Pensées de Krishnamurti

Si nous comprenons que le processus de la pensée ne commence que lorsque le moi devient important, et que le moi n’est important que lorsqu’il désire se sauvegarder, nous verrons que nous passons la plus grande partie de notre vie à nous sauvegarder.

(Revue Spiritualité. No 81-82-83. Février-Avril 1952)

(Pensées extraites du livre « Ojai » 1949 par R. Linssen)

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Plus on se connait, plus il y a de clarté, car la connaissance de soi n’a pas de limites. Elle ne nous conduit pas à un achèvement, à une conclusion. C’est un fleuve sans fin. Au fur et à mesure que l’on y plonge, on trouve la paix. En ce silence, le Réel nait, qui est félicité, action créative.

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En présence d’une très belle chose, si vous commencez à bavarder, vous ne sentez pas sa signification. Mais dès l’instant que votre esprit se tait, dès l’instant que vous êtes sensitif, la beauté de cet objet vient à vous.

De même, si nous voulons comprendre quoi que ce soit, non seulement devons nous physiquement nous tenir tranquilles, mais nos esprits doivent être à la fois sur le qui-vive et calmes. Cette passivité alertée de l’esprit ne peut pas être obtenue par la contrainte.

Page 15 :

Si vous ne vous comprenez pas vous-mêmes, comment, pourquoi, et au nom de quoi irez vous le raconter à d’autres ? … Si vous n’êtes pas empêtrés dans toutes ces activités verbales, si vous êtes plongés, au contraire, dans la perception de la vie, vous et moi sommes en communion.

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Si vous n’étiez plus attachés, vous vous retrouveriez n’étant plus rien du tout, n’est-ce pas ? … La peur de n’être rien, fait que l’on s’accroche à quelque chose, et le fait de demeurer accroché implique un conflit, une douleur…

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Seuls les esprits sensitifs, seuls les cœurs éveillés à l’affection, peuvent être en rapport avec le monde extérieur.

Page 21 :

Tant que dans nos rapports, nous nous servons de l’intellect, nous ne pouvons comprendre ce que sont des relations réelles… L’amour n’est pas le produit de la pensée. On ne peut pas « penser » l’amour. L’amour est un état d’être. Et lorsqu’on y intervient mentalement avec tout ce que l’esprit y apporte de calculs, de jalousies, d’habiles illusions, le problème de nos rapports surgit. Nos rapports n’ont de valeur que s’ils sont le moyen qui nous permet de nous, révéler nous-mêmes à nous-mêmes. Et si, au cours de ce processus, nous nous explorons profondément et extensivement, nos rapports seront un état de paix, non une lutte, un antagonisme de deux personnes.

Ce n’est que dans le calme, où fructifie la connaissance de soi, qu’existe la paix.

Page 22 :

Où est l’autorité, il ne peut y avoir de pensée, de perception : il ne peut y avoir de découverte du Réel.

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Il y a aussi la peur de la solitude, la peur de se trouver seul, sans livre, sans radio, sans conversation; la peur de sortir seul en promenade, ou de demeurer seul assis sur une chaise, tranquillement: sans se livrer constamment à quelque activité qui absorbe les mains, la tête, le cœur…

Page 27 :

Être poète implique la capacité d’accueillir le neuf; c’est être assez sensitif pour répondre à ce qui est frais et nouveau.

Page 29 :

Lorsque nous disons que le savoir et les connaissances sont des obstacles, il est entendu que nous ne parlons pas des connaissances techniques, de la façon de conduire une auto. Nous parlons de tout autre chose : de ce sens de félicité créative qu’aucune somme de savoir ne peut apporter. Être créatif dans le sens le plus vrai, c’est être libre du passé, d’instant en instant. Car c’est le passé qui continuellement projette son ombre sur le présent.

Page 30 :

La découverte de la vérité n’a pas de sentier. Il nous faut naviguer par des mers dont on n’a pas dressé de cartes, ce qui n’implique ni découragement ni esprit d’aventure.

Page 37 :

Nous croyons avoir compris une chose en lui donnant un nom. Nous la nommons afin de la reconnaître, en tant qu’espèce; mais ce n’est pas la comprendre, l’éprouver par expérience.

Page 3 9 :

Si nous comprenons que le processus de la pensée ne commence que lorsque le moi devient important, et que le moi n’est important que lorsqu’il désire se sauvegarder, nous verrons que nous passons la plus grande partie de notre vie à nous sauvegarder.

Page 45 :

Après tout, un récipient n’est utile que lorsqu’il est vide, et un esprit rempli de croyances, avec ses dogmes, ses affirmations, ses citations est stérile, il n’est que répétitif.

Page 49 :

Tout ce que je puis faire « moi », c’est mettre le doigt sur vos propres difficultés, et nous pouvons ensuite en parler les uns avec les autres, mais c’est à vous qu’il appartient de les voir… Je n’agis que comme un miroir dans lequel vous vous voyez vous-mêmes. S’il vous arrive vraiment de regarder dedans, faites le clairement, sans émotion, sans le voile de la sentimentalité.

J. KRISHNAMURTI