Michel Odent
La première heure après la naissance

On comprend beaucoup mieux aujourd’hui que lorsque la mère et le bébé ont un contact étroit alors qu’ils sont encore imprégnés des endorphines mises en jeu par l’accouchement et la naissance, il s’agit d’une étape importante du processus d’attachement. On comprend mieux ce qu’est une période critique. On comprend mieux également aujourd’hui que toute drogue analgésique ou ocytocique introduite pendant l’accouchement entre en compétition avec les hormones naturelles et que la destruction de ce qui est un équilibre hormonal complexe continue à avoir des effets après la naissance…

(Revue CoÉvolution. No 12. Printemps 1983)

Michel Odent est un chirurgien et obstétricien français, auteur de nombreux livres.

Il y a peu de temps que l’amour est devenu un sujet d’étude pour scientifiques. Bien entendu, les scientifiques ne prononcent pas le mot « amour » : ils étudient l’« attachement », le processus de « lien » (bonding process), l’empreinte, etc…

Le point commun de toutes les perspectives scientifiques, qu’elles soient éthologique, endocrinologique, ou neurophysiologique, est de mettre en exergue les notions-clefs de périodes sensibles, de périodes critiques. On entend par période sensible une période relativement brève susceptible d’avoir une influence déterminante sur le comportement futur. Il semble que chez la plupart des mammifères — donc a priori chez l’homme — l’heure qui suit la naissance soit une période sensible.

Les bases physiologiques du comportement maternel

Tout a commencé par la perspective éthologique. Tout le monde a entendu parler des oisillons de Lorenz, qui restèrent définitivement « attachés » à un être humain et eurent ultérieurement des conduites sexuelles inadaptées à la reproduction, Par la suite, l’éthologie animale a multiplié les études chez les mammifères, y compris chez les primates et aussi chez les oiseaux. C’est seulement pendant les années soixante-dix que la perspective neuroendocrinienne est devenue prééminente. Un bond en avant dans notre compréhension des bases physiologiques du comportement maternel a eu lieu en 1968 quand Terkel et Rosenblatt [1] injectèrent à des rattes vierges du plasma de rattes ayant mis bas dans les 48 heures précédentes : ils induisirent ainsi un comportement maternel. Ce type d’expérience est à l’origine de nombreux travaux sur les effets des hormones « sexuelles », c’est-à-dire les œstrogènes, (progestérone et prolactine). On sait qu’il se produit des interactions continuelles entre ces trois groupes d’hormones pendant la grossesse et pendant la période d’accouchement. En comparant ces données avec les effets d’injections d’hormones, il a été possible d’établir que l’élévation des taux d’œstrogènes et de prolactine favorisait le comportement maternel, alors que la progestérone avait plutôt tendance à l’inhiber.

Mais certains faits ne pouvaient être expliqués par la seule étude des hormones dites « sexuelles », et Rosenblatt eut à imaginer une « période de transition » pendant laquelle le déterminisme du comportement maternel passait d’un processus hormonal à un processus non hormonal. Par exemple, il était difficile de comprendre que l’on peut induire un comportement maternel chez des femelles qui ne sont pas en gestation ou même chez des mâles simplement par un contact continu et prolongé pendant plusieurs jours avec des animaux nouveau-nés. Pour interpréter ces faits, il faut faire intervenir d’autres systèmes que le système des « hormones sexuelles ».

En d’autres termes, on connaissait le pouvoir qu’ont ces dernières de déclencher un comportement maternel, mais tout cela ne mettait pas l’accent sur la notion d’habitude, de continuité qui est incluse dans les concepts d’attachement ou de lien.

Le système des endorphines

Soudain notre compréhension des bases physiologiques du processus d’attachement a subi un nouvel essor avec l’une des découvertes les plus stimulantes de cette dernière décennie. La découverte des « neurohormones » a supprimé les limites entre les systèmes nerveux et endocrinien. Les neurohormones sont des transmetteurs chimiques secrétés par les cellules nerveuses. La découverte, en particulier, des neurohormones à action morphinique bouleverse notre connaissance des processus de reproduction en général. Ces neurotransmetteurs ne sont pas encore bien connus. Le « système des endorphines » est vraisemblablement très complexe. Chez la mère et le fœtus il serait fortement impliqué pendant l’accouchement et contribuerait à induire une « interdépendance » entre la mère et le nouveau-né.

