Michelle Reboul : Raymond Abellio: l'Europe n'est pas une maison de commerce ! interview recueillie

Si la structure absolue permet de comprendre le perpétuel déséquilibre de la politique en général, et la persistance de ses antagonismes, elle ne se donne pas comme le moteur d’une politique « supérieure ». Je n’ai absolument pas de solution politique à proposer. Simplement, je me fais de l’Europe une idée non politique. Et pour le surplus, ce n’est pas mon affaire : je ne me sens pas capable de « choisir ».

Jean Guitton et Michelle Reboul : Pèlerinage & Apparitions

Il est remarquable que dans « L’Ancien Testament » ce sont surtout, semble-t-il, des phénomènes auditifs, des « voix » : Dieu parle, et souvent dans le sommeil. Ce sont aussi des apparitions de messagers divins (angélophanies). Dans « Le Nouveau Testament », l’accent est concentré sur un phénomène unique en son genre : les apparitions du Christ après sa mort (christophanies). Il semble que dans les temps contemporains (et c’est peut-être signe que la fin approche) les apparitions de la Vierge (mariophanies) se présentent à notre attention, comme un message qu’il faut tenter de déchiffrer, comme un « signe des temps » que nous vivons ou plutôt que nous allons vivre : car nul ne peut rien que nous approchions d’une crise sans pareille.

Michèle Reboul : 15 questions à un prêtre exorciste

Mais qu’est-ce qu’un exorcisme, en général ? C’est la sommation faite au démon, au nom du Christ, de la Trinité, de la Vierge, des saints anges, à sortir d’une personne qu’il possède ou infeste, c’est-à-dire qu’il domine en proportions plus ou moins graves. Le grand exorcisme se dit dans les cas de possession, et seulement par certains prêtres spécialement chargés de cette fonction, et le petit exorcisme, dit de Léon XIII (publié sur l’ordre de ce pape, en 1884), est récité, soit dans les cas d’enveloppement ou d’infestation diabolique, soit dans les cas où l’évêque refuse le grand exorcisme : en effet, prêtres et laïcs ont été autorisés par Léon XIII à dire le petit exorcisme « tous les jours, si c’est possible ».

Michelle Reboul : Henry Corbin et le chiisme iranien

Le chiisme est l’ésotérisme de l’islam comme le rappelle ce propos du VIe imâm, Ja’far al-Sâdiq, mort en 765: « Notre cause est un secret qui reste voilé, un secret que peut seul enseigner un secret, un secret qui reste enveloppé dans le secret. » Le chiisme n’est pas marginal ou hétérodoxe par rapport au sunnisme, qui serait l’islam orthodoxe, fortement majoritaire dans les pays musulmans, excepté l’Iran chiite. Il n’y a pas en Islam d’autorité qui décrète des positions dogmatiques et lance des anathèmes contre ceux qui refuseraient d’y adhérer, mais la liberté de se soumettre (islam = soumission), de suivre (chîa, en arabe, d’où dérive chiisme, veut dire suivre) un aspect plutôt exotérique, extérieur, ou un aspect ésotérique, intérieur, du Coran : les deux aspects, étant deux faces de la même réalité, ont la même valeur.

Michèle Reboul : Les "pouvoirs" de la méditation transcendantale

La technique de la méditation transcendantale consiste dans la récitation d’un mantra (que les instructeurs définissent comme une vibration purement sonore, sans signification), deux fois par jour (matin et soir) pendant vingt minutes, mantra qui est donné par l’instructeur au moment de l’initiation, à des gens de tous âges (de quatre à quatre-vingt-dix-huit ans) et de toutes origines. Ce mantra est seul connu de l’instructeur et de l’initié et le critère de son choix ne sera dévoilé par le méditant que s’il devient lui-même instructeur…

Comment vivent les trappistes (1977): propos de Luc Bérimont

Nous sommes obligés d’être négatifs les uns par rapport aux autres pour nous défendre. Nous sommes obligés de nous blinder. D’ailleurs c’est l’image même de notre société avec toutes ses machines ; nous sommes enfermés dans nos carapaces, comme des langoustes, mais qu’est-ce qu’il y a à l’intérieur ? Peut-être une immense faiblesse, un immense laisser-aller par rapport à l’essentiel. Il me semble que dans ce monde du non, une « centrale du oui » est plus qu’indispensable. Et comme je crois que les ondes cérébrales doivent agir sur l’univers, je crois que c’est là l’utilité des moines.

