L'homme à l'écoute du cosmos, entretien Alfred A. Tomatis et Christine Hardy

Pour moi, je crois que nous sommes en train de développer délibérément une psychologie de la haine, qui est à l’inverse de la progression et ceci au bénéfice de quelqu’un. Ce quelqu’un, c’est une même synarchie qui dirige tout à l’envers. Les gens n’arrivent jamais à atteindre un plan assez haut pour se rendre compte que celui qui suscite les guerres militaires, de religion ou de partis fait partie d’une même synarchie. Et notre travail c’est de l’éviter. Plus vous chercherez une vérité, plus vous aurez cette synarchie aux trousses. Et nous devons être frappés d’humilité. Je pense qu’à tout moment nous devons nous rappeler que nous ne sommes rien : 80 % d’eau… et quelques sels minéraux. Mais nous devons aussi nous rappeler que nous sommes un rien qui écoute.

(Extrait de La science devant l’inconnu par Christine Hardy. Édition Rocher 1983. Copyright Christine Hardy)

Alfred A. Tomatis (1920-2001) Docteur en Médecine de la Faculté de Paris, Oto-Rhino-Laryngologiste. Spécialiste des troubles de l’audition et du langage. Professeur d’Audio-Psycho-Phonologie à l’École d’Anthropologie de Paris. Professeur de Psycholinguistique à l’École des Psychologues praticiens de l’Institut Catholique de Paris. Directeur du Centre International de Langage de Paris. Président de l’Association Internationale d’Audio-Psycho-Phonologie. Ex-Directeur du Laboratoire de Psycho-Physiologie Acoustique du Centre d’Essai des Propulseurs de Saclay.

A. T. — Partant toujours des choses simples, comme la mise en évidence de ce que pourrait être une oreille par rapport à la phonation et au contrôle du langage, j’en suis venu peu à peu à me rendre compte que l’oreille avait une importance plus grande qu’on ne lui accordait actuellement.

De plus, elle est elle-même attirée vers un processus d’un niveau beaucoup plus élevé qui joue sur une autre octave de notre perception et qui est l’écoute. En fait, plus j’avance, plus je me rends compte, en exagérant un peu, que l’homme est une oreille en totalité.

Mais quand je dis oreille, ce n’est pas simplement de l’oreille que l’on voit sur le côté de la tête que je veux parler mais bien de tout le système nerveux qui lui est associé. Alors, ce qui m’intéresse de plus en plus, c’est le fait que, prenant l’oreille comme point de départ de l’organe qui est attiré vers l’écoute, par ce processus d’induction, nous avons affaire, autour de cet appareil, à toute une organisation qui semble s’y associer jusqu’à faire que le sujet, non seulement parvient à écouter, mais parvient à « réfléchir » au sens propre du terme, tout ce que l’univers lui dit.

Autrement dit, il semble que l’univers, dans son énergie de création, ait une intentionnalité qui soit la suivante : celle de construire tout un ensemble qui lui permette de réaliser sa propre réflexion.

C. H. Peut-être est-ce là le point essentiel : quel est le but inhérent à l’univers, et peut-on le découvrir ?

A. T. — Je crois que c’est dangereux de le faire, car là on risque de déraisonner. Il faut prendre les choses comme elles sont et rester au niveau d’une dynamique phénoménologique.

C. H. Justement, on peut s’en apercevoir à travers l’évolution même du corps de l’homme, qui crée son oreille, par exemple…

A. T. — Oui, c’est ça, il crée son oreille ; et je suis même persuadé que c’est l’oreille qui le crée, mais je pense qu’on se perdrait en questions infinies en se demandant le pourquoi. Aussi, plus j’avance dans la recherche, plus je suis persuadé que c’est le diable qui a inventé le mot « pourquoi ».

On peut être admiratif devant une finalité, on peut la suivre, mais le pourquoi peut ne pas être donné, car nous avons très peu d’octaves de pensée, Nous avons onze octaves d’audition, une octave de vision et je ne sais combien d’octaves de pensée. Et c’est parce que nous cherchons toujours les pourquoi au-delà de nos limites que nous n’arrivons pas à les investiguer. Je crois que c’est le problème de l’ésotérisme : certaines personnes se perdent dans des recherches extérieures et ne veulent pas se limiter aux concepts qui leur sont offerts.

Alors ! l’univers, c’est quoi en fait ? Eh bien, l’univers, nous pouvons nous le figurer comme un système nerveux et nous arrivons très bien en partant de l’oreille, à reconstruire le système nerveux.

La proposition est la suivante : comment faire pour qu’un univers que nous connaissons dans certaines de ses réalités, nous soit perceptible ; attendu qu’il est supporté par d’autres substrats qui nous échappent en totalité ?

L’univers présent est vraiment la manifestation phénoménologique de l’être, de l’étant. La difficulté pour moi est de concevoir que des gens arrivent à ne pas croire à ce substrat. La négation de ce qui fait que l’univers est ce qu’il est, est peut-être la plus belle des absurdités humaines.

C. H. C’est tout nouveau, de découvrir dans la science le but inhérent aux atomes, à l’oreille, par exemple ?

A. T. — C’est nouveau et ce n’est pas nouveau. Nous avons toujours l’impression que la science nous permet d’entrer dans toute une dimension qui était inconnue. C’est faux. Cette dimension a été connue de tous temps. La seule chose que nous apporte la science actuellement, c’est une technicité pour prouver ce que l’on a découvert depuis longtemps. Nous n’avons rien ajouté de plus, ni sur l’atome, ni sur le reste. Je pense que si l’on regarde bien ce qu’ont dit les Anciens, notamment sur l’écoute, personne n’a dépassé ce qui a été introduit et inspiré par la Bible.

