David Edwards
Physique quantique et bouddhisme — Carlo Rovelli rencontre Nagarjuna

Traduction libre 8 février 2024 Carlo Rovelli est un physicien théoricien et écrivain italien renommé qui a apporté d’importantes contributions à la physique de l’espace et du temps. Il est actuellement titulaire d’une chaire de recherche invitée à l’Institut Perimeter et membre du Rotman Institute of Philosophy de l’Université Western, au Canada, où il travaille principalement […]

Traduction libre

8 février 2024

Carlo Rovelli est un physicien théoricien et écrivain italien renommé qui a apporté d’importantes contributions à la physique de l’espace et du temps. Il est actuellement titulaire d’une chaire de recherche invitée à l’Institut Perimeter et membre du Rotman Institute of Philosophy de l’Université Western, au Canada, où il travaille principalement dans le domaine de la gravité quantique. Son livre, Seven Brief Lessons on Physics (2014, tr fr Sept brèves leçons de physique), a été traduit en 41 langues et s’est vendu à plus d’un million d’exemplaires dans le monde.

Dans son livre Helgoland — The Strange and Beautiful Story of Quantum Physics (2021, tr fr Helgoland : le sens de la mécanique quantique), Rovelli décrit une épiphanie surprenante dans ses efforts pour comprendre les mystères de la physique quantique :

Dans mes tentatives de donner un sens aux quanta, j’ai parcouru les textes des philosophes à la recherche d’une base conceptuelle, afin de comprendre l’étrange image du monde offerte par cette incroyable théorie. J’ai trouvé de très belles suggestions, des critiques subtiles, mais rien qui me convainque parfaitement.

Puis, un jour, je suis tombé sur un texte qui m’a sidéré. (Rovelli, Penguin, version e-book, 2021, p.72).

Fait remarquable, le livre en question est un texte clé de la métaphysique bouddhiste du IIIe siècle, les versets fondamentaux de la voie du milieu, écrit par le mystique éclairé Nagarjuna. Rovelli écrit :

La thèse centrale du livre de Nagarjuna est simplement que rien ne possède une existence en soi, indépendante d’autre chose. La résonance avec la mécanique quantique est immédiate. Naturellement, Nagarjuna ne savait rien et ne pouvait rien savoir des quanta, là n’est pas la question. Ce qui nous intéresse, c’est que les philosophes nous proposent des façons originales de penser le monde… (p.73)

Rovelli a tort de décrire Nagarjuna comme un « philosophe » ; c’était un mystique. Les philosophes cherchent des solutions par la pensée ; les mystiques cherchent des solutions en transcendant la pensée. Si Nagarjuna s’est engagé à « repenser le monde », c’est pour atteindre une vérité qui ne peut être expérimentée que lorsque la pensée s’arrête. Rovelli écrit :

Le caractère illusoire du monde, le samsara, est un thème général du bouddhisme ; le reconnaître permet d’atteindre le nirvana, la libération et la béatitude.

Rovelli met ici la charrue avant les bœufs : la « libération et la béatitude » ne sont pas atteintes en reconnaissant « le caractère illusoire du monde » ; au contraire, le caractère illusoire de la façon dont nous voyons le monde est reconnu comme le point final d’un processus de libération et de béatitude.

Ce processus est la méditation. Le fait que Rovelli ne mentionne pas les mots « méditation », « méditant » ou « méditer » dans son livre indique qu’il se limite actuellement à une compréhension intellectuelle du nirvana et de la voie (qui est l’absence de voie) qui permet de l’atteindre. Dans le bouddhisme, l’aspect « sagesse » de la « voie » — l’exploration intellectuelle du caractère illusoire des phénomènes — est soutenu par l’aspect « méthode » de la méditation. Ensemble, ils constituent les deux « ailes » sur lesquelles l’oiseau de l’éveil prend son envol.

