LE DILEMME
Quelle est la différence entre le divin et le mondain, entre le spirituel et le matériel ? Y a-t-il une différence ? Y a-t-il une différence entre être spirituel et être dans le monde ? Nous avons tendance à séparer les deux. C’est une grave erreur. Il n’y a pas de différence entre le spirituel et le matériel lorsque nous le regardons du point de vue de la Vérité.
La différence réside dans notre attitude, dans la manière dont nous voyons le monde. C’est la façon dont nous le regardons, voilà tout. Nous pouvons le regarder du point de vue de l’ego, ou du point de vue du Soi. Une personne réalisée voit le monde uniquement comme une projection extérieure d’elle-même ; par conséquent, c’est réellement sa création. Et comme projection extérieure, c’est comme un écran de cinéma sur lequel tout cet univers est projeté et qui, à volonté, peut être modifié ou retiré. Pour celui qui ne voit pas la Vérité, ce cinéma, ce film en mouvement, ne semble pas être créé par lui-même, et, en tant que tel, il s’y soumet et en devient esclave.
Un Maître est très présent dans le monde. Un Maître a les pieds fermement ancrés sur la Terre, mais il voit la substance fondamentale juste derrière le monde apparent comme son propre Soi. Et lorsqu’il fait cela, tout est en harmonie, tout est parfait.
VOIR LA VÉRITÉ
Il ne s’agit pas de séparer l’un de l’autre, ou d’avoir l’un ou l’autre, il s’agit simplement de voir la vérité du monde. Quand on le fait, on est réalisé. Quand on ne le fait pas, on lutte sans fin contre son propre monde d’oppositions créé par soi-même. Tous deux voient le monde. Le Maître voit la Vérité juste derrière et il n’y a rien d’autre que l’harmonie ! L’être non réalisé voit la séparation et l’opposition, et il y a beaucoup de dysharmonie ! La personne non réalisée voit le monde comme une chose qui la dirige ; la personne réalisée le voit comme sa propre projection et, par conséquent, il peut le diriger et le monde ne peut la diriger. En étant Maître de celui-ci, il demeure toujours le même, dans la paix et la tranquillité, et vit dans la complète aisance en tout temps.
Nous devons, dans notre vie quotidienne, être dans cet état de tranquillité, et, tant que nous ne pouvons être dans cet état au milieu des détails de la vie de tous les jours — nous n’avons pas atteint le sommet. Il n’y a donc pas deux catégories, le monde et l’esprit ; tout est un et le même. C’est seulement une question de la façon dont nous le voyons. Nous devrions nous efforcer d’atteindre l’état où personne ni rien ne peuvent nous troubler. Quand nous atteignons cet état, nous sommes au sommet.
Nous sommes dans le monde et rien ni personne ne peut nous perturber le moins du monde. Développez cela. Faites-en une pratique. Faites-en votre manière de vivre. Ne réagissez pas aux gens ; ne vous mettez pas en colère, ne soyez pas jaloux, haineux, et ainsi de suite. Restez toujours le même, toujours le même ; quoiqu’il arrive, quoi qu’il se passe, vous êtes réellement toujours le même, serein et posé.
QUESTIONS ET RÉPONSES
Q : Mais Lester, quand je regarde le monde, je vois des différences ?
Lester : Chaque fois que nous voyons une différence, ou une différence entre le spirituel et le mondain, c’est parce que nous n’avons pas encore suffisamment de compréhension du spirituel. Nous séparons. L’état le plus élevé est lorsque nous sommes dans le monde et dans l’esprit en même temps et qu’il n’y a aucune différence. Lorsque nous y sommes, nous ne le voyons pas comme monde et esprit. Nous le voyons comme une seule et même chose ; nous voyons une unité ; nous voyons tout comme notre propre Soi ; ou, si nous le voulons, nous voyons le monde entier comme étant en nous, comme un rêve est en nous durant le sommeil. Quoi qu’il arrive dans le rêve, nous restons les mêmes. Nous ne voyons absolument aucune différence en quoi que ce soit ; il y a une unité singulière à travers tout. Rien ne change. Notre ressenti est toujours-le-même.
Cela peut servir de critère pour savoir où nous en sommes sur le chemin. Tout est-il toujours identique ? Les choses ne changent-elles vraiment pas ? C’est un peu choquant quand nous commençons à examiner les choses sous cet angle. Où en suis-je sur le chemin qui mène à la perception de l’identité, de l’Unité, du rien d’autre que Dieu, Dieu en tout, le Dieu en chacun ?
