Comment connaître ce qui, comme le message de l’exemple analogique précédent, n’est ni matière, ni énergie ? Tant qu’on reste dans le domaine intellectuel ou affectif, on ne peut procéder que par distinction donc par séparation. Le monde de l’intellect humain par sa nature ne peut être que dualiste. Lorsqu’on se trouve placé dans la dimension essentielle il est impossible d’en rendre compte au moyen de l’intellect et du langage. Telle est la situation paradoxale dans laquelle on se trouve. D’un côté rien ne peut vous aider et de l’autre rien ne peut être dit. Pourtant il n’existe qu’une seule réalité inséparable. Comme pour une pièce de monnaie on ne peut demander à quelqu’un de vous donner seulement soit le côté pile, soit le côté face à l’exclusion du reste…
Étiquette : Vie intérieure
Le chemin de dieu en nous - propos de Chiragh
Observons cependant, puisque nous en sommes là et pour sacrifier au goût du jour, que cette discussion avec soi-même et au besoin cette bataille contre soi-même ne « censure » rien, ne « refoule » rien. Car le moment où nous décidons librement de conquérir notre liberté intérieure est le moment où nous devenons, dans le sens réel du terme, un être humain à part entière et où nous ouvrons enfin les yeux. C’est aussi le moment où les masques multiples de notre Ennemi, de celui qui nous a fait tant souffrir commencent à bouger et où nous nous prenons à soupçonner son vrai visage: et voici qu’à notre saisissement nous découvrons, sans erreur et sans dérobade possible, que cet Ennemi porte nos propres traits. Et à ce moment-là, à cette heure-là, il n’est vraiment plus question de « refoulement » ni de « censure », produit artificiels d’une contrainte morale aveugle imposée de l’extérieur à un être dont les yeux étaient bandés. Et c’est bien d’une autre lutte et d’un plus haut combat qu’il s’agit.
Eric Edelmann : L’instant ultime entretien avec Marie-Madeleine Davy

L’homme privé de racines, désacralisé, se banalise. Il n’est plus qu’un personnage sociologique ; on anéantise son mystère et ses pouvoirs secrets. Un tel homme n’est plus qu’un produit de supermarché. La dimension humaine ne peut s’acquérir que par l’intériorité, au profit d’une structure lui permettant d’occuper la place qui lui revient et à laquelle il a droit. La radio, la télévision, les revues panoramiques genre Digest confèrent à l’homme un savoir horizontal qui le « gonfle », et lui donne l’illusion d’une connaissance qui risque de lui suffire.
Sam Keen : Carlos Castaneda ou l’apprenti sorcier
Nous avons quelque chose en commun avec toutes les formes de vie. Quelque chose est altérée chaque fois que nous portons délibérément atteinte à la vie végétale ou animale. Nous prenons la vie des êtres afin de vivre, mais nous devons être prêts à donner notre vie sans ressentiment lorsque notre temps est venu. Nous sommes si importants, et nous nous prenons tellement au sérieux que nous oublions que le monde est un grand mystère qui nous enseignera si nous écoutons.
Trân-Thi-Kim-Diêu : Entrer dans le courant
Il vaut la peine de remarquer qu’un véritable chrétien reconnaîtra dans les enseignements de K l’essence de l’Evangile, tandis qu’un bouddhiste y retrouvera le sens profond des sermons du Bouddha. Ou, plus précisément, le bouddhiste Mahayana qui écouterait Krishnamurti pourrait percevoir dans ses paroles la quintessence du message de Hui-Neng, le Sixième Patriarche du bouddhisme (chinois) Chan, qui a été à l’origine du bouddhisme japonais Zen, plus tardif. En outre, un poète reconnaîtra que — en dépit, ou peut-être à cause de la simplicité, de la précision et de l’absence de forme strictement technique de leurs mots — la plupart des textes de Krishnamurti décrivant la nature, les paysages environnants, les gens, ou faisant état d’observations intimes, sont de la poésie pure.
Hélène Renard : Raymond Ruyer: la sagesse des gnostiques
La partie la plus vitale du cerveau n’est pas le néo-cortex, qui n’est qu’un instrument ordinateur, mais le cerveau sous-cortical, instinctif, affectif, sentimental. Or, c’est l’imagination qui nourrit ce cerveau-là. Non pas l’imagination appliquée à fabriquer des histoires mais plutôt celle qui transfigure la réalité et les circonstances. C’est l’imagination transfigurante, celle qui « irise » le monde autour de nous. C’est elle qui recharge et nourrit notre cerveau affectif, qui oriente le diencéphale vers des états euphoriques plutôt que discordiques.
Louis Pauwels : La distance et la sérénité
Vivre en cherchant le suprême bien dans l’égalité d’âme. Egalité d’âme en toutes circonstances dans ce monde. Egalité d’âme dans les combats. Egalité d’âme dans les chagrins et les bonheurs, les misères et les fastes de ce monde. Certainement, il y a la société, il y a la politique. Mais, ou bien je ne suis qu’un homme-dans-l’histoire, et je n’existe que par mes engagements. Ou bien ma part la plus profonde n’est pas dans l’histoire. Et, dans ce cas, je donnerai au monde, à la société, à la politique, à l’histoire ce qu’il faut bien donner. Mais à distance et sans passion. Il m’arrivera de prendre parti. Mais je douterai d’avoir raison. Il m’arrivera d’agir. Mais je douterai des fruits de l’action. Et s’il arrive que j’y mette de la passion (sait-on jamais !), il y aura encore ma part profonde qui ne se passionnera pas pour cette passion.
Comment vivent les trappistes (1977): propos de Luc Bérimont
Nous sommes obligés d’être négatifs les uns par rapport aux autres pour nous défendre. Nous sommes obligés de nous blinder. D’ailleurs c’est l’image même de notre société avec toutes ses machines ; nous sommes enfermés dans nos carapaces, comme des langoustes, mais qu’est-ce qu’il y a à l’intérieur ? Peut-être une immense faiblesse, un immense laisser-aller par rapport à l’essentiel. Il me semble que dans ce monde du non, une « centrale du oui » est plus qu’indispensable. Et comme je crois que les ondes cérébrales doivent agir sur l’univers, je crois que c’est là l’utilité des moines.
Paul Arnold : Comment lire le livre des morts Tibétain
A cet égard, il suffit de lire le début des chapitres du Bardo Thödol décrivant les divers états ressentis par l’agonisant puis par le « mort », pour s’apercevoir qu’on nous dépeint une expérience vécue par l’être et suivie par un observateur en état de transe. De cette faculté d’observation, les témoignages abondent dans la pratique de la méditation bouddhique. C’est ainsi que le maître tendaï suit dans son propre cerveau comme sur le petit écran les « expériences » imaginaires du disciple pendant les grandes épreuves pour connaître l’état d’avancement de celui-ci…
Dominique Casterman : Réflexion sur la réalisation intérieure
L’homme réalisé transcende l’opposition conscient-inconscient par l’expérience directe, immédiate de lui-même et du monde. Il cesse d’opposer ce qu’il aime à ce qu’il n’aime pas, d’opposé l’homme universel à l’homme social. Il vit l’immédiate réalité de la source la plus intime de son être. Il est. Au lieu de se sentir gouverné par le monde extérieur sur lequel il projette ses pulsions intérieures non reconnues consciemment, l’homme réalisé s’éprouve comme le Sujet de ses pensées-sentiments et de ses sensations-intuitions. Pour être remonté jusqu’à la source de son être, il s’est libéré de l’emprise affective et de la tyrannie de l’intellect.