la glycémie doit être comprise entre 5,5 et 6,5 mmoles par litre, que le taux de sodium plasmatique doit avoisiner 142 mmoles par litre, etc. Ce mode d’approche a pour princi­pal défaut de ne pas tenir compte de l’individualité du malade. J’ai vu ainsi beaucoup de patients s’étein­dre au moment même où l’on avait enfin réussi à ramener tous leurs paramètres biologiques dans les normes admises. Pour un malade, une tension artérielle de 14/9 est déjà excessive. Pour un autre, 11/7 est déjà un chiffre d’hypotension.

Le médecin énergéticien va au contraire tenter de définir ce qui est spécifique à son malade. Pour cela, il s’efforce tout d’abord de cerner la structure archétypale du patient, le plan de construction, avec ses fragilités et ses forces, le terrain de départ. Il replace ensuite sur ce ter­rain les différents événements, inci­dents ou accidents dont les effets conjugués ont amené à la situation présente. La santé est pour lui un état d’équilibre relatif, qui doit tenir compte de ce terrain, mais aussi du fait que l’homme évolue dans un univers qui est lui-même un ensem­ble d’énergies en mouvement. Ain­si, selon le moment de la journée, de la lunaison, de l’année, l’état énergétique normal du patient va­rie et il faut aussi tenir compte de tous ces facteurs. Le pouls d’une personne en bonne santé est diffé­rent en été et en hiver, le matin et le soir… De même, les pouls de deux personnes équilibrées auront des qualités très différentes si l’une est mince et l’autre forte, l’une âgée et l’autre jeune, etc. La normalité dé­pend donc à la fois de facteurs par­ticuliers à chaque individu et du fait que celui qu’on examine fait partie de l’ensemble des énergies universelles et est régi par les mêmes lois.

La santé n’est pas une situation statique mais plutôt un équilibre dy­namique, qui permet de s’adapter à toutes les contingences extérieures et intérieures. Un individu sain est celui qui peut résister à tous les cli­mats, choisir ou supporter tous les types de régimes ou d’aliments, assumer sans problèmes ses efforts physiques et sa sexualité, affronter sans défaillance les inévitables pei­nes, soucis et autres problèmes émotionnels suscités par la vie. À l’inverse, la maladie survient de­vant l’incapacité à fonctionner har­monieusement, du fait d’une ou de plusieurs des causes précitées. Le plus souvent, la cause première est interne, émotionnelle, et retentit ensuite sur les autres niveaux.

Le diagnostic en médecine énergétique

Devant une personne souffrante, il est nécessaire d’établir un diag­nostic précis. Pour cela, le praticien, selon les principes exposés ci-avant, effectue un examen dont le but est de répondre à plusieurs questions : compte tenu du terrain de ce malade, quelle est la nature de son déséquilibre (excès, insuffi­sance, problèmes de chaleur, froid, humidité, sécheresse…) ? Quelle est la localisation du déséquilibre (at­teinte de l’extérieur du corps, de l’intérieur, de tel organe, de tel mé­ridien, de tel tissus…) ? Comment évolue la maladie ? Va-t-elle en s’aggravant, en s’améliorant, sur un mode chronique, aigu ? Ceci étant défini, il faut s’attacher à remonter aux causes du problème. En effet, le médecin doit s’efforcer d’agir sur les racines du problème et non se contenter de traiter les symptômes périphériques, ce qui soulagerait ponctuellement le malade mais ne préviendrait pas les récidives ou les évolutions néfastes. Le bon méde­cin est celui qui sait prévenir autant que guérir, qui résout les patholo­gies avant que celles-ci ne s’ancrent profondément dans le corps dense. C’est toute la différence avec le médecin matérialiste que le malade colopathe, spasmophile ou anxieux agace, parce que d’un point de vue biologique ou radiologique, c’est un sujet normal. Pourtant ; tous les maux dont se plaint le patient sont bien réels, la souffrance n’est pas une simulation et c’est en tenant compte de ces signaux d’alarme que le praticien, s’appuyant également sur un examen subtil, peut éviter les maladies graves, qui ne manque­raient pas de survenir après des mois voire des années de plaintes incomprises.

