docteur Jacques Vigne : Psychologie de la violence dans notre société

La meilleure prévention contre une éventuelle manipulation de notre esprit reste de retourner à soi-même : savoir se désidentifier des circuits émotionnels tout faits qui viennent s’interposer entre nous et les autres, entre nous et la réalité. Savoir remettre en question ses croyances automatiques, ses préjugés, avant que d’autres viennent les remettre en question…

G. I. Gurdjieff : Première initiation

Vous n’avez pas de mesure pour vous mesurer. Vous vivez uniquement d’après « cela me plaît » ou « cela ne me plaît pas ». C’est dire que vous n’avez d’appréciation que pour vous-même. Vous ne reconnaissez rien au-dessus de vous — théoriquement, logiquement peut-être, mais réellement, non. C’est pourquoi vous êtes exi­geants et continuez de croire que toutes les choses sont bon marché, que vous avez dans votre poche de quoi tout acheter si vous le désirez. Vous ne reconnaissez rien au-dessus de vous, ni au dehors ni en vous-même. C’est pour cela, je le répète, que vous n’avez pas de mesure et vivez passivement selon votre bon plaisir. Oui, votre « appréciation de vous-même » vous aveugle ! Elle est le plus grand obstacle à une vie nouvelle…

Patrice Godart : Champs de cohérence et yoga

Mais il existe aussi un autre men­tal, plus intérieur, plus profond, qui n’est plus conditionné par l’ego, l’ambition, la vanité, le désir person­nel, un mental réceptif, capable de se taire et d’écouter, de s’adapter, de s’élargir et de s’enrichir sans qu’aus­sitôt il ne se gargarise de sa propre importance. Il travaille dans la nuance, dans la subtilité, cherche à établir toujours de nouvelles rela­tions, se contente souvent de frôler des essences psychiques, comme dirait J. Ravatin, sans aussitôt vou­loir les annexer et les mettre en repè­res. Il sait se mettre à l’écoute, en silence, veille avec soin sur ces efflu­ves d’un autre monde pour qu’elles pénètrent en lui et fécondent mille sensations et pensées qui deviendront à leur tour les germes d’autres expé­riences et d’autres sensations. Il aime se fondre dans l’objet qu’il interroge et vivre au cœur des êtres et des choses quand d’autres se con­tenteraient d’un survol rapide à la surface. Pour lui, la diversité du monde ne constitue pas un fardeau de compilation, mais une voie d’enri­chissement, de relations illimitées et la source d’une joie toujours renou­velée devant le mystère d’une unité infiniment morcelée et cependant tou­jours inaltérable.

Jean Markale : Le singulier pluriel

Alors apparaissent des problèmes qui semblent insurmontables et qui sont facteurs d’angoisse. Si l’on prend, par exemple, le problème de l’énergie, on va se heurter tout de suite à une incompréhension. Un individu qui, pour se chauffer, ou pour s’éclairer, n’a plus qu’à manœuvrer un commutateur ne sait absolument pas ce qu’est l’énergie : c’est seulement un vague courant électrique, invisible, mystérieux, magique même, dont les effets se font sentir mais dont l’existence réelle n’est pas discernable. En un sens, les dieux on été remplacés par la « Fée Électricité », et peu importe son origine puisque l’essentiel est que ses manifestations soient bienfaisantes. En somme, l’être humain n’a guère évolué depuis qu’il croyait aux fées et aux divinités anthropomorphiques qui font tant rire ceux qui se disent rationalistes. La men­talité de cet être humain serait complètement différente s’il devait aller lui-même couper son bois, le réduire en petits morceaux avant de le mettre dans sa cheminée ou dans son fourneau pour se chauffer. Là, le rapport aux choses, l’effort qu’il ferait, la quantité limitée de combus­tible dont il disposerait, tout cela lui montrerait l’utilité d’une économie, c’est-à-dire d’une utilisation consciente et raisonnée d’un élément indispensable à sa survie et à son bien-être.

