connaitre votre terrain : Débutez

Habituellement, nous dressons « un opposé » au conditionnement qui nous choque : coléreux, nous nous efforçons de devenir paisibles, nous engageant ainsi dans un autre conditionnement, ou bien encore, nous avons recours à diverses évasions. Grâce à de tels procédés, nous sommes contraints de parcourir éternellement le même cercle vicieux. Il ne nous reste donc plus qu’une attitude de pure observation, qui nous permettra de connaître notre terrain en question, de saisir sur le vif les activités de notre corps, de notre psychisme, les démarches de notre pensée, nos motivations.

Jean Gontier : Au-delà

Tout ce que l’on pense, éprouve et sent n’est rien. Quoi que ce soit qui se puisse présenter en nous, que l’on sache que ce n’est jamais Cela et que l’Ineffable est toujours au-delà, au-delà de toute pensée, de toute sensation, de tout sentiment, au-delà de l’imaginaire, au-delà du rêve, au-delà ! Comme le concerto de Bach ou de Mozart, Il ne signifie rien, ne traduit rien, ne sert à rien. Il est, c’est tout.

Jean Gontier : Connaissance et psychisme

Se voulant créature divine, l’homme a toujours plus ou moins répugné à considérer sa nature humaine et à la tenir pour ce qu’elle est parce que cela dévalue la fabuleuse opinion qu’il se fait de lui-même. Aussi est-il conduit à refouler cette nature, du moins dans l’Occident judéo-chrétien. Dans cette tradition, dès l’origine, existe la tendance à considérer la chair en général, et plus particulièrement tout ce qui touche au domaine sexuel, comme la cause de la perte de l’état paradisiaque. La chair, cause du péché, finit par devenir elle-même le péché. Et avec le puritanisme on en est arrivé à contraindre au maximum cette nature humaine tenue pour impure. L’homme est créé pour expier et souffrir et le bonheur même est un péché…

Souvenir d'un passant

Quand apparaît la certitude qu’il ne peut y avoir de réponse sur le plan intellectuel, verbal et émotionnel, qu’on ne peut plus se référer à quoi que ce soit de connu, l’énergie en tant que moi investigateur s’épuise, s’éteint et se résorbe dans sa source, dans une lucidité silencieuse qui est une réponse totale, une plénitude vécue, sans que le moi intervienne ni puisse intervenir, il y a réintégration et dissolution dans le Soi. Alors, il n’y a plus de question car la recherche et le chercheur disparaissent dans la conscience unitive qui s’avère être le trouvé, le cherché.

Michel Guillaume : L’homme de précaution

Mais ce personnage précautionneux qui nous habite ne se montre pas toujours sous des dehors aussi évidents ni aussi naïfs. Et il ne prend pas non plus forcément des mesures aussi inadaptées ni aussi précaires. Ce personnage est parfois moins facile à voir et peut se dissimuler sous des masques. Il lui arrive ainsi par exemple de faire le philosophe : ‘‘en étudiant, en pratiquant telle philosophie, telle discipline (le Soufisme par exemple) — se dit-il — je suis fort. Cet enseignement, la bonne volonté que j’y apporte les efforts que je fais pour me perfectionner me rendent moins vulnérable. Si par malheur le Destin me frappe, il me trouvera tout armé et prêt à faire face’’.

W.A. Keers - Ce que nous sommes - entretien à paris en octobre 1984

C’est uniquement pour la personne qu’il y a progrès, pas pour votre vraie nature. La réalisation du Soi est immédiate, c’est l’axe. Si vous dites : « ah, ma maison est encore sale, je vais nettoyer le grenier » — tout en faisant le ménage vous serez naturellement maintenant, sans aucune progression. Donc pouvez-vous toujours faire votre toilette, vous modifier puisque vous êtes la deuxième Vénus de Botticelli et parvenir directement au septième ciel, mais ce que vous êtes, enregistrez bien ce mot : ce que vous « Êtes », vous ne pouvez pas l’atteindre puisque vous l’êtes ! Savez-vous qu’il existe un endroit, un drôle d’endroit — vous allez comprendre tout de suite — le seul lieu au monde d’où il soit impossible, par n’importe moyen de transport, d’aller à Paris ?… C’est la réponse ! Oui, la notion de progrès est contaminée par l’idée que le sentir et le penser pourraient comprendre quelque chose. Les pensées ne sont que des objets, comme les papillons, les chaises, comme l’Europe ; elles ne connaissent rien, elles sont connues. Vous êtes cette Connaissance dans laquelle paraissent les concepts et vous projetez celle-ci sur eux. Comment imaginer que ce soit la pensée qui sache quelque chose ? La pensée est objet, pas sujet !

Laisser l’intérieur agir Jean Klein

Ce silence intérieur fait accepter, aimer, comprendre ce qui se présente et que nous considérons à ce moment-là comme un cadeau. Toute perception, toute pensée est une énergie en mouvement, retournant automatiquement à son origine. Laissez donc l’objet s’épanouir, il se perdra et révélera votre conscience ultime, accueillez chaque rappel, qu’il soit sous une forme ou sous une autre, sans immixtion d’aucune sorte entre lui et votre présence.

Entretien avec Nisargadatta maharaj 1980

Il n’est besoin ici d’aucun « comment ». Gardez en mémoire le sentiment « je suis », fondez-vous en lui jusqu’à ce que pensée et sentiment deviennent un. En renouvelant les tentatives, tôt ou tard vous obtiendrez le juste équilibre entre attention et affection et votre intellect sera alors fermement ancré dans cette pensée-émotion « je suis ». Quoi que vous puissiez penser, dire ou faire, ce sentiment immuable et chaleureux d’être demeurera en tant qu’arrière-plan permanent de toute activité cérébrale.

L’accueil comme voie, entretien avec Jean Klein

Bien souvent, nous ne savons pas être ouverts, réceptifs aux pensées, aux sensations qui nous assaillent. Laissez-les venir, n’intervenez pas afin qu’elles se livrent à votre regard vierge. Cette écoute sans choix est détendue, paisible, nous voyons l’espace s’agrandir peu à peu. Hors de toute préhension, de toute mémoire. Le contenu de notre psychisme se révèle, s’actualise, nous contemplons d’une façon désintéressée nos agressions, nos fureurs, nos peurs, nos anxiétés. Tôt ou tard, elles se résorberont dans notre observation et la transformation, la transmutation se font dans cette résorption. Malheureusement, nous n’allons pas jusque-là, la personne se défend, elle n’approfondit pas complètement ces constatations, elle remet cette étude à plus tard, n’en ayant soi-disant pas le temps, sans vouloir comprendre le motif qui la guide. Cultivez l’observation, ne refusez pas une approche attentive, cet approfondissement vous rendra autonome.

Murshida Sharifa Goodenough : L’acquisition de la sagesse dans la vie

C’est par une observation constante de la vie et en maintenant l’équilibre du cœur et de l’esprit qu’on peut acquérir la sagesse; par une observation qui, pour être fructueuse, doit d’abord porter sur nous-même. Il est inutile d’observer autrui si nous ne nous sommes pas observés nous-mêmes. La connaissance de notre propre être nous facilitera celle des autres, nous donnera la clé de leurs pensées, de leurs sentiments.