Schématiquement, l’examen re­pose sur quatre temps principaux :

  • l’inspection et l’observation, qui portent sur l’allure générale, le dynamisme, la morphologie du patient, mais aussi son teint, puis l’aspect de ses yeux, de sa langue et de ses excrétas, expectoration, urines, selles…

  • la palpation, qui concerne les pouls et l’abdomen mais aussi de nombreuses autres parties du corps comme les mains, le dos, les mus­cles…

  • lauscultation et l’odoration, s’at­tachent aux caractéristiques de la voix, de la respiration, de la toux et de l’odeur du malade.

  • l’interrogatoire permet enfin de recueillir de nombreuses indications sur les antécédents héréditaires et personnels du patient, ses problè­mes actuels, la manière dont il les perçoit et dont il réagit par rapport à ses troubles.

Il est évident que ces étapes se chevauchent au cours de la séance. L’observation de la morphologie et du teint se font conjointement à l’in­terrogatoire, l’odoration peut accompagner la palpation abdomi­nale…

Alors que la médecine matéria­liste repose de plus en plus sur des examens biologiques et radiologi­ques qui creusent un fossé entre le médecin et son malade, le praticien de médecine énergétique effectue personnellement des investigations de plus en plus poussées dans l’inti­mité du malade. Il doit s’efforcer de recueillir les signes les plus caracté­ristiques de l’état énergétique de son patient. Savoir qu’un malade est fiévreux est peu utile. Par contre, apprendre que cette fièvre sur­vient la nuit, suite à une maladie épuisante, ou qu’elle est très élevée et est survenue brutalement après des épisodes de frissons avec crainte du froid, constitue un bon élément pour le diagnostic. Des ter­mes comme diarrhées, angine, fiè­vre, céphalées, sont en fait des fourre-tout dans lesquels on peut ranger un très grand nombre de déséquilibres différents qu’il est important de caractériser. Cette démarche nécessite des sens aigui­sés, une mémoire hors du commun et un sens aigu de l’analyse et de la synthèse. Ainsi, alors que le méde­cin classique joue de plus en plus le rôle d’un fonctionnaire de santé, l’énergéticien, qui a accès aux plans les plus subtils de l’être, est souvent considéré dans les sociétés tradi­tionnelles comme un « surhomme », c’est-à-dire un personnage que sa fonction (et non son ambition) amène à un niveau de développe­ment supérieur à la normale.

Le traitement en médecine énergétique

La thérapeutique est sans doute le pan de la médecine énergétique le mieux connu du grand public. Depuis quelques années en effet fleurissent de nombreuses techni­ques, acupuncture, shiatsu, musico­thérapie, chromothérapie, etc., qui peuvent faire partie des ressources du praticien. Il ne faut toutefois pas oublier la démarche préalable indispensable à l’utilisation optimale de ces techniques qui ne sont en fait que la partie émergée de l’ice­berg : la nécessité de faire un diag­nostic précis, ce qui demande tout un apprentissage et un travail sur ses propres énergies. Sans cette connaissance, le thérapeute ne fait qu’appliquer des recettes dont il ne maîtrise pas les fondements et demeure incapable de compren­dre et de s’adapter aux subtilités qui font toute la richesse d’une médecine de ce niveau. On donnera telle ou telle plante pour la diarrhée sans réaliser qu’une substance indi­quée pour une dysenterie due à un excès de chaleur-humidité est con­tre-indiquée si la cause en est un vide-froid. Toutes les potentialités de la médecine énergétique rési­dent dans la capacité à cerner chez le malade ce qui lui est caractéristi­que, ce qui fait que l’angine de Dupont n’a rien à voir avec celle de Durand, que la grippe de ce vieillard évolue différemment de celle de cet enfant. Chaque malade recèle une énigme à résoudre, avec ses apparentes contradictions, ses pièges, et son traitement spécifi­que. Cette individualisation effec­tuée, le praticien peut alors s’ap­puyer sur un éventail thérapeuti­que extrêmement étendu. Sans pouvoir ici les citer de manière exhaustive, force est de constater que toutes les grandes médecines énergétiques utilisent des moyens analogues.

