Le terme « désinformation » n’est pas ce qu’il prétend être. Ce n’est pas un terme scientifique ni une mesure objective de la vérité par rapport à la fausseté. Il s’agit plutôt d’un bâton linguistique, brandi pour discréditer l’opposition et imposer l’adhésion à un récit. Les efforts récents pour « inoculer » les gens contre la désinformation — dont le dernier en date est une étude couverte par Science et un préprint sur PsyArXiv — ne sont que les derniers d’une longue série de tentatives visant à contrôler la pensée sous prétexte de la protéger.
L’impact de la désinformation sur l’intégrité épistémique de la démocratie est une préoccupation largement répandue. En outre, la désinformation affecte manifestement les attitudes et les intentions à l’égard des comportements de santé dans des expériences et dans des situations réelles. En réponse, des chercheurs ont testé une variété d’interventions pour lutter contre la désinformation sur les réseaux sociaux (par exemple, les incitations à l’exactitude, les conseils en littératie numérique, l’inoculation, la démystification). Ces interventions font appel à différents mécanismes psychologiques, mais elles ont toutes pour objectif d’améliorer la capacité des destinataires à distinguer les vraies informations des fausses et/ou d’accroître la véracité des informations diffusées sur les réseaux sociaux. Cet ensemble d’approches est utile, mais il est actuellement difficile de comparer les interventions, car elles ont été testées dans des environnements différents, avec des ensembles de stimuli différents (par exemple, les gros titres par rapport aux tweets), en utilisant des participants différents et des méthodes différentes. Ces différences font qu’il est difficile de savoir comment les interventions se comporteraient dans un environnement de test équivalent. https://osf.io/preprints/psyarxiv/uyjha
Cette étude, dont Stephan Lewandowsky est l’auteur principal, illustre parfaitement la manière dont la « désinformation » est déployée non pas dans un souci sincère de vérité, mais comme une arme rhétorique visant carrément la dissidence. En qualifiant les points de vue divergents de désinformation dangereuse, les auteurs ferment effectivement la porte au débat et s’érigent en arbitres de ce qui peut et ne peut pas être discuté.
« Inoculer » contre une fiction
Ne prétendons pas que la désinformation est un phénomène réel. Le terme implique une norme objective de vérité, mais dans la pratique, il est appliqué de manière sélective et politique. Ce qui est considéré comme de la désinformation n’est pas déterminé par une enquête minutieuse ou des preuves, mais par la conformité d’une déclaration avec l’orthodoxie dominante. Si elle correspond au récit, c’est un discours protégé ; si elle remet en cause le récit, c’est de la désinformation.
Cette manipulation est parfaitement mise en évidence dans l’article de Science. Les auteurs présentent la désinformation comme une maladie qui se propage comme un virus, ce qui revient à considérer les dissidents comme une menace pour la santé publique. La solution supposée consiste à « inoculer » le public en lui apprenant de manière préventive à reconnaître et à rejeter la désinformation. Mais cela soulève une question évidente : Qui décide de ce qui est vrai et de ce qui est faux ?
La réponse ressort clairement des méthodes de l’étude. Les participants ont été testés à l’aide d’exemples de prétendues fausses informations, notamment l’affirmation réfutée selon laquelle « 97 % des scientifiques sont d’accord » sur le changement climatique anthropique. Ce chiffre, tiré de l’étude très critiquée de John Cook, est en soi un excellent exemple de manipulation narrative des données. Comme l’explique Watts Up With That? la statistique de 97 % a été fabriquée au moyen d’un codage sélectif et d’exclusions arbitraires, produisant un chiffre qui sert des objectifs politiques plutôt que de refléter la réalité scientifique.
Pourtant, dans cette étude, les participants ont été « inoculés » pour accepter ce chiffre comme un fait, tandis que les opinions dissidentes étaient traitées comme de la désinformation. Ce n’est pas de l’éducation, mais de l’endoctrinement. En apprenant aux gens à accepter sans critique le récit dominant, les auteurs ne les protègent pas du mensonge, ils les entraînent à répéter la ligne du parti.
La militarisation de la désinformation
Le véritable objectif du terme « désinformation » est le contrôle. En qualifiant une idée de désinformation, ses opposants peuvent la rejeter sans s’engager dans un débat de fond. Cette tactique est particulièrement efficace dans des domaines tels que la science du climat, où les complexités et les incertitudes du sujet sont souvent réduites à des slogans simplistes.
