(Revue Être. No 3. 14e année 1986)
Le titre est de 3e Millénaire
Comme vous le savez, notre dialogue s’engage sous la forme de questions/réponses. Ne vous interrogez pas sur ce qui vous vient à l’esprit sur le plan de la pensée, des objets, des situations mais uniquement au sujet de votre nature profonde. Ceci est le seul motif de nos réunions, sans parler bien entendu, de la joie d’être ensemble, de communiquer, de vivre en harmonie ces instants.
Lorsqu’on fait appel à l’intellect pour se demander quel est le sens de notre vie : « Qui suis-je ? », nous mettons à contribution une faculté tout à fait différente de celle que nous employons dans la vie de tous les jours où la personne est toujours impliquée. La pureté du raisonnement qui nous porte à nous demander : « Qui suis-je ? », à nous sonder plus profondément a une autre dimension. Là surgit la question qui nourrira notre entretien.
Dans l’enseignement védantique, cette réflexion qu’on ne peut nommer : (vidya-vritthi) est élaborée par une possibilité supérieure en nous, bien au-delà des niveaux proposés par le yoga. Elle se développe au fur et à mesure de l’élèvement de notre pensée, libérée alors de toute affectivité. L’approfondissement de cette interrogation dépouillée d’objectivité, entraîne une réponse vivante, créative que ne peut provoquer le point de vue de la personne.
Je me sens troublé par ce que vous nous dites. Ce que je vous demande — me semble-t-il — est dicté par mon mental, s’il s’efface, je n’ai plus rien à solliciter. Vous conseillez de profiter des circonstances particulières de ces réunions pour dépasser cet horizon limité et laisser notre totalité s’exprimer. Je ne comprends pas bien, non plus, comment elle peut rencontrer quelqu’un, puisque nulle entité particulière ne se manifeste, ni d’un côté, ni de l’autre ?
Parfaitement, la personne est une fraction de la réalité, mais dans le cas qui nous occupe, elle en est une fonction — si l’on peut s’exprimer ainsi — elle ne se rapporte pas à un centre, le moi, mais à l’unité et là s’établit le véritable contact qui n’a ni besoins, ni problèmes. Vous pouvez rétorquer : pourquoi alors se retrouver ? En fait, nous ne sommes guidés par aucun but, mais simplement par la joie, la jubilation d’être, par la joie de se réunir dans une unité merveilleuse. Du reste, vous connaissez déjà des moments où vous n’éprouvez pas la nécessité d’obtenir quelque chose.
Est-ce l’occasion de percevoir un peu ce qu’est le Soi ?
C’est une rencontre sans référence.
Si une question vraiment épurée reçoit d’elle-même sa réponse, pourquoi la poser ?
Si elle est vraiment profonde, elle contient et suscite sa réponse juste, créative. Malgré tout, on peut lui donner une direction, mieux l’orienter vers sa résolution.
Une chose est primordiale pour moi. Comment intensifier le désir d’êtreté ? Je crois qu’il est très fragile par rapport aux situations auxquelles je suis confronté.
Lorsqu’une ouverture de cet ordre se fait, restez consciemment dans le silence qu’elle crée sans rien chercher ; ce qui vous distrait va perdre toute substance. Laissez-vous habiter par cette accalmie et si vous restez ainsi avec votre entourage, une très grande humilité, une complète simplicité s’installeront. Tant que l’on vit sur le plan de l’individu, on est dans les artifices. Cette humilité, cette simplicité sont l’expression directe de ce que nous sommes réellement, spontanément. Elles sont constantes puisque nous avons compris qu’il n’y a rien à défendre, rien à conquérir.
C’est à ce moment-là que nous pouvons nous poser la question : Qui suis-je ?
En général, on croit être une entité personnelle et on cherche à la justifier ; on emprunte des idées, des états pour lui donner plus de saveur. Très souvent, derrière cette humilité qui se figure être vraie, vous pressentez un immense orgueil, accompagné de certains gestes qui le ponctuent : La simplicité est une expression naturelle qui se manifeste quand on a saisi l’erreur fondamentale sur laquelle on s’appuie habituellement.
Quel besoin avons-nous d’avoir un corps, puisque c’est une illusion ?
