Arthur G. Zajonc
La théorie des couleurs de Goethe et l’intuition scientifique

Traduction libre Randall Laboratory of Physics, Université du Michigan, Ann Arbor, Michigan 48104 (Reçu le 13 décembre 1974 ; révisé le 20 mai 1975 et paru dans L’American Jouranl of Physics Vol. 44, No 4 Avril 1976)) Un résumé des études de Johann Wolfgang von Goethe sur les couleurs est présenté, avec une attention particulière portée à sa « méthode ». Il est proposé […]

Traduction libre

Randall Laboratory of Physics, Université du Michigan, Ann Arbor, Michigan 48104

(Reçu le 13 décembre 1974 ; révisé le 20 mai 1975 et paru dans L’American Jouranl of Physics Vol. 44, No 4 Avril 1976))

Un résumé des études de Johann Wolfgang von Goethe sur les couleurs est présenté, avec une attention particulière portée à sa « méthode ». Il est proposé que l’acte d’observation qualitative précise crée, chez l’observateur, la capacité d’une compréhension intuitive des lois physiques sous-jacentes aux phénomènes observés. L’utilisation d’une telle méthode comme base pour l’enseignement en laboratoire est discutée.

Lord Kelvin (1824-1907) a décrit comme suit ce dont la science s’occupe [1] :

Je dis souvent que lorsque vous pouvez mesurer ce dont vous parlez et l’exprimer en chiffres, vous en savez quelque chose ; mais lorsque vous ne pouvez pas l’exprimer en chiffres, votre connaissance est maigre et insatisfaisante ; cela est peut-être le début de la connaissance, mais vous n’avez guère, dans vos pensées, atteint le stade de la science, quelle que soit la question.

Nous rencontrons ici explicitement un présupposé central qui est à la base de la recherche scientifique depuis Newton ; en bref, la science est quantitative. Il est généralement admis que cette quantification de l’information permet de contourner la nature subjective de l’expérience humaine. On s’est beaucoup interrogé sur la validité d’un tel point de vue et, si c’est valide, sur ses limites et ses implications [23 4]. Cependant, peu de choses positives ont été faites pour répondre à la question suivante : jusqu’où peut-on aller dans la formation d’une science basée sur les expériences qualitatives exactes de l’homme ? C’est précisément cette « science qualitative » que nous souhaitons explorer en tant que complément, peut-être nécessaire, à la « science quantitative » plus orthodoxe enseignée aujourd’hui dans les lycées et les universités. Dans la théorie des couleurs de Goethe [5], nous trouvons, je crois, les éléments nécessaires pour former une alternative fructueuse à la nature purement quantitative de la science moderne. Dans les pages qui suivent, nous espérons présenter une approche fondamentalement différente à certains égards de la science moderne, tout en restant fidèle à ses objectifs sous-jacents [6]. Cette approche met l’accent sur la réalité des expériences « intuitives » des lois naturelles en tant que complément à la formulation mathématique plus formelle de ces lois. Enfin, nous soulignons brièvement certaines ramifications pédagogiques dans la conception des cours de laboratoire qu’une telle approche pourrait avoir.

INTRODUCTION

En 1810, Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832) a publié ce qu’il considérait comme son œuvre la plus importante, Zur Farbenlehre (Sur la théorie de la couleur). En grande partie à cause de sa polémique contre Newton et sa théorie des couleurs alors acceptée (Opticks, 1704), la théorie de Goethe « sonnait comme un coup dans les montagnes », c’est-à-dire qu’elle était essentiellement ignorée à l’époque, comme aujourd’hui, par la majeure partie de la communauté scientifique [7]. Toutefois, plus récemment, des scientifiques contemporains tels que Walter Heitler [2] et Werner Heisenberg [8] ont entrepris de reconsidérer les contributions de Goethe à la science. Contrairement à ces auteurs, notre objectif n’est pas d’évaluer le Farbenlehre de Goethe, mais plutôt de rendre compte aussi clairement que possible de la pensée de Goethe concernant les sciences physiques, telle qu’elle ressort de ses études sur les couleurs. En prenant conscience non seulement des explications qu’il a avancées, mais aussi de sa méthode, nous pouvons être amené à expérimenter les aspects pertinents et opportuns de sa vision scientifique du monde. Sa méthode conserve une intimité avec la nature et qui, de ce fait, est accusée de subjectivité. Elle établit également une relation avec les phénomènes qui conserve l’élément d’émerveillement authentique. Les Grecs anciens sont souvent cités pour avoir déclaré que toute connaissance commence par l’émerveillement. En abordant le monde d’une manière phénoménologique, nous pouvons encore parvenir à une compréhension des phénomènes naturels qui, nous espérons le montrer, peut légitimement être appelée une « théorie ». Grâce à l’immédiateté de l’expérience qui consiste à contempler les lois de la nature dans les phénomènes eux-mêmes, les étudiants sont d’abord émerveillés par les expériences les plus simples. Pourtant, cet émerveillement ne conduit pas au mythe, mais plutôt à une véritable démarche scientifique.

L’ŒIL : LES COULEURS PHYSIOLOGIQUES

Goethe commence son Farbenlehre par une réflexion sur l’organe de la vue ; nous choisirons de faire de même. Pour ce faire, on peut réaliser l’expérience suivante.

