John F. Clauser
La crise des pseudo-sciences

Traduction libre 25/07/2023 John F. Clauser, né en 1942, est un physicien américain, théoricien et expérimentateur, connu pour ses contributions aux fondements de la mécanique quantique. Clauser a reçu le prix Nobel de physique en 2022, conjointement avec Alain Aspect et Anton Zeilinger « pour des expériences avec des photons intriqués, établissant la violation des inégalités […]

Traduction libre

25/07/2023

John F. Clauser, né en 1942, est un physicien américain, théoricien et expérimentateur, connu pour ses contributions aux fondements de la mécanique quantique. Clauser a reçu le prix Nobel de physique en 2022, conjointement avec Alain Aspect et Anton Zeilinger « pour des expériences avec des photons intriqués, établissant la violation des inégalités de Bell et ouvrant la voie à la science de l’information quantique ».

M. Clauser s’est exprimé en juillet lors de l’événement Quantum Korea 2023. Ce qui suit est une transcription de ses remarques qui ont incité le Fonds monétaire international à annuler sa participation cette semaine, et qui ont entamé une trajectoire prévisible d’annulation plus large.

Vous trouverez ci-dessous le discours et sa transcription.

Oh, j’espère qu’il n’y a pas eu d’erreur de communication dans l’invitation pour cet exposé particulier, je vais lui en donner un autre plus tard — le discours d’ouverture. On m’a d’abord demandé de faire quelques brèves remarques pour inspirer les jeunes scientifiques coréens. Je ne sais pas trop, je ne savais pas trop comment m’y prendre, alors voici ma meilleure tentative, qui n’a pas grand-chose à voir avec la technologie quantique, mais voici mes pensées inspirantes.

Il y a longtemps, en fait toute ma vie, j’ai été physicien expérimental. J’ai eu l’insigne privilège de pouvoir littéralement parler à Dieu, même si je suis athée. Dans un laboratoire de physique, je suis en mesure de poser des questions mathématiques soigneusement posées et d’observer en conséquence la vérité universelle.

Pour ce faire, j’effectue des mesures minutieuses des phénomènes naturels. Dans un laboratoire de physique, j’ai un jour tranché le débat entre Einstein et Schrödinger d’une part, Niels Bohr et John von Neumann d’autre part. Dans un laboratoire, j’ai posé une question simple : lequel de ces deux groupes avait raison ? Et lequel avait tort ?

Je ne savais pas à l’avance quelle réponse j’obtiendrais. Je savais simplement que je pourrais obtenir une réponse. Néanmoins, j’ai trouvé la vérité réelle. Pour la réponse. J’affirme que la vérité réelle ne peut être trouvée qu’en observant les phénomènes naturels. En observant attentivement les phénomènes naturels.

Une bonne science est toujours basée sur de bonnes expériences. Les bonnes observations l’emportent toujours sur les théories purement spéculatives. Les expériences bâclées, en revanche, sont souvent contre-productives et fournissent de la désinformation scientifique. C’est pourquoi les bons scientifiques répètent soigneusement les expériences des autres.

Pour inspirer les jeunes scientifiques, je dirais qu’aujourd’hui est un moment propice à l’observation attentive de la nature. Pourquoi ? Le monde actuel que j’observe est littéralement inondé, saturé, de pseudo-science, de mauvaise science, de mésinformation et de désinformation scientifique, et de ce que j’appellerai les « techno-arnaques (techno-cons) ». Les techno-arnaques sont l’application de la désinformation scientifique à des fins opportunistes.

Les chefs d’entreprise non-scientifiques, les hommes politiques, les directeurs de laboratoire nommés par les pouvoirs publics, etc. sont très facilement submergés par la désinformation scientifique. Parfois, ils participent à sa création. L’objectif est de vous inciter, en tant que jeunes scientifiques, à observer directement la nature afin que vous puissiez, vous aussi, déterminer la vérité réelle. Utiliser les informations obtenues grâce à des expériences et des recherches soigneusement menées pour mettre un terme à la diffusion de la mésinformation scientifique, de la désinformation et des techno-arnaques.

Les scientifiques bien formés peuvent contribuer à résoudre les problèmes du monde en jouant le rôle de vérificateurs de faits scientifiques (fact-checker). Le problème le plus courant d’un vérificateur de faits, malheureusement, est de déterminer ce qui est vrai de ce qui ne l’est pas. Le monde est inondé de ce que d’autres perçoivent comme vrai comme alternative à la vérité réelle.

Une perception de vérité diffère souvent de manière significative de la vérité réelle. De plus, avec une promotion et une publicité suffisantes, une perception de vérité devient vérité. Sa promotion par une entreprise commerciale s’appelle le marketing, généralement utilisé par ses promoteurs à des fins politiques, commerciales ou opportunistes. Lorsque la promotion est faite par le gouvernement ou des groupes politiques, elle est appelée « manipulation médiatique (spin) » ou « propagande ».

Pour un tel promoteur, cette perception de vérité est la vérité. Si vous pouvez la vendre, c’est qu’elle est vraie. Si vous ne pouvez pas la vendre, elle doit être fausse. La perception de vérité est également malléable. Si vous pouvez la vendre, si vous voulez la vendre et que vous ne pouvez pas la vendre, c’est facile. Vous la changez. Vous pouvez changer la vérité. Vous pouvez prétendre à de fausses observations si nécessaire.

