Swami Hridayananda Sarasvati
Raja Yoga 12

L’état de veille, à l’opposé de ce qu’en disent les Occidentaux, est pour nous, Indiens, responsable en quelque sorte de l’état de rêve, nous lui donnons donc plus d’importance. Dans l’état de veille nous expérimentons, nous faisons des expériences conscientes et ce sont ces expériences qui forment des empreintes au niveau du subconscient. Et ce sont ces empreintes subconscientes qui fonctionnent dans l’état de rêve et qui forment les rêves.

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(Revue Panharmonie. No 195. Juillet 1983)

Enseignement donné à l’École Normale de Yoga Roscoff – Juillet 1980

Mataji : En attendant que tout le monde arrive, on pourra peut-être poser des questions ?

Question : Quelle est la signification de « OM NAMA Bhagavate » ?

Réponse : « OM » signifie « je me prosterne devant… « Bhagavad » c’est le Seigneur, c’est la manifestation de la Conscience Absolue en une forme. Ici c’est Krishna qui s’appelle aussi VASUDEVA. Mais, ce qui importe, c’est moins les sens que la combinaison des sons. C’est très difficile d’éprouver un sentiment de dévotion pour Krishna, par exemple, pour les Occidentaux, mais c’est l’effet de la composition des sons qui importe. Donc, plutôt que de penser à la forme, pensez à l’Absolu, puis à la combinaison des sons, et si vous avez l’esprit suffisamment ouvert, vous pouvez penser au Christ, alors que cela s’adresse plus précisément à Krishna, cela revient au même, puisqu’à un niveau ultime c’est la même Conscience Absolue qui se manifeste en Christ, Krishna, Bouddha, etc. A un niveau superficiel vous serez tenté de dire non, mais pensez bien que si vous êtes convaincus que Dieu est partout, s’Il est partout, il faut accepter rationnellement et logiquement qu’Il est dans le Christ comme dans le Bouddha, etc. Si vous êtes profondément religieux, votre religion ne devrait pas vous séparer, vous diviser, mais au contraire créer l’unité. Cela ne veut pas dire que vous ne devez pas pratiquer votre propre religion, mais vous devez le faire avec un sentiment d’universalité vis-à-vis des autres religions. Malheureusement de nos jours les gens qui sont religieux disent pour la plupart « ma religion » qu’ils opposent à celle des autres. Cela devient donc une séparation au lieu d’une union.

Question : Lorsque vous parlez de sons, ceux-ci ne sont pas forcément acceptés de la même façon selon les différentes cultures que l’on a.

Réponse : Si je provoque un grincement contre un métal, le fait que vous soyez français ne fera pas que vous trouviez ce son agréable. Il paraîtra désagréable de la même façon à un Indien, un Allemand, un Français, quelle que soit leur culture. L’effet sera le même. Mentalement peut-être vous ne pouvez pas accepter un son, mais, je suis désolée de le dire, ce sera par ignorance que vous aurez cette réaction.

Question : C’est peut-être vrai pour un son isolé, mais dès que c’est un son composé, les oreilles ne sont pas toujours prêtes à accueillir une musique différente.

Réponse : Les mantras ne sont pas de la musique, mais une combinaison de sons. Vous pouvez chanter un mantra sur un air occidental.

Pensez au mantra « Hare Rama », il est chanté sur toutes sortes d’airs différents, vous pouvez le chanter sur l’air que vous voudrez.

Question : Est-ce mieux de dire OM ou AUM ?

Réponse : Le son est composé de A U M, mais la combinaison de ces sons donne OM. Pour prononcer A on ouvre la bouche complètement. Le son doit partir du hara et remonter. Cela doit partir du ventre.

Question : Est-ce que le processus de la Création est une suite d’émanations du plus subtil au plus grossier ?

Réponse : Oui.