La Bible, c’est le livre de l’écoute. Le mot « écoute » est écrit cinq mille fois dans la Bible, avec une dimension que l’on ne trouve nulle part ailleurs. Il y a vraiment là une sorte de présence de l’écoute par rapport à tout le reste, notamment par rapport au monde de la vision.

Nous sommes enfermés dans un domaine de la vision, à cause de toute notre culture gréco-latine qui est une philosophie de la vision. On ne trouve rien chez les Grecs sur l’audition, à part peut-être quelques écrits de Cresype ; dans tout le reste, je n’ai rien relevé. Tandis que dans la Bible, il y a un thème extraordinaire qui nous montre bien qu’ils sont arrivés à définir certains plans ; c’est le leitmotiv : « écoute et tu verras ». Si l’on n’écoute pas, ce qu’on entend n’étant pas dénommé n’a pas de réalité transmissible.

Alors, la proposition que l’on peut faire dans un domaine comme le mien, est la suivante : ce qui caractérise l’homme, c’est la fonction de l’écoute, c’est-à-dire la possibilité, pour lui, d’être inondé par un bombardement de particules de toutes sortes, de pouvoir en faire une réflexion — au sens réel de réfléchir — à travers l’univers imprimé dans son corps et de laisser sortir l’expression de cet univers, sous forme d’une fonction que j’ai dénommée « la fonction parolière ».

On peut dire par ailleurs que le Logos (c’est-à-dire l’univers lui-même et celui qui l’a constitué sur le plan de l’énergie pure) suscite l’action informative qu’il a sur nous par l’intermédiaire d’une fonction qui lui est propre et que j’ai dénommée « la fonction langagière ».

Cette fonction langagière va en quelque sorte nous sculpter, compte tenu des conditions du milieu extérieur ; nous sommes en fait dans cet univers comme des cristaux idiomorphes (ces cristaux formés par les pressions de l’extérieur). Prenez par exemple un sujet qui vit en Angleterre ; sa langue étant l’anglais, il n’a pas de nasalisation. Un Napolitain, un Allemand, n’ont pas de nasalisation non plus. Vous prenez ces trois individus, si différents quant à leur morphologie, vous les placez au Canada. Grâce à l’impédance acoustique du lieu, aux hautes pressions, et aussi aux contextures du sol (plus un sol est riche, plus il y a de modifications de l’air environnant), ces sujets, au bout de quelque temps, commencent à nasaliser, comme l’Indien qui était là. Et leurs langues vont se modifier ainsi que leurs morphologies. En l’espace d’une ou deux générations, les enfants seront plus grands, leurs visages seront plus plats. Ainsi l’influence du milieu va les transformer,    tout comme un cristal se trouve modifié par les forces extérieures.

Donc, à tout moment, l’univers sollicite une réponse. Cette réponse est la fonction parolière. L’homme est doté d’une fonction parolière, et s’il a la chance d’être dépouillé, débarrassé de toute influence du milieu, débarrassé au sens d’avoir un système nerveux non encombré, non pollué par l’éducation, notamment par papa-maman, etc., il aura la possibilité d’entrer dans un plan de communication directe avec l’univers, et de le traduire.

Le malheur, c’est qu’il est obligé de passer par un langage social qui, lui, risque de gêner. Mais si sa réponse est réalisée correctement, s’il arrive à dépolluer son système nerveux, il se trouvera face à l’univers lui-même qui fera résonner l’être qui est en lui, cet être qui n’est jamais qu’une partie de l’être global.

En effet, l’être qui est en vous et celui qui est en moi sont une seule et même chose. À ceci près peut-être que je n’ai pas votre âge et que par conséquent je ne suis pas à la même place que vous, puisque l’univers se déplace. Il s’agit donc, non pas d’un problème d’âges mais d’un problème de distances. Et si j’arrive à adhérer en totalité à l’univers, à ne pas être la proie de tout ce qui se passe autour de moi, j’aurai la chance, à cet instant, d’obtenir de cet univers qui m’informe, une réponse qui sera la plus proche de la réalité.

Cette réalité va me permettre de comprendre ce que ces bombardements venant de l’univers peuvent traduire de ce que le Logos nous dicte ; je vais avoir alors une réponse parallèle de ce qu’il va me dire. En grec, réponse parallèle se dit « parabolos » : la parole vraie ou parabole. C’est la traduction du message que l’univers nous transmet et, au fond, la traduction des lois de l’univers sur un plan de réalité.

C. H. On peut donc dire qu’il y a des centres de réception des énergies dont l’oreille serait un des plus subtils ; mais quand vous parlez de la fonction langagière, cela implique aussi une émission.

A. T. — L’émission vient de l’univers qui nous bombarde de tous les côtés.

C. H. Oui, mais, par la parole, nous répondons aussi avec des énergies et des ondes ?

A. T. — Ce n’est qu’une traduction analogique. Nous ne pouvons pas traduire exactement la réalité…

C. H. Bien sûr, cela ne se passe pas sur le même plan.

A. T. — Non, pas du tout, c’est déjà matérialisé, donc progressivement dégradé, avec bien sûr, l’obligation de passer par une filière culturelle. C’est pour cela que ce que le Logos nous dicte peut nous être insupportable. Combien de gens sont-ils capables de comprendre la parabole de l’Évangile, et combien peuvent la vivre ? Car cela nous amène à une profonde remise en cause et si nous acceptons cette dimension, nous nous rendons compte immédiatement de ce vers quoi nous devons aller et ce pour quoi nous sommes faits.

Et si par hasard cette parabole est perçue parallèlement et qu’à mesure que je la présente devant vous, elle développe chez vous la même image, alors nous pouvons dire que la parabole et l’image sont synchrones l’une et l’autre, et c’est le « symbolos ». C’est pourquoi les symboles sont identiques à travers le monde, à la condition qu’ils soient toujours exprimés par un langage adhérant à la parabole.

