C’est alors que j’ai fermé les yeux. Je me suis donné sans réserve à la nuit des grands fonds. J’ai lâché prise sur toute réalité. Les voix s’atténuèrent. Puis elles ne furent plus qu’un imperceptible et lointain bourdonnement. Elles disparurent enfin me laissant enveloppé de silence. Je ne sentais plus mon existence, j’étais au delà du temps et de l’espace ; je « m’impersonnalisais » dans l’obscur liquide amniotique d’une matrice originelle retrouvée. Était-ce la paix ? Ou bien peut-être était-ce la mort? Mais ici, toute question corrompait déjà cet océan de calme.
Catégorie : Q-R
L’image du ciel sur la terre grecque. Un entretien avec Jean Richer
Dans le zodiaque grec, tel que je l’ai reconstitué, les symboles de certains signes sont d’origine égyptienne, les autres proviennent de Mésopotamie, ils semblent avoir joué le rôle de relais d’une part Ourartou, d’autre part la Phénicie. Dans l’état actuel de mes recherches, un point de départ est représenté par Toushpa, sur le lac de Van, ancienne capitale d’Ourartou, qui est sur le parallèle de Sardes et de Delphes…
Michèle Reboul : Jean Guitton et la parapsychologie propos recueillis
J’ai eu plusieurs fois l’occasion de parler de ces problèmes avec Bergson qui m’a inscrit parmi ses héritiers spirituels. Il avait beaucoup scruté les phénomènes parapsychologiques en les distinguant fortement des expériences mystiques. Les phénomènes parapsychologiques relevaient de la religion inférieure, statique, où l’homme projette son inconscient, alors que les expériences mystiques provenaient de l’action mystérieuse de l’Amour infini.
Theodore Roszak : Le monstre, le titan et la nouvelle gnose
Connaître Dieu par l’ordonnance des choses est une déduction, peut-être fragile aux yeux des logiciens sceptiques, mais de caractère au moins vaguement scientifique. Connaître Dieu par la puissance de l’instant est une épiphanie, une connaissance qui nous mène loin de la respectabilité scientifique. Pourtant, c’est là que la gnose atteint son sommet, devient connaissance acceptant de se plier à la discipline du sacré. Elle ne se ferme pas devant les épiphanies qu’offre la vie sous prétexte qu’elles seraient « simplement subjectives ». Elle permet plutôt à l’expérience de s’étendre, elle l’invite à prendre tout son sens. Après tout, si Galilée avait raison de traiter de fous les hommes qui refusaient de regarder la Lune dans un télescope, que devrions-nous dire de ceux qui refusent l’invitation de Blake à voir l’éternité dans un grain de sable ? La gnose tente d’intégrer ces moments d’émerveillement extatique ; elle les considère comme une avance sur la réalité et, de loin, la démarche la plus excitante qu’ait entreprise l’esprit. Car là est la réalité qui donne à nos vies leur sens transcendant.
Michel Random : Libres propos sur Stéphane Lupasco
Je suis un amoureux : par tempérament et par vocation sans doute, je suis à l’égard de Lupasco un amoureux contrit : car si comme moi vous allez à travers ses livres à la pêche que de perles n’allez-vous pas ramener. Des perles oui, mais à quel prix. En voici une : « L’univers, toute chose, est un rêve, pour ainsi dire en soi : la trame du monde s’il existe et, chose étonnante, afin qu’il existe, est faite de rêve »…
Raymond Ruyer : Le sourire de l’oracle
L’oracle me fit comprendre que, dans l’état de pénurie, l’inégalité est plus grande que dans l’état d’abondance. Lorsqu’on se plaint aujourd’hui de l’invasion du ciment, du plastique, de l’automobile, des appareils ménagers, on croit se plaindre de la civilisation industrielle. Mais on se plaint en réalité de l’égalisation démocratique, de la démocratie économique et du fait que trop de citoyens sont à leur aise et sont capables d’acheter auto et maison de campagne. Plus il y a de gens « à leur aise », plus les villes et les campagnes étouffent. Nous ne respirons encore que parce que la démocratie économique est imparfaite et qu’il y a toujours des pauvres et des peuples pauvres. L’abondance pour tous serait l’asphyxie et la paralysie universelles. La pénurie pour presque tous, l’abondance relative et le luxe pour quelques privilégiés, tel est le seul état stable possible.
Michel Random : École française des graveurs visionnaires : un monde à la recherche d'une renaissance de l'univers
Tout discours sur l’art est un discours piégé. On risque les généralités et la louange fleurie, et ces louanges ne sont souvent pas justifiées. Parler d’art est difficile et d’art visionnaire encore plus. Car, l’art visionnaire n’existe pas. Ce qui existe, c’est soit une œuvre rare et privilégiée dont la force et la beauté sont le résultat du talent et de la technique certes, mais plus encore de convergences réussies : c’est l’inspiration qui traversant le fond et la forme s’impose, se burine elle-même, prend corps à travers un poète, un musicien, un graveur, s’incarne en paroles, musique ou signes, se génère elle-même comme source inépuisable d’inspiration et de vision. A ce degré, nous avons quitté l’imaginaire, pour parvenir en cette terre où les choses, les idées et les sentiments n’ont plus un corps mais une « corporéité »…
Iegor Reznikoff : Entrer dans la résonance... pour une écologie de la musique
Dans l’expression musique sacrée, le terme sacré est le plus important, la musique vient après. L’art sacré n’est pas un art en soi ; c’est un art fonctionnel, l’outil par excellence pour aider à la prière, pour entrer dans le monde de l’esprit, par définition difficile à aborder. Mais un outil de beauté, de cette beauté platonicienne qui aide à la contemplation. Alors que l’architecture romane influe par ses volumes, et l’icône par ses lignes et la vision, le son agit directement sur tout le corps, extérieur et intérieur, par la vibration. Le son fait vibrer la colonne vertébrale, la poitrine, la gorge, la région frontale, le sommet de la tête, tous ces lieux contemplatifs, ces lieux de la conscience profonde, qui constituent le corps contemplatif ou encore le corps de lumière.
Michèle Reboul : La conception chrétienne du temps
La notion de la fin du monde a son origine dans la perspective eschatologique du christianisme, d’un temps qui a commencé avec le monde et finira avec lui, d’un temps lié au dessein de Dieu sur l’homme et, partant, d’une évolution créatrice de l’histoire. Le temps n’a de sens que dans la mesure où il s’abolit lui-même en permettant à l’œuvre de la création de s’accomplir, il est le signe et l’épreuve de la liberté. Par suite, des philosophes qui n’admettent ni la création, ni la liberté, ni la transcendance de Dieu sur l’homme sont amenés à nier le temps, à séparer le temps de l’éternité, comme l’imaginaire du réel, alors que l’eschatologie chrétienne est fondée sur l’union paradoxale du temps et de l’éternité.
Dr. Dirk Quatannens : La théologie occidentale
Dans la religion du Feu le monde était uni, avait les mêmes aspirations, les mêmes espoirs, à travers les diverses formes des religions dites païennes. Le courant dit Chrétien étant une synthèse typique à tendance eschatologique de cette religion fondamentale de l’Orient, il trouvera en Occident un sol propice et déjà préparé pour commencer son œuvre de Christianisation qui au fond n’était qu’une œuvre de transformation et d’adaptation aux données ésotériques de l’école de Nazareth et l’établissement du code moral israélite et rabbiniste.