La notion de « désinformation » est appliquée de manière inégale. Les affirmations alarmistes sur l’imminence d’une catastrophe climatique sont rarement examinées sous cet angle, même lorsqu’elles ne sont pas étayées scientifiquement. Les prédictions d’une élévation catastrophique du niveau de la mer ou les affirmations selon lesquelles tous les ouragans sont causés par le changement climatique sont acceptées sans discussion. Pourtant, tout scepticisme quant à l’efficacité des politiques « Net Zero » ou à l’exactitude des modèles climatiques est instantanément qualifié de désinformation.
Ce double standard expose le terme pour ce qu’il est : une arme rhétorique utilisée pour imposer la conformité. Il permet aux tenants du discours dominant de délégitimer les points de vue opposés sans en aborder le fond. Pire encore, il a un effet dissuasif sur la liberté de pensée, car les individus et les institutions s’autocensurent pour éviter d’être étiquetés comme diffuseurs de désinformation.
Lewandowsky : le grand prêtre de la police de la désinformation
L’implication de Stephan Lewandowsky dans cette étude n’est guère surprenante. Sa carrière a été marquée par une campagne incessante visant à délégitimer la dissidence, en particulier dans le domaine de la science du climat. Son parcours, largement documenté par Steve McIntyre sur Climate Audit, révèle un schéma cohérent : faire passer l’opposition pour irrationnelle ou complotiste au lieu de répondre à ses arguments.
Le tristement célèbre article de Lewandowsky intitulé « Recursive Fury », par exemple, était une tentative maladroite de dépeindre ses détracteurs comme des théoriciens du complot. L’article était tellement criblé de problèmes éthiques et méthodologiques qu’il a été rétracté, mais Lewandowsky a continué à employer les mêmes tactiques. Qu’il s’agisse d’échantillonner les données de manière sélective, de s’appuyer sur des enquêtes non représentatives ou de déformer carrément les propos de ses adversaires, son travail privilégie toujours l’imposition d’un récit plutôt que la rigueur intellectuelle.
Dans cette dernière étude, Lewandowsky double sa stratégie préférée : pathologiser la dissidence. En présentant la désinformation comme un virus, il présente les sceptiques non pas comme des individus ayant des préoccupations légitimes, mais comme des vecteurs de nuisances sociétales. Il ne s’agit pas de science, mais d’un exercice de contrôle narratif.
Pour en savoir plus sur l’histoire problématique de Lewandowsky, les analyses de McIntyre fournissent une documentation approfondie : « Lewandowsky’s Fury », « Lewandowsky’s Fake Correlation », et « Recursive Fury and Hide the Decline ».
La désinformation comme outil politique
Le contexte plus large de cette étude est une évolution sociétale vers la répression de la dissidence sous couvert de lutte contre la désinformation. Cette tendance se manifeste par l’utilisation croissante de vérificateurs de faits, la censure des réseaux sociaux et les appels lancés aux gouvernements pour qu’ils réglementent la « désinformation ». Ces efforts visent rarement à protéger le public contre les mensonges, mais plutôt à consolider le pouvoir en réduisant l’opposition au silence.
Dans le débat sur le climat, c’est particulièrement évident. Les sceptiques qui remettent en question l’efficacité des énergies renouvelables, la fiabilité des modèles climatiques ou les conséquences involontaires de politiques telles que Net Zero (neutralité carbone) sont régulièrement qualifiés de diffuseurs de désinformation. Cette tactique contourne la nécessité d’un débat en présentant les sceptiques comme des personnes moralement ou intellectuellement déficientes.
On ne saurait trop insister sur le danger de cette approche. Elle érode les fondements de la recherche scientifique, qui dépend de l’échange ouvert d’idées et de la volonté de remettre en question l’orthodoxie. En présentant la dissidence comme un problème de société, les partisans de la police de la désinformation risquent de transformer la science en dogme, où seuls les points de vue approuvés sont autorisés à exister.
Conclusion : Rejeter le mythe de la désinformation
La désinformation n’est pas un phénomène réel ; c’est un outil rhétorique utilisé pour discréditer l’opposition et imposer la conformité. L’étude récente de Lewandowsky et de ses collègues illustre la façon dont ce terme est militarisé pour réprimer la dissidence et promouvoir le contrôle narratif. En apprenant aux gens à accepter sans critique le récit dominant, l’étude ne combat pas la désinformation, elle la perpétue.
Le véritable progrès intellectuel vient de la remise en question des hypothèses, du débat d’idées et de la reconnaissance de l’incertitude. Le concept de désinformation subvertit ces principes, les remplaçant par un régime de censure et de police de la pensée. Si nous tenons à la liberté de pensée et à l’intégrité de la science, nous devons rejeter la fiction de la désinformation et résister aux efforts visant à l’utiliser comme outil de contrôle.
Texte original : https://wattsupwiththat.com/2024/11/12/misinformation-the-fictional-foe-of-free-thought/
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