Si, maintenant, nous n’avons pas la chance de réaliser cette rencontre, il n’y aura pas de communication entre le Logos et nous, les flèches qui vont partir de vous à moi n’auront aucun rapport avec la réalité. C’est alors le « diabolos ». Le diable, ça existe, c’est ce qui nous fait perdre tellement de temps. Or, nous sommes sur terre pour comprendre et nous n’avons que peu de temps pour le faire. L’existence n’est qu’un état précaire qui permet à quelques-uns de rencontrer la Vie. Ils sont très rares.

Alors ! qu’est-ce que la Vie ? Eh bien, c’est la manifestation de l’être dans toutes ses dimensions. Et le but qu’il faut atteindre, c’est de n’être plus le corps, mais uniquement la vie, de telle sorte qu’il n’y ait plus de discontinuité. Vous vivez depuis toujours, et vous vivrez dans tous les temps, à condition de n’être que la vie.

Je pense que nous sommes à une époque où, grâce à l’homme, la matière devient de plus en plus consciente. Mais tant que le dernier caillou est en train de souffrir d’inertie, nous n’avons pas fini notre course. Cela demande du temps, on s’en doute.

C. H. Mais ce sont des seuils à l’infini, des cycles, il n’y aura jamais un dernier caillou qui ne sera plus en train de souffrir…

A. T. — Ce n’est pas à nous de le savoir ; ce n’est pas une question à se poser. C’est prédéterminé car nous sommes dans un plan de création. Mais là où les gens font une confusion, c’est que nous sommes dans un système qui n’a pas terminé son temps de création. Il n’est pas fini.

C. H. Il ne sera jamais fini !

A. T. — Qu’est-ce que vous en savez ? Si cela plaît au créateur qu’il soit fini demain, il sera fini, et si ça ne lui plaît pas !…

Sa pensée ne peut pas être pénétrée. Ne cherchez pas à la pénétrer, sans quoi vous n’allez pas voir comment vous êtes située dans l’univers. Actuellement, vous avez la chance, comme moi, d’être un satellite largué sur un autre satellite plus gros : la Terre. Nous nous baladons à travers l’espace sidéral. À nous de percevoir ce qui nous entoure et les zones de pensée que nous traversons. Cela nous permet de regarder, de confronter d’autres espaces-temps, de savoir. C’est fantastique d’être là-dedans, et sans souffrance par-dessus le marché ; sinon, nous allons arriver à l’attitude pascalienne : celle de se sentir trop petit. En fait, un rien qui écoute, n’est-ce pas fabuleux ?

Et ce rien qui écoute est muni d’une oreille. Et là, je crois qu’il faut revoir ce qu’est l’oreille. Elle a une influence énorme sur le système nerveux. En effet, elle s’est formée avant lui, et chaque fois que l’oreille se complexifie, le système nerveux, lui, se complète. Autrement dit, il est un additif, un accessoire de l’oreille en quelque sorte. Ainsi, le système nerveux est une oreille qui a mis en place tous ses circuits de contrôle.

Vous pourrez aborder dans mon dernier livre la Nuit utérine les plans d’organisation du système nerveux en fonction des étages de l’écoute.

Je pense qu’actuellement nous sommes encore en évolution, peut-être au dernier stade, je n’en sais rien et cela ne m’intéresse pas de le savoir. Ce qui est important, c’est de comprendre qu’il existe des stades.

L’oreille est, d’abord, essentiellement vestibulaire et permet une insertion de l’organicité dans le milieu. C’est déjà un dialogue, mais ce dialogue n’est pas subtil. Et à mesure que nous avançons, sur le plan de la phylogenèse, c’est-à-dire sur le plan de l’évolution dans le temps au cours des millénaires, cet appareil se complète par des éléments de détection plus grande, jusqu’au stade de la cochlée, celle-ci permettant de verbaliser. Disons en passant que la peau est un morceau de système nerveux. Elle est aussi un morceau d’oreille.

Tout le système nerveux se termine bien après l’oreille chez l’être humain. L’oreille est fonctionnelle chez l’embryon. Son évolution est terminée au quatrième mois et demi sur le plan de la structure. Dès ce moment, elle entend tout. Or le système nerveux achève son évolution à l’âge de 42 ans. C’est une précision de grande importance. Seulement tout est fait pour que l’on n’entende pas et pour que l’on n’écoute pas. Il y a là un barrage délibéré.

Eh bien, je pense que lorsque le plan du créateur a été réalisé, il savait, Lui, que mettant en route des énergies, il rencontrerait l’inertie. Cela veut dire que chaque fois que l’être se met en activité, le non-être bouge lui aussi (inertie veut dire non-être). Et la manifestation du non-être, c’est ce qui n’est pas, c’est-à-dire l’existant : « l’existant », ce qui n’est pas.

Tant que vous existerez, vous serez dépendante de votre corps, de votre environnement : papa-maman, la culture, tout ce que vous voudrez, mais vous ne serez toujours pas. Pour être, il faut passer dans une dimension tout à fait différente, il faut se servir de cet instrument corporel pour laisser vibrer le « je suis » qui est à l’intérieur.

Nous sommes bien sûr en droit de nous demander si nous sommes arrivés à la fin ? Mais en fait ce n’est pas ça l’essentiel. Notre mission est de prendre notre individu par la peau du cou, de le désinsérer de son personnage qui le bloque complètement mais qui est malgré tout le fruit d’une culture, et d’essayer de le rendre conscient jusqu’à son dernier atome. Ce qui représente un travail énorme. Et lorsque nous avons fait cela, que devons-nous faire d’autre ? Eh bien, inviter les autres à suivre le même processus.

C. H. Quelle est l’évolution de l’oreille des dauphins ou de celle d’animaux extrêmement évolués comme la chauve-souris qui ont des systèmes de sonar, par rapport à la nôtre ?