Un objet bien éclairé et fortement coloré [9] est placé suffisamment loin pour qu’il n’occupe pas plus de 2° du champ de vision (afin que l’image tombe sur la fovea centralis — vision conique pure). Si, après une période d’environ 30 secondes, nous fermons les yeux ou nous les détournons vers une surface neutre, une image rémanente colorée apparaît progressivement. Elle flottera, pour ainsi dire, devant les yeux, bien qu’aucun stimulus externe ne soit présent ; l’image est entièrement produite par l’œil. Si l’on utilise des objets de couleurs différentes, on découvre que la teinte de l’image rémanente est complémentaire de celle de l’objet. (Ce n’est pas tout à fait vrai. Pour une présentation très intéressante de la teinte de l’image rémanente en fonction de la saturation, voir [10]) La première description de ce phénomène se trouve dans le De Somniis (Sur les rêves) d’Aristote, où il parle des images colorées des rêves et de l’imagination comme ayant une ressemblance avec les images rémanentes de l’œil. Ce phénomène a été redécouvert au cours de l’histoire par des personnages tels que Saint Augustin, Alhazan et Peiresc. Nous pouvons souligner, avec Goethe, que le cercle chromatique peut être construit par paires d’images rémanentes de telle sorte que les paires se trouvent aux extrémités opposées des diamètres. Goethe considérait la tendance de l’œil à créer des images rémanentes d’une extrême importance et l’a même généralisée sous le nom de « loi du changement nécessaire » (« Gesetz des geforderten Wechsels » [11]). Cette loi stipule que lorsqu’une forte impression est reçue, son complément est produit par l’individu, de sorte que lorsque le stimulus externe est supprimé, le geste intérieur complémentaire s’exprime — d’où l’apparition d’une image rémanente, de larmes lorsqu’il y a de la joie, etc. L’œil n’est donc pas un dispositif passif, mais plutôt un organe créatif, qui « exige la complétude et cherche à compléter le cercle chromatique en lui-même » [12].

Vous voyez [dit Goethe] qu’il n’y a rien à l’extérieur de nous qui ne soit aussi en nous, et que l’œil, comme le monde extérieur, a ses couleurs [13].

Le reflet du monde extérieur dans le monde intérieur remonte bien sûr aux anciens et a perduré jusqu’au XVIIe siècle, comme en témoigne l’acceptation d’un univers géocentrique. Comme nous le verrons, les idées de Goethe reflètent à bien des égards ces vues antérieures d’une manière qui porte l’empreinte d’un génie moderne.

Une autre expérience très instructive et fascinante est la production d’ombres colorées. Il faut deux sources de lumière (à l’origine, on utilisait la lumière du soleil et la lumière d’une bougie) de couleurs différentes, par exemple rouge et blanche. Elles sont projetées en superposition sur un écran et un objet approprié est placé de manière à ce que deux ombres soient projetées, l’une éclairée par la seule lumière rouge et l’autre par la seule lumière blanche (Fig. 1). Cependant, au lieu de percevoir une ombre rouge et une ombre « blanche », ce sont des ombres rouge et verte qui sont perçues. La théorie actuelle de la couleur explique ce phénomène par la théorie de l’« adaptation chromatique », qui stipule essentiellement que le « point blanc » subjectif du diagramme de chromaticité est déplacé en fonction de la couleur (dans ce cas, le mélange blanc-rouge) qui domine. Nous sommes ici inévitablement confrontés à la nature subjective de la perception. Il ne suffit pas de connaître la distribution énergétique spectrale du rayonnement incident et les courbes de réflectance spectrale de l’objet. Nous devons également tenir compte de l’environnement dans lequel notre objet a été placé ainsi que de la dernière impression sur la rétine.

Fig. 1. Montage pour la démonstration des ombres colorées ou de l’adaptation chromatique.

Grâce à des expériences comme celles-ci, Goethe était fermement convaincu, contrairement à Newton, qu’il ne fallait pas retirer l’homme de la nature au cours du processus d’investigation scientifique. L’homme fait partie de la nature et, par conséquent, en observant la nature, la nature s’observe elle-même [14]. Ce point de vue a également été exprimé par Werner Heisenberg dans son ouvrage Physicist’s Conception of Nature, où il décrit avec précision le dilemme du scientifique lorsqu’il écrit :… l’objet de la recherche n’est plus la nature elle-même, mais l’étude de la nature par l’homme.

En d’autres termes, la distinction traditionnelle entre l’homme et la nature, l’observateur et l’observé n’est plus valable. Ceci est écrit, bien sûr, avec son principe d’incertitude en toile de fond. Mais Goethe va plus loin. Non seulement nous devons nous rappeler que, par l’observation, nous entrons dans le cours de la nature et le perturbons, mais plus important encore, les couleurs, les tons et les formes elles-mêmes nous affectent d’une manière propre à chaque perception individuelle. Cela ne doit pas être compris dans un sens atomistique ; il faut plutôt concevoir les couleurs, les tons et les formes comme étant tous de nature fondamentalement créative. Dans les cercles anthropologiques, on remarque souvent à quel point l’homme est adapté à son environnement. Par exemple, l’œil est plus sensible à la gamme de fréquences à laquelle le soleil émet principalement. Dans un sens très réel, Goethe a décrit l’œil (en fait tout l’homme) comme étant modelé par des stimuli en continu. C’est ainsi qu’il déclare [15] :

L’œil doit son existence à la lumière. À partir d’organes animaux indifférents, la lumière produit un organe qui lui correspond ; ainsi l’œil est formé par la lumière pour la lumière, afin que la lumière intérieure rencontre la lumière extérieure. … Si l’œil n’était pas semblable au soleil, comment pourrions-nous percevoir la lumière ?