Nous allons donc maintenant parler du corps grossier, il est composé de cinq éléments : terre, eau, feu, air, éther. Il est formé par le processus de la « Panchikarana », c’est-à-dire la quintuple mixtion des éléments subtils qui sont des forces ou des énergies, la force de l’éther étant le son, la force du toucher provient de l’air, la force de la vue provient du feu, la force de la sensation du goût provient de l’eau et la force de l’odorat provient de la terre. Ces cinq éléments sont des forces ou éléments subtils et la combinaison de ces « Tanmatra-s » ou éléments subtils forment les éléments grossiers. Comme je vous l’ai expliqué, chaque élément conserve pour moitié sa propre propriété plus un huitième de la propriété de chacun des quatre autres éléments. C’est cela qu’on appelle « la quintuple mixtion ».

Voilà donc ce qui concerne le corps grossier ; mais non seulement le corps physique, mais également tout ce qu’on voit dans l’univers, est fait de ces cinq éléments.

Nous arrivons maintenant au corps subtil ou « Sukshma Sharira ». Il est composé de dix-sept catégories, les 5 « Jnanendriya-s » ou les 5 organes de connaissance. Les organes physiques sont dans le corps grossier, mais chaque organe des sens grossier a une contrepartie ou un équivalent subtil qui se trouve dans le corps subtil et ce sont ces organes subtils que l’on appelle des « Indriya-s » : l’ouïe, le toucher, la vue, le goût et l’odorat.

Puis il y a les 5 « Karmendriya-s », l’organe de la parole, l’organe de l’oreille, l’organe de la préhension ou la main, l’organe de la locomotion ou le pied, les organes génitaux pour la reproduction et l’organe d’excrétion.

Ensuite il a les 5 « Pranas » : Vyâna le prana général, Prâna qui est respiratoire, Apana qui est excrétoire, Samarra, égalisateur, Udâna, ascensionnel.

Nous en sommes à quinze : 5 Jnanendriya-s, 5 Karmendriya-s et 5 Prâna-s. Nous passons donc à « Manas-Citta », qui fonctionnent ensemble. Elles sont ce qui correspond en anglais au « Mind », c’est-à-dire qui exprime non l’âme au sens spirituel, mais en tant qu’organe interne.

Donc « Manas » et « Citta » vont ensemble, et « Buddhi » et « Ahamkara » qui sont ensemble aussi, soit l’Intellect et le sens de l’Ego.

« Manas », c’est ce qui permet aux sensations de l’extérieur d’atteindre le cerveau, mais cela ne provient pas uniquement du monde extérieur. Quand les informations ont été collectées de l’extérieur, il se produit une formation d’empreinte, la « Citta », et la stimulation de ces empreintes peut créer dans l’esprit une image du monde extérieur. Par exemple, je vois extérieurement un vase et je peux aller dans ma chambre et le voir mentalement. Lorsque je l’ai vu, l’empreinte s’est formée, si bien que, quand je m’en éloigne, je peux à nouveau évoquer son image. C’est aussi le rôle de « Manas ». « Citta » c’est le subconscient et l’inconscient.

« Buddhi » et « Ahamkara » vont ensemble, c’est-à-dire qu’à partir du moment où vous portez un jugement sur quelque chose : ceci est bon, ceci est mauvais, l’ego interfère automatiquement et vous dites finalement : « ceci est bon ou ceci est mauvais pour moi ».

Voici donc les dix-sept catégories qui composent le corps subtil ou « Sukshma Sharira » :

— 5 organes de la connaissance

— 5 organes d’action

— 5 prânas

— Manas et Citta

— Buddhi et Ahamkara.

Nous voici maintenant au corps causal, « Karana Sharira ». On l’appelle « causal », parce qu’il est la cause des deux autres. Lorsque nous avons parlé de Maya, nous avons vu que Maya, à la fois, voile la Réalité et projette en même temps l’irréalité. Donc, avant que Maya n’entre en action, on ne peut avoir conscience de rien de tout cela, ni du corps physique, ni du corps subtil. C’est la Maya qui nous empêche de prendre conscience de notre Nature Essentielle qui est la Conscience Absolue et, en même temps, c’est Maya qui projette le corps physique, grossier et le corps subtil en nous faisant croire que nous ne sommes que cela. Ainsi peut-on dire que le corps causal « Karana Sharira » est la Maya individuelle, c’est-à-dire « Avidya », l’ignorance ou la nescience individuelle.

