Robert Amadou : Qu'est-ce que l'alchimie ?

L’alchimie s’exprime en symboles, et il faut bien dire que beaucoup d’alchimistes ne comprennent pas les textes qu’ils lisent et ne comprennent peut-être pas les textes qu’ils écrivent. Il m’est arrivé de trouver tant d’imitations, de plagiats ! et des exemples encore plus intéressants de véritable délire poétique ! Et tant d’alchimistes qui, lisant ou écrivant des textes d’alchimie, s’imaginaient comprendre, et en fait ne comprenaient pas ! La question se pose : Qu’y a-t-il à comprendre ?

Un autre regard, entretien avec J.H. Lartigue

La photo, l’écriture, la pein­ture, c’est pareil. C’est un cachet d’aspirine qu’on prend quand on peut saisir un tout petit peu de ce qui passe. Ça vous calme. Je souffre quand la nature est trop belle. Supposez qu’on m’em­mène en voiture et que je tra­verse des bourgs, des champs de blé sauvages ; alors, je deviens de mauvaise humeur avec les passagers qui ne compren­nent pas pourquoi. Et c’est parce que je laisse tout ça se perdre.

Archaka : Je et Moi

Passent les jours et les semaines. Passent les mois et les années. Les siècles et les millénaires peuvent passer de même. Cela est en nous. Et cela est la vérité. Extérieurement, comme une pluie ruisselant sur nos traits, les brouillant, les effaçant, nous empêchant d’y voir clair, les événements peuvent se succéder. Nous pouvons être précipités dans le torrent des passions, emportés par le vent de l’Histoire, disparaître dans les déserts d’époques sans vie ou dans les abysses de temps muets où se préparent les ères nouvelles, nous pouvons être prisonniers de toute cette quasi invincible apparence, entichés de ce presque inexpugnable visage des choses, cela existe : envers et contre tout, il y a en nous cette fleur de feu que nous avons vue un jour et qui ne cesse de s’épanouir, cette flamme d’or qui ne cesse de grandir et se nourrit de notre obscurité même, de notre confusion, de notre ignorance et fait de notre forme l’athanor où la Nuit se dénude et se transmue en Jour et où, lentement, l’expérience du Temps se change en la légende de l’Éternité.

Les sociétés secrètes du Moyen Age et de la Renaissance: 3 Les académies et les sociétés secrètes de la Renaissance

Or on peut remarquer à ce propos que Pleber devait être laïque bien que le texte cité ne l’indique pas expressément ; en effet, si cet architecte avait appartenu à une confrérie religieuse, la condition de l’évêque, le genre même du monu­ment que celui-ci voulait édifier auraient suffi pour engager le jeune constructeur à livrer spontanément l’« arcanum magisterium », le « secret de maîtrise ». Il est ainsi probable, pour ne pas dire certain, qu’existaient, à côté des religieux qui avaient le monopole de l’art de bâtir, des architectes laïques, en petit nombre peut-être, mais qui n’en gardaient pas moins jalousement des secrets importants. En effet, il n’est pas possible de réduire ces arcanes à de simples procédés techniques puisque nous venons de citer les textes de Vitruve selon lesquels un savoir encyclopédique était nécessaire à l’exercice même de l’art de l’architecture…

Robert Amadou : Gurdjieff et le soufisme

Si Gurdjieff n’a jamais prétendu être soufi, il a soutenu qu’il enseignait, à sa manière, ce que les derviches en­seignent. À première vue, il n’en est rien, dans un contexte non seulement muet sur l’islam, mais a-religieux. Dans le travail, néanmoins, des traces d’influence se dessinent : comment pourrait-il en aller autrement ? Les « exercices », les « mouvements » constituent Gurd­jieff en « maître de danse », à la Rumi. Mais des tech­niques respiratoires et gestuelles analogues existent dans le christianisme oriental et dans le chamanisme, dont l’islam et le christianisme des pays de Gurdjieff ont subi l’influence, quand ils ne se sont pas seulement rencontré avec lui. Il paraît que certains traits spécifiques, d’ailleurs accessoires, des rites derviches reviennent dans le travail de Gurdjieff. Une influence soufie est certaine, d’autres aussi, probablement plus faibles, la réinvention ne l’est pas moins. Je n’ose plus avant…

René Alleau : Les sociétés secrètes du Moyen Age et de la Renaissance: 2 Les gardiens de la Terre sainte

