W.A. Keers - Ce que nous sommes - entretien à paris en octobre 1984

C’est uniquement pour la personne qu’il y a progrès, pas pour votre vraie nature. La réalisation du Soi est immédiate, c’est l’axe. Si vous dites : « ah, ma maison est encore sale, je vais nettoyer le grenier » — tout en faisant le ménage vous serez naturellement maintenant, sans aucune progression. Donc pouvez-vous toujours faire votre toilette, vous modifier puisque vous êtes la deuxième Vénus de Botticelli et parvenir directement au septième ciel, mais ce que vous êtes, enregistrez bien ce mot : ce que vous « Êtes », vous ne pouvez pas l’atteindre puisque vous l’êtes ! Savez-vous qu’il existe un endroit, un drôle d’endroit — vous allez comprendre tout de suite — le seul lieu au monde d’où il soit impossible, par n’importe moyen de transport, d’aller à Paris ?… C’est la réponse ! Oui, la notion de progrès est contaminée par l’idée que le sentir et le penser pourraient comprendre quelque chose. Les pensées ne sont que des objets, comme les papillons, les chaises, comme l’Europe ; elles ne connaissent rien, elles sont connues. Vous êtes cette Connaissance dans laquelle paraissent les concepts et vous projetez celle-ci sur eux. Comment imaginer que ce soit la pensée qui sache quelque chose ? La pensée est objet, pas sujet !

Laisser l’intérieur agir Jean Klein

Ce silence intérieur fait accepter, aimer, comprendre ce qui se présente et que nous considérons à ce moment-là comme un cadeau. Toute perception, toute pensée est une énergie en mouvement, retournant automatiquement à son origine. Laissez donc l’objet s’épanouir, il se perdra et révélera votre conscience ultime, accueillez chaque rappel, qu’il soit sous une forme ou sous une autre, sans immixtion d’aucune sorte entre lui et votre présence.

Entretien avec Nisargadatta maharaj 1980

Il n’est besoin ici d’aucun « comment ». Gardez en mémoire le sentiment « je suis », fondez-vous en lui jusqu’à ce que pensée et sentiment deviennent un. En renouvelant les tentatives, tôt ou tard vous obtiendrez le juste équilibre entre attention et affection et votre intellect sera alors fermement ancré dans cette pensée-émotion « je suis ». Quoi que vous puissiez penser, dire ou faire, ce sentiment immuable et chaleureux d’être demeurera en tant qu’arrière-plan permanent de toute activité cérébrale.

L’accueil comme voie, entretien avec Jean Klein

Bien souvent, nous ne savons pas être ouverts, réceptifs aux pensées, aux sensations qui nous assaillent. Laissez-les venir, n’intervenez pas afin qu’elles se livrent à votre regard vierge. Cette écoute sans choix est détendue, paisible, nous voyons l’espace s’agrandir peu à peu. Hors de toute préhension, de toute mémoire. Le contenu de notre psychisme se révèle, s’actualise, nous contemplons d’une façon désintéressée nos agressions, nos fureurs, nos peurs, nos anxiétés. Tôt ou tard, elles se résorberont dans notre observation et la transformation, la transmutation se font dans cette résorption. Malheureusement, nous n’allons pas jusque-là, la personne se défend, elle n’approfondit pas complètement ces constatations, elle remet cette étude à plus tard, n’en ayant soi-disant pas le temps, sans vouloir comprendre le motif qui la guide. Cultivez l’observation, ne refusez pas une approche attentive, cet approfondissement vous rendra autonome.

Stephen Jourdain : Une unique expérience

Pour beaucoup de personnes s’intéressant à ce genre d’expérience, il semble qu’il existe, qu’il doive nécessairement exister une contradiction entre ce qu’ils nomment l’« expérience ultime » et la vie quotidienne. Moi je n’ai jamais entrevu, jamais même commencé d’entrevoir cette contradiction. Je n’ai jamais senti la moindre brouille entre le fait de jouer au billard, par exemple, ou le fait d’avoir une activité sexuelle quelconque, et la nécessité de vivre cette « chose ». La nature de cette « chose » exclut une telle contradiction, de la même façon qu’elle n’exige pour briller aucune sorte de sacrifice. Cette opinion que la contradiction existe pourrait provenir du fait que, n’ayant pas l’« ultime expérience », connaissant par ouï-dire ce moi mystérieux de qui elle est l’avènement, les gens se figurent qu’il a perdu la qualité humaine. Alors, tout naturellement, ils sont amenés à imaginer une contradiction entre la vie humaine, la vie quotidienne, et « l’éveil ».