C’est un peu comme si vous alliez vous promener au crépuscule et que, sur la route, vous voyiez quelque chose qui a la forme d’un serpent. Vous êtes en Inde où il y a beaucoup de serpents. Immédiatement vous faites un bond en arrière pensant voir un serpent et vous restez pétrifié, ne sachant que faire, car cette chose ne bouge pas et vous savez que si vous bougez cela risque de la faire bouger aussi. A ce moment arrive un ami qui vous voit figé sur place et qui vous demande : « Mais qu’est-ce que tu fais là à ne pas bouger ? » Et vous répondez : « Il y a un serpent et j’ai peur d’avancer ». Or l’ami a une lampe électrique qu’il dirige sur l’objet en question et là vous vous apercevez que c’est une corde, une corde épaisse qui est par terre et qui a la forme d’un serpent. A aucun moment la corde n’a été un serpent, la corde est restée corde à tout moment, mais il s’est produit quelque chose dans votre mental qui vous a fait vraiment prendre la corde pour un serpent. C’est le manque de lumière qui vous a empêché de voir que c’était une corde et qui vous a empêché de voir si c’était un serpent. C’est le manque de Lumière Divine, que l’on appelle ignorance, « Avidya ». C’est la Maya qui a voilé la Lumière qui vous aurait permis de prendre conscience de votre Nature Essentielle, la Conscience Absolue, et qui, au contraire, vous fait croire que vous n’êtes que votre corps physique et votre corps subtil.

Quand vous voyez un individu, c’est-à-dire son apparence physique, vous dites : « C’est une personne, c’est un homme (ou c’est une femme) ». Et s’il y a un groupe d’individus, vous dites : « Il y a des gens ». Si vous voyez un arbre, vous dites « Voilà un arbre », mais s’il y a un groupe d’arbres, vous dites : « C’est un bois, c’est une forêt ». De la même façon un corps physique, c’est un homme, mais si tous les corps physiques de l’univers étaient mis ensemble, ils se nommeraient « Virat ».

Il y a un chapitre dans la Bhagavad Gîta dans lequel il est dit que Krishna montre sa forme cosmique « Virat ». Il apparaît comme un individu, mais en fait il n’est pas un individu, il est l’Absolu incarné, descendu dans un corps, incarné dans un homme. Deux choses sont possibles : une « ascension » et une « descension ou descente ». Lorsqu’il y a une nouvelle naissance due à des « Karma-s » précédents, nous appelons cela une « réincarnation » parce qu’il s’agit d’un nouveau corps physique. Ainsi la réincarnation n’a lieu que lorsqu’il y a des Karmas, c’est-à-dire lorsque vous avez accompli des actions qui nécessitent des réactions.

Quand l’Absolu assume une forme humaine, c’est une « incarnation ». Dans le cas de Krishna, par exemple. C’est la Conscience Divine qui prend une forme humaine pour venir au secours de l’humanité et, même dans ce cas-là, c’est aussi la Maya qui permet la formation d’un corps humain. La différence est que, dans le cas de l’incarnation, l’être en quelque sorte domine la Maya, contrôle la Maya, tandis que dans le cas de la réincarnation, ce qui est notre cas à nous, nous sommes en fait des marionnettes entre les mains de Maya. C’est pourquoi dans le cas d’une incarnation il y a à tous moments la conscience de la Nature Essentielle Divine et on sait que ce n’est pas limité du tout aux corps physique et subtil, alors que dans le cas d’une réincarnation nous croyons que nous sommes notre corps physique et notre corps subtil et nous perdons de vue notre nature essentielle. C’est donc la Conscience omnipénétrante qui est dans l’être incarné et il est dit que lorsque Arjuna a pris Krishna pour un être humain ordinaire, puisque Krishna était dans le monde sous forme d’un homme ordinaire, quand Krishna a voulu qu’Arjuna fasse son devoir, il a accordé à Arjuna une vision cosmique et c’est alors qu’Arjuna a pu voir tout l’Univers, tout ce qui existe dans l’Univers, contenu dans Krishna. C’est cela que l’on veut dire par « Virat ». La Bhagavad Gîta raconte qu’Arjuna a été si terrifié, qu’il a eu si peur quand il a vu tout cela, qu’il a supplié Krishna de reprendre sa forme habituelle.

