Arnaud Desjardins : La voie consiste beaucoup plus à perdre ce qu'on a en trop qu'à acquérir ce qu'on n'a pas!

À 24 ans, j’ai passé un an et demi de ma vie en sanatorium. J’en suis sorti complètement guéri. Je sens une réelle transformation dans mon existence, c’est sûr, sinon ce serait absurde d’écrire les livres que j’écris ou de porter les témoignages que je porte. Si je n’avais pas eu personnellement la preuve que cette démarche, dite « spirituelle », peut conduire quelque part, je ne témoignerais pas. Ce que je ressens avant tout, c’est la gratitude pour tous ceux qui m’ont aidé et l’impression d’avoir trouvé ma place dans un certain monde, qu’on peut peut-être appeler, en effet, celui de la sagesse. C’est l’impression de ne plus du tout être seul. Je pourrais vous répondre en fonction de ce que je vois de souffrance chez les uns et les autres. L’impression de la solitude est très cruelle pour la plupart des gens. Même si je me trouvais seul, physiquement seul, ou même dans un milieu qui m’est hostile — ce qui peut se produire —, je n’éprouverais pas cette souffrance liée à la solitude.

Albert Low : Il n'y a pas de gradation entre l'ignorance et la sagesse

Vous savez, n’est-ce pas, que Bouddha a dit que « la vie, c’est la souffrance »! Nécessairement au fond de la souffrance, il y a le conflit, il y a contradiction et pour vraiment se réaliser; il faut aller au-delà de la souffrance et du conflit. Pour cela, il faut d’abord faire face au conflit. Avec la prolifération en Occident de différentes branches de l’hindouisme où, par exemple, le gourou est l’incarnation divine que l’on adore, n’est-il pas dangereux de succomber à un nouveau romantisme qui épargne justement cette contradiction fondamentale qui est au centre de l’humain?

Carlo Suarès : Question : « Vivre et/ou survivre (?) »

Je comprends le mot vivre. Je ne comprends absolument pas du tout ce que vous entendez par survivre. C’est un mot qui pour moi n’a strictement aucun sens. Si vous dites qu’on a détaché un cœur, qu’on l’a mis dans un bocal et qu’il continue à battre, il survit parce qu’il bat sans avoir aucune fonction, je le dirais bien, mais je ne pense pas que vous puissiez me parler de cela. Pour moi, tout vit. Et tout est conscience.

René Fouéré : Lucidité, analyse et jugement

Il nous faut inlassablement mettre en question cette mosaïque d’opinions reçues, tous les éléments de cette verrière colorée qui nous dérobe la lumière blanche, la lumière directe de l’expérience. Une telle mise en question ne peut être opérée que par un individu qui s’est « idéologiquement » détaché du milieu, qui a consenti à la solitude perplexe de sa propre pensée. La connaissance de soi, nous dit Krishnamurti, ne passe pas par « l’introspection » (Sur le sens donné par Krishnamurti au terme « introspection », des réserves s’imposent que nous préciserons plus loin.): en essayant d’analyser sur le vif un sentiment qu’on éprouve, on le détruit.

J. Krishnamurti : Ainsi parlait Krishnamurti

Il y a tout un ensemble de théories, de grandes, de nombreuses abstractions, et les gens vivent dans les traditions du passé : acceptent l’autorité. Tout cela n’est pas la religion. Tout cela ne conduit pas à la spiritualité. Ils peuvent aller dans les temples. Ils peuvent avoir d’innombrables rituels, des traditions historiques, non! des fictions historiques! Il y a tout un tas de gourous dans le monde entier, gagnant de l’argent, et avec toute une bande de disciples. J’espère que vous ne vous froissez pas de m’entendre parler ainsi.

Joël André : Un entretien avec Raymond Abellio

Aujourd’hui, on peut et on doit imaginer, c’est conforme à tous les enseignements de la tradition, une sorte de « remontée » où les anciens pouvoirs doivent être réintégrés, passant de l’état d’instinct ou de réflexe à l’état de pouvoirs conscients et maîtrisés. Que cela devienne universel, ce n’est sûrement pas à la même cadence pour tout le monde, c’est évident. Les médiums que nous connaissons sont souvent des êtres frustes, qui sont encore du côté descendant de la courbe, et quand on dit aujourd’hui qu’ils tendent à disparaître, c’est parce que l’évolution de la conscience tend à la fermeture de l’Ego sur lui-même, ce qui amoindrit, et même détruit provisoirement les anciens pouvoirs.

Jean-Louis Siémons : La science et le problème de l’après-vie

Au début, mes études au lycée m’ont porté vers la médecine, qui est une manière d’être humaniste, mais j’ai bifurqué vers la chimie biologique et finalement vers la physique sans renoncer à mes autres intérêts. La science ne nous oblige pas à renoncer à étudier ce qu’est l’homme et ce qu’il fait sur la terre. Donc, avec mes études scientifiques — j’ai deux doctorats — j’ai continué mes études spirituelles. J’ai étudié de très prés des livres comme la Bhagavad Gîta qui est considéré comme l’évangile de l’Inde, et pour mieux étudier ce livre profond, j’ai commencé à apprendre le sanskrit. De nos jours, il n’est plus surprenant de rencontrer des scientifiques qui s’intéressent à autres choses aussi. Oppenheimer a été pour nous l’un des premiers en Occident à s’intéresser à l’Inde et à la Bhagavad Gîta. De nos jours, on trouve des gens comme Fritjof Capra et d’autres. On n’a plus besoin aujourd’hui, en tant que scientifique, de justifier son intérêt pour des idées philosophiques et spirituelles.

René Fouéré : Indications sur mon chemeniment et l'enseignement de Krishnamurti

Par sa base, l’enseignement de Krishnamurti repose, en effet, sur un art de découvrir ces propositions, ces « théorèmes » psychologiques, et d’en établir solidement, au jugement de tout observateur de soi honnête, lucide et attentif, la réalité ; sur une mise en lumière impitoyable et irrécusable de la structure et de l’inévitable fonctionnement de notre esprit au niveau de conscience qui est celui de l’immense majorité des êtres humains. Dans ces conditions, il n’est absolument pas concevable qu’un individu intelligent, s’observant honnêtement, puisse, dans son for intérieur, entrer en conflit avec un tel enseignement une fois qu’il en a bien compris la véritable nature. Cela reviendrait pour lui à entrer en conflit avec lui-même, à renier sa propre transparence.

René Fouéré : De la prise de conscience partielle à la prise de conscience totale ou le chemin de la libération

L’action de la prise de conscience est, comme je l’ai déjà dit, un phénomène psychologique naturel qu’on observe, dans la vie courante, lorsqu’on découvre soudainement et perçoit très clairement qu’une conduite particulière est, de façon indiscutable et flagrante, foncièrement et irrémédiablement inapte à produire l’effet, le résultat qu’on en attendait et en vue duquel on l’avait adoptée. Cette perception entraîne une chute, un retrait instantanés de l’énergie et de l’attention qui se trouvaient jusque-là investies dans la mise en œuvre et l’entretien de cette conduite.

René Fouéré : Une parenthèse métaphysique

Quelque chose est là, éternellement là, caché sous le manteau des apparences, et qui est l’être même, la substance de l’être et l’essence de tout. Cette essence est là depuis toujours. Un « toujours » qu’elle a inventé, de même que l’espace, cette autre illusion de la fragmentation apparente de l’être. Mais ni le temps ni l’espace, qui sont ses fabrications engrenées, ne peuvent menacer son essentiel, son immuable « être-là ».