Quand vous réalisez cette non-dualité, vous perdez le sentiment de séparation du « moi ». Si vous voulez reconnaître les « autres » apparents, vous utilisez le mot « nous ». Mais plus encore, vous préférerez parler de vous-même à la troisième personne. C’est le sentiment qu’éprouve un Maître, et Il parle ainsi. Certains Maîtres ne parleront pas d’Eux-mêmes par leur nom ; ils parleront d’Eux-mêmes à la troisième personne, comme le font leurs disciples. Par exemple, si tout le monde m’appelait comme Ken m’appelle en plaisantant, je parlerais du Père Divin. Au lieu de dire « je », « moi » ou « Lester », je parlerais de lui (en se désignant lui-même), Père Divin. C’est simplement ainsi que vous vous sentez lorsque vous êtes dans l’état où tout est un et tout est le même. Vous ne vous identifiez pas seulement à votre corps.
J’ai insisté sur ce point parce que plusieurs posaient des questions et parlaient des deux, le monde et l’esprit, sans savoir qu’en Vérité ils ne font qu’un.
Q : Il n’y a pas de différence ?
Lester : Exactement. C’est une seule et même chose, lorsque vous voyez les choses correctement. Si vous les voyez à travers l’illusion, si vous les voyez de travers, vous verrez la séparation ; vous verrez la différenciation entre ce qui est spirituel et ce qui est mondain ; entre ce qui est divin et ce qui est profane.
Q : Les « moi » sont-ils notre ego ?
Lester : Oui. Les « moi » sont une condescendance de la part d’un Maître afin de communiquer avec les égos apparents. Un Maître ne voit rien d’autre que des Maîtres ; des étincelles de lumière infinie, toutes semblables — des êtres rayonnants, effervescents et flamboyants, des points d’Être ne faisant qu’Un. C’est ainsi qu’un Maître voit réellement tout le monde ; Il ne voit pas les gens comme nous les voyons.
Q : Les voit-Il comme des nuances différentes ou toutes de la même nuance ?
Lester : Des points de lumière identiques, d’un même océan de lumière, brillants, effervescents, émanant, avec un centre partout et une circonférence nulle part. Essayez-vous d’imaginer à quoi cela ressemble ?
Q : Eh bien, j’ai eu une expérience de voir quelque chose comme cela, et c’est une lumière comme un soleil ardent.
Lester : Oui. Un soleil éclatant et flamboyant. Les Maîtres ne peuvent rien voir d’autre qu’un Maître en nous, et, en même temps, ils peuvent faire semblant de voir autrement en disant : « Harry, oui, tu as des problèmes », ou « Harry, tu as un corps et tu vis dans une maison ». Mais en le disant, c’est comme une voix de rêve qui parle, ou semble parler. Car tout cela est une apparence. C’est une prétention — ils font en réalité semblant, car leur vision de l’Un infini et omniprésent ne change jamais.
Q : Ils prétendent donc une dualité, en fait, là où nous, plus ou moins, la vivons ?
Lester : Oui. Cependant, nous la prétendons aussi, mais nous ne savons pas que nous la prétendons. Un Maître la prétend et Il sait qu’Il la prétend. Mais nous, nous ignorons notre prétention.
Q : En ce sens, Il descend à notre niveau ?
Lester : Oui. Et Il le fait seulement pour nous aider.
Q : Eh bien, pourquoi ne puis-je pas, en tant qu’être humain, dire : « Je vais jouer une partie de base-ball » ? Quand je dis que je suis joueur de base-ball, je me rends sujet à toutes les règles. Mais je n’ai pas à jouer au base-ball. Alors, pourquoi Dieu ne pourrait-Il pas dire : « Je vais jouer le jeu d’être Bob » ? Et alors, Il se soumet aux limitations de Bob, telles qu’Il les définit, tout comme quand je joue au base-ball, je me soumets aux règles. Alors pourquoi Dieu, pour se divertir, ne pourrait-Il pas être un Bob ? Ou être un Lester ? Et être limité, en un sens — la chose est que, si je joue au base-ball, je me limite à toutes les règles du joueur de base-ball. Eh bien, je vais jouer au base-ball et m’amuser et être Bob.
