Litanie blanche par Noutte Sunier
(Revue Spiritualité. No 39-40. Février-Mars 1948)
(Adaptation libre d’un hymne sanskrit à Sarasvatî)
Déesse blanche assise en bordure des fleurs,
Couronnée de jasmins, parée à la ceinture
D’une rose de lys sur le lin sans couture
De ta robe tombée des lunaires pâleurs;
Déesse blanche admise au fleuve immaculé
Qui coule des sommets du ciel pour te distraire
Et répandre sur toi ses onguents parfumés,
Tu passes dans tes doigts les perles du rosaire
Dont les huit chants sacrés désignent le salut.
Sur ton front le santal verse une huile odorante,
Un roi musicien prépare sous sa tente
La viole de nacre et l’archet qui t’ont plu;
Tes colliers transparents chantent l’âme des mers,
Tes bracelets d’ivoire ont la fierté sauvage
Des éléphants divins, émigrants du désert,
Et tes bagues de lait sont l’oubli des nuages.
Les démons et les dieux disent ta majesté
Et les sages penchés sur ta face éternelle
Rythment le vœu secret de ton nom qu’ils épèlent
Pour défaire le nœud de l’immortalité.
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L’Inviolable Poème par Noutte SUNIER
(Revue Spiritualité. No 46-47. Septembre-Octobre 1948)
J’inscrirai l’épigraphe au fronton de ta pierre
et je bâtirai l’édifice avec ton granit dur,
ETRE, dont tourne à l’infini la lave palpitante
comme un limon de sang que la chair n’étreint pas.
Car le col fume et sa substance puise en l’homme
sa perpétuité.
Quand de la chair l’invisible portée trace vers l’horizon
son jet rouge et brûlant,
le sol frémit et son événement se transfigure en songe
qui demeure par delà les écroulements de ses internes forges.
Le miracle de l’être est de s’assouvir de ruines
et de prolonger les rythmes de son chant
sur le souffle expirant des races.
Je t’inscrirai, vision de ces nuits d’audace,
où l’aveugle trébuche sur tes voies, Éternité !
Toi, vertige de l’équilibre au sein du temps instable
qui te poursuit malgré les morts !
Il t’a plu de t’incarner dans l’absolu du sacrifice
et d’éployer tes bras d’amour, face aux siècles,
dans la fulgurante clameur d’un ciel que déchirait
l’éclair affolé de la honte,
Il t’a plu de cacher l’aimant de ta splendeur;
mais le soleil de ta beauté nous fascine
et son rayonnement œuvre dans l’inconnu de nos ferveurs
où l’élan hésite en conquérant sa joie.
Je te proclamerai, incertitude, qui telle un diamant creuses
l’obscurité des vides et des rencontres
sur le chemin fatal et lent de notre extase !