Ne vous posez pas cette question. Voyez plutôt ce qui l’a précédée, ce qui l’a provoquée. Constatez que c’est le silence et accordez-vous avec lui, sciemment, lucidement. Jusqu’ici, vous vous connaissez en relation avec votre corps, les choses, les événements ; approfondissez ces instants où, toute situation s’étant réglée, votre vacuité est totale, sans représentation possible. Vous découvrirez que le connu est toujours porté par cet arrière-plan vécu en présence et en absence de toute figuration. Là se trouvent l’humilité, simplicité, liberté, bonheur. C’est la vie, le reste en est une expression qui devient quelque chose de sacré par notre adhésion, notre compréhension.
Vous nous conseillez de regarder notre fonctionnement, au bout d’un temps, on arrive à pratiquer cet exercice d’une manière assez précise. Par contre, il y manque quelque chose : la fréquentation de ce qui est vrai. On y a accès à des moments privilégiés, mais dans la vie courante, il me semble pratiquement impossible de ne pas rester sur une longueur d’onde assez basse.
Ce qu’on appelle généralement l’activité, l’action est en partie une suite de réactions par lesquelles vous ne pouvez faire le bon choix. La juste solution d’un problème résulte d’un acte spontané, nous voyons la situation dans sa totalité et elle apporte alors sa conclusion exacte, sinon, elle reste boiteuse et laisse des résidus. Un acte véritable ne peut être dirigé par la faculté d’analyse, par la mémoire. Contemplez votre moi ; il cherche à manipuler chaque chose selon ses goûts, sa sécurisation, quel geste adéquat peut-il en sortir ? Seulement, n’oubliez pas : voir signifie l’arrêt de l’ingérence de quoi que ce soit, c’est une attention ouverte à elle-même. N’ayant plus d’énergie excentrique, elle est réceptive et c’est ce qu’on appelle une prise de conscience. Observez cela sur le vif, c’est un miroir parfait qui vous permet de comprendre l’approche appropriée à chaque circonstance. Il est indispensable de suivre du regard, de constater lucidement nos impulsions dans l’existence de tous les jours, dans nos contacts avec les autres ; la vie est communication, notre entourage agit en fonction de notre attention réceptive, de notre amour désintéressé. Qu’est la cellule familiale ? C’est une partie de la société qui commence tout d’abord par nous.
Détecter le faux, ce qui reste est le vrai, c’est notre démarche actuelle. En quoi la voie de l’évolution se développe-t-elle de cette manière ?
Si vous discernez, discriminez, il se crée une autre faculté en vous. La pensée calculatrice, rationnelle, scientifique part toujours du connu, de la mémoire, c’est un peu comme si nous utilisions un caléidoscope pour remuer des images. Elles semblent changer mais ce sont les mêmes éléments qui constituent celles qui sont soi-disant nouvelles. Lorsqu’on le voit clairement, on se rend compte — en se posant le problème de notre vraie raison de vivre — « Qui suis-je ? » — de l’impossibilité d’y répondre de cette façon. Alors, on se trouve dans une attente sans attente, pleinement épanouie et c’est dans le silence de cette immensité vacante, sans frontière, sans limite, sans centre, que la lumière, la vérité peut surgir.
Nous sommes obligés de constater que notre existence est en grande partie remplie par des spéculations, par une recherche intellectuelle ou scientifique. Celle-ci semble pure, mais spécule aussi consciemment ou inconsciemment sur un résultat et en fin de compte, n’est pas vraiment créative. Pour discerner le vrai du faux, on ne doit pas affirmer, dominer, mais simplement admettre, interroger. N’oublions pas que ce qui semble négatif apparaît aussi dans le positif. Nous le reconnaissons à ce qu’il n’a pas de réalité en soi, ayant toujours besoin d’un agent pour être expérimenté et nous remarquons qu’il se croit une indépendance, une autonomie illusoire. Au fond, il en est de même pour ce que nous appelons sacré ou profane. Nous transformons le profane par notre disposition intérieure, par notre façon de l’accueillir. Chaque manifestation est issue de l’ultime sujet et y retourne, nous parlons d’objet au moment où nous lui donnons nom et forme, mais si nous savons examiner plus en profondeur, nous saisissons qu’elle est une expression, une prolongation du silence. Ce qu’on appelle transcendant, immanent perd donc toute signification. Où commence la transcendance ? Où commence l’immanence ? Nous vivons peu avec nos questions, nous laissant happer par les mouvements de la vie, pourtant c’est par la discrimination qu’elles se métamorphosent, se simplifient, se désobjectivent et deviennent vivantes, contenant elles-mêmes leur solution.
