Ainsi donc du voyant. Sa conscience n’est plus enfermée dans son corps. Fini le donjon de la pensée. Les murs en ont disparu, dissous dans la Lumière. Le prisonnier meurt-il une fois échappé de son cachot ? Comment le sage mourrait-il en franchissant l’enceinte mentale qui nous limite ? Il est libre, il est illimité, il n’a plus de limites ni dans l’Espace ni dans le Temps. Et si nous continuons de lui voir un corps devant lequel d’aucuns tiennent à se prosterner, nous devons comprendre que ce corps est en lui, à l’inverse du nôtre où nous sommes pour le moment détenus. C’est là, probablement, la chose la plus difficile à comprendre. Ce renversement des structures de l’être qui fait que l’intérieur passe à l’extérieur, et l’extérieur à l’intérieur, est pour notre raison plus improbable encore que les mondes d’au-delà. Et pourtant, c’est à partir d’une telle métamorphose que nous ont parlé les plus grands Inspirés. Et c’est parce que nous ne pouvons en saisir le mécanisme que nous nous méprenons sur le sens de leurs paroles. Leur expérience a cessé de ressembler à la nôtre. Et le plan où ils vivent n’a que de lointains rapports avec celui de nos jours.
Archaka : Bénédiction de l’abîme : Livre I
