Michel Random : Le visage ou le mystère de l'être

C’est le propre du poète de prendre le risque de révéler en se révélant. Nous avons sans doute perdu la magie profonde au profit d’une magie apparente. Et pourtant le fait est là, la drogue de l’image est là. La hantise de voler l’instant et l’instant de l’instant est là pour cristalliser malgré et contre tout ce mystère. On le fait avec répugnance, avec mauvaise conscience, l’ina­vouable mystère se trouve imprimé et publié pour être touché et vu par les yeux de tous, et malgré tout le sacrilège est commis. Qu’on me pardonne ce sacrilège au nom de l’amour qui lui aussi existe hors du temps et de l’espace.

Archaka : La naissance de la Mort

Il y a soixante mille ans, un phénomène s’est donc produit dans la conscience terrestre : le brusque arrêt du souffle dans une poitrine étrangère, l’ataraxie intérieure qu’en dépit de la raideur navrée des membres le visage détendu traduisait, le silence irrémédiable de celui qui, un instant avant, criait ou riait, tout cela s’est mué en ce qui nous prosterne et à quoi nous n’avons pas encore trouvé de réponse. Toutes nos cultures découlent de cette découverte d’une Amérique que nous appelons la Mort. Toutes nos philosophies, toutes nos religions sans aucune excep­tion sont issues de cette brusque ouverture sur notre anéantissement…

Joël André : Astrospective

La conjugaison des cycles planétaires et des devenirs terrestres s’est-elle imposée à la manière d’une programmation cosmique ? Ou suffit-il d’y voir une astro-programmation de l’homme par l’homme ? Il est probable que sur le fond d’une résonance cosmique initiale, l’homme primordial a prélevé, parmi toutes les configurations astra­les possibles, celles qui évoquaient le plus sa structure interne. Pro­jection et auto-envoûtement auxquels l’espèce actuelle continue de répondre. Les stratégies originelles marquent pour des millénaires…

Yvon Bec : Beethoven, La Missa Solemnis et l'esprit religieux

En fait, ses aspirations religieuses semblent le mener vers une entité proche de ce que Spinoza nomme Dieu. Et trop d’intuitions beethovéniennes sur la nature de l’éternité (cf. : la lettre au peintre Macco) et sur la na­ture du divin convergent avec le spinozisme pour n’être que fortuites. Ces intuitions que nous trouvons, non dans de vagues invocations de malade, mais lorsqu’il affirme sa pensée avec le plus de cohérence possible pour lui, c’est-à-dire lorsqu’il met en rapport la pensée du divin et l’acte de création

L’interprète face à l’œuvre avec Brigitte Engerer

Et mon maître disait toujours : Quand vous êtes devant votre instrument et que vous jouez, je n’ai pas besoin d’être psy­chologue pour deviner ce que vous êtes, pensez, sentez, ce à quoi vous accédez ; vous êtes complètement nu à travers la musique que vous exprimez. Il est donc ridicule de vouloir être personnel en chan­geant ou en déformant la pensée de l’auteur. Vous l’êtes quoique vous puis­siez faire.

Archaka : Avant le Déluge

Si élevées qu’elles puissent être, les paroles qui nous sont adressées ne sont que des conceptions qui, d’une voix à l’autre, semblent parfois se contredire. La réincarnation, absente du christianisme depuis le Ve siècle, est essentielle à la pensée bouddhique qui nie pourtant la réalité de l’individu, laquelle est fondamentale pour les chrétiens. D’une religion à l’autre, d’une philosophie à l’autre, les explications diffèrent et peuvent même diverger, comme elles le font d’une politique à l’autre. Toutes sont néan­moins justifiables. Toutes saisissent un reflet ou un écho de ce qui nous hante et qui, peut-être, est à jamais incompréhensible.

Quantique entretien avec Jean-Marc Lévy-Leblond

Ce qui m’intéresse, moi, dans cette interaction du microscopi­que et du macroscopique, c’est de demander à la physique : si les objets quantiques sont aussi radi­calement différents des objets classiques, comment se fait-il qu’en très grand nombre, ils redonnent des objets macroscopi­ques de type classique ?

Le Son de l'Âme entretien avec Jean During

On peut s’appuyer sur une icône comme support de méditation, comme cela se pratique dans le Christianisme, particulièrement en Grèce, mais la musique, elle, joue sur plusieurs plans à la fois. On y trouve la dimension du temps, celle de l’espace, de l’espace sonore, tous les niveaux de l’être que nous évoquions à l’instant ; ce pour­quoi on arrive plus facilement à une expé­rience totale… … La thèse qui sous-tend les musiques spirituelles dans tout l’Islam, depuis les premiers textes soufis jusqu’aux derniers maîtres contemporains — tous sont unanimes sur ce point — est qu’il existe des sens spirituels.

Joël André : La science au verso

[…] d’où vient que popu­lairement, le « c’est scientifique » ait ce sous-entendu (ou pouvoir supposé) de mettre fin à la discussion ? Sans doute d’une naïveté propagée par un discours second de la science, l’épistémologie : dis­cours sur la science ou science de la science, selon les prétentions. Longtemps appuyée sur une histoire de la science monolithique, volontiers « laïque et obligatoire », elle a imposé universitairement pendant des décennies une vulgate dont le public a gardé cliché. La science, au fond, comme une galerie de « machines à raisonner iso­lées sur des socles de marbre » (Koestler).

Dominique Dussaussoy : Le souffle et le miroir

De la préhistoire la plus reculée à nos jours, jamais, dans aucune culture, cette foi en la puissance musicale ne s’est affaiblie. Les chamanes sibériens battent tou­jours le tambour sur cadre et les Indiens entonnent leurs chants du peyotl. Partout, on fait de la musique. Pour élever l’âme, exalter les émotions, bercer, charmer, mar­cher, danser, travailler, rêver. Et chacun saisit intuitive­ment que ce pouvoir musical est le plus grand qui soit, le pouvoir même du verbe : le pouvoir de créer.