Tous les corps subtils mis ensemble ont aussi un nom collectif : « Hiranya Garbha », et tous les corps causals ont comme nom collectif : « Ishvara », car « Ishvara » n’a pas de forme, il est sensé être le véritable Créateur, celui qui donne l’impulsion à la Création, et « Brahma » exécute le dessein d’ « Ishvara », juste avant que la manifestation visible se produise.

Puis il y a trois « Avastha-s » : l’état de veille, l’état de rêve, l’état de sommeil profond.

L’état de veille, à l’opposé de ce qu’en disent les Occidentaux, est pour nous, Indiens, responsable en quelque sorte de l’état de rêve, nous lui donnons donc plus d’importance. Dans l’état de veille nous expérimentons, nous faisons des expériences conscientes et ce sont ces expériences qui forment des empreintes au niveau du subconscient. Et ce sont ces empreintes subconscientes qui fonctionnent dans l’état de rêve et qui forment les rêves.

Vous pouvez m’objecter : « Je fais des rêves de choses que je n’ai jamais vues ». Mais si vous examinez de très près vos rêves, vous constaterez que vous avez vu à l’état de veille des choses qui se rapprochent de ce que vous avez rêvé. Dans l’état de veille la conscience claire ne fonctionne pas, de même il n’y a pas de pouvoir de discrimination. Alors, que se passe-t-il ?

Supposons que vous avez vu un éléphant et, à un autre moment vous avez vu un homme avec un col et une cravate et vous avez aussi lu quelque chose sur un vaisseau interspatial. Vous pouvez combiner ces trois éléments et voir un éléphant avec un veston, un col et une cravate, s’en aller dans une fusée. Il n’y a pas de signification particulière aux associations ou mélanges. Il y a certains rêves qui ont un sens, une signification, par exemple lorsqu’ils sont suscités par des empreintes très profondément enfouies dans l’inconscient, presque à la frontière de la Conscience Cosmique qui est située après. A ce moment-là il peut y avoir un sens au rêve. Mais notre conception des rêves est tout à fait différente de celle de vos psychologues occidentaux.

Dans l’état de veille nos organes des sens fonctionnent en même temps que les « Indriya-s », les organes des sens subtils et le mental. Dans l’état de rêve les organes des sens ne fonctionnent pas, seuls fonctionnent les « Indriya-s » et le « Mind ». Il y a des gens qui dorment avec les yeux ouverts, vous pouvez prendre un couteau et approcher la pointe de l’œil du dormeur, il ne bougera pas et, pendant ce temps-là, dans son rêve, il peut être en train de regarder quelque chose de très beau. C’est parce que dans le rêve c’est le corps subtil, le « Sukshma Sharira » qui fonctionne. Donc tout ce qui se passe dans les rêves c’est l’œuvre du « Sukshma Sharira » ou corps subtil. Mais cela peut avoir une réaction sur le corps physique, car si vous faites un cauchemar épouvantable, vous pouvez vous réveiller trempé de sueur ou frissonnant, etc.

Dans l’état de sommeil profond, c’est le corps causal qui fonctionne. Ce corps causal est très proche de la Conscience Absolue et c’est cette proximité même qui donne ce sentiment merveilleux de paix, de repos total, de calme qu’on éprouve dans le sommeil profond.