Les conseils de comporte­ment sont souvent parmi les plus simples à prescrire, même s’il peut être difficile au malade de s’y con­former. En effet, la maladie découle souvent, en partie au moins, de mauvaises habitudes de vie, et les premières recommandations pourront être, par exemple, de con­seiller de l’exercice physique, évi­ter les bains froids, chauds, avoir un rythme journalier régulier (sommeil et repas à heures fixes). Certaines pathologies sont aggravées par les siestes, les chocs, l’énervement, que le malade devra donc éviter.

La diététique a dans tous les systèmes médicaux une place fon­damentale. On tient peu compte ici de la composition biochimique des aliments mais on s’attache surtout à la nature de leur énergie (froide, fraîche, neutre, tiède ou chaude), à leur saveur (piquante, douce, amère, acide, salée, insipide, astrin­gente) et à leur tropisme, c’est-à-dire aux zones et structures du corps pour lesquelles ils ont des af­finités privilégiées. Ainsi, selon la dialectique de la médecine chi­noise, la laitue agit plus particulière­ment sur l’estomac et le gros intes­tin, la carpe sur la rate et le rein, la pastèque sur le cœur, l’estomac et la vessie. Il est également utile de connaître les capacités d’une ali­ment à apporter des liquides, ou à assécher telle ou telle partie du corps. Par exemple, la poire produit les liquides, humecte poumons et estomac et dissipe les glaires. Le coing séché ou grillé a un effet as­séchant, utile dans certains œdèmes, diarrhées et rhumatismes.

D’un point de vue pratique, il est difficile de donner un régime très structuré et détaillé. Le plus sou­vent, le médecin conseillera d’évi­ter les aliments dont la saveur ou l’énergie est la plus aggravante et recommandera les saveurs ou ali­ments les plus bénéfiques au patient.

La pharmacopée utilise les mê­mes principes que la diététique, mais de manière plus large en ce qui concerne l’étendue des substances utilisées et plus précise pour ce qui est de la dose. En fait, comme l’écri­vait Gong Ting Xien dans le Shu Shi Bao Yang, « tout ce qui est com­pris entre le ciel et la terre peut être un remède pour les Dix mille êtres ». De nombreux minéraux, végétaux, animaux et même certains matériaux humain (urine, placenta) constituent cette pharmacopée. Racines, tiges, feuilles, fleurs, grai­nes, seront utilisées pour leurs propriétés spécifiques, seules ou le plus souvent associées selon des règles précises. Un mélange de substances permet en effet de po­tentialiser certains effets, d’éviter des phénomènes indésirables, d’amener certaines énergies dans des zones où il leur serait difficile de pénétrer sans un « ambassa­deur », etc. Des préparations pré­alables et une posologie précise permettent l’utilisation de remèdes qui, sans ces précautions, se révéle­raient toxiques.

Contrairement à la médecine mo­derne, l’utilisation de ces substan­ces traditionnelles est basée sur des siècles et même des millénaires d’expérience. En Occident, les médecins de l’Antiquité tels Hip­pocrate ou Dioscoride avaient déjà une connaissance poussée des propriétés thérapeutiques de nom­breuses substances et les utilisaient selon une dialectique plus énergéti­que que matérialiste. En Chine, on attribue à Chen Nong, premier empereur mythique, qui aurait vécu 4000 ans avant notre ère, la pre­mière matière médicale (Ben Cao), sur laquelle se sont appuyés les auteurs ultérieurs.

Les massages sont les métho­des les plus simples et les moins agressives pour agir sur des zones précises de la structure corporelle. La connaissance de la physiologie subtile de l’organisme permet d’ob­tenir, par la pression de certains points ou de certaines parties du corps, des effets importants. Plus le diagnostic est précis, plus le mas­sage peut être spécifique et donner des résultats intéressants. L’efficaci­té du traitement dépend ici encore du propre développement énergé­tique du thérapeute. Les massages sont particulièrement indiqués chez l’enfant, dont la physiologie se prête moins à l’effet de remèdes puissants où à l’agressivité des tech­niques suivantes.