A. T. — Il y a toujours dans l’évolution du cerveau et de l’oreille une dialectique entre les deux, qui fait que chaque fois que l’oreille atteint un plan, elle induit le cerveau à faire de même. De temps en temps, il y a des clivages, parce que l’oreille a été un peu trop vite et que le cerveau n’a pas suivi.

L’oreille d’un dauphin est fantastique. Elle atteint une performance d’audition des aigus plus grande que la nôtre. En effet, celle-ci ne dépasse guère la possibilité de percevoir les sons au-delà de 16000 à 20000 hertz ; or, la sienne va jusqu’à 220000 hertz mais le cerveau, lui, n’a pas atteint la même évolution.

Il y a un animal dont l’oreille est encore plus puissante, mais qui n’a pas de cerveau : c’est l’hippocampe. Il a d’ailleurs, une rectitude, une verticalité extraordinaires, mais il n’a pas de cerveau. La chauve-souris n’est absolument qu’une oreille. Quand on ouvre le crâne de ces animaux, on s’aperçoit que ce sont des oreilles fantastiques, mais que le cerveau est vraiment minuscule, presque inexistant. Autrement dit, ce sont des animaux qui sont pour l’instant peut-être des « apprêts » (ou en préparation) par rapport à ce que nous sommes devenus.

Je ne crois pas au système strict de l’évolution, je crois en des mutations qui font que l’on évolue de stade en stade. Si vous regardez les plans de la création, vous constatez que ce sont des plans de mutations. Et si vous lisez bien la Genèse, vous verrez que ce n’est pas de jour en jour que les choses sont faites, mais de manifestation en manifestation. Les « Yom », terme que l’on traduit par jour, sont des manifestations de différents plans, Yom voulant dire « l’énergie qui entre dans la matière », ce qui est extraordinaire : donc il s’agit vraiment de mises en forme de nouvelles structures.

C. H. Les noms des patriarches se réfèrent d’ailleurs à des cycles ?

A. T. — Exactement. Et quand on dit que tel ou tel a atteint tel âge, c’est faux ; ce sont des cycles. Il s’agit non pas d’un homme, mais d’une humanité.

Le plus grand livre de sociologie, c’est l’histoire de Noé. Car Noé est une intégration de l’énergie dans la matière et, si vous lisez bien la Bible, vous constatez que c’est le premier qui a pris une image réellement charnelle, le reste n’était que des plans d’intentionnalité qui se mettent en route. Adam, par exemple, ne répond qu’à une des intentionnalités de mise en forme d’une structure comme le confirme l’analyse des lettres hébraïques qui le constituent, Adam, cela signifie « quelque chose qui met en route la matière », en tenant compte précisément de la position de l’énergie par rapport à la matière.

C. H. Et vous pensez qu’à l’époque de Noé, l’homme a passé un stade ?

A. T. — A l’époque de Noé, l’homme devient chair. De plus, Noé veut dire « l’homme universel disant  » oui  » ». C’est pour cela qu’il entre dans l’alliance.

C. H. C’est la première réponse de l’homme ?

A. T. — C’est la première fois qu’il est constitué en tant qu’homme, donc c’est la première  fois qu’il peut adhérer à la marche de l’univers. Mais on sait très bien que s’il adhère, il y a toujours en lui ce facteur adamique avec le danger de croire qu’il est uniquement par lui-même. Or, déjà dans l’intentionnalité Adam, « dam » voulant dire « la terre rouge », le aleph (a) va l’insuffler et lui donner un moyen d’agir.

Mais il y a aussi la lettre « d » — daleth, qui veut dire la dépendance et la domination, car l’homme est le gérant de l’univers. Remarquez qu’il ne sait pas gérer : c’est pourquoi il détruit. Il a cru en fait qu’il était indépendant et il a voulu gérer de lui-même. Il a oublié que sans cette notion de dépendance qui le met sur orbite, il ne peut rien faire. Le « daleth » signifie aussi la division. Autrement dit, on a ôté le sens de dépendance et il ne reste plus que celui de domination et de division. Si bien que d’emblée, il existe déjà une sorte de scission et cette scission va subsister jusqu’au moment de l’apparition de Noé.

Mais on sait que les fils de Noé n’écoutent pas toujours, et cela recommence. Mais cela va-t-il aller de pire en pire ? Je ne le pense pas. De nos jours, les gens sont pessimistes, ils ont raison quand on juge ce qui se passe, mais en fait, ce sont de petits troubles de surface. Ce qu’il faut, c’est créer des sortes d’îlots de respiration (vous savez qu’avec trois litres d’huile on peut faire mourir un étang). Donc avec des petites ouvertures à ce niveau-là, on peut améliorer les processus vitaux. L’écoute est justement l’un des grands moyens de créer ces îlots de respiration.

Si vous considérez l’évolution des hommes sur le plan de la pensée, vous pouvez constater qu’au même moment et dans plusieurs endroits du globe des gens ont été imbibés des mêmes grandes idées (car c’est l’univers qui parle et non pas nous). Et vous pouvez avoir ainsi un Platon en même temps qu’un Bouddha, avec des filtres, des perceptions et des cultures différents. Il y a donc eu des cristallisations de conscience assez fortes pour leur permettre de capter la pensée universelle. Et je reste persuadé qu’il y aura de plus en plus de gens qui atteindront ces plans de conscience.

C. H. Oui, je crois que malgré les mouvements de surface dont vous avez parlé, ce que l’on ressent le plus profondément à l’heure actuelle, c’est une sorte de prise de conscience à un niveau collectif.