Chaque cellule représente l’Univers tout entier, en miniature. Les scientifiques l’admettent-ils ?

Gabriel Monod-Herzen : Les physiciens ne pensent pas que la cellule est une miniature de l’Univers, mais l’expression d’une possibilité. Freud a fait remarquer depuis longtemps que, lorsque le subconscient veut se manifester, il est semblable à un acteur qui, avant d’entrer en scène, a besoin de choisir un costume. Il choisit alors celui qu’il veut et qui correspond à la tendance qu’il a à ce moment-là. C’est ainsi que les images des rêves s’habillent avec un peu n’importe quoi avant de passer en scène et d’être visibles à tout le monde.

Question : Comment les trois corps sont-ils reliés entre eux ?

Réponse : Il y a d’une part le corps physique ou grossier « Sthula Sharira » et, d’autre part, les corps subtil « Sukhsma Sharira » et causal « Karana Sharira ». Le corps subtil peut aussi être appelé le corps astral et, ensemble avec le corps causal on les appelle aussi corps subtil. Il y a donc d’un côté le corps physique et de l’autre le corps subtil. C’est le « Prâna » qui les relie, et c’est « Udâna », le « Prâna » ascensionnel en particulier. C’est lui qui sert à séparer le corps physique du corps subtil. C’est pour cela qu’en Inde on dit à la mort de quelqu’un que le Prâna l’a quitté ou que son Prâna est parti.

G. Monod-Herzen : On peut résumer en disant que le Prâna est le moyen par lequel la conscience peut agir sur la matière.

Mataji : Oui, exactement.

Question : Que se passe-t-il quand on agit sur le corps physique (soins, greffe) ; se produit-il une détérioration dans le corps subtil ?

Réponse : Si le corps physique est malade, cela provient d’un défaut au niveau du corps astral. Évidemment les deux sont en rapport. Si l’organe du corps physique est complètement guéri, cela veut dire qu’au niveau astral il y a aussi guérison, sinon la maladie physique reviendra, car la cause de la maladie n’a pas été supprimée. Cela est démontré par les photographies des effets Kirlian. J’ai vu la photo d’un homme qui était censé être en parfaite santé. Mais la photographie a montré qu’il y avait une tache, ou un vide, dans son aura, car c’est l’aura qui est photographiée. De nombreuses années après, un cancer s’est développé dans la partie du corps physique correspondant à cette tache, ce vide, cette lacune au niveau de l’aura.

Question : Comment soigner le corps subtil ?

Réponse : Le seul soin possible, c’est la méditation, car la cause principale de ces détériorations du corps astral, c’est l’agitation du mental qui trouble la répartition du Prâna et affecte le corps physique du fait de ce déséquilibre du Prâna. On ne peut consciemment atteindre le corps subtil que par le truchement du corps physique, parce que la coopération du corps physique est tout à fait nécessaire. Il faut mener un certain type de vie, incluant régime alimentaire, etc., pour calmer le mental. C’est pourquoi on considère le corps physique comme un temple, une demeure de l’Absolu. Nous ne sommes pas censés négliger le corps physique, sinon cela affectera nécessairement le corps subtil. Le corps physique est notre instrument de travail.

Nous passons maintenant aux cinq « Koshas » ou les cinq gaines de conscience :

— La première gaine, ou enveloppe, est appelée « Annamaya Kosha » ou gaine de la nourriture, car le corps physique est en quelque sorte le produit de la nourriture que nous absorbons.

— La deuxième gaine, c’est le « Pranamaya Kosha » qui est une gaine ou enveloppe plus subtile que la précédente et qui est composée de Prâna-vital.

— La troisième gaine, c’est le « Manomaya Kosha », la gaine mentale, mais le mental sans pouvoir de discrimination, c’est-à-dire « Manas ».

— La quatrième gaine encore plus subtile, c’est le « Vijnanamaya Kosha », la gaine intellectuelle, la gaine du pouvoir de discrimination ou gaine de la connaissance.