En fait, le Bouddha n’a pas dit que le monde est une « illusion » ; il a dit que le monde n’existe pas de la manière dont il nous apparaît exister ; que notre croyance profonde que le monde est constitué d’objets existant indépendamment les uns des autres est une illusion ! Il existe de nombreuses histoires zen et autres dans lesquelles les maîtres pincent le nez de leurs élèves ou les frappent à la tête en leur demandant : « Est-ce que c’est une illusion ? »

Rovelli explique bien comment des objets apparemment concrets s’évanouissent lorsqu’on les regarde de près. Nous imaginons naturellement qu’une chaise, par exemple, existe en tant qu’objet unique, en tant qu’unité. En réalité, ce que nous appelons « une chaise » se compose d’un siège, de pieds, d’un dossier, etc. Aucun des pieds n’est « une chaise », ni le siège, ni le dossier. Aucune des parties qui composent une chaise n’est « la chaise ». Il s’avère que la chaise unitaire, qui semblait si solide, n’est qu’une étiquette appliquée à un ensemble de pièces.

Mais dire que la chaise est composée de pièces est également trompeur, car cela suggère que les pièces, au moins, sont des objets solides et unitaires. Hélas, les parties disparaissent également lorsqu’on les examine de près. Ainsi, le siège peut être constitué d’un cadre en bois avec un coussin au milieu, mais ni l’un ni l’autre n’est un « siège ». Bien entendu, tous ces objets sont constitués d’atomes. Un « atome » est également un ensemble : de neutrons, de protons, d’électrons et de particules subatomiques. Aucun de ces éléments n’est un « atome ». Un « atome » est également une simple étiquette appliquée à une collection. Partout où nous cherchons des « choses » solides, elles disparaissent dans l’air qui n’est également qu’une étiquette.

Pourquoi devrais-je être concerné par tout cela en tant qu’entité évidemment solide et unitaire ? Si quelqu’un hurle des injures contre moi — cela m’est arrivé une ou deux fois sur twitter.com —, j’ai l’impression d’avoir été touché par une insulte cinglante. Apparemment, une entité solide, « moi », a été touchée. Sinon, pourquoi ressentirais-je de la douleur ?

Mais lorsque je cherche une entité semblable à une cible de fléchettes qui a été touchée, je constate qu’aucune des parties de mon corps, aucune de mes pensées et aucune de mes émotions ne constituent un moi unitaire appelé « moi ». Cette unité présumée est également une simple étiquette. Mais comment une insulte peut-elle blesser une étiquette, une simple idée ? Ne devrait-elle pas passer au travers ? La réponse est qu’elle fait mal parce que nous croyons profondément en un moi solide qui n’existe pas en réalité. Nous sommes donc coauteurs de l’insulte, de la douleur.

Alors, tout n’est-il qu’une collection d’étiquettes mentales ? Rien n’est réel ? Prenons l’exemple des rêves : d’un certain point de vue, il s’agit clairement d’illusions. Mais ils sont réels en tant qu’illusions. Pour être plus précis, la conscience qui perçoit une illusion ou un rêve est réelle — la conscience est nécessaire pour que le rêve soit vécu.

En effet, même si le monde entier est un rêve, la conscience qui perçoit le rêve est réelle. Et, comme nous l’avons vu, le nirvana n’est pas atteint simplement en reconnaissant intellectuellement « le caractère illusoire du monde » ; il est découvert lorsque l’on fait l’expérience de la véritable nature de cette conscience, de l’être. Mais comment cela peut-il se produire ?

Le « néant » n’est pas vide

Tout comme les objets physiques — chaises, planètes, étoiles — apparaissent dans l’espace extérieur, les perceptions sensorielles, les pensées et les émotions apparaissent dans l’espace intérieur de la conscience. Les pensées, les idées et les souvenirs qui constituent l’idée que nous nous faisons de « moi » sont tous des « objets » dans cet espace intérieur. Nous pensons que nous sommes « la voix dans notre tête », mais nous sommes en fait « l’espace », le témoin de « la voix ».