L'œil du sorcier entretien avec Philippe Alfonsi

Vous savez, la sorcellerie est très contagieuse. Nous ne restions jamais plus de trois semaines dans le Berry pour ne pas basculer, parce qu’il faut le reconnaître, ça va vite. Tous les gens que j’ai vus tomber en sorcellerie vivaient des expériences dramatiques, parmi les plus épouvantables que l’on puisse faire. Il ne faut pas croire que les beaux esprits soient à l’abri d’une « culbute ». Je vous ai dit que le phénomène touchait également des médecins. La plupart des médecins (et des patients !) ont cru à la toute-puissance de la médecine. Je crois que c’est cette mauvaise approche de la science qui fait que beaucoup de médecins s’intéressent aujourd’hui au paranormal et à l’irrationnel. Ils n’ont peut-être pas su prendre la véritable mesure de la science, attendre de la voir évoluer par sa propre critique, en reconnaissant ses limites.

La puissance du verbe entretien avec Jeanne Favret-Saada

Le fait que personne ne soit sorcier n’empêche pas le système des sorts de marcher. Au contraire. Lorsque quelqu’un est victime de malheurs à répétition, son entourage et son désenvoûteur l’autorisent à se dire ensorcelé. Pour s’en tirer, il accuse tel ou tel « sorcier » qui, le plus souvent, devient à son tour victime de malheurs à répétition pendant que l’accusateur se rétablit. Le « sorcier » passe alors en position d’ensorcelé, va voir un désenvoûteur, etc. Et ainsi de suite. La sorcellerie, c’est comme un paquet de violence, un ballon de nitroglycérine dont il faut se débarrasser au plus vite. Quand on l’a dans les pattes, on se dépêche de le balancer à quelqu’un d’autre, avant qu’il n’explose.

Beethoven, Bach, Mozart, ou... Rosemary Brown ? Un reportage de Joël André

Liszt. Chopin, Schubert, Beethoven, Bach et Mozart, Schumann, Berlioz, Brahms, Rachmaninov, Grieg, Debussy et Stravinsky. La mort a-t-elle vraiment mis fin à l’activité créatrice de ces treize compositeurs ? Sont-ils, au contraire, à l’origine des œuvres musicales que produit par centaines, depuis 1964, le médium britannique Rosemary Brown (1916-2001) ? Dérision, indifférence, méfiance. Enquêtes. Expertises, recours à l’ordinateur. Et peu à peu, à partir de 1968, une partie de la presse et de la critique musicale se font à l’idée que cette « musique de l’au-delà » pourrait bien être authentique. Car il ne s’agit pas d’expertes imitations — Rosemary Brown a d’ailleurs une formation musicale très rudimentaire — mais d’œuvres entièrement originales. Ce que l’on décèle, ce n’est pas seulement le « style » d’un Liszt, d’un Chopin ou d’un Rachmaninov, mais leur intuition et leur démarche créatrices mêmes…

La sorcellerie démystifiée? Entretien avec Louis Costel

Lorsqu’on ne réussit pas à faire face (lorsqu’on perd un enfant, qu’on a une série de malchances), il est tentant de fuir, de démissionner, de reporter la faute sur les autres. Ce sont des gens qui, s’ils n’ont pu garder une vie chrétienne vivante, ont conservé une certaine religiosité et qui, s’estimant coupables, se demandent : « Mais qu’est-ce que j’ai bien pu faire au Bon Dieu ? » Et bien sûr, si le Bon Dieu n’est pas en cause, c’est le Diable qu’on accuse.