Nous arrivons ici à une idée centrale de la science de Goethe. L’homme fait partie de la nature et ne doit pas en être séparé pour des raisons d’objectivité. La nature a créé et crée des organes dans l’homme à travers lesquels l’homme peut la percevoir. L’homme répond à son tour par ses propres actions créatives.

La perception est donc un dialogue permanent entre les sens et le sensible. Empédocle [16] et Platon [17] présentent une théorie de la vision de cette nature. Le feu extérieur (le soleil) agit de manière à amener les images du monde à l’œil, mais en réponse, une image comparable est projetée de la rétine à la surface de l’œil par l’action d’un feu intérieur pur qui réside à l’intérieur de l’œil. L’interaction entre ces deux images est à l’origine de la perception.

C’est ainsi que nous en arrivons à une image de l’homme comme un être inséparable de la nature, engagé dans un dialogue continu, à la fois conscient et inconscient, avec la nature. Le plus important est peut-être qu’il s’agit d’un dialogue créatif, qui conduit à des organes aptes à percevoir ce qui entoure l’homme.

COULEURS PRISMATIQUES

Avant de poursuivre l’analyse des idées de Goethe, rappelons ce que nous entendons par « science ». Comme l’a souvent souligné, par exemple, Whitehead [18], le monde se présente à nos sens d’une manière telle que, si nous sommes déductifs de manière complète et rigoureuse, aucune « loi de la nature » ne peut, a priori, être honnêtement avancée. Le scientifique possède cependant une foi généralement inavouée dans l’existence de relations causales dans la nature et dans le fait que ces relations, contrairement à ce que prétend Hume [19], ne sont pas arbitraires. Motivé par cette croyance, le scientifique s’efforce de découvrir les relations qui ordonneront ses perceptions de telle sorte que des éléments de permanence soient trouvés dans ce qui apparaît autrement comme une expérience sans lien. Pour reprendre les termes d’Einstein [20] :

L’objectif de toutes les sciences est de coordonner nos expériences et de les intégrer dans un système logique.

La nature de la science consiste donc à tenter de réduire un ensemble de phénomènes à certaines lois générales et exactes à partir desquelles les phénomènes individuels peuvent être déduits. C’est ainsi que nous considérons, par exemple, qu’une loi physique régit à la fois la trajectoire d’une pierre lancée et l’orbite de la lune, à savoir la loi de la gravitation. Le monde nous présente alors une multitude d’expériences que nous ordonnons en les considérant comme des manifestations particulières d’une ou de plusieurs lois physiques. Dans cette optique, nous espérons indiquer dans quelle mesure les études de Goethe sur les couleurs constituent une science, une science qui ne se préoccupe pas des relations causales abstraites supposées exister par le scientifique moderne, mais plutôt des lois telles qu’elles sont perçues dans les phénomènes eux-mêmes, en tant qu’interaction active des polarités. Nous espérons ainsi montrer dans quel sens Goethe espérait lui aussi trouver « dans le flux des phénomènes toujours changeants […] ce qui était permanent » [21].

Nous pouvons maintenant poser la question de savoir quelles sont les « lois de la couleur ». Il convient de souligner que nous ne nous intéressons pas ici aux lois de l’optique, mais purement à celles de la couleur (les deux sont bien sûr intimement liées, mais la distinction est réelle). L’optique, comme le souligne Goethe, est certainement un domaine valable pour une science mathématique, mais cette approche lui semble inadéquate pour rechercher les lois de la couleur [22]. L’histoire, bien sûr, n’a guère tenu compte des sentiments de Goethe, et l’on peut légitimement dire que la théorie moderne de la couleur a réellement commencé avec Newton, dont l’approche était fondamentalement antithétique de celle de Goethe. La célèbre expérience de Newton sur la production du spectre [23] a été enseignée à Goethe dans sa jeunesse comme elle l’a été à nous dans la nôtre. L’histoire du travail expérimental actif de Goethe commence par une répétition de cette expérience.

Goethe avait un ami scientifique, Hofrat Büttner, à Gottingen, à qui il emprunta suffisamment de matériel optique pour réaliser la plupart des expériences de base en optique. À leur réception, Goethe les plaça dans un coin et les oublia rapidement. Ce n’est qu’après des rappels et des messages que Büttner contraignit en quelque sorte Goethe à sa première expérience rudimentaire. Goethe raconte qu’il a pris un prisme et qu’en le plaçant devant son œil, il a vu autre chose que l’arc-en-ciel auquel il s’attendait [24]. En effet, il affirme qu’il se trouvait à ce moment-là dans une pièce complètement blanche. Ainsi, il s’attendait à ce que la lumière réfléchie des murs blancs, lorsqu’elle traverserait le prisme, produise de nombreux arcs-en-ciel sur sa surface. Comme on pouvait s’y attendre, il fut très déçu. C’est pourtant de ce moment de désillusion qu’est née la résolution que les notions de Newton étaient erronées, ce qui le conduisit à ses recherches approfondies et précises sur les phénomènes de couleur. Goethe se tourna alors du mur vers la fenêtre de la chambre, pensant que la lumière du soleil contenait peut-être l’élément essentiel. Là encore, il ne vit pas ce à quoi il s’attendait, mais quelque chose de tout à fait extraordinaire. À l’endroit où le treillis du cadre de la fenêtre traversait la fenêtre, il vit de la couleur : du bleu et du violet d’un côté, du rouge et du jaune de l’autre. C’est là que les lois de la couleur devaient être trouvées, non pas dans la lumière seule, mais dans la rencontre de la lumière et de l’obscurité ! À ces frontières, la lumière « interagit » avec l’obscurité et donne naissance à la couleur. Goethe commence donc son étude des couleurs prismatiques par ce que nous appelons aujourd’hui les couleurs de frontière. Il les considère comme fondamentales, alors que la théorie moderne des couleurs les traite généralement comme un phénomène composite. Il est toutefois important de comprendre que l’on peut légitimement commencer par les couleurs de frontière et développer une théorie des couleurs sur cette base [25].