Il est impossible de résumer tous les travaux d’origines diverses qui tendent à illustrer le rôle prééminent de ce système dans le processus d’attachement ou à établir les conditions étroites qui existent entre ce système et d’autres systèmes hormonaux (également impliqués dans les phénomènes de reproduction comme la lactation, l’acte sexuel).

Mais pour combler le fossé des études des bases hormonales du comportement maternel et notre compréhension du phénomène d’attachement, il est utile de rappeler certaines des propriétés des opiacés en général et des endorphines en particulier :

— les endorphines induisent des comportements affectueux, des comportements de soins.

— les opiacés ont la propriété bien connue de créer des dépendances, de créer des habitudes. Ainsi est introduite la notion d’habitude, contenue dans les concepts d’attachement et de « lien ».

On comprend beaucoup mieux aujourd’hui que lorsque la mère et le bébé ont un contact étroit alors qu’ils sont encore imprégnés des endorphines mises en jeu par l’accouchement et la naissance, il s’agit d’une étape importante du processus d’attachement. On comprend mieux ce qu’est une période critique. On comprend mieux également aujourd’hui que toute drogue analgésique ou ocytocique [2] introduite pendant l’accouchement entre en compétition avec les hormones naturelles et que la destruction de ce qui est un équilibre hormonal complexe continue à avoir des effets après la naissance. On peut même aujourd’hui, dans un langage différent, évoquer cette ambiance « sacrée » qui règne dans certaines salles de naissance. On comprend mieux le processus d’attachement impliqué spécifiquement au cours d’événements qui appartiennent à la vie sexuelle.

Ce premier contact entre la mère et le bébé peut être considéré à la fois comme une étape et comme un modèle pour toutes les formes d’attachement en général, aussi bien entre partenaires sexuels qui ont des occasions répétées d’être ensemble « sous endorphines », ou envers d’autres êtres humains (lorsqu’on l’on est dans un état émotionnel particulier, on peut s’attacher à l’objet que l’on côtoie), ou envers les animaux, les végétaux, et même les choses. C’est la capacité ainsi acquise de multiplier les objets d’attachement qui permet d’atteindre plus facilement un état de non-dépendance. Lorsqu’on sait le rôle que joue le système des endorphines à la fois dans la protection contre la douleur, et aussi dans la sensation de plaisir et dans le processus d’attachement, on ne peut plus séparer les différentes parties de ce qui est un tout. Nous pouvons entrevoir une toute nouvelle approche de la façon dont se structure l’affectivité.

L’affectivité n’est rien d’autre que le développement, l’accroissement, l’intensification, la complexification des états de plaisir et de douleur.

Il est évident que le simple fait de s’interroger sur la nature du processus d’attachement aboutit à une remise en cause radicale des pratiques obstétricales conventionnelles. Comprendre que pendant l’heure suivant la naissance les secrétions hormonales mises en jeu par l’accouchement interviennent vraisemblablement dans l’essor du processus d’attachement, c’est chercher à ne pas perturber le déroulement physiologique de l’accouchement, c’est d’abord tout faire pour aider les parturientes à utiliser au maximum leurs propres potentialités.

L’équilibre hormonal nécessaire au déroulement spontané de l’accouchement est encore imparfaitement connu. On en connait cependant les éléments essentiels. On sait que les secrétions de catécholamines (adrénaline, noradrénaline, utilisées dans la lutte contre le froid ou pour faire face à la peur) inhibent l’accouchement et que leurs taux doivent être aussi bas que possible. On connait aussi la nécessaire sécrétion d’ocytocine hypophysaire, qui induit et entretient les contractions utérines efficaces. Nous avons vu le rôle vraisemblablement essentiel joué par le système des endorphines. Les facteurs qui peuvent aider la parturiente à atteindre l’équilibre hormonal favorable peuvent être connus de façon empirique, même si l’on ignore la nature même de cet équilibre : lorsqu’une femme accouche spontanément, facilement, sans drogues, c’est qu’elle a pu atteindre l’équilibre hormonal nécessaire.