A. T. — Bien sûr, c’est pour cela qu’il y a des résistances de plus en plus grandes. Encore une fois, la matière se défend. Elle ne veut pas se laisser faire. Tout ce qui est matériel, matérialisé ou matérialiste entre en opposition. Nous gênons un statut ; cela n’intéresse pas les gens de n’avoir que des états de conscience. Et dès que la conscience se manifeste, il n’y a plus de pouvoir. On ne peut pas « prendre » la conscience, on ne peut qu’être pris par elle. C’est la conscience qui nous habite, c’est tout à fait différent.

D’ailleurs, vouloir prendre la connaissance, la conscience, c’est encore un danger adamique. On ne peut rien prendre. Nous sommes de petits appareils de connaissance totale, nous sommes des mémoires éternelles. Mais ce qui occulte nos mémoires éternelles, c’est le souvenir de notre vécu, qui bloque tout l’ensemble. Est-ce que le souvenir de notre vécu nous dérange ? Non, si nous avons la chance de nous rendre compte que c’est notre fichier de documentation.

C. H. Peut-être parce que ce souvenir n’est pas assez lointain. Il nous dérange si l’on en reste au stade de la vie personnelle, mais si l’on remonte plus avant dans la mémoire…

A. T. — Oui, mais vous ne pouvez pas avoir la chance de comprendre le reste sans avoir au moins ce paramètre, sans le placer immédiatement dans votre computer, comme fiche de documentation. Si vous n’avez jamais souffert, vous ne pourrez pas comprendre que l’on puisse souffrir. Si vous n’avez pas traversé des zones de difficultés, vous ne pourrez pas comprendre que l’on soit obligé de passer par là ? Il existe de temps en temps des gens surprotégés qui ne se rendent compte de rien et qui risquent d’entrer dans une sorte de béatitude qui ne sert à rien.

Le périple existentiel du Bouddha nous en donne la preuve. Jusqu’à l’âge de 20 ans, il fut par son père fantastiquement protégé jusqu’au moment où il s’est rendu compte que les gens souffraient autour de lui. Toute sa démarche ultérieure sera conditionnée par la prise de conscience de cet événement. Par ailleurs, certains Saints sont aussi des êtres protégés qui, à partir de deux ou trois petits détails, deux ou trois événements fortuits, arrivent à tirer immédiatement des conclusions phénoménales sur la signification de ces événements. Il y en a d’autres qui ont besoin d’une expérience plus longue et qui arrivent à un état de sainteté plus tardivement.

C. H. La protection au début de la vie est nécessaire pour que nous ayons confiance en nous-mêmes, et dans notre rapport avec le cosmos.

A. T. — La protection, oui. Un enfant semble être protégé en totalité par la coque utérine. Il y a là une protection extraordinaire de telle sorte que si vous faites un thème astrologique par exemple, à partir du moment de la conception, vous risquez de vous tromper à cause de cette protection. On pourrait penser que l’instant de la conception joue un rôle essentiel, or, il ne le joue pas car l’utérus protège même contre les influences cosmiques. Malheureusement, si la mère n’inonde pas le fœtus d’un langage affectif doux et aimant, l’enfant sera perturbé. C’est donc la mère qui le prépare à la vie. Et la notion d’amour de cette première vibration, qui est une vibration de vie, est superposée à l’image maternelle. Donc, s’il n’y a pas cela, de grandes difficultés sont à prévoir par la suite. En tout cas, cela gêne pour l’éveil de la conscience.

Il nous est donc donné la possibilité d’entrer peu à peu dans ce processus de communication. Et je crois que si vous parvenez à un certain stade, si vous passez à une autre octave qui est celle de la Vie avec un grand V, vous atteignez un point spécifique à partir duquel tout ce qui se passe ici-bas n’a plus d’importance. C’est comme si nous étions très très loin, avec la chance d’être projeté à l’infini dans un satellite qui est notre corps et qui nous permet d’assister à un déroulement, à une sorte de réflexion en retour pour nous montrer ce qui se passe dans l’univers, et non ce qui se passe dans le milieu des hommes.

Mais nous avons aussi la possibilité d’aller nous balader dans le passé ou dans le futur. Le diable aidant on peut le faire ; mais c’est très dangereux car on entre dans des plans qui sont interdits. C’est comme les gens qui s’amusent à sortir de leur corps pour voyager dans l’espace. Un corps, cela ne se quitte pas car on prend vite sa place. Mais si on sait que ce corps est suspendu à l’être qui l’habite, c’est dans les bras de ce dernier qu’il doit résider. Et cela change tout.

C. H. Le fait que l’homme reste vraiment enserré dans le plan matériel, qu’il n’ose pas quitter son corps, qu’il n’ose pas justement explorer l’inconnu, ne pensez-vous pas que cela ressemble exactement à l’enfant qui ne veut pas quitter le ventre de sa mère ? Et n’est-ce pas justement le même mode de pensée : le fait de croire que l’on est tout seul sur notre planète, ou d’avoir l’impression qu’il y a une défense de rencontrer l’inconnu ? Je ne conçois pas profondément qu’il puisse y avoir des plans défendus : simplement, ils nous font peur.

A. T. — Certes, il n’y a pas de plans défendus à proprement parler. Ce qui est défendu : c’est de sortir de soi.

C. H. Pourquoi ? Nous avons des protections !

A. T. — Il n’y a pas de protections dans ce domaine. La vanité de penser que l’on puisse sortir de soi risque de faire qu’un certain jour, on ne puisse plus rentrer en soi. Mais cela ne veut pas dire pour autant que l’on ne soit pas toujours ailleurs.

C. H. En fait, on est toujours ailleurs !

A. T. — On est toujours ailleurs ; on est dans ce corps et il est un télescope ou un microscope nécessaire pour assister au déroulement des événements. En fait, notre vision des choses de ce monde vient d’ailleurs. Je veux dire que nous pouvons toujours regarder ce qui se passe ici-bas, mais en tenant compte que nous sommes toujours ailleurs. Cependant, cet instrument corporel que nous détenons, il faut le garder ; c’est le seul que nous ayons à notre disposition.