Considérons les couleurs de frontière de manière plus précise et conforme à l’approche de Goethe, c’est-à-dire de manière purement phénoménologique. La figure 2 illustre une première expérience. Des régions noires et blanches sont disposées comme indiqué sur la figure, puis vues à travers la moitié supérieure d’un prisme, dont l’un des bords est tenu contre le nez. Certaines couleurs apparaîtront aux interfaces noir-blanc. Il est important de noter qu’il existe deux groupes de couleurs : les couleurs « chaudes », rouge, orange et jaune, et les couleurs « froides », bleu, indigo et violet. Un certain nombre d’observations peuvent être faites à ce stade. Par exemple, les couleurs froides apparaissent sur la zone noire tandis que les couleurs chaudes apparaissent sur la zone blanche. De plus, la couleur verte est totalement absente alors qu’elle est présente dans le spectre newtonien. Enfin, la figure semble déplacée vers le haut.

Fig. 2. Démonstration des couleurs de frontière : la couleur comme « actes et souffrances » de la lumière avec l’obscurité.

Comme nous l’avons vu, la couleur verte est absente des couleurs de frontière. Comment peut-on alors produire cette couleur ? Les expériences suivantes sont une démonstration vivante et magnifique de ce processus. Placez une feuille de papier blanc sous deux feuilles noires, comme le montre la figure 3(a). Faites glisser lentement les feuilles noires ensemble tout en observant la zone blanche étroite à travers un prisme. Comme nous pouvons constater, le jaune des couleurs chaudes entre en contact avec le bleu des couleurs froides pour donner naissance au vert. Goethe conclut de cette expérience que le vert est produit par le mélange du jaune et du bleu, comme on le fait en peinture. (Ceci est bien sûr une erreur puisque le vert produit ici est approximativement un vert spectral, c’est-à-dire un vert pur et non un mélange). Goethe réalisa ensuite une expérience complémentaire à la précédente. Alors qu’auparavant on voyait une fente de lumière dans un champ d’obscurité, voyons maintenant une fente d’obscurité dans un champ de lumière. (Notez que ceci est précisément complémentaire à l’expérience de Newton). Le montage est illustré à la figure 3(b). Les feuilles blanches sont maintenant poussées ensemble pour créer une couleur (lorsqu’elle est vue à travers un prisme) qui ne se trouve pas dans le spectre de Newton. Goethe a appelé cette couleur « purpur » (magenta) et l’a décrite comme résultant d’une « intensification » (Steigerung) du violet et du rouge, distincte du mélange du jaune et du bleu qui donne le vert. Nous pouvons également remarquer un délicat changement de teinte dans toutes les autres couleurs vers le pastel.

À travers ces deux expériences, nous avons produit toutes les couleurs du cercle chromatique moderne ou du diagramme de chromaticité. Les deux tiers inférieurs des couleurs du diagramme proviennent de l’expérience de Newton, tandis que les deux tiers supérieurs sont visibles dans l’expérience de Goethe. (Cela ne veut pas dire que Goethe considérait le blanc comme le composé de toutes les couleurs, mais seulement que les couleurs spectrales de Newton ne sont pas suffisantes pour la gamme complète des couleurs présentées dans le diagramme de chromaticité moderne). La dualité qui est ici évidente est d’une nature étonnante. En transformant le blanc en noir et le noir en blanc, nous produisons une expérience sensorielle complémentaire, étant donné que le vert et le magenta sont complémentaires de l’image rémanente. Ce concept de dualité est au cœur de la vision du monde de Goethe. C’est un reflet de la notion goethéenne de polarité, qui sera abordée plus loin.

Fig. 3. (a) La génération du vert dans le spectre newtonien. (b) La génération du « purpur » (magenta) dans le spectre goethéen.

Jusqu’à présent, l’approche que nous avons adoptée est essentiellement celle de la science moderne : une analyse minutieuse des phénomènes eux-mêmes. Dorénavant, cependant, les chemins se séparent nettement, la science moderne suivant la voie de l’analyse mathématique et de la « modélisation » [26], tandis que Goethe reste dans le cadre de l’expérience phénoménale. À ce stade, le scientifique a généralement recours à des concepts « secondaires » qui n’ont pas de réalité en dehors de l’esprit. Par exemple, la première représentation de l’atome comme une boule avec des crochets et des yeux assortis pour expliquer la liaison est, bien sûr, une tentative d’expliquer les faits scientifiques concernant quelque chose d’invisible, de nature submicroscopique, par analogie avec ce qui est perceptible par les sens, à savoir les crochets et les yeux [27]. Bien qu’aucun scientifique qualifié n’accepte un tel modèle naïf comme décrivant la réalité, il est néanmoins souvent considéré comme tel par la communauté non scientifique.

