Patrick Lebail
La vie selon la tradition

Dans le texte considéré nous trouvons un entrelacement de beaucoup d’éléments touchant à la voie, à la philosophie qui avait cours à ce moment-là dans les milieux intellectuels évolués. En Orient l’étude philosophique n’est pas académique, elle est spéculative. Il y a plusieurs Écoles donnant leurs solutions aux problèmes. Ce sont des échanges de vues, des sortes de tournois entre philosophes. Rien n’est gratuit dans la pensée d’Extrême-Orient.

(Revue Panharmonie. No 172. Mai 1978)

Le titre est de 3e Millénaire

Compte rendu de la réunion du 18.2.1978

Quelques remarques utiles consécutives à l’enseignement de Gaudapada poursuivi pendant les séminaires chez Patrick Lebail :

— Nous vivons dans la contradiction, il faut s’élever au-dessus et tirer notre inspiration non pas des contradictions, mais de quelque chose de plus élevé, de plus stable.

— Dans le texte considéré nous trouvons un entrelacement de beaucoup d’éléments touchant à la voie, à la philosophie qui avait cours à ce moment-là dans les milieux intellectuels évolués. En Orient l’étude philosophique n’est pas académique, elle est spéculative. Il y a plusieurs Écoles donnant leurs solutions aux problèmes. Ce sont des échanges de vues, des sortes de tournois entre philosophes. Rien n’est gratuit dans la pensée d’Extrême-Orient.

— Gaupada représente le résultat ultime de la pensée upanishadique. Dire que la Divinité s’implique dans le monde et devient le monde est, pour lui, une affirmation insoutenable. Il est impossible que quelque chose qui n’existe pas, apparaisse. Il y a changement d’aspect, l’aspect de quelque chose d’immuable.

— Les choses séparées impliquent une cause. La causalité se situe dans le monde empirique.

— La pensée théologique dit : Dieu crée les choses ; à cause réelle, résultat réel. Gaudapada estime fausse cette façon de penser. Ne voyant pas de cause, nous ne voyons pas de séparation. Rien ne change, sauf les éléments de répartition du monde.

— Néanmoins la pensée a ses exigences, l’homme pose des questions. Pour le Bouddha les événements s’enchaînent les uns les autres, ce monde est un cercle vicieux au-delà duquel il faut se hausser.

La dialectique du Bouddha se détruit elle-même, c’est une pensée active. Gaudapada l’adopte en la modifiant légèrement : il y a le Réel, le monde est l’aspect d’une Transcendance. Le Védanta et le Bouddhisme sont frères jumeaux.

— La seule Réalité, c’est la conscience. L’admettre, c’est suivre la voie de la méditation. La conscience individuelle devient alors illusion.

— La perception est un moment du concept universel.

— L’homme qui vit par intuition saura que comprendre, c’est ne pas comprendre. On débouche sur une non-dialectique, sur un non-raisonnement. La compréhension n’est pas un processus intellectuel.

— Dieu est l’infini de conscience, mais il ne le sait pas (Bruno de Jessé).

— Tout ce qui est conceptuel, exprimable est contradictoire.

Qu’est-ce que la Vie ?

(1)      La vie est une Source d’énergie orientée vers sa propre conservation donc essentiellement dans le domaine de la Nature

du Manifesté ; du monde physique ;

du Changement ; de la Durée.

(2)      D’où   … vivre c’est mouvement …

…vivre c’est évoluer

(3) Celui qui vit est un : individu

— notion inexplicable. « l’individu » est en continuité avec son environnement.

— être un individu, c’est une opinion due à la centralisation des messages   sensoriels.

— évoluer = ne plus être le même

permanence de l’individualité = celle d’une opinion = erreur (voir 7)

« le bon sens » est très limité dans sa portée

(4) « Vivre c’est éprouver »

conséquence non éprouver = inexistence, mort          ou — (8)

(5) « Vivre c’est souffrir »

un pessimisme             ex-Schopenhauer

une sagesse                  bouddhisme … yoga

(proposition équivalente à (4) + — (5) : éprouver c’est souffrir

SOLUTION 1

(6) une vue contraire : « Vivre c’est être joyeux »

— l’enseignement du Véda

—    le mythe de Janaka

(une sagesse perdue : action et joie, inséparables)

(7) être éprouvé = être (dans la conscience,

(«animation du milieu mental», «Gaudapada»)

• Si on est captivé par l’expérience on vit ou meurt

le « on » est l’individu qui se découpe illusoirement dans le continuum du monde

• Si par contre on cherche la source de l’expérience on ne trouve plus qu’une  permanence (le Soi, âtman

(« Vacuité »

SOLUTION 2

(8) « vivre » est l’apparence de « être »

être = en dehors du Temps — supprimer l’apparence = supprimer l’hallucination

« mort »                                   LIBERATION