C. H. Puisque la conscience se déplace sur plusieurs plans à la fois et que l’on vit synthétiquement dans plusieurs espaces-temps, on pourrait essayer de faire coïncider dans le conscient les informations de ces différents plans…

A. T. — Le corps est l’instrument capable de le faire.

C. H. Je voulais dire : en déplaçant la conscience.

A. T. — Elle se déplace sans arrêt…

C. H. Alors, c’est ce qu’on peut appeler le voyage astral, en fait ?

A. T. — Ce n’est pas tout à fait cela. Malheureusement, c’est ce que font les gens qui n’ont pas compris le sens de leur mission sur terre. C’est aussi pour cela qu’il est dangereux de les induire à entreprendre un tel voyage. Les gens qui n’ont pas la possibilité de vivre cette aventure croient pouvoir le faire ; et ils ont souvent des ennuis. Je pourrais vous montrer ici quelques patients. Ce sont des gens qui ont quitté leur corps.

C. H. Je suis d’accord pour penser qu’en quittant son corps avant d’être préparé, cela peut être dangereux.

A. T. — Il n’est pas nécessaire de le quitter. C’est grâce à ce corps que nous pouvons nous balader. Les perceptions que vous avez des différents plans, vous pouvez aussi les avoir sans quitter votre corps.

C. H. En cela, je suis d’accord. Mais il s’agit peut-être d’un plan intermédiaire. C’est comme un guérisseur qui débute, il va prendre dans ses mains toutes les énergies négatives du malade jusqu’à ce qu’il apprenne à les effacer dans le corps du malade lui-même. J’ai l’impression que ceux qui partent en astral quand ils sont prêts, (je ne parle pas des autres) c’est parce qu’ils n’ont pas encore compris comment déplacer leur conscience en restant centré dans leur corps. C’est comme un stade intermédiaire qui n’est pas parfait et qui a ses dangers.

A. T. — D’accord. Mais personnellement, je considère que le corps ne se quitte pas.

C. H. Oui, c’est dangereux, mais il y a quand même des protections très grandes.

A. T. — Il ne faut pas les lasser, ces protections. Qu’on fasse une ou deux expériences pour découvrir les dangers, c’est une chose ; il faut bien une expérience pour savoir. Mais si vous êtes décidé à écouter ces protecteurs, vous verrez qu’ils vous demanderont un jour de rester en place. Cela ne veut pas dire qu’ils ne vous conduiront pas à découvrir certaines réalités.

C. H. Je crois justement que la façon qu’ils ont de nous conduire c’est de permettre, à un moment donné, cette expérience. Puis, de la faire cesser afin que l’on trouve une nouvelle façon de voir et d’intégrer les autres plans. Si je me réfère à ma propre expérience, cela s’est passé exactement ainsi : la possibilité de partir en astral a duré trois ou quatre mois, mais après, j’ai vraiment senti que l’on me forçait à rester dans mon corps et que je devais chercher un autre mode d’écoute. Mais il y a eu ce passage dangereux et nécessaire.

A. T. — Oui, mais il y a des gens qui ne font que cela, et parce qu’ils cherchent des pouvoirs. Or, il n’y a pas de pouvoirs. Nous sommes fixés à des lois de l’univers. Quelles sont donc ces lois ? Elles vont à l’encontre des lois des hommes, bien sûr. Il existe une légitimité sur laquelle l’univers est basé, cette légitimité étant accolée au Logos. Il s’agit donc d’une sorte de logique qui nous dépasse ; et tout ce que nous pouvons faire, c’est apprécier et regarder. Et toute l’astronomie est basée sur cette loi. La science a permis de voir des planètes se mettre sur leur orbite et de constater qu’un processus de créativité est en cours.

Malheureusement, à cause de la nature inhérente à l’homme et de tout ce qu’il représente est apparu l’ego. Et cet ego va, non pas agir selon des légitimités, mais selon une légalité qui est, elle, une loi des hommes.

C. H. Vous pensez donc que les lois sont renversées entre l’univers et l’homme ?

A. T. — Elles devraient être les mêmes. Vivre en harmonie ou en sympathie avec les lois de l’univers, telle est notre recherche. C’est l’ego qui renverse les lois. Les gens ne savent pas écouter cet intérieur qui dicte comment fonctionne l’univers. Mais quand on a trouvé ces lois-là, point n’est plus besoin d’enseignement.

C. H. Est-ce que ces cycles de division et de séparation par rapport aux énergies du cosmos ne sont pas justement prévus aussi dans l’évolution de l’humanité. C’est comme l’adolescent qui se révolte, on pourrait penser que l’on est dans l’âge adolescent de l’humanité et que nous avons été coupé pendant longtemps….

A. T. — On s’est coupé !

C. H. Oui, on s’est coupé, et peut-être qu’alors, lorsqu’on retrouve l’harmonie, c’est sur un plan supérieur.

A. T. — Bien sûr. Et je pense que c’était prévisible. Prenons l’exemple d’un bassin : si vous donnez une impulsion à l’eau qu’il contient, vous voyez l’onde qui se propage, puis revient. Nous avons toujours des ondes d’aller-retour. Le plan de la création est comme cela. Dès l’instant où le Créateur a déterminé ce plan, sachant tout, il savait très bien qu’il y aurait des ondes en retour, sinon aucun événement ne pourrait se passer. La matérialisation, ce sont des énergies qui s’affrontent. Il n’y a pas de matière. Maintenant on sait que la matière n’existe pas. Il n’y a que de l’énergie plus ou moins expansée, le matériau étant encore une conscience inexpansée.