Michèle Reboul : Vers une psychologie des racines de l'homme. Entretien avec le docteur Bour

Freud a fait une découverte inconsciente qui concernait son histoire personnelle qu’il a voulu rapprocher du drame de Sophocle, mais la façon dont nous est parvenue cette interprétation, est celle d’une fatalité qui amènerait l’enfant qualifié de pervers polymorphe à être poussé irrésistiblement, pour un fils vers sa mère, pour une fille vers son père, et à rejeter, jusqu’au désir de mort, l’autre parent du même sexe que lui. Si cela nous semble valable dans certaines complications pathologiques, cela nous paraît dommageable d’être érigé en dogme universel. Il serait plus profitable d’en venir à des notions plus simples et limpides, à savoir que l’enfant, après le stade d’attachement maternel, traverse une phase que j’ai appelée « nucléaire », le rattachant au noyau de ses deux parents, et cela d’une façon relativement complexe au plan inconscient, car, d’une part, il a besoin de s’identifier au parent du même sexe que lui s’il a la chance de trouver en lui un modèle valable, et, d’autre part, de vivre son attirance pour le parent de sexe différent…

Michèle Reboul : Spinoza, l'homme ivre de dieu

Toute la philosophie de Spinoza est centrée sur cette certitude : Tout est en Dieu, Dieu est Tout, mais rien n’est Dieu. C’est pourquoi il est faux, comme le disent trop souvent bien des commentateurs (qui semblent n’avoir jamais lu directement Spinoza), de parler de panthéisme spinoziste. Il y aurait panthéisme si le monde et tout ce qu’il contient était Dieu. Mais il y a une totale différence de sens et même une opposition entre le fait de penser que tout est Dieu (panthéisme) et que tout est en Dieu. Dans premier cas (le panthéisme), tout est identique ; dans l’autre (le spinozisme), tout est uni à Dieu, car Dieu étant l’Un, unifie toutes choses et tout être en Lui. Dans l’identité, il n’y a ni mouvement, ni vie, ni amour. L’unité, elle, permet une union de plus en plus consciente dans une vie de désir et « d’amour intellectuel ».

Michèle Reboul : Jean Guitton et la parapsychologie propos recueillis

J’ai eu plusieurs fois l’occasion de parler de ces problèmes avec Bergson qui m’a inscrit parmi ses héritiers spirituels. Il avait beaucoup scruté les phénomènes parapsychologiques en les distinguant fortement des expériences mystiques. Les phénomènes parapsychologiques relevaient de la religion inférieure, statique, où l’homme projette son inconscient, alors que les expériences mystiques provenaient de l’action mystérieuse de l’Amour infini.

Michèle Reboul : La conception chrétienne du temps

La notion de la fin du monde a son origine dans la perspective eschatologique du christianisme, d’un temps qui a commencé avec le monde et finira avec lui, d’un temps lié au dessein de Dieu sur l’homme et, partant, d’une évolution créatrice de l’histoire. Le temps n’a de sens que dans la mesure où il s’abolit lui-même en permettant à l’œuvre de la création de s’accomplir, il est le signe et l’épreuve de la liberté. Par suite, des philosophes qui n’admettent ni la création, ni la liberté, ni la transcendance de Dieu sur l’homme sont amenés à nier le temps, à séparer le temps de l’éternité, comme l’imaginaire du réel, alors que l’eschatologie chrétienne est fondée sur l’union paradoxale du temps et de l’éternité.