Albert Low et Monique Dumont : Créer la conscience

Car cela vient avec la pensée technologique, la pensée technologique est toujours à un seul niveau, toujours à la surface. L’idée de hiérarchies de significations ou de profondeur n’existe tout simplement pas pour cette pensée. Tout est réduit à un seul niveau. Tout est approprié à son niveau approprié. Ainsi, il n’y a rien de mal dans le fait de dire : « Supposons que nous pouvons comprendre l’être humain sans avoir recours à la conscience. Supposons que nous pouvons le voir comme une machine. Et voyons en conséquence jusqu’où on peut aller dans la compréhension ». Il n’y a rien de mal là-dedans. Mais le saut de « supposons » à « c’est ainsi » est ce qui constitue pour moi une pensée superficielle.

Dany-Robert Dufour : La modernité, le désarroi et la formation

Puisqu’il y a un « espace aveugle derrière tout espace rempli », Törless « voit les choses sous un double aspect, toutes les choses et aussi bien les pensées ». Mais l’esprit mis sous cette tension dédouble de plus en plus fortement chacune des situations. Ce qui est obscur, ce qui est non rationnel l’est au point où ça échappe radicalement aux réseaux d’intelligibilité et où ça perdure et ressurgit après même que ç’ait fécondé, par voie de défi, la connaissance rationnelle : « aussi clairement que je sens une pensée prendre vie en moi, je sens « ce quelque chose » en moi s’éveiller à la vue des choses, au moment où les pensées se taisent. C’est quelque chose en moi d’obscur, au-dessus des pensées, je ne le puis mesurer rationnellement, c’est une vie que les mots ne cernent point et qui est pourtant ma vie »