Lester : Dieu le peut — et le fait — mais n’oublie jamais qu’Il est Dieu ! N’oublies-tu jamais ?
Q : Donc, je suis Dieu qui joue Bob et, pour le moment, je l’ai oublié ?
Lester : Tu ne l’es que si tu le sais, non si tu le dis. Le dire du bout des lèvres ne revient pas à le savoir.
Q : Je comprends.
Lester : Théoriquement, tu as raison. Maintenant, l’important est de le mettre en pratique — de connaître ton Être en Dieu pendant que tu joues le jeu, de savoir que tu es Dieu et que tu fais semblant d’être limité en tant que corps, et ainsi de suite.
Q : Et chaque fois que je ne veux pas, je n’ai pas à jouer, et je n’ai pas à faire cette étape particulière d’être limité parce que je suis le créateur du jeu ; je fais les règles et je n’ai pas à jouer plus que je n’ai à jouer à un match de base-ball. Je peux arrêter juste comme ça ! (claquement de doigts).
Lester : C’est comme ça. Très bien, maintenant, quand tu ne sais pas vraiment que tu es Dieu, tu peux le découvrir en remontant à la source du « moi ». Si nous retraçons la source de l’ego « moi », nous découvrirons que c’est l’Être infini. Si tu remontes à la source de l’esprit, tu découvriras la même chose. L’Être infini se met lui-même ce voile de limitation, d’ego et d’esprit, afin que nous ne voyions pas cette Vérité : que ce monde est seulement Dieu — jouant un jeu de limitation apparente. La façon de le découvrir est de chercher la source de l’ego « moi », et si nous restons avec elle, nous découvrirons qu’elle est réellement le « Je » infini, le Je Suis.
Q : Eh bien, selon ton livre, et laisse-moi utiliser les mots de Bob, si je joue au jeu de balle en regardant vers Dieu, alors je n’y suis pas encore. Si je fais quoi que ce soit en regardant à partir de Dieu, alors je sais qui je suis. Mais si je joue le jeu en regardant vers Dieu, de l’extérieur, alors je ne sais pas.
Lester : Tu as raison. Traduisons cela en termes chrétiens : si je regarde vers le Christ, ou si je crois au Christ, ce n’est pas suffisant ; je dois regarder à travers les yeux d’un Christ ; je dois croire comme le Christ croyait ; je dois être comme un Christ.
Q : C’est dans ton livre. Je l’ai lu dans la Gita ce matin, et aussi dans ton livre, donc tu tiens tes vos informations d’une bonne source.
Lester : Au début du livre, il y a une note précisant que la connaissance ne m’appartient pas. C’est la Vérité, mais je ne peux ni la créer ni la détruire. Je peux seulement la reconnaître ou ne pas la reconnaître. C’est le choix que nous avons — reconnaître la Vérité ou non. Nous ne pouvons pas la fabriquer ; nous ne pouvons rien lui faire ; mais nous pouvons la reconnaître.
Q : Tous les livres que je lis disent la même chose ; Patanjali le dit, Yogananda le dit, la Gita le dit et les Védas le disent ; ils le disent tous.
Lester : Oui, ils le disaient il y a mille ans, un million d’années, un milliard d’années, un milliard de milliards d’années, et, dans le futur, ils diront la même chose. Parce que la Vérité est ce qui ne change jamais ; elle est immuable. La Vérité fondamentale ne changera jamais de toute l’éternité et tu peux savoir cela pour tout l’univers. Si quelqu’un vient d’une planète située à des milliards et des milliards d’années-lumière et te dit le contraire, peu importe combien il paraît, agit ou parle d’une manière élevée, si cela ne correspond pas à ce dont tu sais de la Vérité immuable, tu peux être sûr qu’il se trompe, même s’il agit et ressemble à un dieu.
Sais-tu ce que je dis ? Même si un ange te dit quelque chose, si ce n’est pas en accord avec la Vérité, rejette-le, car il y a tant d’êtres qui paraissent élevés, qui ressemblent à des dieux, qu’on peut très facilement être trompé — jusqu’à ce que l’on connaisse la Vérité. La Vérité est la même partout, de l’infini à l’infini.
Q : Nous essayons d’avancer aussi vite que possible, et nous écoutons et lisons, et nous pensons que la bonne chose à faire est d’être sur le chemin, mais je vais à l’église et je vois un prêtre, un moine, là-bas, et il lutte sur le chemin depuis vingt ans. Comment puis-je y arriver rapidement quand je vois devant moi quelqu’un qui est sur le chemin depuis bien plus longtemps et qui lutte encore ?