LES PHÉNOMÈNES ARCHÉTYPAUX

La question demeure : comment comprendre les phénomènes de la couleur ? Comment procéder si le but recherché est la connaissance, et non pas simplement l’énumération et la classification ? C’est ici que se trouve le cœur de la méthode de Goethe.

Pour découvrir les principes généraux qui ordonnent le monde, l’intellect doit être mis à contribution. Il recherche l’élément essentiel qui peut traverser toute une série de phénomènes. Pour la méthode goethéenne ainsi que pour l’approche scientifique moderne, cela forme le deuxième partenaire des paires percept-conception et observation-raisonnement. Ce n’est que l’application de l’intellect aux objets eux-mêmes plutôt qu’aux relations entre eux qui rebute Goethe. Le domaine d’activité légitime de l’intellect humain est la découverte des relations. Les perceptions, directes ou indirectes, ne doivent pas être soumises à l’abstraction ou à la spéculation sur la composition ultime, etc. [28,29] Goethe déclare [30] :

Il [l’investigateur de la nature] doit se forger une méthode conforme à l’observation, mais il doit veiller à ne pas réduire l’observation à une simple notion, à substituer des mots à cette notion, et à utiliser et traiter ces mots comme s’il s’agissait de choses…

Nous sommes ici avertis du danger inhérent au fait de s’éloigner de l’expérience elle-même pour se tourner vers des « notions » et de simples « mots », tout en oubliant que la réalité de ceux-ci dépend de nous-mêmes et non du phénomène. La méthode que Goethe nous invite à utiliser se garde de telles dénominations et notions. Elle présente plutôt les caractéristiques d’une réduction au plus essentiel et d’une ascension au plus général. Il a caractérisé cette méthode en déclarant [31] :

les circonstances que nous remarquons dans l’observation ordinaire sont, pour la plupart, des cas isolés qui, avec un peu d’attention, peuvent être classés sous des rubriques théoriques générales principales qui sont plus complètes et grâce auxquelles nous nous familiarisons mieux avec les détails de certaines conditions d’apparition indispensables. Désormais, tout est progressivement organisé selon des règles et des lois supérieures, qui ne doivent cependant pas être rendues intelligibles par des mots et des hypothèses pour l’entendement uniquement, mais en même temps par des phénomènes réels pour les sens. Nous appelons ces phénomènes primordiaux [Urphänomen], parce que rien d’appréciable par les sens ne se trouve au-delà d’eux ; au contraire, ils sont parfaitement aptes à être considérés comme un point fixe vers lequel nous montons d’abord, étape par étape, et à partir duquel nous pouvons, de la même manière, descendre jusqu’au cas le plus banal de l’expérience quotidienne…..

Dans notre exposé jusqu’à présent, nous avons suivi les conseils de Goethe en nous contentant de présenter et de décrire les phénomènes étudiés. Il s’agit maintenant de les organiser en « règles et lois supérieures » dont Goethe a écrit, des règles qui ne s’éloignent pas entièrement du perceptible, faisant ainsi appel non seulement à l’intellect, mais aussi aux sens.

En revenant au concept de dualité, nous pourrions nous attendre à le voir également à l’œuvre ici. La polarité majeure de la lumière et de l’obscurité devrait se refléter dans des expériences doubles, dont l’une produirait les couleurs chaudes et l’autre les couleurs froides. Ces expériences devraient permettre l’expression du phénomène archétypal (Urphänomen) que nous recherchons et à partir duquel le reste du monde des couleurs peut être compris. Goethe a souligné que l’interaction entre la lumière et l’obscurité était fondamentale. En termes plus poétiques, il déclare que la couleur est « les actes de la lumière, les actes et les souffrances » [32]. Quelle est la nature de cette interaction, de ces « actes et souffrances » ? Goethe, à la suite d’Aristote, de Roger Bacon, de Léonard de Vinci et d’autres, considère que les couleurs sont produites par le rayonnement d’un extrême ou d’un pôle à travers l’autre. Plus précisément, les couleurs chaudes proviennent du rayonnement de la lumière à travers l’obscurité. L’exemple le plus frappant et le plus beau de ce phénomène dans la nature se trouve dans le lever et le coucher du soleil. À mesure que le soleil s’approche de l’horizon, sa lumière pénètre de plus en plus l’air (qui transporte l’obscurité), donnant naissance à la séquence de couleurs jaune, orange et rouge progressivement au fur et à mesure qu’il se couche. Une fois de plus, en effectuant la transformation de la lumière en obscurité, de l’obscurité en lumière, nous rencontrons immédiatement l’expérience « complémentaire » ou « double » qui produit les couleurs froides. C’est-à-dire qu’en faisant passer l’obscurité à travers la lumière, nous expérimentons les bleus et les violets. Ici, nous voyons immédiatement le caractère actif que Goethe attribue à l’obscurité. Elle n’est pas perçue comme l’absence de lumière, mais comme un principe actif en soi ! Une fois de plus, la nature nous fournit des exemples immédiats dans le ciel et l’océan. Le ciel bleu (ou l’océan) est considéré comme produit par le passage de l’obscurité de l’espace (ou du fond de l’océan) à travers le milieu lumineux de l’air (ou de l’eau). C’est ainsi que l’air agit comme porteur de l’obscurité en produisant les couleurs chaudes et comme porteur de la lumière pour les couleurs froides. Cet acte de « porteur » est commun aux entités qui, dans la terminologie de Goethe, sont « troubles » (trüb). C’est à partir de ces deux phénomènes archétypaux que l’on peut expliquer l’ensemble du monde des couleurs. En effet, on peut aller loin avec ces pensées pour comprendre et apprécier les teintes de la nature. Goethe va même jusqu’à expliquer les couleurs prismatiques en termes de ces phénomènes archétypaux [33]. Il s’agit donc d’un exemple de l’ascension vers l’« Urphänomen » dont Goethe a parlé et au-delà duquel on ne peut aller :

la lumière à travers l’obscurité -> couleurs chaudes ;

l’obscurité à travers la lumière -> couleurs froides.