Quelle est la nature fondamentale de cette conscience ? Nous savons par expérience que lorsque des pensées et des émotions de colère apparaissent dans la conscience, nous souffrons. De même, lorsque des pensées de peur, d’anxiété et de jalousie apparaissent. Beaucoup d’entre nous imaginent que la conscience sans aucune pensée, comme l’espace extérieur, serait un vide, un néant.

Selon les Upanishads, les anciennes écritures de l’hindouisme datant de 800 ans avant J.-C., ce n’est pas du tout le cas. Les Upanishads affirment que l’espace intérieur de la conscience et l’espace extérieur sont tous deux des manifestations de Brahman, la source sans forme et immuable de toutes les formes matérielles :

Nous devrions considérer que dans le monde intérieur, Brahman est la conscience ; et nous devrions considérer que dans le monde extérieur, Brahman est l’espace. (Juan Mascaró, The Upanishads, Penguin, 1965, p.115).

Cela est important et, en fait, vérifiable, car Brahman est considéré comme étant de la nature de la conscience et de la félicité. En d’autres termes, la conscience — même la conscience qui attend à un arrêt de bus pluvieux par une froide matinée d’hiver — est de la nature de la félicité. Mais si c’est vrai, pourquoi les êtres conscients que nous sommes sont-ils si malheureux à l’arrêt de bus et dans tant d’autres situations ? La réponse est que l’homme et la femme sont nés libres, mais qu’ils sont partout enchaînés par la pensée.

Ce que nous appelons à tort « méditation » en Occident (ce qui suggère en fait son exact opposé, la pensée) est l’art de découvrir la nature fondamentale de la conscience en réduisant et finalement en abandonnant la pensée qui l’obscurcit.

Tout le monde peut se détendre dans un fauteuil confortable pendant une heure en prêtant attention aux sensations présentes dans la région du cœur et du bas-ventre. Naturellement, les pensées vont surgir. C’est exactement comme cela devrait être et ce n’est en aucun cas une erreur. Au lieu de suivre ces chaînes de pensées comme d’habitude : « Il était si condescendant… et elle ne m’a pas du tout défendu… Ce que j’aurais dû dire, c’est… ». Au lieu de suivre ce train de pensées, nous essayons de remarquer les pensées et de revenir à la sensation.

Cela continue ainsi : nous parvenons à concentrer notre attention sur la sensation, puis soudain nous commençons à suivre nos pensées, nous réalisons soudain ce que nous sommes en train de faire et revenons à la sensation. Si nous procédons de la sorte de manière cohérente, quotidiennement, un jour, après environ 40 à 45 minutes, l’esprit se lasse de générer des pensées qui ne sont pas appréciées à leur juste valeur et commence à perdre son élan.

Les pensées sont, maintenant, moins nombreuses et nous pouvons avoir le sentiment subtil de naviguer dans des eaux plus calmes. Par la suite, de véritables intervalles peuvent commencer à apparaître dans le flot des pensées, ce qui nous permet de nous concentrer avec clarté sur les ressentis au niveau du cœur et du bas-ventre. Ces intervalles — des moments de conscience non obscurcis par la pensée — sont vécus comme de minuscules étincelles dorées d’amour, de félicité et de paix. C’est un moment révolutionnaire — il est tout à fait étonnant que, après avoir été à moitié endormis et chaotiquement distraits, nous soyons soudain plus heureux assis à ne rien faire que nous ne l’avons été depuis des années et des décennies.

