Louis Pauwels : La distance et la sérénité

Vivre en cherchant le suprême bien dans l’égalité d’âme. Egalité d’âme en toutes circonstances dans ce monde. Egalité d’âme dans les combats. Egalité d’âme dans les chagrins et les bonheurs, les misères et les fastes de ce monde. Certainement, il y a la société, il y a la politique. Mais, ou bien je ne suis qu’un homme-dans-l’histoire, et je n’existe que par mes engagements. Ou bien ma part la plus profonde n’est pas dans l’histoire. Et, dans ce cas, je donnerai au monde, à la société, à la politique, à l’histoire ce qu’il faut bien donner. Mais à distance et sans passion. Il m’arrivera de prendre parti. Mais je douterai d’avoir raison. Il m’arrivera d’agir. Mais je douterai des fruits de l’action. Et s’il arrive que j’y mette de la passion (sait-on jamais !), il y aura encore ma part profonde qui ne se passionnera pas pour cette passion.

le professeur L.J. Delpech : Visite au Docteur Calligaris

J’ai entendu parler pour la première fois du docteur Calligaris à Tours en 1935 en lisant un livre de l’ingénieur Givelet sur les travaux de Lakovsky. L’auteur y présentait la traduction de la préface d’un ouvrage de Calligaris intitulé « la formation des sentiments dans le corps de l’homme », paru en 1934 en Italie. Dans ces deux pages le professeur italien exposait des idées extrêmement intéressantes et précises sur les rapports du corps et de l’esprit. En particulier, il admettait une correspondance entre chaque organe et une catégorie de sentiments, d’une part et d’autre part entre les sentiments et la stimulation d’une zone déterminée de la peau d’un sujet. En somme, il s’agissait d’une approche expérimentale d’un problème métaphysique bien connu, celui des rapports du corps et de l’esprit.

Milan Ryzl & Robert Amadou : Précognition, peut-on changer le futur

Toutes images sont donc en nous, tout est images, tout est en nous. Point de futur externe. Point de passé ou de présent externe. Le présent en nous, l’absence du temps. A l’extérieur, l’illusoire du temps que nous introjectons dépouillé de son illusionnisme, sans lui conférer néanmoins, et pour cause, de réalité.

Jean Néaumet : René Daumal ou la volonté de connaissance

Chez l’homme ordinaire, apprenait Daumal, c’est la personnalité qui est active, plus ou moins éveillée, l’essence passive, arrêtée le plus souvent à un stade infantile de développement. Le travail de connaissance et de transformation est séparation d’abord : séparation du réel et de l’artificiel, du subtil et de l’épais — purification ; union ensuite, union de l’essence activée, développée, initiatrice et de la personnalité pacifiée, et subordonnée à l’essence.

Louis Pauwels : Etat de conscience et la possession de soi

Toutes les traditions spirituelles disent la même chose : qu’il faudrait avoir la puce à l’oreille et se réveiller. « Éveille-toi, dormeur, éveille-toi ! » Il faut aller contre cette nature lâcheuse qui ne nous a qu’ébauchés. Contre cette nature endormeuse qui nous rend contents de si peu. « Veiller est tout. » Il faut, avec une volonté de démiurge, essayer de changer d’état. Alors se dévoile le sens de la parole sibylline selon laquelle « être, c’est être différent ».

Dr Bernard Boissier : Du « corps de vie » aux influences astrales

Les Égyptiens, les Grecs de l’antiquité, les Indiens d’Amérique du Nord, les Incas, mais aussi les premiers chrétiens, tel saint Paul, mentionnaient que l’homme était constitué d’un Corps Physique, d’un Corps psychique et d’un Corps spirituel, tripartition que l’on retrouve tout au long des Grandes Traditions de l’occident. Les mystiques et les alchimistes de l’Europe Médiévale ont tous fondé basé leurs écrits et leur enseignement sur la croyance en un monde invisible, suprasensible qui s’interpénètre dans le monde physique, le conditionne, le dirige et l’anime.

le Dr Jacques Oudot : Le concept de pluridisciplinarité ou les frontières vivantes

La notion même de spécialisation est moderne et récente ; pendant des siècles on a donné en exemple gratifiant celui qui « avait des clartés de tout », ou celui dont on pouvait dire qu’il savait tout faire ; et jusqu’à René Descartes il était encore possible à un seul homme de posséder l’ensemble de la connaissance mondiale de son temps ; l’homme curieux trouvait son plaisir dans la familiarité d’un savoir étendu et varié, et même d’un minimum de compétence technique en tous les champs de la pragmatique ; ce n’est que depuis deux siècles que l’idée se développe parmi nous d’une nécessaire spécialisation comme garantie de valeur personnelle et sociale…

Denise Greindl : Rencontre d'Henry Miller avec le Zen

La rencontre des enseignements du Zen et de Krishnamurti a été d’une importance décisive dans la vie et l’œuvre d’Henry Miller. Sa nouvelle prise de conscience le rend très heureux. Grâce au Zen, il déclare : « Ce vieux monde que je détestais est transfiguré en un monde de magie et d’enchantement, depuis que l’on m’insuffle le silence intérieur où gît l’Inépuisable. »

Ilya Prigogine : Temps, durée, devenir : La réconciliation d'Einstein et de Bergson

La notion de temps fait irruption de tous côtés. J’ai été frappé de voir comment elle a émergé au début du siècle. C’est un problème clé pour Einstein, et aussi pour Bergson. Comment leurs pensées se sont-elles développées ? Cette méditation sur le temps qui s’élabore au début du siècle prend deux formes tout à fait différentes. Le temps d’Einstein est le temps-communication. Celui de Bergson, c’est la durée, le temps intérieur. Aujourd’hui nous arrivons à une synthèse des deux, avec la notion de devenir, qui comprend à la fois temps et durée. L’insistance de Bergson sur la nouveauté, la création, a quelque chose de très moderne. Avec la notion de devenir nous englobons la nécessité et le hasard, la transparence et l’opacité. L’essentiel pour un homme de science est d’être ouvert à ce qu’il apprend…

Léon-Jacques Delpech : Mort et survie

L’homme a découvert son image le jour où il s’est penché sur un calme miroir d’eau. Que la notion de miroir eût permis à l’homme de découvrir sa personnalité comme le veut Lacan, c’est discutable mais elle est une des bases de la notion de double. Notions que d’innombrables écrivains parmi lesquels Dostoïevski et quantités d’autres dont on trouvera l’historique soit dans le livre de Ranke, soit dans celui de Stocker. Une notion corrélative est celle d’ombre, puis enfin celle de jumeaux comme celle de sosie. De toutes ces sources convergentes on a été conduit à admettre que l’homme porte en lui un ou plusieurs doubles…