Le maximum que l’homme peut atteindre en ces matières est l’étonnement ; si le phénomène archétypal [Ur] le provoque, qu’il soit satisfait ; il ne peut apporter davantage ; et il devrait s’abstenir de chercher quoi que ce soit d’autre derrière : c’est là la limite. Mais la vue d’un premier phénomène ne suffit généralement pas aux gens ; ils pensent qu’ils doivent aller encore plus loin ; et sont ainsi comme des enfants qui, après avoir jeté un coup d’œil dans un miroir, le tournent directement pour voir ce qu’il y a de l’autre côté [34].

LA PERCEPTION INTUITIVE

Cette approche est, à plusieurs égards, fondamentalement différente de celle de la science orthodoxe. Les lois de la nature, selon ce point de vue plus orthodoxe, ne sont compréhensibles qu’à l’aide d’une « analyse rationnelle » [35]. Elles ne sont pas une réalité évidente. C’est sur ce point que Goethe n’est pas entièrement d’accord. Il affirme qu’il est possible de soumettre un champ d’expérience à une réduction. De cette réduction naît la perception fondamentale du phénomène archétypal. Le phénomène archétypal est une manifestation évidente de la loi physique. Il permet d’atteindre une véritable rencontre perceptuelle avec les lois de la physique. Il convient ici de rappeler les racines du mot « théorie » qui, en grec, était ?????? (« regarder/contempler »). Toute l’impulsion de la contribution de Goethe à la science repose sur ce principe : savoir, c’est avoir vu. C’est précisément cette pensée que l’on retrouve exprimée dans le verbe grec ????, qui signifie à la fois « je sais » et « j’ai vu ». Comme le souligne Heisenberg, la distinction que fait ici Goethe correspond aux deux types de connaissance possibles dans la philosophie platonicienne, Épistémè et dianoïa. Pour citer Heisenberg : « Épistémè est précisément cette conscience immédiate à laquelle on peut s’arrêter et derrière laquelle il n’est pas nécessaire de chercher plus loin. Dianoïa est la capacité d’analyser en détail, le résultat de la déduction logique » [36]. Bien que Goethe ait certainement considéré sa science comme radicalement opposée à celle de Newton, nous sommes d’avis qu’une relation complémentaire peut exister entre la science moderne et la science goethéenne si les deux modes de connaissance peuvent être rendus exacts et objectifs. C’est ainsi que la compréhension de la nature par l’homme peut devenir équilibrée et complète : ni purement mécaniste, ni purement poétique. (Voir le Tableau I pour une comparaison plus approfondie des courants goethéen et newtonien). C’est ainsi que la nature abstraite de la pensée scientifique moderne à laquelle l’étudiant est constamment soumis, trouve chez Goethe son contrepoint.

Il est peut-être insuffisant de simplement compléter les formules de la physique mathématique par des démonstrations appropriées. Ne pourrait-on pas développer, parallèlement à la formulation mathématique, une formulation phénoménologique qui conduirait finalement à des rencontres avec les phénomènes archétypaux de chaque discipline de la physique ? C’est là que réside l’éducation intelligente de l’intuition. Contrairement aux expériences de laboratoire habituelles conçues pour illustrer les lois physiques, il y aurait une série structurée d’expériences conçues pour amener l’étudiant à une rencontre perceptuelle avec les lois de la physique !

Il convient de souligner que ces perceptions ne sont pas immédiates. Le simple fait de montrer aux élèves le phénomène archétypal approprié ne garantit nullement la perception ou l’intuition concomitante. Combien de personnes ont vu le lustre de la cathédrale avant Galilée et n’ont pas fait ses observations sur le mouvement du pendule ? L’élément initial nécessaire est le sentiment d’émerveillement sans lequel l’enquêteur ne peut faire que peu ou pas de progrès, mais ensuite, au fur et à mesure que le monde perceptuel nous parvient de manière grossièrement différenciée, des facultés ou des capacités apparaissent progressivement qui conduisent à une perception suffisamment affinée, dont le résultat est la cognition.

On trouve ici un parallèle frappant avec les réflexions grecques sur la vision. La cognition naît lorsque, en termes grecs, l’?????? interne (ou image) de l’œil rencontre l’?????? externe de la nature. Les deux ??????, ou images, sont provoquées par l’action du feu, extérieur ou intérieur. Cette approche comporte une analogie immédiate avec les conceptions plus actuelles du processus de cognition. Lorsque le percept (?????? externe) atteint l’œil, l’intellect (feu interne) l’associe au concept approprié (?????? interne), ce qui donne lieu à la cognition. Comme pour l’œil, il en va de même pour les facultés « intuitives » plus subtiles. En d’autres termes, ne serait-il pas possible de développer la capacité de « percevoir » une loi physique ?