Eléments d’une éco-obstétrique

Ainsi, nous savons, par notre pratique, que l’accouchement sera habituellement facilité, dès sa première phase, par la pénombre, par un certain silence, on pourrait dire par une réduction de toutes les stimulations sensorielles. Il sera également facilité par la chaleur. Un environnement matériel et mobilier familier, proche de celui que l’on pourrait trouver chez soi, permet de lever certaines inhibitions. Une liberté complète de position est essentielle ; cela nous conduit à observer fréquemment certaines scènes, alors que d’autres sont exceptionnelles.

Ainsi la position à quatre pattes est fréquente, quotidienne. C’est vraisemblablement une position qui réduit les sensations douloureuses, en particulier les douleurs lombaires. Sur le plan mécanique, elle semble faciliter les phénomènes de rotation. C’est une position qui favorise la vascularisation du placenta, alors que la position dorsale est celle qui la gêne le plus. Surtout, cette position de la prière semble aider la femme qui accouche à se couper du monde, à accomplir un changement d’état de conscience qui correspond, dans un autre langage, à l’équilibre hormonal nécessaire au processus d’accouchement. Tout se passe comme si les inhibitions susceptibles de gêner l’accouchement avaient pour origine le cerveau supérieur, le néocortex. La meilleure façon de lever ces inhibitions est de réduire l’activité néocorticale. Bien entendu, outre la pénombre, le silence, la chaleur, la liberté de positions, l’activité néocorticale. Bien entendu, outre la pénombre, le silence, la chaleur, la liberté de positions, l’environnement humain joue un rôle essentiel pour favoriser ce « voyage » que doit parcourir la femme qui accouche. Dans une société où la famille se réduit à la famille nucléaire, il est normal que le partenaire sexuel soit le compagnon habituel et, en tant que personnage familier, intime, il joue souvent un rôle positif. Mais certains hommes sont particulièrement anxieux, stimulent trop, parlent trop et empêchent la femme qui accouche de devenir plus indifférente à ce qui l’entoure. C’est pourquoi certaines femmes bénéficient beaucoup plus de la compagnie d’une autre femme, vécue comme expérimentée et bienveillante : c’est le rôle de la sage-femme. Dans un avenir plus ou moins proche, lorsqu’on aura remis en cause la famille nucléaire et son caractère éminemment pathogène, il sera peut-être de bon ton de souligner que la participation du père du bébé à l’accouchement était un aspect parmi d’autres de la mainmise de l’homme sur le processus de l’enfantement. Dans notre maternité, lorsque, malgré une atmosphère apparemment favorable, la dilatation du col au-delà de cinq centimètres devient difficile, laborieuse, trop douloureuse, l’immersion dans l’eau chaude de la piscine est souvent une bonne façon de lever des inhibitions et d’éviter le recours aux drogues ou aux interventions. La plupart des femmes quittent l’eau à la fin de la première phase de l’accouchement et se retrouvent dans la salle de naissance [3].

Lorsque la parturiente a pu accomplir pendant la première phase le changement d’état de conscience spécifique, c’est-à-dire lorsqu’elle a pu atteindre l’équilibre hormonal efficace, il lui est possible, lors des dernières contractions, de trouver spontanément des positions satisfaisantes sur les plans mécanique et physiologique. C’est ainsi que dans notre maternité la plupart des femmes terminent l’accouchement dans une position accroupie soutenue ou suspendue.

Après un accouchement en position verticale, il est évident que le premier contact mère-enfant est très différent de ce qu’il serait si la mère était couchée. La mère, habituellement assise sur le sol, buste vertical, tient le bébé contre sa poitrine. Le contact de peau à peau est aussi riche que possible. Le croisement des regards est parfait. Une première tétée précoce est fréquente, dans la mesure où la position de la mère est favorable et où l’on sait respecter toutes les fonctions sensorielles du nouveau-né. C’est dire en particulier l’importance de la pénombre (tout se passe comme si le nouveau-né devait ouvrir les yeux lors de cette première tétée) et celle d’un climat olfactif neutre (il est difficile d’atténuer les odeurs agressives fréquentes en milieu hospitalier). Il n’existe habituellement aucune raison d’écourter ce premier contact entre mère et enfant.

