Wei Wu Wei : L'Innommable

Comment l’illusion se produit-elle ? Chaque `geste’ a lieu maintenant, chaque `endroit’ est ici, chaque `objet’ est ceci, de tels faits évidents, les concepts conditionnés de la spatialité-temporelle produisent l’illusion de `mouvement’, de la `durée’, et du `changement’. Lorsque nous nous éveillons des rêves (dans le sommeil) nous ne croyons plus à ce que nous avons rêvé, il en est de même quand nous nous éveillons du songe `vécu’.

Wei Wu Wei : Voie directe

La traduction ‘voie’ a été trouvée peu satisfaisante, parce que les textes révèlent la vérité fondamentale qu’aucun déplacement n’est nécessaire pour atteindre un ‘chez-soi’ qu’aucun voyageur n’a jamais quitté.

Jean-Michel Varenne : La route de Konya

Un voyage peut, momentanément, briser cette dynamique aliénante et priver ses ressorts de leurs subsides. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire, à condition que nous nous sentions disponibles, d’accélérer le rythme du voyage comme on souffle le feu sur la forge ; de faire reculer les possibilités, d’épuiser les réserves, d’assécher les compensations : marcher jusqu’à l’épuisement, sauter de train en bus, se nourrir de peu…
Cette ascèse déstabilise le régime du mental, provoque la disparition des pensées.

XXX : Cette lancinante nostalgie d'absolu

Ainsi se produit une sorte d’alchimie qui conduit celui qui recherche et ce qui est recherché à cela en quoi il n’existe plus aucune distinction possible : ni Dieu ni homme, ni Soi ni moi, ni esprit ni matière — tout apparaissant alors comme autant de découpages artificiels de l’intellect. Finalement, on aboutit toujours à la même impasse : pour pouvoir parler de ce dont il s’agit ici, il faut s’y trouver ; si l’on s’y trouve, l’on ne peut parvenir à en parler valablement faute de moyens appropriés.

Georges Vallin : Difficultés d'approche de la non–dualité

Le caractère fondamental des modèles théoriques que nous offrent les diverses formulations du Non-dualisme oriental consiste dans l’affirmation simultanée et paradoxale de la Transcendance radicale de l’Absolu et de son immanence intégrale au monde ou à la manifestation. Cette transcendance à la fois radicale et intégrative de l’Absolu nous paraît constituer l’expression la plus authentique et la plus achevée de ce que Nietzsche appelait « l’affirmation originaire », se situant au-delà du « nihilisme » et de la fuite vers les « arrière – mondes », mais dont la philosophie même de Nietzsche ne nous offre qu’une expression mutilée.

XXX : Répétitions

Comment connaître ce qui, comme le message de l’exemple analogique précédent, n’est ni matière, ni énergie ? Tant qu’on reste dans le domaine intellectuel ou affectif, on ne peut procéder que par distinction donc par séparation. Le monde de l’intellect humain par sa nature ne peut être que dualiste. Lorsqu’on se trouve placé dans la dimension essentielle il est impossible d’en rendre compte au moyen de l’intellect et du langage. Telle est la situation paradoxale dans laquelle on se trouve. D’un côté rien ne peut vous aider et de l’autre rien ne peut être dit. Pourtant il n’existe qu’une seule réalité inséparable. Comme pour une pièce de monnaie on ne peut demander à quelqu’un de vous donner seulement soit le côté pile, soit le côté face à l’exclusion du reste…

Daniel Verney : Esquisse pour une théorie de la relativité ontologique

Cela ne signifierait évidemment pas qu’il faut abandonner l’idéal d’une unité de la connaissance et de l’être, mais qu’il faut abandonner la prétention de l’orgueilleux mental humain à conceptualiser « le tout », et admettre que l’unité ne peut pas être atteinte par une démarche uniquement conceptuelle ; bien plus, qu’elle ne peut être éventuellement vécue qu’à travers l’acceptation et le dépassement des multiplicités. C’est d’ailleurs ce qu’enseignent toutes les traditions de l’humanité.

le Dr Dimitri Viza : Pour sortir de l'état de vérité

La maladie qui atteint l’intelligence de ceux qui deviennent les porte-paroles de telle ou telle idée politique ou scientifique, qui deviendra doctrine pour se transformer en dogme, est sans doute un trait congénital de l’organisation cérébrale humaine au stade actuel de son évolution. Ainsi, les représentants de chaque vision s’enfermeront chacun dans leur vérité, se rendant imperméables à toute autre. Cela est un trait fondamental de l’homme et il suffit d’écouter pendant quelques minutes un militant de n’importe quelle obédience (communiste, chrétien, juif, musulman, athée, fasciste) pour se rendre compte de l’ampleur de la déformation intellectuelle qu’une idée est capable d’imposer à ses partisans.

Daniel Verney : Vers un nouveau paradigme scientifique : ontologies et logiques selon Gotthard Günther

L’une des originalités essentielles de la pensée de Gotthard Günther est en effet de ne pas hésiter à entrelacer les points de vue métaphysique et logique, non pas pour diluer la science dans la métaphysique, ni, comme l’imaginent les scientifiques qui restent attachés au paradigme de la science classique, pour évacuer de la science ce qui pourrait y rester de métaphysique, mais au contraire pour essayer de construire une science nouvelle qui n’exclurait pas une réflexion sur la nature — les natures — des êtres.