Eric Baret : Le corps et la pensée sont complètement conditionnés. La seule liberté, c'est de voir ces conditionnements!

Je pense qu’il n’y a qu’une crise: quand vous vous rendez compte que tout ce que vous faites, que tout ce que vous pensez vient de votre mémoire, que tout ce que vous rencontrez, c’est le passé et que vous ne pouvez pas avoir la moindre idée créatrice. Vous avez alors le pressentiment profond que ce que vous cherchez n’est pas dans la situation, n’est pas dans la perception. Vous constatez que vous pouvez uniquement aller devant. Tout ce que vous pensez, c’est devant vous, et pourtant, vous vous rendez compte que vous pouvez uniquement projeter le connu, la mémoire. Le neuf, la liberté ne peuvent être dans la projection. La crise émerge de l’évidence que vous ne pouvez penser que le vieux, alors que c’est le neuf que vous cherchez. Vous vous rendez compte que toute votre vie, que toutes vos actions sont faites constamment pour trouver ce neuf, pour trouver le non-désir et vous ne pouvez que répéter les schèmes qui reproduisent les erreurs passées. Votre questionnement ne peut plus être devant. La pensée n’a pas les éléments pour arriver à la non-pensée. Lorsque l’on rencontre ce moment dans la vie, c’est vraiment une crise, un choc. Vous savez très bien où vous ne voulez pas aller. Vous ne savez pas où vous voulez aller, mais vous voyez très bien où ne se trouve pas ce que vous cherchez. C’est un choc très profond. Les jeunes aussi éprouvent cela. À l’âge de quatorze ou quinze ans, on se rend compte qu’on ne veut pas être comme son père ou sa mère, qu’on ne veut pas mener une vie bourgeoise. On s’aperçoit que la société est factice. À cet âge, on sait très bien ce que l’on ne veut pas, mais on n’a pas le pressentiment de ce que l’on veut. Ce sont vraiment des crises très profondes.

Marguerite Bangerter : Tout est dit

L’AMOUR ne s’apprend pas, nous dit volontiers Krishnamurti ; il s’empare en effet de nous à l’improviste et surgit spontanément. Pourtant, entre l’amour radieux et complet qui crée entre les autres et nous cette communication directe où s’anéantissent toutes les barrières et l’amour inquiet, ombrageux, possessif et jaloux qui dramatise nos existences, il y a place pour beaucoup de larmes et une longue suite d’épreuves qu’on pourrait considérer comme l’école de l’amour ou plus exactement celle de la compréhension ; car l’amour reste en effet toujours pareil à lui-même, jaillissement pur, fontaine de joie.

Marguerite Bangerter : Spiritualiser le quotidien

Il est difficile de ne pas se laisser gagner par l’angoisse et l’inquiétude devant le gâchis, la confusion et le désordre généralisé dont les pires catastrophes paraissent devoir être l’inévitable aboutissement. Pourtant, malgré cela, je pense que, en dépit des inconvénients et de l’insécurité où nous sommes, il ne faut pas minimiser la chance qui nous échoit de vivre une époque de grand bouleversement comme celle-ci, qui offre à chacun l’occasion de participer pour une part accrue à l’influence déterminante que notre action peut avoir sur l’orientation du futur.

L.C. Beckett : Le Lankâvatara Sutra et l’Espace-Temps

Si tout — nous-mêmes inclus — n’est que le Mental, comment pouvons-nous le connaître ? Il a généralement été accepté comme le privilège de l’homme, mais ni les grecs lorsqu’ils le nommèrent « nous »; ni les chrétiens qui l’attribuait à Dieu; ni le biologiste lorsqu’il étudie le cerveau; ni le psychologue lorsqu’il parle de « Mental inconscient », n’ont été capable d’expliquer ce dont il s’agit, ni où il se trouve. Si nous acceptons l’idée de la Lankâvatara Sutra, en supposant que nous la regardions radicalement d’un autre angle, et qu’au lieu de considérer le mental comme la faculté créatrice par laquelle l’homme façonne le monde autour de lui, nous le tournions dans le sens opposé et regardions l’univers, le monde et tout ce que nous connaissons n’importe où et par n’importe quel moyen — la vie elle-même — comme quelque chose de non-né, parce qu’elle a toujours été — ou plutôt pas « été » — dans le sens où nous utilisons ce mot. Supposons que nous ne soyons ni des atomes, ni de l’énergie, ni des dispositifs de l’espace- temps, ni la vie, ni la conscience, mais le Mental-unique, qui a toujours été, est et sera, comme l’affirme le Lankâvatara Sutra ? Il déclare que ce n’est que notre ignorance qui nous fait établir une distinction entre ce que sont seulement des fantaisies.