Mon préféré dans ce domaine est ChatGPT. Il est très doué pour faire exactement cela. Il dispose d’un grand nombre de pseudo-sciences créées par l’homme qu’il peut copier, manipuler et imiter. Il peut mentir et tricher encore mieux que ses mentors humains dont les écrits abondent dans la littérature. Dans la littérature, vous remarquerez qu’il y a beaucoup plus de fiction que de non-fiction. La pseudo-science est de la science-fiction. Malheureusement, ni les ordinateurs ni les vérificateurs de faits humains ne peuvent, en général, distinguer les faits de la fiction. Ou la science de la science-fiction ou de la pseudo-science.

Si le vaisseau Enterprise peut voler plus vite que la vitesse de la lumière, c’est possible, non ? Tout ce dont vous avez besoin, c’est de cristaux de dilithium, n’est-ce pas ? Faux.

La vérité réelle n’est pas malléable. Elle ne peut être trouvée qu’en procédant à des observations minutieuses. Les lois physiques éprouvées et les données d’observation sont des guides importants qui vous permettent de distinguer la vérité de la perception de vérité.

Je ne suis pas le seul à observer la dangereuse prolifération des pseudo-sciences. Récemment, la Fondation Nobel a créé un nouveau groupe d’experts chargé d’étudier la question, le Groupe international sur l’environnement informationnel. Elle prévoit de s’inspirer du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations unies.

Je pense personnellement qu’ils font une grosse erreur dans cet effort car, à mon avis, le GIEC est l’une des pires sources de mésinformation dangereuse. Ce que je m’apprête à recommander va plutôt dans le sens des objectifs de ce nouveau groupe.

Dans le passé, nous, scientifiques, avons joué le rôle d’arbitres pour l’examen par les pairs des articles de revues. Et nous avons mutuellement évalué nos travaux, afin d’empêcher la prolifération de la mésinformation scientifique. Ce processus semble s’être récemment effondré. Il faut le relancer d’une manière ou d’une autre.

Au cours de ma carrière de scientifique, on m’a souvent demandé d’arbitrer de nombreux articles de revues scientifiques. Je vais donc vous donner quelques conseils. Tout d’abord, et c’est très important, votre travail doit être basé sur des observations minutieuses de la nature. Vous devez faire des efforts et reconnaître ce que j’appellerai un « éléphant dans la pièce » qui se cache à la vue de tous. Posez des questions très simples. J’ai trouvé un éléphant dans la pièce que je décrirai dans mon discours d’ouverture sur la mécanique quantique.

J’ai découvert récemment un deuxième éléphant dans la pièce concernant le changement climatique. Je pense que le changement climatique n’est pas une crise.

La vérité réelle peut être trouvée si et seulement si vous apprenez à reconnaître et à utiliser la bonne science. C’est particulièrement vrai lorsque la vérité réelle est politiquement incorrecte et ne reflète pas les objectifs politiques, commerciaux ou les désirs des dirigeants. Même la communauté scientifique peut parfois être diluée par la pseudo-science.

Rappelons que si l’on veut qu’une pseudo-science soit vraie, il suffit de lui donner un spin médiatique pour qu’elle le devienne. Il est important de noter qu’un arbitre doit baser sa connaissance et son usage de la physique sur les mathématiques. Un bon scientifique doit également savoir comment dériver et résoudre des équations différentielles. C’est la première chose que j’ai apprise lorsque j’étais étudiant à Caltech.

Suivez l’enseignement de Sir Isaac Newton. Il a découvert que le monde est régi par des équations différentielles. Il a dû inventer le calcul pour y parvenir, mais il y est parvenu. Un arbitre doit identifier correctement les processus dominants. C’est le point de départ. La meilleure façon d’y parvenir est de procéder à des estimations de l’ordre de grandeur des différents processus concevables.

Je pourrai donner un exemple plus tard, mais je n’ai pas le temps de le faire, concernant le changement climatique ; le processus dominant, je crois, a été mal identifié par un facteur de 200. Donc, si vous vous trompez d’un facteur de cent ou deux cents, votre processus est bien trop petit pour être important. C’est la clé — les grands nombres sont importants, les petits nombres peuvent être négligés.

Il arrive que des personnes promeuvent de nouvelles idées qui sont erronées par un facteur de 1 000 000. Ils n’ont tout simplement pas fait les calculs eux-mêmes. Le plus pathétique dans tout cela, c’est qu’ils ne savent pas qu’ils ont besoin de savoir comment faire cela. Leur manque de connaissances scientifiques permet à la science, à la pseudo-science, de promouvoir ce que j’appellerai les techno-arnaques, des objectifs politiques opportunistes.

Il suffit d’appliquer des calculs d’ordre de grandeur pour démasquer et identifier les « techno-arnaques ». Il est très important qu’un arbitre applique de bonnes méthodes statistiques basées sur le calcul ainsi qu’un bon sens. J’aimerais également que vous considériez les méthodes utilisées par deux de mes anciens associés à l’université de Californie, Berkeley, lauréats du prix Nobel. Lorsqu’on leur a montré des données, un groupe de points de données et qu’on leur a dit « Regardez, la tendance est évidente ». Luis Alvarez, lauréat du prix Nobel, les regardait et disait : « La ligne la plus plate que j’aie jamais vue ». Charlie Townes le regardait et disait : « Je ne vois pas dans les données ce que vous me dites que je suis censé voir. »

Attention. Si vous faites de la bonne science, elle peut vous conduire dans des domaines politiquement incorrects. Si vous êtes un bon scientifique, vous les suivrez. J’en ai plusieurs dont je n’aurai pas le temps de parler, mais je peux affirmer en toute confiance qu’il n’y a pas de véritable crise climatique et que le changement climatique n’est pas à l’origine des phénomènes météorologiques extrêmes.

Merci.

Transcription originale : https://brownstone.org/articles/the-crisis-of-pseudo-science-by-john-f-clauser/