L’apparition de ces étincelles est souvent annoncée par des pensées inhabituellement généreuses ; nous avons soudain une impulsion pour être gentils envers quelqu’un d’une manière ou d’une autre, même envers un ennemi. C’est le signe que quelque chose d’étrange est en train de se produire. Ces étincelles s’approfondissent et s’intensifient et peuvent durer des heures ou des jours. Au début, cependant, elles sont vulnérables à une activité mentale intense — une dispute sur Twitter après la méditation les éteindra rapidement. Les mystiques éveillés, en revanche, vivent dans un état d’extase et d’amour permanent. Lao Tseu, auteur du Tao Te Ching, a dit :

Le Tao [l’amour et la félicité] ne va pas et ne vient pas.
Il est toujours présent partout,
comme le ciel.
Si votre esprit est obscurci,
vous ne le verrez pas,
mais cela ne signifie pas
qu’il n’est pas là.
Toute la misère est créée
par l’activité de l’esprit.
Pouvez-vous lâcher les mots et les idées ?
les attitudes et les attentes ?
Si c’est le cas, le Tao se profile à l’horizon.
Pouvez-vous rester tranquille et regarder à l’intérieur ?
Si c’est le cas, vous verrez que la vérité
est toujours disponible, toujours réactive.
(Lao Tseu, Brian Browne Walker, Hua Hu Ching—The Unknown Teachings of Lao Tseu, e-book, St Martin’s Press, 2012, p.39).

Restez tranquille et regardez à l’intérieur de vous — c’est aussi simple que cela. Mais c’est un conseil qui a été ignoré par la plupart des gens pendant des millénaires.

M. Rovelli conclut :

Mais la vacuité de Nagarjuna alimente aussi une attitude éthique profondément rassurante : comprendre que nous n’existons pas en tant qu’entités autonomes nous aide à nous libérer de l’attachement et de la souffrance. C’est précisément en raison de son impermanence, de l’absence de tout absolu, que la vie a un sens et est précieuse.

Oui, réfléchir intellectuellement à notre manque de solidité et à notre impermanence peut aider à dissoudre l’importance perçue de nos attachements. Mais ce qui réduit nos attachements et notre importance personnelle à néant, ne serait-ce que temporairement au début, c’est l’amour et la félicité éblouissants qui surgissent dans la méditation. Le « maintenant » n’est pas seulement précieux parce qu’il est impermanent ; il est précieux parce que l’expérience du « maintenant », non obscurcie par la pensée, déborde d’une extase et d’un amour qui font paraître insignifiants tous les attachements du monde. Le mystique indien Osho a dit :

Lorsque l’ego [la pensée] n’est pas, l’amour vient comme un parfum — comme une floraison de votre cœur… Avec cette attitude, lorsque l’esprit est complètement immobile, quelque chose du divin vous attirera ; vous aurez des aperçus.

Une fois que vous aurez connu le bonheur de ces aperçus, vous comprendrez le non-sens, l’absurdité et la misère absolument inutile de l’ambition. L’esprit s’arrête alors de lui-même. Il devient complètement immobile, silencieux, détaché.

Le mystique américain Robert Adams a dit :

J’ai ressenti de l’amour, de la compassion, de l’humilité, tout cela en même temps. C’était vraiment indescriptible. Ce n’était pas un amour dont vous êtes conscient. Pensez à quelque chose que vous aimez vraiment, ou à quelqu’un que vous aimez vraiment de tout votre cœur. Multipliez cela par un milliard de millions de milliards, et vous comprendrez de quoi je parle. (Adams, Silence of the Heart — Dialogues With Robert Adams, Acropolis Books, 1999, pp.9-10).

Rovelli poursuit :

À l’être humain que je suis, Nagarjuna enseigne la sérénité, la légèreté et la beauté du monde : nous ne sommes que des images d’images. La réalité, y compris nous-mêmes, n’est qu’un voile ténu et fragile, au-delà duquel… il n’y a rien. (p.75)

On sent l’inquiétude dans ces mots. Rovelli perçoit « la beauté du monde », mais c’est une beauté froide et austère parce qu’elle lui apparaît comme un « voile ténu et fragile », au-delà duquel il n’y a « rien ». Mais nous avons déjà convenu que « rien ne possède une existence en soi, indépendante d’autre chose ». En effet, nous sommes là en tant que témoin du « rien ». (p.73). Osho explique :

En anglais, il n’y a pas de mot pour traduire le mot bouddhiste « shunyata ». Dans ce « néant »… il n’est pas vide, il est plein de votre témoin, plein de votre témoignage, plein de la lumière de votre témoignage.