Si tel est le cas, comment cette capacité peut-elle être créée ? Notre étude des images rémanentes et des ombres colorées peut ici s’avérer utile. À travers ces expériences nous avons observé les propriétés dynamiques des perceptions visuelles. En effet, dans les deux cas, quelque chose a été modifié en nous, soit physiologiquement, soit psychologiquement, par les couleurs elles-mêmes. Le processus même de la perception attentive transforme l’observateur en harmonie avec la perception ! Un exemple trivial pourrait être celui du machiniste qui, d’un seul coup d’œil, peut faire la différence entre une vis mécanique 6-32 ou 8-32. Il ne compte certainement pas les filets et ne mesure pas le diamètre. Cette connaissance est plutôt une question de perception. Cette capacité a été acquise par l’expérience de ces objets. De la même manière, on peut concevoir un entraînement plus fin des capacités de perception par une méthode goethéenne. Ces observations ne constituent en aucun cas une preuve rigoureuse des idées de Goethe. Il vaut peut-être mieux laisser cela au domaine de la psychologie. Ces commentaires ont plutôt pour but de clarifier et de soutenir la pensée de Goethe [37] :

Chaque nouvel objet, bien contemplé, ouvre un nouvel organe en nous.

Une fois que l’on admet la possibilité d’une telle éducation, les applications pédagogiques possibles sont immédiates. On pourrait déterminer les lois de la physique qui seraient abordées de cette manière goethéenne et ensuite mettre en place une séquence d’expériences de laboratoire dont le but serait de donner à l’étudiant l’occasion d’expérimenter dans « l’expérience archétypale » (l’expérience finale) la loi de la physique à l’étude. La séquence d’expériences devrait être soigneusement déterminée et, en fait, pourrait varier quelque peu d’un étudiant à l’autre. Cependant, l’expérience, l’intuition de la loi qui précède généralement son expression plus formelle, serait valable. Elle serait importante non seulement pour le jeune physicien, mais aussi pour le non-scientifique dont l’approche du monde peut être tout à fait différente de la théorie : par exemple, l’artiste.

Pour mener la description de la Farbenlehre de Goethe à sa juste conclusion, il est nécessaire de souligner les idées contenues dans le dernier chapitre, intitulé « Les aspects sensoriels et moraux de la couleur ». Dans ce chapitre, Goethe étend ses idées sur la couleur au domaine artistique. Par ses études, il espérait construire une base objective pour l’utilisation artistique de la couleur. À chaque expérience de la couleur, Goethe associe une réponse humaine intérieure. Ces réactions, qu’il appelle notre expérience de « l’aspect moral de la couleur », constituent, en quelque sorte, l’image psychologique de la couleur. Une fois de plus, la compréhension des aspects moraux objectifs de la couleur passe par la perception directe. En traitant de la couleur en termes « d’actes et de souffrances de la lumière » par rapport à l’obscurité, nous avons une image très impressionnante de la source de ces aspects moraux et esthétiques.

RÉSUMÉ

Nous espérons avoir transmis avec précision les idées fondamentales que Goethe a exposées dans sa Théorie de la couleur il y a cent cinquante ans. En outre, nous espérons que sa valeur en tant que premier pas important vers une science basée non pas sur des mesures, mais sur des observations qualitatives approfondies et une intuition éduquée est devenue évidente. Grâce à une telle formation, l’étudiant est amené à percevoir les lois de la nature à travers le phénomène archétypal. Je pense que cela sera utile pour la conception et la philosophie de l’enseignement en laboratoire. Peut-être plus important encore, grâce à de telles expériences, l’étudiant a la possibilité d’acquérir une expérience directe de ce qui a pu jusqu’à présent lui échapper dans la présentation mathématique, l’excitation de savoir : ???? — j’ai vu.

C’est ainsi que nous ressentons avec Heisenberg que [38] :

Aujourd’hui encore, nous pouvons apprendre de Goethe qu’il ne faut pas laisser tout le reste s’atrophier au profit du seul organe de l’analyse rationnelle ; qu’il s’agit plutôt de saisir la réalité avec tous les organes qui nous sont donnés, et de faire confiance à ce que cette réalité reflétera alors aussi l’essence des choses, « l’un, le bon et le vrai ». Espérons que l’avenir sera plus fructueux à cet égard que notre époque, que ma génération n’a su le faire.

REMERCIEMENTS

Ma profonde gratitude au Dr A. P. Cottrell et au Dr E. Katz pour m’avoir intéressé à ces idées et m’avoir offert de nombreuses conversations stimulantes. Je remercie également le Dr J. Zorn pour son aide et son assistance dans la correction et la modification du manuscrit. Je remercie tout particulièrement Michael Wilson, de la Goethean Science Foundation, pour son aide généreuse et perspicace dans l’élaboration de ces idées.

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1 F. W. Sears et M. W. Zemansky, College Physics (Addison-Wesley, Reading, MA, 1960), 3édition, p. 1.

2 W. Heitler, Der Berliner Germanistentag 1968 (Heidelberg, 1970).

3 T. R. Blackburn, Science 172, 1003 (1971).

4 W. Heisenberg, Across the Frontiers, traduit par P. Heath (Harper and Row, New York, 1974).

5 J. W. von Goethe, Zur Farbenlehre, in Goethe’s Werke, Hamburger Ausgabe, édité par E. Trunz (Hambourg, 1961), 5édition, Vol. XIII, ou Theory of Colors, traduit par C. L. Eastlake (MIT Press, Cambridge, MA, 1970; tr fr Traité des couleurs).

