Nous le savons, tout est relation, le grand univers lui-même n’est pas un empilement de parties élémentaires séparées les unes des autres. Chaque chose en particulier découle des connexions multiples avec l’ensemble et, bien entendu, nous participons de cette unité. L’univers en tant que totalité une peut être considéré comme un organisme vivant dont chaque entité distincte et apparemment séparée est une manifestation provisoire, comme la vague et l’océan. L’être humain ressemble à un navigateur dont la boussole est déréglée, il emprunte des chemins qui ne correspondent pas à sa nature profonde. Cette notion de totalité une, en l’absence de laquelle rien ne serait, est comme endormie dans la conscience des hommes, recouverte qu’elle est par un soi imaginaire séparé complice d’une ignorance fondamentale de l’être essentiel, c’est-à-dire de l’éternelle conscience. Comme tout phénomène dans l’univers, l’être humain est relié, mais psychologiquement il se vit comme isolé, reclus qu’il est dans une image de lui-même séparée du monde.
La conscience vécue de la ‘‘condition non séparée’’ en fonction de l’unité primordiale de ce qui est d’instant en instant est la cause-effet de l’effacement spontané de la croyance d’être une entité séparée, et de la vision directe que tout ce qui est découle du fonctionnement spontané de la totalité.
Nous ignorons généralement que l’instant présent est l’innommable (éternité) métaphysiquement inséparable de l’ultime conscience. Le présent, comme la conscience, à peine nés, déjà ne sont plus, plus exactement ils se renouvellent d’instant en instant comme une totalité sans faille. C’est pour cette raison que nous pouvons évoquer la conscience présence. Cela qui est, aussi nommé, à défaut de mieux, la conscience présence se manifeste dans le monde à travers le temps, c’est-à-dire la durée, et le monde objet. Le temps, en tant que mode manifesté du présent intemporel, implique la notion de passage, de direction passé-présent-futur. Dans notre ignorance du présent intemporel, nous sommes incapables de laisser au passé la discrétion qui lui est propre, de laisser les choses du futur s’occuper du futur, et de laisser au présent son éternelle jeunesse. Le monde, en tant que mode manifesté de la conscience présence, implique la notion d’objets extérieurs se suffisant à eux-mêmes. Dans notre ignorance, nous sommes incapables de voir que l’existence et la connaissance du monde extérieur découle d’une seule et même réalité : la conscience présence. Nous naissons dans la lourdeur d’un matérialisme jamais, ou tellement peu, remis en question. La profondeur des êtres et des choses est, à n’en pas douter, d’une somptueuse légèreté transparente, lumineuse et joyeuse…