Nous ne sommes pas des cerveaux dans des bocaux ou des tours d’ivoire. Ce « rien » paradoxalement plein n’est pas un simple concept sur lequel Rovelli peut réfléchir intellectuellement ; c’est un défi existentiel auquel il doit faire face et qu’il doit ressentir. Jiddu Krishnamurti l’a bien exprimé :

Nous avons tous fait l’expérience de cette immense solitude, où tout — les livres, la religion, tout — se dérobe, et où nous sommes, au plus profond de nous, immensément seuls et vides. Nous sommes généralement incapables de faire face à ce vide, à cette solitude, et nous les fuyons. La dépendance est l’une des choses dans lesquelles nous trouvons un refuge, bientôt indispensable, parce que nous ne supportons pas d’être seuls face à nous-mêmes. Il nous faut la radio, des livres, des conversations, des bavardages incessants sur ceci ou cela, sur l’art et la culture. Nous en arrivons ainsi à ce point où nous avons la connaissance intime de cet extraordinaire sentiment d’isolement de soi.

Nous pouvons avoir un très bon emploi, travailler avec acharnement, écrire des livres, et pourtant cet énorme vide est là, au fond de nous. Nous voulons le combler, et la dépendance en est un moyen. La dépendance, les distractions, les bonnes œuvres, les religions, l’alcool, les femmes (ou les hommes) sont pour nous autant de moyens parmi tant d’autres de masquer, de combler ce vide. Si nous voyons qu’il est tout à fait futile de vouloir le masquer, si nous en constatons toute la futilité, si — au lieu de nous en tenir à des mots, à des convictions, et donc à des préjugés, à des opinions toutes faites — nous voyons l’absurdité totale de tout cela… alors nous sommes confrontés à un véritable fait. La question n’est pas de savoir comment se délivrer de la dépendance, car, loin d’être un fait, elle n’est que la réaction à un fait… Pourquoi ne pas affronter le fait, pour voir ce qui se passe ?

C’est là que se pose le problème de l’observateur et de la chose observée. L’observateur dit : « Je suis vide ; cela ne me plaît pas », et il prend la fuite. L’observateur dit : « Je suis distinct du vide ». Or, l’observateur est le vide, il n’est plus question d’un vide vu par un observateur. L’observateur est la chose observée. Lorsque cet événement se produit, il s’opère dans la pensée, dans la perception, une formidable révolution. (Krishnamurti, Le livre de la méditation et de la vie)

Le point crucial de ce « rien » est donc que nous nous tenons ici en tant que témoins ; il s’agit d’un rien dont on est témoin. Le témoin n’est pas une chose — il est non-chose (no-thing) — mais il existe, il est réel. Et il est tout sauf « ténu et fragile ». Il s’avère que l’observateur est l’observé : c’est la nature fondamentale de l’univers et c’est dans la nature de la conscience, de l’amour et de la félicité.

C’est remarquable : la prochaine étape pour la physique quantique, pour Rovelli lui-même, est de reconnaître le « néant » intérieur, de voir comment nous le remplissons de connaissances et d’expérimenter l’abandon de ces connaissances, l’abandon de toute pensée, pour faire face à cet abîme.

Une telle confrontation pourrait annoncer une révolution dans la conscience humaine : l’union de la physique et de la mystique, de la science et de l’amour.

David Edwards est co-rédacteur en chef de www.medialens.org

Texte original : https://www.medialens.org/2024/quantum-physics-and-buddhism-carlo-rovelli-encounters-nagarjuna/