Virgil : C'est ici!

Ce n’était pas une expérience ; c’est venu comme cela. Pour moi, ce n’était pas une expérience. Je ne m’attendais à rien. C’est arrivé spontanément, le matin. Je ne savais pas ce que c’était, mais c’était quelque chose de très grand, d’immense. Je n’avais jamais entendu parler d’une telle chose. C’était beau, très beau. C’était une joie. C’était quelque chose d’autre, quelque chose de formidable.

Marguerite Bangerter : Sommes-nous libres?

Aussi, loin de nous désespérer au milieu de la confusion qui règne dans tous les secteurs de l’activité humaine, comprenons plutôt que toutes les grandes étapes que l’humanité a franchies se sont accompagnées de remous semblables; et si les perturbations auxquelles nous sommes en proie semblent cette fois mortellement menaçantes, c’est que l’évolution qui cherche à s’accomplir s’annonce d’une importance aussi formidable que celle qui élabora l’individu à partir de l’anthropoïde dont il est issu.

Marguerite Bangerter : La Joie, indice de perfection

La perfection a, il faut le reconnaître, mauvaise réputation, Il serait curieux de rechercher comment sont nés, à travers les âges, les facteurs qui l’ont peu à peu enrobée de tellement d’ennui et d’austérité qu’il faut, avouons-le, une réserve de courage peu commune pour se soucier de la poursuivre. Si on nous proposait d’en modeler symboliquement les traits, nous la ferions parfaitement belle assurément, sereine et paisible, mais l’idée ne nous viendrait pas d’illuminer son visage et ses gestes d’une joie radieuse, qui est pourtant son plus authentique attribut.

Marguerite Bangerter : Ce que Teilhard apporte aux incroyants

J’entends constamment opposer « croyants » et « incroyants ». Qu’est-ce que cette « croyance qui diviserait le monde en deux catégories opposées »? Il y a dans l’habitude qu’on a prise de faire usage de ces termes quelque chose qui me choque et me fait à chaque fois sursauter. Faut-il pour entrer dans la catégorie des « croyants » avoir simplement la perception du divin ou faut-il de surcroît adhérer au symbole des apôtres ? Ce que l’occidental chrétien appelle un incroyant est-il simplement celui qui rejette en tout ou en partie ce que « notre mère la sainte Eglise nous propose de croire » ?

Marguerite Bangerter : Nécessité d'un homme nouveau

Dans un monde en évolution apparaissent de nouvelles valeurs. Motivent-elles un nouvel humanisme ? Le déroulement du quotidien nous masque facilement cette brusque métamorphose, mais il est évident que l’éclatement de la première bombe atomique a marqué avec fracas l’ouverture d’une ère nouvelle pour l’humain. « Ere Nouvelle » est pourtant beaucoup dire, car c’est à nous qu’il appartient d’en décider. En effet, l’énergie dégagée par la fission nucléaire est sans commune mesure avec celle dont nous disposions auparavant.

Marguerite Bangerter : Nous sommes les artisans de l'avenir

Le chaos politique, économique et social qui livre le monde actuel à la violence, à la revendication, à la lutte sans merci pour le pouvoir et le profit, a de quoi amplement motiver l’angoisse née de l’insécurité qui concerne chacun. Dans les conditions actuelles, l’avenir me semble déboucher en effet que sur des lendemains incertains et menaçants. L’évidence nous démontre que les institutions, à quelque rang qu’elles se situent, sont impropres à procurer aux individus le bonheur et la paix auxquels ils aspirent et qui constituent leur véritable destin.