Nous sommes à l’aube d’une transition entre la dépendance — dépendance vis-à-vis d’un gouvernement « maman » pour nous torcher, d’un gouvernement « papa » qui nous punit et d’un gouvernement « Big Brother » qui surveille chacune de nos interactions — et l’indépendance, à mesure que nous apprenons à nous organiser et à nous gouverner nous-mêmes. Cette transition ne sera pas facile, et le résultat final ne sera pas utopique ; il y aura toujours des contrevenants à la loi et des personnes qui rejetteront l’ordre social. Mais nous devons comprendre que la fausse croyance selon laquelle les éléments perturbateurs ne peuvent être traités qu’en cédant davantage de notre pouvoir à des autorités centralisées est précisément ce qui nous a conduits au bord de l’effondrement économique et social.
Pendant longtemps j’ai considéré l’état atrophié de la pensée et de l’être modernes comme le résultat de la société industrielle, la conséquence de centaines d’années de « progrès » et de « développement » étouffant l’âme. Mais maintenant je vois que c’est l’inverse — notre pensée et notre être ont dû être réduits de cette manière afin que nous acceptions l’esclavage qui nous était destiné.
Pendant la majeure partie de notre histoire, depuis l’époque hébraïque et gréco-romaine, le livre (sous toutes ses formes physiques) a été un moyen d’aider à réfléchir aux grandes questions de la vie et une voie vers l’amélioration mentale et morale de soi. Il a été au cœur de la « haute culture » qui nous a apporté le christianisme, la Renaissance, les Lumières, le romantisme, le modernisme et toutes les idéologies postmodernes fondées sur le livre, au sujet desquelles nous nous battons actuellement. Si même nos jeunes les plus brillants ont de plus en plus de mal à lire, tout cet héritage culturel va-t-il continuer à être étudié, critiqué et transmis aux générations futures et, si ce n’est pas le cas, comment les générations futures pourront-elles construire du nouveau en l’absence de ces fondements ?
Il n’y aura pas besoin de policiers ou de sbires bottés pour vous empêcher de vaquer à vos affaires. Il leur suffira d’annuler vos abonnements, de vous couper de vos comptes bancaires, de vous mettre sur une liste noire ou, d’une autre manière, de débrancher votre vie numérique, et pouf — en un instant, vous serez dans l’incapacité de participer à la vie publique.
Avant l’ère industrielle, les objets matériels étaient aussi des vecteurs de relation. Soit vous les fabriquiez vous-même à partir de matériaux locaux, soit quelqu’un les fabriquait pour vous, quelqu’un avec qui vous étiez lié de nombreuses autres manières. Les relations économiques étaient étroitement liées aux relations sociales. Nourriture, vêtements et tout ce qui était créé de mains humaines circulait dans des réseaux de dons, ancrant donneur et receveur dans une toile de relations. Ils confirmaient : vous êtes là. Vous êtes connecté au monde, un participant et non seulement un consommateur. Vous faites partie du réseau. Les objets qui apparaissent de nulle part, via l’achat en un clic sur Amazon, ne vous connectent pas à un être humain, un lieu ou une communauté.
Il n’y a pas si longtemps, associer les mots « plante » et « mémoire » dans un sens scientifique aurait prêté à sourire. Mais ce temps est révolu. De nombreux travaux scientifiques publiés suffisent désormais à démontrer que les plantes non seulement se souviennent, mais aussi apprennent, prennent des décisions, communiquent et perçoivent leur environnement.
Ce à quoi nous assistons n’est pas seulement un progrès technologique – c’est ce qu’Ivan Illich appelait la dépendance iatrogène dans son ouvrage précurseur, Némésis médicale. Illich avait forgé ce terme pour la médecine – des institutions qui promettent de soigner tout en créant de nouvelles formes de maladies – mais le schéma s’applique parfaitement à l’IA également. C’est exactement ce que je ressentais à propos de ces nouveaux outils – ils promettent d’accroître nos capacités cognitives tout en les affaiblissant systématiquement. Ce n’est pas la prise de contrôle hostile dont la science-fiction nous avait avertis. C’est l’érosion silencieuse de la capacité individuelle déguisée en aide.
La crise de la science qui mine la recherche est largement sous-estimée, en grande partie parce que les résultats non reproductibles, les biais idéologiques, les conflits d’intérêts et la fraude sont généralement discutés isolément — sans reconnaître leur impact cumulatif et leurs racines communes. Les scientifiques seuls ne peuvent à eux seuls résoudre ce problème. La vigilance des citoyens est essentielle. Mais d’abord, les citoyens doivent en être informés.
Je pense ici avant tout aux changements sociaux et politiques qui se produisent actuellement à un rythme très rapide, et qui ne sont pas nécessairement pilotés par les politiciens eux-mêmes, mais inévitablement exploités par ceux — qu’il s’agisse de gouvernements ou de multinationales — qui souhaitent exercer un contrôle total sur le corps, l’esprit et l’âme des êtres humains, dès lors que la technologie leur permettra de le faire. Il ne s’agit donc pas tant de machinations machiavéliques que d’opportunisme machiavélique. C’est ainsi que le mal prospère. Il est vrai qu’un contrôle et une surveillance importants sont déjà en place sur Internet, sans que cela soit évident pour beaucoup, mais le pire, bien pire, peut arriver.
Nous vivons la première époque de l’histoire humaine où nos vies intérieures sont systématiquement façonnées par des machines optimisées pour l’engagement plutôt que pour l’épanouissement. Le contrôle centralisé de l’information représente l’industrialisation de l’attention humaine — et, ultimement, la mécanisation de la création de sens elle-même. Les protocoles décentralisés ne sont pas seulement des solutions techniques ; ce sont des outils pour réaffirmer le droit de penser par nous-mêmes.
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