Jean Gontier : Connaissance et psychisme

Se voulant créature divine, l’homme a toujours plus ou moins répugné à considérer sa nature humaine et à la tenir pour ce qu’elle est parce que cela dévalue la fabuleuse opinion qu’il se fait de lui-même. Aussi est-il conduit à refouler cette nature, du moins dans l’Occident judéo-chrétien. Dans cette tradition, dès l’origine, existe la tendance à considérer la chair en général, et plus particulièrement tout ce qui touche au domaine sexuel, comme la cause de la perte de l’état paradisiaque. La chair, cause du péché, finit par devenir elle-même le péché. Et avec le puritanisme on en est arrivé à contraindre au maximum cette nature humaine tenue pour impure. L’homme est créé pour expier et souffrir et le bonheur même est un péché…

Krishnamurti : L'homme et le moi

Je me rends bien compte de l’indifférence, de la majorité des hommes à l’égard de la Vérité: ils ignorent jusqu’à son existence. Ils sont comme des prisonniers qui seraient nés dans leur prison et qui ne savent pas qu’elle a une sortie, mais qui souffrent à cause de leur emprisonnement. La Vérité, qui est la Vie, ne supporte aucune limitation. Pour la découvrir, nous devons nous libérer; et pour nous libérer, nous devons être poussés, par le désir de comprendre, à trouver la cause de nos limitations. La certitude à laquelle nous parvenons alors est le résultat de nos propres luttes, de notre compréhension, de notre doute. Cette certitude, personne ne peut nous la donner.

Robert Powell : Crise de conscience

Se contenter de qualifier le monde d' »irréel », même si cela était vrai, ne le fera jamais disparaître. Il ne me semble pas plus pratique, ni plus facile, de traiter avec ce monde que de traiter avec le monde « réel » habituel. En d’autres termes, la différence entre « des personnes réelles aux prises avec des problèmes réels dans un monde réel » et « des personnes irréelles aux prises avec des problèmes irréels dans un monde irréel » me paraît d’intérêt purement académique. On pourrait même se demander s’il est très sensé de faire cette différence. Ce n’est peut-être pas la bonne question après tout. Avons-nous une unité de mesure pour calculer la réalité et l’irréalité ? Ces lignes ne résoudront donc pas la question, j’en ai bien peur, parce que nos unités de mesure sont tout à fait de ce « monde », et si celui-ci était irréel, les unités de mesure le seraient aussi.

N. Sri Ram : Manas et bouddhi

Le mental qui est en rapport avec la matière est appelé, dans la philosophie hindoue, MANAS ; mais le mental en rapport avec l’esprit est nommé BOUDDHI. C’est un seul mental, une seule conscience, mais avec deux aspects tournés dans deux directions. En général, « Bouddhi » est traduit par « Intuition spirituelle ». C’est la cause spirituelle qui connaît intuitivement. Le mot Bouddhi est apparenté à celui de Bouddha, qui signifie « l’illuminé » ou « éveillé ». Bouddhi donne l’illumination complète. Dans la philosophie hindoue il y a plusieurs systèmes, mais tous font cette distinction fondamentale entre Bouddhi et Manas. Ces deux principes sont toujours inclus dans la constitution de l’homme. La conscience en nous est une, il n’y a pas plusieurs consciences en nous. Mais il y a deux aspects, deux modes d’action de notre conscience.

D. Casterman : « La structure de l'illusion »

L’homme pense avec des mots qu’il associe à des images mentales et des états émotifs variables auxquels il identifie les événements pour se construire une représentation du monde et de lui-même; c’est ce que j’appellerai « la pensée psychologique ». Il existe deux types de pensée : d’une part, ce que nous avons nommé les « pensées psychologiques » et, d’autre part, ce que nous appellerons les « pensées naturelles ».

Swami Hridayananda Sarasvati : Retour à la source

Ce titre, « Retour à la Source », donne l’impression que la source est éloignée et qu’il faut parcourir une grande distance pour l’atteindre. Ce n’est pas vrai. La source est partout; elle est en nous et autour de nous. Nous n’en sommes jamais séparés mais sommes toujours en continuité avec elle. Nous faisons partie de cette source. Dire « Retour à la Source » n’est qu’une façon de parler, car si l’on n’a pas conscience de la Vérité, on a l’impression que la source est éloignée de soi. Tant qu’on n’en est pas devenu conscients, on peut dire que l’on chemine vers elle. Ce cheminement est néanmoins différent de tout autre voyage car on ne peut rien emporter avec soi. En fait il faut tout abandonner. Il faut même s’abandonner soi-même. Ce que l’on appelle toute la journée le « moi », il faut l’abandonner afin d’arriver à la source ou devenir pleinement conscient de cette source.