Après le concile de Troyes, en 1128, la règle du Temple, d’inspiration bénédictine, est fixée. L’éloquence de saint Bernard oppose l’humilité de la nouvelle chevalerie, sa pau­vreté volontaire, son esprit de pénitence au « courroux déraisonnable, à la soif de la gloire et à la convoitise des biens temporels » de la noblesse du siècle. Saint Bernard salue avec espoir ce signe de la présence d’un nouvel idéal chrétien « dans la Terre de l’Incarnation ». Avec la deuxième croisade, l’ordre reçoit sa tenue, fixée par le pape : un man­teau blanc et une croix rouge sur le cœur, ainsi que des pri­vilèges importants : droit de percevoir des impôts locaux, indépendance à l’égard du clergé séculier de l’endroit, pos­sibilité d’établir des églises avec des chapelains relevant directement de Rome…

Autour de l'enseignement de Gurdjieff, entretien avec Henri Tracol

Le psychisme dont il parle est visiblement du domaine de la manifestation, alors que le spirituel relève de ce qu’il est réellement. Mais il n’y a pas là pour autant une condamnation de la manifestation au profit de l’essence. La perspective qu’il ouvre est celle d’un accomplissement, par la fusion du psychisme et du spirituel, en sorte que la manifestation de l’homme émane de son essence réelle, au lieu de s’imposer à lui du dehors.

Archaka : Le geste innombrable de Dieu

Il nous faut comprendre également ceci : la pierre avait-elle le pouvoir de se changer en fleur, et le lézard en oiseau ? Le singe avait-il le pouvoir de se changer en homme ? Le pouvoir était en lui, sans doute. Mais était-il capable de le découvrir et de s’en servir ? Autre chose était là, qui voyait et savait. Autre chose, depuis toujours, préside à la manifes­tation du monde. Autre chose agit. Les formes ne sont que ses supports et ses instruments. Les formes ne choisissent pas de se modifier. C’est cette autre chose qui, sans fin, les sculpte et s’y traduit. Il ne dépend pas de ces formes qu’elles existent ou dis­paraissent ou soient transformées. Il ne dépend pas de nous que nous existions ou disparaissions ou soyons transformés. Que sommes-nous donc, alors ? Les jouets, les esclaves de la Divinité qui, à Sa guise, nous tire du néant et nous y replonge ? Ou bien les membres du corps infini, inconnaissable et resplendissant de cette Divinité ?

René Alleau : Les sociétés secrètes du Moyen Age et de la Renaissance: 1 La tradition ésotérique judéo-chrétienne

En effet, selon ces conceptions, les hommes pieux peuvent s’élever jusqu’à Dieu, même dans les limites de la vie présente, s’ils savent l’art occulte de s’affranchir des liens qui unissent l’âme et le corps. Cette notion d’une délivrance et d’une union mystique avec l’essence divine jouait aussi un rôle fondamental dans le gnosticisme. Cela explique la fonction centrale de mystérieuses cérémonies et d’incantations associées à une hiérarchie d’anges et d’esprits qui servaient, en quelque sorte, de guides et de supports au mystique durant son ascension vers le divin. Les paroles et les formules sacrées permettaient à l’initié de triompher des mauvais génies, qui s’efforçaient de l’attirer vers l’abîme. Les Esséniens, fort instruits dans l’angélologie et dans la démonologie, ont emprunté ces connaissances à des sources mésopotamiennes et égyptiennes. Toutefois ces éléments initiaux étrangers furent, en quelque sorte, « judaïsés » et prirent la forme de l’adoration du nom de Dieu « qui crée et qui détruit les mondes », selon la philosophie du « Sepher Yetzirah » et du « Zohar » : « le livre de la Splendeur »…

Archaka : L'Arbre de la Liberté

Quoi qu’il arrive, il n’y a éternellement qu’un événement, et c’est Dieu. Les mondes peuvent s’écrouler et renaître, les univers se succéder ou ne plus jamais exister, il n’y a que Dieu. Et dans cette incommensurable et myriadaire existence de l’Un qui s’aime à jamais en tout ce qu’Il est, du plus chétif atome au plus énorme amas galactique, l’amour est au centre de tout. L’amour est ce qui manifeste les mondes et ce en quoi ils se résorbent. Il est, pour l’âme du sage, l’immense et ineffable Lumière de la conscience suprême où rien n’a de nom ni de forme et qui se condense sous l’aspect d’univers — amour qui n’a d’autre objet que soi-même et dont toute la création n’est que l’expression charmeresse.