Si l’on n’attend pas une réponse immédiate, est-ce par une certaine peur de lâcher prise, ou par suite d’une projection involontaire ?
Dans ce cas, notre écoute, notre attente est — si l’on peut dire — polluée par notre mémoire, elle n’est pas encore pleinement réceptive, pas encore digne de recevoir ce qui lui est promis, elle n’est pas tout à fait épurée.
Elle est tout de même liée à l’ouverture du cœur ?
->Oui, elle sait déjà ne pas pouvoir attendre de réponse à travers le passé qui nous permet de nous sécuriser en tant qu’individu et nous enferme. Du fait de cette compréhension, nous sommes en quelque sorte saisis par une intelligence universelle. Vivez cette merveilleuse lucidité, sans désir, sans anticipation ; cette approche libre des limitations, des contradictions de la personne est positive, c’est la réalité.
Le Soi est en dehors de l’espace/temps. Or, cette voie d’évolution comporte une implication dans le temps, elle passe par un agent et n’est donc pas sur le même plan ?
Le temps est créé par la pensée, c’est le rapport d’une chose à une autre, comme l’espace.
Notre erreur ne serait-elle pas de lui attribuer une réalité ?
L’espace/temps surgit d’un silence que notre pensée, notre esprit ne peuvent atteindre. Chronologiquement, astronomiquement, il est dans le présent, tandis que sur le plan psychologique, il n’est jamais dans l’instant, il s’accroche au passé-futur par un mouvement constant de devenir. Comprenez la différence qui existe entre vivre reproductivement ou créativement. Dans le premier cas, la répétition engendre l’ennui, l’on va d’une compensation à une autre, dans le second, au contraire, une vraie vie créative part de l’attente, tout est donné, c’est une prière, une offrande dans l’unité.
Peut-il y avoir évolution, ou est-ce un état qu’on obtient ou n’obtient pas ?
Cette ouverture dégagée de tout apport psychologique n’est pas sujette à évolution. Elle est. Dieu est toute perfection et n’a pas besoin d’évoluer pour se perfectionner.
La question aura-t-elle une réponse ou se dissoudra-t-elle d’elle-même ?
Elle vient en apportant sa solution, c’est le chercheur qui est le cherché.
Si je suis le silence, pourquoi est-ce que je m’éloigne de mon centre ?
C’est une mauvaise habitude. Remarquez ce geste automatique qui vous conduit à vous éloigner de vous-même. Sans pensée, sans représentation, vous êtes dans votre gloire. Libérez-vous à tout prix de ces coutumes néfastes instaurées par la société, vous agirez d’une façon positive pour la collectivité qui commence par vous-même ; mais voyez-le sur le vif, non en tant qu’idée, conviction, croyance et constatez que nous sommes toujours conditionnés par un centre, le moi.
Durant cette observation, on est attentif, la personne est oubliée au bénéfice de la constatation et en un éclair, nous nous sentons dégagés de ce personnage, dans une vacuité totale, dans une immensité. Nous sommes cette immensité. Le film se déroule devant nous et nous en sommes l’éclairage. Là s’explique sa signification, il nous permet de nous voir en tant que lumière, que présence.
L’ultime sujet est de toute façon immuable, pourquoi la manifestation se déroule-t-elle ? Est-ce obligatoire ?
C’en est une expression, ne lui cherchez pas de but. C’est un jeu qui est de la nature du Soi, une offrande. Comme je viens de vous l’indiquer, c’est le film qui nous permet de réaliser que nous sommes la lumière, la toute présence, cet ultime sujet.
Autrefois, le travail était un don, un rituel, en est-il encore de même ?
Tout dépend de notre approche de cette nécessité, de ce jeu de l’ultime. Si nous nous penchons non sur ce que nous faisons, mais sur notre attitude intérieure vis-à-vis de l’acte bien exécuté, nous sommes dans une attente heureuse, paisible.
Prenez du recul pour regarder les choses, vous n’aurez plus de centre auquel vous référer. Krishna Menon dans un poème (je ne me souviens pas exactement du texte) disait à peu près : « Tu dois te trouver derrière toi. » Il voulait nous faire comprendre que pour finir, nous ne sommes nulle part. Libérons-nous donc de cette exigence de nous situer quelque part, de cette appréciation, notre seul appui doit être la vacuité, le silence intérieur. Vivons-le avec intensité.