C. H. Pourriez-vous nous parler des centres de réception ?

A. T. — Du point de vue réception sonore, il y a donc l’oreille et la peau. Dans l’oreille, nous avons l’organe de Corti. Ce dernier est fabriqué avec la cellule de Corti, qui est vieille de millénaires, puisqu’on la trouve déjà chez les méduses. Or, l’apparition des méduses date de quelques millions d’années. Ces quelques millions d’années ont laissé une cellule intacte qui vit toujours dans l’eau. Puis, peu à peu, on va la voir s’enfermer dans une cavité chez les serpents. On va la retrouver par la suite dans l’oreille humaine, sur le côté, pour procéder à l’analyse des sons.

Mais elle a aussi un deuxième trajet qui va donner le poil et la plume, donc déjà la peau, ce qui suscite l’apparition de tous les organes sensoriels de la peau. C’est pourquoi il me plaît de dire de façon laconique, que nous ne sommes qu’une oreille en totalité.

Quant à nos dimensions spatiales, il y a évidemment tout le reste, par exemple et certaines perceptions, plus fines qui impliquent la participation de tout le corps. Tout notre système nerveux se met alors en activité et notamment notre perception qui entraîne elle-même le système glandulaire. Celui-ci est, à mon avis, un appareil de perception bien que la médecine occidentale continue de considérer seulement nos cinq sens comme organes de perception.

C. H. J’allais justement vous demander si, au niveau des chakras, on avait pu mettre à jour les systèmes de réception et d’émission.

A. T. — Les mettre à jour : non. On ne peut pas les observer comme on voudrait. Dans le domaine de la clairvoyance, on peut les voir.

C. H. Arrive-t-on à les capter ?

A. T. — Certains ont essayé de les photographier ; au niveau des auras, les résultats sont clairs. Mais pour les chakras, cela n’est pas assez satisfaisant. Il est certain qu’ils existent mais il manque en effet, le dégagement des rayonnements.

C. H. Mais à quelle échelle se trouveraient ces fréquences et comment pourrait-on les capter ?

A. T. — Les fréquences ? Par un phénomène inverse. C’est-à-dire qu’on peut voir à quelles fréquences ces chakras sont sensibles ; donc ce sont les fréquences d’émission qui entrent en ligne de compte.

Actuellement, par l’oreille, nous avons des réponses lorsque nous faisons une analyse de l’audition. Cela veut dire que des zones corporelles du sujet répondent à telle ou telle fréquence. Ainsi, quand on fait passer ces fréquences, on remarque une résonance au niveau des chakras. Autrement dit, lorsque nous analysons un test d’écoute, nous savons à quel niveau le sujet est en train de somatiser, ou de souffrir, ou de mal se porter.

En examinant le spectre d’écoute du sujet, nous savons qu’à telle ou telle tranche, il y a une défaillance. Sur le test d’écoute, on peut situer le corps humain, la tête étant vers les aigus et les pieds vers les graves. Après des milliers de recoupements on a pu obtenir des résultats assez précis. Par exemple un sujet qui a une pointe à 1000 hertz a toujours un ulcère d’estomac ; son plexus solaire ne marche pas, le chakra correspondant est donc bloqué.

C. H. Et qu’est-ce qui vous empêche techniquement de capter ces émissions venant des chakras ?

A. T. — La matière qui se défend et qui ne veut pas. Il y a obscurcissement. L’homme veut des pouvoirs auxquels il n’a pas droit. Et tant qu’il ne sera pas heureux d’être dépendant des lois du Logos lui-même, il sera dans l’impossibilité de trouver quoi que ce soit.

C. H. Je pense aussi que pour que l’humanité puisse entrer dans ce domaine de connaissance, il faudrait qu’elle fasse preuve de plus de sagesse et de paix…

A. T. — La sagesse, c’est l’humilité…

C. H. … Parce qu’il est trop dangereux d’accéder à ces connaissances alors que nous sommes toujours sur une planète sous la dépendance de la guerre.

A. T. — Pour moi, je crois que nous sommes en train de développer délibérément une psychologie de la haine, qui est à l’inverse de la progression et ceci au bénéfice de quelqu’un. Ce quelqu’un, c’est une même synarchie qui dirige tout à l’envers. Les gens n’arrivent jamais à atteindre un plan assez haut pour se rendre compte que celui qui suscite les guerres militaires, de religion ou de partis fait partie d’une même synarchie. Et notre travail c’est de l’éviter. Plus vous chercherez une vérité, plus vous aurez cette synarchie aux trousses.

Et nous devons être frappés d’humilité. Je pense qu’à tout moment nous devons nous rappeler que nous ne sommes rien : 80 % d’eau… et quelques sels minéraux. Mais nous devons aussi nous rappeler que nous sommes un rien qui écoute.

C. H. Évidemment, par rapport au vide entre les particules de notre corps, nous ne sommes rien.

A. T. — Mais est-ce que ce vide n’est pas plein, justement ?

C. H. Oui, c’est ça plein d’inconnu.

A. T. — Cela vous gêne-t-il qu’il soit inconnu ?

C. H. Ah non ! cela ne me gêne pas du tout, au contraire, c’est ce qui est à chercher. Par rapport à notre conscient, on est dans un océan d’infini inconscient qui est l’inconnu pour nous.

A. T. — Je crois que l’on est gêné par une question de langage. On s’est trompé dans la terminologie : l’inconscient est ce qui est dans la conscience ; inconscient : dans le conscient. Or, on en est arrivé à un « in » privatif, sans conscience, ce qui est dangereux. La conscience totale ne peut être que le fait de Dieu, c’est tout.

C. H. Je suis d’accord, cet inconscient, c’est l’univers entier.

A. T. — C’est plus que l’univers entier. Actuellement, en science, puisque vous vous intéressez à la science, on en est arrivée au point où nous ne sommes assurés que de très peu de choses. Nous ne pouvons réellement compter que sur trois lois qui sont bien fondées : la loi d’Einstein, la formule de Planck, et celle de Boltzmann sur l’entropie. C’est tout et c’est peu de choses.