— La cinquième gaine, encore plus subtile, est « Anandamaya Kosha » ou gaine, enveloppe de la félicité.

Ainsi le corps physique est composé de la première des cinq gaines, la gaine de la nourriture. Le corps subtil est composé des trois gaines suivantes, soit « Pranamaya Kosha, Manomaya Kosha et Vijnanamaya Kosha », et le troisième corps, le corps causal est composé de la gaine de félicité, « Anandamaya Kosha ».

« Maya », dans le nom des gaines, veut dire « rempli de », rempli de nourriture, rempli de Prâna, etc. A ne pas confondre avec Mâya, la Mâya.

Question : Pourquoi y a-t-il une distinction entre les corps et les gaines ?

Réponse : Parce qu’on va du plus grossier au plus subtil, tout finalement peut être réduit à de l’énergie. Le plus grossier s’appelle « Annamaya ». Puis cela devient de plus en plus subtil pour en arriver à la Conscience Absolue. Il y a plusieurs couches de conscience, les gaines sont une distinction plus fine par rapport aux corps, « Sharira-s ». Ce sont des enveloppes qui ne se situent pas dans une partie particulière du corps, ce sont des gaines qui deviennent de plus en plus subtiles.

Selon nous il y a dans cette pièce quatorze plans de conscience, mais nos organes des sens ne peuvent être branchés que sur un seul de tous ces plans de conscience qui sont l’un dans l’autre. Dans le livre « Yoga Vasishtha » il y a des histoires dans lesquelles tout cela est bien exprimé.

Une autre raison pour laquelle on donne tout cela, c’est que dans la méditation on transcende toutes ces enveloppes les unes après les autres et quand on arrive à la gaine de félicité on peut éprouver une béatitude, une félicité extrême. Il y a une expansion de conscience très importante qui se crée ainsi. A ce moment les méditants peuvent s’imaginer qu’ils ont atteint le point ultime, le Brahman, l’Absolu. Et cela explique que pendant l’état de sommeil profond, nous sommes dans l’état d’« Anandamaya Kosha ». Mais dans l’état de sommeil profond le mental est toujours dans les mêmes conditions que dans l’état de veille, sauf que dans l’état de sommeil profond le mental est en quelque sorte comprimé, réduit, tandis que dans la méditation les différentes couches du mental sont brûlées et que par conséquent, la félicité est expérimentée consciemment. Dans l’état de sommeil profond il n’y a pas cette conscience, c’est inconsciemment qu’on est dans la félicité. On n’en a qu’un vague souvenir. Dans « Anandamaya Kosha » on est très proche de l’Absolu, c’est pourquoi on a ce sentiment de félicité extrême, mais il faut encore transcender ce « Anandamaya Kosha » pour atteindre l’Absolu.

Au sujet de la Kundalini : Je veux vous dire très clairement que, dans toute méditation véritable, le pouvoir de la Kundalini s’est éveillé. S’il y a une méditation véritable, il y a éveil de la Kundalini, sans méthode particulière, quelle qu’elle soit. Mais lorsque la Kundalini s’éveille d’elle-même, naturellement grâce à la méditation, à la purification du mental, il n’y a aucune expérience fantastique, extraordinaire qui se produit. Cela se fait très progressivement et très doucement, tandis que si l’on cherche à stimuler la Kundalini, on peut effectivement avoir des phénomènes assez bizarres. Le corps peut être projeté violemment dans un sens ou dans l’autre, etc. Ceux qui enseignent le Yoga de la Kundalini peuvent vous dire que c’est merveilleux, qu’il n’y a rien de mieux pour les Occidentaux, mais moi je peux vous dire qu’il y en a beaucoup qui finissent à l’hôpital.

G. Monod-Herzen : Trois cas en France, une trentaine en Amérique. Les cas les moins graves sont les cas de folie, les cas les plus graves sont des cas de décès. Mais ce qui se produit dans tous les cas, c’est qu’il y a quelqu’un qui touche de l’argent pour cela !