J’ai l’impression que lorsque je procède comme vous le dites, je ne peux plus nourrir mes buts personnels. Sur le plan de la vie quotidienne, je dois aller ou bien à gauche et laisser faire, ou bien à droite et me plonger dans les difficultés d’un homme de trente-cinq ans. Ce conflit est-il réel ou est-ce moi qui l’invente de toutes pièces ?
Ayez une approche intelligente de votre existence, cas par cas. Vous ne pouvez la changer, prenez la telle qu’elle se présente ; c’est la personne qui veut apporter des modifications à la marche des choses. Essayez plutôt de voir votre environnement sans idée préconçue, sans but, vous serez étonné de ce qui surgira et que vous n’aviez pas remarqué auparavant ; ces éléments qui montent à la surface apportent une grande simplification. Interrogez-vous sans vouloir rien dominer, rien affirmer, d’une manière non affective, pour mieux faire connaissance avec ce qui a soulevé un problème. Celui qui se remet en question n’est pas lié, compromis par ce qui l’entoure et qui devient peu à peu transparent, son attitude intérieure est parfaitement autonome. Voir clairement suscite les modifications, sachez être vous-même, votre environnement en fait partie. Au lieu d’être perdu dans l’objet, c’est lui qui est perdu maintenant en vous, dans votre laisser-faire : attitude complètement différente, c’est l’amour, on est lié sans être lié.
Pouvez-vous m’expliquer davantage cette notion.
Ce laisser-faire est une véritable acceptation dans laquelle se trouve la liberté. Conscients de cette disponibilité, nous ne nous identifions plus à une personne. Cela ne se peut exactement formuler, mais nous constatons que nous ne jouons plus avec des schémas inventés un jour et notre entourage devient unique, nouveau à chaque instant.
Dès que vous regardez d’un point de vue non affectif, vous sentez déjà une certaine fraîcheur s’instaurer, avec plus de douceur dans vos contacts, vous vous situez dans une autre dimension.
Je constate que je suis souvent superficiel. J’ai un désir de vivre le Soi, mais il n’est pas profond et je m’en laisse distraire aisément.
Vous remarquez distraitement que vous êtes enfermé, que vous vivez à la périphérie et vous en restez là. Prenez davantage d’intérêt à vos motivations, essayez de comprendre mieux au fur et à mesure des circonstances comment vous vous comportez au cours de votre existence. Regardez comment vous fonctionnez dans vos activités journalières, comment vous procédez, sans vouloir amener le changement. Aimez, accueillez de plus en plus ce qui se présente à vous et, de ce fait, vos actes seront justes. Si vous examinez chaque situation dans votre ouverture, vous serez en recul, non concerné. Ne cherchez rien, vous ne serez pas noyé dans vos actions, vous trouverez la force d’approfondir votre approche et vous connaîtrez la sérénité.
Comment clarifier ce qu’on entend pas corps énergétique ?
Tout d’abord, votre attention ne doit pas être concentrée mais accueillante ; constater vraiment les choses est tout à fait primordial. Nous nous connaissons généralement d’une façon très superficielle, extérieure, mais peu sur le plan physiologique, nous ignorons notre corps subtil, énergétique.
De la même manière que nous regardons une lampe ou un cheval, nous avons la faculté de communiquer avec nous-même et c’est très important. Dans ce cas, cette observation ne doit pas être orientée, elle est sans désir, elle est vierge, multidimensionnelle, elle ne peut se situer, c’est une vacuité totale dans laquelle le corps apparaît et nous raconte ses heurs et malheurs.
Puisque nous sommes pour l’instant loin de nos habituelles sécurisations, loin de notre travail, de notre chambre, de notre vie de tous les jours, profitons de l’éveil plus intense de notre intérêt pour nous donner à une attention pleinement accueillante, offerte, afin que chaque chose se présente en rapport avec notre totalité ; n’opposons aucune résistance, soyons impersonnels, nous n’aurons plus de bagage à porter. C’est une attitude d’amour.
Cela revient à ressentir la situation du moment, mais on peut également être l’observateur non impliqué. Avons-nous le choix entre ces deux positions ?
C’est une observation sans choix, neutre, l’option va peut-être se faire, mais indépendamment de vous, c’est la situation qui l’a provoquée, elle a une valeur seulement à l’instant, dans la circonstance immédiate, mais pas absolue.