La mère est en sécurité, dans la mesure où le contact étroit avec le bébé, la stimulation du mamelon favorisent la sécrétion d’ocytocine post-hypophysaire nécessaire au détachement du placenta, et où le gros utérus ne comprime pas la veine cave, comme cela est fréquent dans les positions demi-assises ou couchées. Ce n’est pas par hasard que notre taux de délivrances artificielles (extractions manuelles du placenta) est inférieur à 1%. D’une façon générale notre attitude obstétricale, qui consiste d’abord à ne pas perturber la physiologie de l’accouchement et le premier contact mère-enfant, semble apporter encore plus de sécurité immédiate que l’attitude conventionnelle, qui consiste d’abord à vouloir contrôler en permanence la grossesse et l’accouchement. Ainsi nous parvenons depuis plusieurs années à concilier des taux de mortalité périnatale d’environ 10 pour 1000 avec des taux de césariennes qui restent inférieur à 7%.

L’avènement d’un autre être humain

Pour les mères qui ont eu l’occasion de tenir leur bébé dans les bras dans l’heure qui suit la naissance et pour les professionnels habitués à cette scène, il est évident que la première heure suivant la naissance est une période sensible dans l’espèce humaine. C’est moins évident pour les scientifiques qui parviennent difficilement à le prouver. Au Congrès de San Francisco de mars 1983, Marshall Klaus a une fois de plus posé la question et discuté la méthodologie utilisée au cours des différentes études. En fait, dès qu’il s’agit de l’espèce humaine, ce genre d’étude devient impossible. Trop de facteurs entrent en jeu. Il est évident qu’un bébé né par césarienne et séparé de sa mère dans les premières heures peut ne pas être différent des autres. Dans l’espèce humaine tout passe par la dimension culturelle et certains répètent que l’influence du milieu est déterminante, ce qui les conduit à afficher leur désintérêt pour la perspective neurophysiologique. L’important est de comprendre qu’une civilisation est constamment dans un état d’évolution et que ses caractères sont la résultante de l’addition et de l’interconnexion d’une multitude d’unités physiologiques. Il est permis de penser que lorsqu’une proportion élevée de bébés naîtront sous drogue ou par césarienne, cela induira un changement dans les caractères mêmes de notre civilisation.

Les professionnels de l’obstétrique ne connaissaient jusqu’ici que leur responsabilité à l’échelle individuelle. Ils doivent désormais prendre conscience de leur grande part de responsabilité dans l’évolution de notre civilisation. Ils ne peuvent pas continuer à perturber massivement, à l’échelle collective, des épisodes clefs de la vie sexuelle, de la vie affective, de la vie émotionnelle. Ils ont une responsabilité dans la transmission de la capacité d’aimer. A propos de capacité d’aimer, nous pensons aussi bien à l’amour entre êtres humains, qu’à l’amour envers les animaux, et même les végétaux.

L’être humain ne peut pas continuer à se détruire lui-même et à détruire la terre, les océans, l’atmosphère. Il nous faut créer un autre monde, et pour cela favoriser l’avènement d’un autre être humain, qui aura d’abord la possibilité de développer au maximum sa capacité d’aimer.

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Que signifie le premier cri du nouveau-né ?

La signification du premier cri du bébé a été interprétée de façons fort différentes dans le passé selon que l’on s’exprimait dans le langage des mères, des poètes, des médecins ou des spécialistes de la physiologie cardio-respiratoire…

Quelques expériences récentes de stimulation des centres nerveux suggèrent un nouveau type d’interprétation. Ainsi on a pu déclencher des « vocalisations de détresse » chez le cobaye en stimulant des zones très précises, exceptionnellement riches en « récepteurs d’opiacés », du cerveau archaïque (thalamus et hymothalamus).

Certains neurophysiologistes considèrent aujourd’hui que le circuit de commande du « comportement de panique » est tout à fait spécifique, et complètement étranger au « comportement de peur ». Un comportement de panique pourrait être interprété comme l’expression d’un besoin aigu de cohésion sociale.

Ainsi notre interprétation est que le premier cri du bébé pourrait être en relation avec des changements soudains de l’activité du système des endorphines et pourrait être compris comme un appel au secours, à la cohésion sociale. C’est un comportement éminemment archaïque. Peut-être pourrait-on interpréter de façon analogue le dernier cri de la femme qui accouche…

M.O.