Lester : Regarde cela ainsi. Si tu veux aller de Los Angeles à New York et que tu ne connais pas la route directe, tu commences à tâtonner ; tu pourrais aller d’abord jusqu’à l’État de Washington, puis tourner vers l’est, puis redescendre au Nevada, puis remonter au Montana. Cependant, si tu connais la route directe, tu prends le chemin direct et tu arrives bien plus vite. Le tâtonnement peut te prendre toute une vie. En y allant directement, tu pourrais le faire en trois ou quatre jours.
Q : Ne me dis pas un mot de plus, parce que j’ai la réponse.
Lester : Très bien. Maintenant, le prêtre ou le moine ne voit pas la route directe et il tâtonne et apprend peu à peu. Il arrivera à New York finalement s’il continue à essayer et à errer à travers les États-Unis.
Q : Mais chacun de nous n’a-t-il pas des capacités différentes ? Une personne surmonte quelque chose très facilement, très rapidement, et quelqu’un d’autre a un problème profondément enraciné qui est avec lui depuis longtemps et qui demande un effort très actif pour le surmonter ?
Lester : Oui. Cependant, la rapidité de la réalisation est déterminée par l’intensité du désir de l’obtenir. Jusqu’où sommes-nous allés dans notre désir ? Si nous sommes allés très loin, les réalisations viennent vite et facilement.
Q : Et nous nous y tenons alors ?
Lester : Oui. Elles demeurent vraiment en toi. Je te le dis : je ne t’enseigne pas. Tu reçois quelque chose que tu connaissais déjà ; tu le fais ; tu te souviens simplement à nouveau de choses que tu as toujours sues. Je ne peux pas te donner cette connaissance ; personne ne le peut. Je ne fais que suggérer de t’ouvrir à ce que tu connais déjà, as toujours connu et connaîtras toujours, inconsciemment.
Q : En d’autres termes, tu viens simplement de lire une page de ton vrai Soi.
Q : Eh bien, c’est en fait la réalisation du Soi.
Lester : Oui, et ceci est également vrai : si tu n’as pas beaucoup grandi, ou autant qu’une autre personne, tu peux aller bien au-delà de celle-ci si tu as un très fort désir de le faire. Seul un très fort désir de pleine réalisation te la donnera dans cette vie. Quiconque n’a seulement que le désir de vérité atteindra la pleine réalisation rapidement. Tu peux surmonter ton conditionnement passé quand tu le veux.
Combien de temps devrait-il falloir à un Être infini et omniscient pour savoir qu’il est omniscient, omnipotent et omniprésent ? Combien de temps cela devrait-il lui prendre pour le faire ?
Q : Une seule réalisation.
Lester : Quand l’homme le veut, il est immédiatement libéré — totalement ! Donc, en réalité, ce que ce développement devient, c’est que nous jouons avec le chemin comme nous le faisons maintenant, obtenant de plus en plus de réalisations, puis, un jour nous disons : « Oh, mon Dieu, regarde cette chose prodigieuse que j’ai toujours été ! Quelle folie j’ai jouée ! À quoi bon ! » Et boum ! C’est fini !
Q : Et à ce moment-là tu regardes à partir de Dieu !
Lester : Oui. Tu regardes à partir de Dieu et tu vois toute la chose, tu vois le rêve insensé que tu vivais en jouant au jeu de la limitation, et tu le laisses tomber, entièrement, totalement !
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Lester Levenson (1909-1994) était un physicien, entrepreneur et enseignant spirituel américain, connu pour avoir développé des méthodes de libération axées sur la libération émotionnelle, l’autonomisation et la libération intérieure. Après une grave crise de santé en 1952, Levenson entreprit une période de profonde recherche intérieure, qui mena à une transformation à la fois physique et spirituelle. Il formalisa ensuite cette approche comme une méthode d’atteinte de la liberté émotionnelle et de la réalisation du Soi, connue sous le nom de « Méthode Sedona ». Ses enseignements ont influencé les mouvements spirituels et de développement personnel modernes.
Extrait de Keys to the Ultimate Freedom: Thoughts and Talks of Personal Transformation, par Lester Levenson.
Texte original publié à : https://www.innerdirections.org/worldliness-vs-spirituality/