Acceptons-nous, c’est indispensable, mais non d’une façon intellectuelle, morale, ce n’est plus un concept ; ce sont les habitudes ancrées depuis l’enfance, tous les résidus qui doivent se laisser faire. Quand les affectivités ont disparu, un rayonnement de paix seul subsiste et les résistances parasitaires qui bloquent tant d’énergies ne peuvent se soulever.
Le corps est rarement habité, ce qui veut dire que la plupart du temps, nous ignorons notre corps énergétique, qu’advient-il de lui dans ce cas ?
Il est toujours là, seulement, nous ne sommes pas suffisamment conscients de sa présence, notre structure musculaire, nerveuse, nos réactions se surimposent et annihilent cette perception.
Lorsque le corps physique est malade, qu’en est-il du corps subtil ?
C’est lui qui en grande partie est défaillant.
Comment y remédier ?
Il n’en est pas exclusivement ainsi : un vieillissement des cellules et d’autres éléments peuvent intervenir, mais la guérison quand elle est possible part du corps énergétique.
Pouvons-nous soigner un organe malade à travers ces énergies subtiles ?
Nous sommes composés d’un certain nombre de couches que nous désignons par leurs qualités, en fait, elles sont une seule chose. Si vous prononcez un mot, aussitôt toute votre structure affective, chimique, musculaire, physique est en réaction. Bien sûr, en mentionnant : automobile, chaise, chemin de fer, la stimulation n’est pas la même sur le plan affectif que si vous dites : Dieu, mon mari, ma femme, mon argent ; cela provoque une réaction considérable, nous pouvons même prendre une autre coloration !
Lorsque le corps énergétique s’éveille, un lâcher prise se fait. C’est instantané et constant sur le plan métaphysique, mais dans la pratique, la mémoire joue et nous devons recommencer. Seulement, c’est une répétition qui n’en est pas une et à un moment donné, nous établissons une attitude corporelle juste engendrant la santé.
Dans la journée, généralement, tout ce qui nous entoure est perçu par la personne : j’aime, je n’aime pas, profitable, non profitable. Nous sommes non seulement isolés de ce qui nous sollicite, mais de plus constamment sur la défensive. La fatigue à tous les niveaux est entraînée en partie par nos résistances, nos refus, nos réactions. En le comprenant, nous perdons cette néfaste coutume de nous considérer comme tel ou tel individu et les choses sont reçues dans notre totalité ; un autre fonctionnement s’établit. Nous laissons l’objet — n’importe lequel — se fondre dans notre présence, ce que nous sommes réellement, mais qui ne se laisse jamais objectiver. C’est dans ce sens qu’Oppenheimer a dit : « En physique nous pouvons découvrir les substances les plus infinitésimales, mais non l’observateur. »
Tant que toutes les résistances ne seront pas brûlées, nous ne pouvons connaître la vérité ?
Dès que les résistances, les réactions s’évanouissent, ce qui surgit dans notre observation se résorbe aussitôt dans la conscience. Toute énergie née dans l’espace/temps se déploie et meurt dans le silence. Quand l’observé a vidé son sac, l’observateur qui n’a plus de rôle à jouer, se meurt aussi et il reste le silence, l’acteur, le penseur ont disparu. Nous ne sommes qu’un canal à travers lequel tout passe ; je dirai poétiquement : le jeu divin s’accomplit.
Quand le corps énergétique se manifeste, ce mouvement n’a aucun point de contact avec la personne ?
Oui, c’est un instrument parfait. La volonté de procéder, de saisir, de maintenir, de posséder est provoquée par notre insécurité et toute notre structure en subit le contrecoup. Notre système nerveux devient irritable et endort nos énergies.
Qu’est-ce qui fait choisir quelque chose de spécifique au corps subtil pour être dans l’image : faire la guerre ou être près de l’oiseau, de l’arbre ?
Les vicissitudes de l’existence sont ce qu’elles sont, ne vous en tourmentez pas. Seul le « Qui suis-je ? » doit vous préoccuper.
C’est par la conviction qu’il n’y a rien à trouver, à acquérir que le lâcher prise s’effectue et spontanément, vous êtes ouvert à la réceptivité, suscitant la juste façon de vous comporter. La créativité nous est donnée, c’est un cadeau qui jaillit du silence. Voyez les mécanismes qui vous guident, ne vous identifiez plus avec la personne, un arrêt se fait. Vivez-le sciemment, vous vivrez l’éternité dans l’instant.