Une autre déviation de la science actuelle est à mon avis de ne pas comprendre la position exacte de l’homme qui semble, grâce à sa conscience, lutter contre la restructuration du chaos l’homme semble être le facteur d’anti-entropie.

Encore une fois, je crois que si nous avons la sagesse de rester dans les registres qui nous sont accordés, nous pouvons observer et éprouver ce qu’il nous est donné de pouvoir faire. Et pour cela, nous avons très peu de temps.

C. H. Pourquoi cette notion de très peu de temps ? Et pour arriver à faire quoi, exactement ?

A. T. — Nous devons situer cette notion de temps par rapport à nous-mêmes ou par rapport à la mission qui nous a été confiée. Si nous n’effectuons pas cette mission, nous trahissons. Chacun a son travail à accomplir. Le danger d’avoir une perception plus fine que certains autres êtres humains, c’est de nous prendre pour quelque chose. C’est plus dangereux d’avoir certains dons à sa disposition, car on risque de déraisonner plus vite que celui qui ne les a pas.

Quant aux énergies, Carlo Suarès a fait une étude très intéressante à ce sujet, et j’ai pu moi-même mesurer les énergies des lettres hébraïques.

C. H. Comment ?

A. T. — J’ai fait prononcer ces lettres par des rabbins et j’ai pu enregistrer leur énergie sur des tubes cathodiques.

C. H. Pouvez-vous expliquer ce que sont ces tubes cathodiques ?

A. T. — Ce sont des plaques sur lesquelles les lettres s’inscrivent comme si vous les aviez écrites à la main. Autrement dit, les sages qui ont déterminé cette écriture avaient une perception tellement fine qu’ils ont projeté sur la pierre ce qu’ils percevaient des sons eux-mêmes. Ils sont donc arrivés à fournir une réponse visuelle analogique à une perception du bombardement sonore.

C. H. Vous voulez dire que la lettre est une transcription exacte de l’onde ?

A. T. — Oui, par exemple dans l’aleph (a) vous avez des fréquences qui vont des graves aux aigus, et l’étalement du son reproduit la forme de la lettre.

C. H. Donc, la courbe même des fréquences forme un aleph ?

A. T. — Exactement. Par contre, vous avez une lettre qui ne donne rien. Vous pouvez la hurler. C’est le « mem », qui est l’eau. Cela ne donne rien, il n’y a pas d’image.

Je voudrais terminer en disant que si l’on atteint un certain plan de recherche, on n’a plus besoin de langage pour communiquer. Parce que le langage est presque un accélérateur, un cyclotron qui permet de parvenir à ce plan, à ce mode de pensée où l’on n’a plus besoin de langage. Reste à savoir si l’on peut penser sans parole. Je crois qu’à un très très haut niveau, l’adhésion au Logos n’a pas besoin de langage. Seulement, pour pouvoir entraîner l’autre, on est obligé d’utiliser ce matériau.

Dès que vous parlez, vous avez la chance de mettre l’autre « en forme », cela se dit « informer ». Mais c’est un danger de mettre l’autre en « forme » : est-ce que ma parole va être bénéfique ou est-ce que je ne vais pas le détruire ? C’est tout le danger de l’éducation.

Parler, c’est donc jouer vraiment du système nerveux de l’autre. Or, nous avons la chance de pouvoir améliorer ce langage. C’est le but des cures que nous faisons dans certains centres appliquant nos techniques.

Chaque fois que je vous parle, je suis le premier auditeur de ce que j’exprime. Autrement dit, si je veux vous passer un message de qualité, je dois pouvoir mesurer certains paramètres comme l’intensité, le timbre, la coulée verbale, le sémantique. La caresse acoustique que représente mon langage pour mon interlocuteur est aussi une caresse que je dois ressentir. De plus, il faut considérer que le langage est quelque chose qui doit envelopper l’autre de manière aimante, harmonieuse et non haineuse. Et pour aimer l’autre, il faut s’aimer soi-même, se sentir bien dans sa peau. Ceci est important.

Le langage doit être dominé du désir d’avoir l’autre, de le posséder. Il implique donc une grande honnêteté, une grande humilité.

BIBLIOGRAPHIE

Léna Tomatis – Intégration des langues vivantes, Ed. Soditap, 1974.
Carlo Suarès – Analyse de l’alphabet hébraïque.

PRINCIPAUX OUVRAGES DE A.A. TOMATIS

L’Oreille et le Langage, Ed. du Seuil, 1963. Collection « Point-Science ».
Éducation et Dyslexie. Ed. ESF, 1972. Collection « Sciences de l’éducation ».
La Libération d’Œdipe, Ed. ESF, 1973. Collection « Sciences de l’éducation ».
Vers l’Écoute humaine (2 tomes), Ed. ESF, 1974. Collection « Sciences de l’éducation ».
L’Oreille et la Vie, Ed. Laffont, 1977. Collection « Réponses-Santé ».
La Nuit utérine, Ed. Stock, 1981.

QUELQUES ARTICLES ET COMPTES RENDUS DES CONFÉRENCES

Inconscient et conscience, Bulletin Tomatis information, 1980.
L’Oreille et le chant, conférence au conservatoire de Berne, 1980.
Oreille et structure du corps, interview avec Alain Gerber, revue Son, 1977.

Christine Hardy est Dr es sciences humaines et ethnologue. Son blog en anglais : http://chris-h-hardy-dna-of-the-gods.blogspot.fr/. Dernier livre publié en Français : La Prédiction de Jung : La métamorphose de la Terre. Dervy, 2012. En anglais : DNA of the Gods: The Anunnaki Creation of Eve and the Alien Battle for Humanity, Bear & Co., USA & Canada, mars 2014. À Lire aussi son interview dans le numéro 104 de 3e Millénaire.