Robert Linssen : Insuffisance de la compréhension intellectuelle des enseignements de Krishnamurti

Beaucoup de personnes écoutant Krishnamurti depuis plusieurs années sont étonnées et parfois déçues de la lenteur de la transformation effective de leur conscience dans le sens que leur suggère le penseur indien. Elles ont de ce dernier, une compréhension intellectuelle et théorique qui leur semble parfaite et s’étonnent, de ce fait, de se sentir parfois « piétiner » et rester, malgré tout, prisonnières des conditionnements, des limitations, des réactions étriquées de l’égo.

Robert Linssen : Etudes psychologiques de C. G. Jung à J. Krishnamurti

Pour Krishnamurti et Jung, le conscient ne constitue qu’un infime fragment de notre « moi total ». Krishnamurti nous enseigne que la partie de nous-mêmes que nous connaissons avec une relative clarté ne constitue qu’une couche superficielle et fragmentaire de notre structure psychique. Celle-ci est extraordinairement complexe et se trouve formée de couches innombrables portant au plus profond d’elles-mêmes les mémoires obscures d’événements se perdant dans la nuit des temps.

Robert Linssen : La relation entre maître et disciple dans la pédagogie spirituelle de Krishnamurti

La définition du maître telle que Ramakrishna l’entend diffère un peu de l’image traditionnelle que l’on en a : il insiste sur le fait que le guru n’apporte rien à son disciple qui ne soit déjà en ce dernier. Le guru renvoie juste au disciple une lumière qu’il ne peut voir, mais qui lui est intérieure. Elle est donc sienne, mais il n’a pas encore appris à se connaître. Les présents commentaires sur la nature des rapports entre Maître et disciple dans l’enseignement de Krishnamurti ne concernent évidemment que la période située entre 1929 et sa mort, en 1986.

Henri Methorst : L'éducation

Mais l’éducation n’a qu’un pouvoir limité en ce qu’elle peut éviter de mouler, de façonner, de conditionner le jeune et qu’elle peut lui laisser suffisamment d’air et d’espace pour qu’il développe sa propre originalité, sa propre authenticité, son jugement et sa prise de position d’être humain. Car en fin de compte la coopération, et la construction d’une société humaine valable, ne sera possible qu’avec des individus ayant un point de vue personnel.

André Niel : Krishnamurti et la Révolte

Il y a un adage du désir de violence qui est celui-ci : « La fin justifie les moyens ». Rien de plus faux ici. La preuve en a été maintes fois administrée. On se révolte, on tue, on brûle; on est enfin victorieux. Mais l’injustice recommence avec l’ordre politique nouveau. La misère, la cruauté, le désordre, tout cela a survécu, il n’y a rien de changé!

Reynold Welvaert : Extrait d'une lettre adressée à Krishnamurti 

Il existe une immense différence entre un mental pacifié par une satisfaction personnelle, par un effort épuisant, par une recherche d’un résultat ou d’une réponse particulière et le silence produit au milieu d’une prise de conscience, d’une attention, d’une concentration spontanée. Cela est une quiétude d’une conscience alertée par l’urgence de la compréhension du moment.

Reynold Welvaert : Le péril de la fragmentation

Il serait aberrant de se contenter d’une répétition de ce que Krishnamurti nous a dit ou de suivre quelques habiles interprètes. Afin de sortir des ornières du passé, il y a lieu de découvrir l’intelligence véritable qui sommeille en chacun de nous. N’est-il pas en effet nécessaire que l’enseignement transmis par Krishnamurti mûrisse en chacun de nous et s’intègre dans la vie quotidienne ?

Robert Linssen : L'éducation selon Krishnamurti

Il semble de prime abord contradictoire de parler de l’éducation « selon » Krishnamurti. Le climat psychologique présidant à toute éducation véritable est fait de liberté, de création, d’intelligence et d’amour. L’un des buts essentiels de l’éducation consiste dans l’épanouissement des facultés créatrices et originales de chaque enfant. Cet épanouissement de l’intelligence du cœur et des formes élevées de la sensibilité requiert un affranchissement de tout conditionnement de l’esprit, de tout processus d’imitation, de tout conformisme, de toute autorité psychologique. Il n’entre donc pas dans nos intentions de faire de la propagande pour la pensée de Monsieur Krishnamurti ni d’élaborer une méthode d’éducation qui est basée sur un système particulier de pensée.

Robert Linssen : La Voie Abrupte de Chen-Houei (668-760) et Tetsugen (1630-1682)

La vérité, disait Carlo Suarès, est une chose que l’on voit complètement d’un seul coup, ou bien que l’on ne voit pas du tout. Il n’y a pas de demi-mesure entre le dualisme et le non-dualisme. Pour Chen-Houei, l’illumination véritable et définitive ne peut être que subite. Il la désigne en chinois par le terme « touen wou », ce qui signifie une conversion totale et instan­tanée, un bouleversement complet de la conscience, une réalisation abrupte, non préfigurée, soudaine et totale.

Henri Methorst : Krishnamurti

A mon avis, Krishnamurti est le seul à avoir tenté d’établir ce contact intime entre la complexité subtile et illogique de la psychologie humaine avec ses frustrations d’une part, et la flamme d’un amour intelligent et perceptif de l’autre et d’avoir réussi à communiquer ce qui est incommunicable grâce à sa façon éducative et psychologique de procéder. Je suppose que plusieurs grands esprits dont nous ne possédons plus exactement les paroles ont été inspirés de la même mentalité. Mais son « message » est en cela différent de toutes les méthodes, de tous les enseignements qui exhortent et encouragent et se servent de systèmes par le fait que lui abolit radicalement la distance, l’« aliénation » qui existe entre l’homme et son propre esprit, entre l’homme et les buts qu’il poursuit. Car tout ce qui n’est pas authentique, qui n’est pas immédiat, dont on se laisse persuader et par lequel on est conditionné, est une auto-aliénation et n’est pas « créateur » (terme dangereux) — dans un sens comparable à celui que donne Erich Fromm à l’aliénation et le danger créé par la société d’abondance et du succès.