La puncture et la moxibustion permettent une action très précise sur la structure énergétique, dans le but de stimuler, faire circuler, dis­perser, harmoniser, réchauffer, rafraîchir… La moxibustion consiste en l’apport de chaleur par la com­bustion de plantes médicinales, ar­moise en particulier, sur la peau, ou à une faible distance de celle-ci. Des pratiques comme la cautérisa­tion ou l’application d’huile chaude imprégnée de plantes médicinales se rapprochent de ce type de mé­thode.

Un choix stratégique

Il n’est pas possible d’énumérer de manière exhaustive toutes les ressources thérapeutiques dont peut disposer le praticien de médecine énergétique. De nombreuses tech­niques comme saignées, gymnasti­ques, Qi Gong, Tai Qi, Do In… visualisations et même pratiques spirituelles peuvent jouer un grand rôle dans la résolution de certains troubles. Ainsi, en médecine tibé­taine, les plus grands spécialistes s’accordent sur l’importance de certains rituels dans la guérison de maladies mentales. La continuité entre les différents plans de l’être explique en effet qu’un mouvement ou un massage physique et une vi­sualisation ou la récitation d’un mantra puissent avoir le même ef­fet.

L’un des soucis majeurs du mé­decin doit donc porter sur le choix de la thérapeutique la mieux adap­tée à chaque patient. Il faut être capable de discerner si le patient sera sensible à des techniques phy­siques, énergétiques, spirituelles, s’il faut s’appuyer sur la diététique, la pharmacopée, la puncture… Une fois ceci déterminé, quelle doit être la manière d’agir ? Évacuer l’énergie pathologique, renforcer l’énergie saine ? À quel moment intervenir ? Quel doit être le planning des séan­ces, leur durée ? Le patient ne per­çoit souvent les améliorations qu’après plusieurs visites. Il faut savoir le faire patienter, lui mon­trer ce qui, par rapport à la dernière entrevue, a été résolu, mais il faut aussi pouvoir lui avouer notre im­puissance face à son cas et lui con­seiller éventuellement un type de traitement que nous ne maîtrisons pas nous même.

L’éthique : un impératif technique

Pour conclure, il n’est pas super­flu d’insister sur l’éthique qui doit régir l’art de guérir. Importante quel­que soit le type de médecine prati­qué, cette notion devient un impé­ratif pour l’énergéticien, dans tou­tes les traditions. En effet, il est difficile de penser pouvoir équili­brer un malade en profondeur si on n’a pas soi-même un relatif équili­bre à ces niveaux. Pour pouvoir ne serait-ce qu’accéder à l’intimité subtile de la personne, il est néces­saire de cultiver calme, concentra­tion et acuité de perception, ce qui passe par une discipline et une cer­taine purification des propres émo­tions et voiles intérieurs du praticien. Alors, ce dernier peut devenir le vecteur des forces de guérison et participer à la transformation de la santé de ses semblables.

Quelques ouvrages de référence

AUTEROCHE B. NAVAIL P. et DUBOIS J.C. Diagnostic en médecine chinoise, Ed. Maloine

CLIFFORD T. La médecine tibétaine boud­dhique, Ed. Dervy

EDDE G. Traité de médecine ayurvédique, Ed. Trédaniel

EYSSALET J.M. Diététique énergétique et médecine chinoise, Ed. Présence

GUILLAUME G. et MACH-CHIEU : Pharmacopée et médecine traditionnelle chi­noise, Ed. Présence

HAHNEMAN S. L’Organon, Ed. Similia

HUANG DI NEI JING SU WEN, traduit par A. Husson, Ed. de l’ASMAF

KENT J.T. La science de l’art de l’Homéo­pathie, Ed. Maisonneuve

MARIE E., aux Éditions Paracelse : Traité fondamental d’astrologie médicale

Astrologie et médecine ésotérique

Introduction à la médecine hermétique à travers l’œuvre de Paracelse

MASSIN C. La médecine tibétaine, Ed. de la Maisnie

MEYER F. Gso Ba Rig Pa, le système médical tibétain, Ed. du CNRS