6 W. Heitler, Réf. 2, p. 13.

7 G. Jaki, Am. J. Phys. 37, 195 (1969).

8 W. Heisenberg, Wandlungen in den Grundlagen der Naturwissenschaft (Hirzel, Leipzig, 1945), ou Philosophie Problems of Nuclear Science (Problèmes philosophiques de la science nucléaire), traduit par F. C. Hayes (Faber and Faber, Londres, 1952), pp. 60-76.

9 Bien que n’importe quel objet coloré puisse convenir, l’expérience en classe a montré que les feuilles Colormatch se prêtaient bien à cette expérience.

10 M. H. Wilson et R. W. Brocklebank, J. Opt. Soc. Am. 45, 293 (1955).

11 Dans le compte rendu d’une conversation avec Goethe le 1er février 1827, Eckermann déclare : « Cela nous amena à parler d’une grande loi qui imprègne toute la nature et dont dépendent toute vie et toute joie de vivre. Ceci [l’après-imagerie], dit Goethe, est le cas non seulement de tous nos autres sens, mais aussi de notre nature spirituelle supérieure ; et c’est parce que l’œil est un sens si éminent que cette loi du changement nécessaire est si frappante et si particulièrement claire en ce qui concerne les couleurs » [J. P. P. Eckermann, Goethes Gesprache mit Eckermann (Insel-Verlag, Leipzig, 1929), ou Conversations of Goethe with Eckermann and Soret (Conversations de Goethe avec Eckermann et Soret), traduit par J. Oxenford (Bell, Londres, 1883), édition révisée, pp. 216-217].

12 Référence 5, Theory of Colours, p. 28.

13 Référence 11, Conversations of Goethe with Eckermann and Soret, p. 216, 1er février 1827.

14 P. J. Bouma, Physical Aspects of Colour (St. Martin’s, New York, 1971), p. 176.

15 Référence 5, Zur Farbenlehre, dans Goethe’s Werke, Hamburger Ausgabe, Vol. XIII, pp. 323-324. La traduction d’Eastlake est médiocre.

16 V. Ronchi, The Nature of Light (Harvard U.P., Cambridge, MA, 1970), p. 6.

17 Platon, Théétète, 155d-157c [voir, par exemple, F. M. Cornford, Plato’s Theory of Knowledge (Liberal Arts Press, New York, 1957), p. 45].

18 A. N. Whitehead, Science and the Modern World (Free Press, New York, 1967), chap. 1.

19 D. Hume, Inquiry Concerning Human Understanding (Clarendon, Ox ford, 1962), 2édition, Sec. IV, p. 30.

20 G. Holton et D. Roller, Foundations of Modern Physical Science (Addison-Wesley, Reading, MA, 1965), p. 214.

21 K. Vietor, Goethe the Thinker (Harvard U.P., Cambridge, MA, 1950), p. 17.

22 Par exemple, en écrivant sur les applications correctes et incorrectes des mathématiques, Goethe déclare : « La théorie des couleurs, en particulier, a beaucoup souffert et ses progrès ont été incalculablement retardés parce qu’elle a été mêlée à l’optique en général, une science qui ne peut se passer des mathématiques ; alors que la théorie des couleurs, en toute rigueur, peut être étudiée tout à fait indépendamment de l’optique » [Réf. 5, Theory of Colours, p. 287].

23 La description originale par Newton de cette expérience est rapportée à Oldenburg, secrétaire de la Royal Society, dans une lettre très intéressante [voir, par exemple, Ref. 16, p. 160].

24 J. W. von Goethe, Geschichte der Farbenlehre, in Goethe’s Werke, Hamburger Ausgabe (Hambourg, 1961), Vol. XIV, pp. 257-261.

25 Référence 14, pp. 176-177.

26 Référence 20, chap. 13-15, notamment p. 223.

27 W. Heisenberg, Physics and Beyond, traduit par A. J. Pomerans (Harper and Row, New York, 1971), p. 2.

28 Kurschner deutsche National-literatur, édité par R. Steiner (Spemann, Berlin, 1892-1897), Vol. 35, ou Goethe the Scientist, traduit par O. D. Wannamaker (Anthroposophical, New York, 1950), p. 223.

29 Le même esprit est manifesté par P. A. M. Dirac, lorsqu’il déclare : « L’objet principal de la science physique n’est pas de fournir des images, mais de formuler des lois régissant les phénomènes et d’appliquer ces lois à la découverte de nouveaux phénomènes » [P. A. M. Dirac, The Principles of Quantum Mechanics (Oxford U.P., Oxford, 1958), p. 10].

30 Référence 5, Theory of Colours, p. 283.

31 Référence 5, Theory of Colours, pp. 71-72.

32 La traduction d’Eastlake (Réf. 5) est ici médiocre. La version allemande est la suivante : « Die Farben sind Taten des Lichts, Taten und Leiden » [Hamburger Ausgabe, Vol. XIII, p. 315]. Dans l’édition du MIT, cette citation se trouve à la page XXXVII dans la « Préface à la première édition de 1810 ».

33 Référence 5, Theory of Colours, pp. 82-83.

34 Référence 11, Conversations of Goethe with Eckermann and Soret, p. 370, 18 février 1829.

35 Référence 4, p. 129.

36 Référence 4, p. 137.

37 Référence 5, Hamburger Ausgabe, Vol. XIII, p. 38.

38 Référence 4, p. 141.