(réf. J. Pankseep, « Towards a general psychobiology and theory of emotions » The behavioral and brain science, 1982 – 5, 407-467).

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Naissances. L’accouchement avant l’âge de la clinique par Mireille Laget, préface de Philippe Ariès Ed. du Seuil, 1982, 350 p.

La naissance n’est pas une, elle n’est pas simple, elle n’a pas toujours été celle que nous connaissons, sûre et aseptisée. Il n’y a pas si longtemps elle voyait planer l’ombre de la mort. C’était le prix du « naturel sauvage. Mais les femmes n’étaient pas seules dans ce moment, elles étaient protégées par la force du groupe qui les entourait, la naissance était acte de convivialité. Depuis, la médecine a éloigné les « faiseuses d’anges » et la protection est devenue affaire de science, la naissance est devenue exigence de vie, la femme est seule, dépossédée de son acte de pouvoir. Mais conjointement, la vie du nouveau-né a pris de l’importance, la mort du bébé de moins de 2 ans est devenue chose exceptionnelle et on s’y est d’autant plus attaché.

La naissance est devenue un but en soi et non inéluctable ; la vie amoureuse du couple a une valeur propre non liée à la procréation. L’enfant n’est plus signe de prospérité, condition de survie pour la famille, il a son existence propre. Il s’agit là d’un aspect intéressant entre autres du livre de Mireille Laget. Elle a réussi le tour de force de dresser une histoire de la naissance extrêmement documentée, mais passionnante à lire, même pour le néophyte. Elle nous y montre l’importance des croyances et des facteurs culturels sur l’accouchement, la puissance de la collectivité autour de la femme et leur prééminence sur les facteurs biologiques.

Anne-Marie Peyrat

• Au travers de cette évolution, on perçoit des rejets de plusieurs natures : refus de la douleur, refus des attitudes magico-religieuses, refus du risque de mort. Le sentiment de protection ne s’alimente plus à la solidarité du voisinage, mais aux institutions extérieures de salut : l’obstétricien, l’hôpital.

• Parce qu’il met en jeu les forces profondes de la vie du corps et de l’esprit, parce qu’il appartient à l’histoire privée, à l’histoire sociologique, à l’histoire des nations, l’accouchement échappe aux classifications habituelles de la recherche historique.

• Et même si les résistances sont grandes, à la campagne particulièrement, le corps médical et chirurgical contribue, d’une façon plus ou moins directe, à répandre des habitudes de propreté et de soins qui, d’une façon très lente, ont amélioré d’une manière globale les conditions de la naissance. C’est probablement la raison pour laquelle la mortalité en couches sera moins liée à la situation sociale. Moins injuste peut-être, mais présente néanmoins, la mort.

• Et l’enfantement ne peut qu’être marqué par l’assimilation de la fonction génératrice à la fonction sexuelle. L’accouchement des femmes commence à perdre son aspect incantatoire, rituel, immuable, pour devenir perméable au regard médical. Les recours traditionnels commencent à s’effacer devant une pratique qui sait désormais faire jouer un réflexe de sécurité.

• Le cordon est considéré dans les convictions anciennes comme un substitut de l’enfant. Le sort qui lui est fait peut déterminer celui du nourrisson : s’il est brûlé, jeté à l’eau ou dévoré par un chien, l’enfant risque de mourir par le feu, noyé ou mangé par les bêtes. L’habitude la plus répandue est de l’enterrer, ce qui constitue une protection définitive, et donne à ce tissu hautement symbolique une terre pour l’imprégner de sa fécondité. De même, dans les représentations collectives, le placenta a la signification d’une transmission de la vie, d’un passage nourricier. Il devient le symbole par excellence de la fécondité et de la richesse.


[1] Chercheurs spécialisés dans l’étude des bases hormonales du comportement maternel.

[2] Analgésique : qui supprime la douleur ; ocytocique : qui provoque des contractions utérines.

[3] Certains bébés naissent dans l’eau. Cela se produit lorsque la future mère ne veut plus quitter la piscine et que le processus d’enfantement évolue vite. Le nouveau-né est parfaitement adapté à l’immersion.