Mataji : Je suis tout à fait contre ce genre d’exercices qui tentent de stimuler artificiellement la Kundalini, de la même façon que lorsqu’on provoque un accouchement. Il peut y avoir des dégâts pour l’enfant et pour la mère. Les gens qui sont les promoteurs du Yoga de la Kundalini savent très bien que les Occidentaux sont à la recherche de sensations fortes et ils les offrent, bien sûr, dans leurs méthodes. C’est une marchandise. Il y a beaucoup de gens comme cela.

G. Monod-Herzen : J’ai rencontré en Inde des gens qui naturellement avaient obtenu l’éveil et le développement de la Kundalini par des voies normales, si je puis dire, et qui en avaient tiré un bonheur profond, extraordinaire, permanent et sans aucun accident. Mais cela demande toute une ascèse, toute une préparation.

Question : Cela peut sembler un peu artificiel de se mettre en position du lotus et de méditer.

Réponse : Oui, mais cette position on ne la prend qu’au début. Le but c’est d’être en méditation lorsque l’on marche, lorsque l’on travaille, lorsque l’on fait n’importe quoi. Il faut bien commencer par quelque chose, alors on commence comme cela, car le corps immobile favorise la tranquillité du mental, les yeux fermés permettent de ne pas être distrait. C’est donc recommandable au début, par la suite on doit pouvoir méditer à tout instant.

Passons à présent aux quatre paroles essentielles : « Maha Vakya-s ».

1° « Prajnanam Brahman » : Cela veut dire « la Conscience Ultime est Brahman ».

On essaye d’abord de faire comprendre à l’aspirant, à l’étudiant que la « Conscience Absolue est Brahman ».

2° « Tat Tvam Asi » : Cela tu l’es ».

On essaye de faire comprendre que cette Conscience Absolue qui est Brahman, le Soi, est en l’aspirant également.

3° « Aham Atma Brahman » qui veut dire le Soi Ultime est Brahman, « Je suis « Atma-Brahman ».

4° « Aham Brahman Asmi », « Je suis la Conscience Absolue ».

Ce qui veut dire que le véritable « Je » n’est pas le corps physique, donc le « Je » n’est pas le corps physique », le mental, l’intellect.

Le « Je » et le « Moi » représentent la Conscience Absolue et ce n’est ni le corps, ni le mental, ni l’intellect.

Les Maîtres demandent à l’aspirant de penser à ces quatre grandes Vérités, à ces quatre grandes Paroles : « Maha Vakya-s ».

Dans la réalisation ultime le petit « je » individuel disparaît et se confond avec l’Absolu, le Brahman, le Soi Universel.

Question : Vous avez parlé des trois états : veille, rêve, sommeil profond, mais pas du  quatrième état.

Réponse : On a expérimenté les trois états et au-delà de cela se trouve le quatrième état : « Turya », qui est l’état de supraconscience.

Question : N’y aurait-il pas aussi un état en dessous de la veille ?

Réponse : Oui, au niveau animal. Des gens comme Hitler, par exemple, sont à un niveau de conscience infraconscient, réduit au niveau animal.

Question : Où situez-vous l’état de prophétie ?

Réponse : C’est lorsque le mental est transcendé et que l’on a une connaissance intuitive. Quand le mental se tait tout à fait, cela peut se produire pendant une période de temps très limitée.

Dans l’état de « Samadhi » toutes les empreintes subconscientes ont été brûlées et alors on peut atteindre cet état latent. Tandis que dans l’état prophétique, ce n’est que temporaire ; on revient ensuite à un niveau de conscience ordinaire. Les grands artistes, les grands savants, les grands scientifiques, dans leurs recherches, peuvent avoir des instants de grande intuition. Cela paraît paradoxal, car ils peuvent être à un niveau de conscience très peu élevé. A ce moment l’impression est très fugitive.

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