Jacques Ardoino : L'éducation minuscule ou la pédagogie à fonds perdu

Hors de ces péripéties, tenant lieu d’essentiel, l’éducation se contente du statut médiocre que lui assignent nos sociétés. Sans doute pour être finalement plus « domesticatrice », selon l’expression de Paolo Freire, l’économie attend d’elle des tâches ancillaires, serviles, autrement dit : une fonction « domestique ». Il n’y a pas et il n’y aura sans doute jamais de « Prix Nobel » de l’éducation. Il y a peu de politiciens de métier, ayant quelque talent, prêts à consacrer du temps et de l’énergie à ce travail herculéen. Peu importe si, parallèlement, le gâchis social s’accroît, au fil des décennies ; si les problèmes éducatifs rebaptisés pour la circonstance : « problèmes de civilisation » (délinquance, violence, toxicomanies, prosti­tution, etc.) s’accumulent et sont confiés, pour être commémorés plutôt que traités, à des commis ad hoc (M. « Drogue », Mme « Prostitution », etc.) ; si des pays technologiquement avancés comme le nôtre se retrouvent finalement en état de désalphabétisation croissante.

Le paradis est l'enfer du sage, entretien avec Faouzi Skali

Le cœur ne désigne pas seule­ment le cœur organique mais aussi le centre subtil de l’être, celui qui reçoit la connais­sance et donc Dieu. Un texte dans lequel Dieu parle rappelle : « ni mon ciel, ni ma terre ne peut me contenir mais je suis tout entier conte­nu dans le cœur de mon servi­teur ». Mais on parle aussi de l’œil du cœur. Dans tout le langage coranique, l’intelligence est l’intelligence du cœur, y compris dans le discernement. Alors que dans le monde moderne le mental, le cœur et le domaine spirituel sont séparés.

L'Esprit dans la Matière, entretien Jean Charon et Christine Hardy

En fait, Newton n’était pas aussi rationaliste qu’on voudrait le faire croire : il a écrit autant sur l’alchimie et sur le divin que sur l’optique et la gravitation. Ainsi, il distinguait deux sortes de lumières : la lumière phé­noménale qui faisait l’objet de son optique et la lumière nou­ménale qui devait jouer un rôle dans la pensée et dans les phé­nomènes du vivant, un rôle fondamental, donc. Or il est très curieux de voir ce que l’on formule maintenant dans le cadre d’un rapprochement entre l’esprit et la physique : que précisé­ment dans les particules qui sont porteuses d’esprit, c’est-à-dire les électrons, cet esprit lui-même est porté par la lumière. Les électrons que l’on étudie en physique ont des caractéristiques spirituelles, et cela parce qu’ils sont de véritables micro-univers, tout semblables à notre immense univers, mais enfermant un espace et un temps particuliers où les phénomènes évoluent en allant vers l’ordre, au lieu d’aller vers le désordre, comme c’est le cas dans notre univers observable.

Le tissu relationnel humain, entretien Christine Hardy et Fritjof Capra

L’esprit n’est pas une substance ou une force, mais un ensem­ble de processus caractéristique des êtres vivants. Dans cette optique, l’esprit existe bien avant le système nerveux et le cer­veau. Même une cellule montre un certain phénomène de menta­tion, une certaine activité mentale que l’on peut définir assez rigoureusement dans le cadre de la théorie des systèmes. En fait, cette activité mentale est l’essence même de la vie. Chaque fois que l’on rencontre des structures vivantes, elles manifesteront cette activité mentale. Bien sûr, ce n’est pas une activité mentale complexe comme lorsque nous parlons, c’est très primitif au début, mais cela croit en complexité et on abou­tit à l’esprit humain.

Pourquoi la science est née dans l'Occident chrétien ? Entretien avec Pierre Chaunu

En définitive, tout ce qui est fondamen­tal se passe une fois dans l’histoire de l’humanité. Le XVIIe siècle, dans sa nova­tion, est à l’instar de ce qui s’est produit il y a quelque dix mille ans. Là aussi avait émergé quelque chose de fondamental. Cette fois là, la chose s’était produite dans un coin qui est à cheval entre la Syrie, le Liban et éventuellement un petit morceau du plateau d’Anatolie. C’est là que l’on a fait pousser le premier grain de blé. Encore une fois, c’est dans cette chré­tienté occidentale, selon un axe qui passe du Nord de l’Italie au Sud de l’Angleterre, un petit peu à droite et un petit peu à gauche, que s’est produite cette rupture définitive. Or, cette émergence radicale est en relation profonde avec deux traits substantiels de la pensée chrétienne. La pre­mière c’est l’idée de Création. Je dois cons­tater que lorsque la science est née, elle est née dans un monde où existait cette idée étrange. La Création, c’est elle qui permet la constitution d’une connaissance qui ne soit pas globale ni ontologique, bref une connaissance qui n’ait pas la prétention d’expliquer la racine de l’Être.

Élisabeth Andrès : L'enseignement de demain

L’éducation doit s’appuyer sur les vertus communes des enfants, leur faculté d’émotion, d’enthousiasme, d’amour (on ne peut séparer en eux intelligence, curiosité et affectivité), leur faculté d’intérêt non pas sous la forme d’une réussite codifiée, préalablement définie, visiblement ren­table, comme l’exige l’adulte, mais dont le critère est d’avoir compris quelque chose et d’y trouver du bonheur.

Jean-Rémi Deléage : La logique des niveaux

On a parlé le plus souvent en sciences humaines (et même physiques) d’« effet d’expérimentateur » quand ce dernier, pour étudier un phéno­mène, lui fait correspondre un modèle descriptif en énonçant des lois de comportement, issues d’inférences partiales. Il y a là expérimentation de façon orientée, subjective, ce qui modifie, voire fausse les résultats. Or comme on l’admet aujourd’hui, même l’acte d’observer qui se veut passif oriente le résultat dans un sens précis. Tout observateur observe à travers lui-même et sa structure nerveuse humaine. Tout schéma perceptif en est tributaire, et l’on trouve le plus souvent sur le terrain ce que l’on y a apporté.

Henri Go : Célestin Freinet, l’éducation selon la vie

On constate à quel point la visée de Freinet est AUTRE que toutes les visées communes en matière de « pédagogie ». On est confronté ici à une prise en compte globale de l’être : matériel (physique, psychique) et spirituel. C’est en fait que Freinet porte son attention sur ce qui peut opérer l’UNITÉ en l’individu, ce qui est partout dans les manifestations extérieures, ce qui n’est nulle part au plus profond : le principe énergétique. Ce principe est beaucoup plus que ce que la psychanalyse pourrait nommer, il dépasse aussi largement ce qui serait comme une « conscience de classe » chez les enfants du peuple… Il est cela, mais il est plus que tout cela : Freinet le nomme la vie. La vie cherche sa réalisation. C’est le principe. Toute la réalité extérieure n’est que le décor ou le prétexte du processus.

René Fouéré : Spiritualité et parapsychologie

Plusieurs d’entre eux furent, en certaines cir­constances, très péniblement affectés par ces forces inattendues et importunes, sinon indési­rables, qui, se manifestant en eux ou par eux, faisaient de leur personne un objet de curiosité, venaient les distraire ou les détourner, en quelque sorte, de leur recherche essentielle et risquaient de les faire trébucher sur le chemin simple et direct de leur accomplissement, ce che­min central et vertical qu’on voit sur le dessin de saint Jean de la Croix illustrant son livre La Montée du Carmel. Comme ils n’avaient nulle soif de l’empire de ce monde, les prodiges dont ils étaient l’objet ou la cause involontaires leur apparaissaient, au regard de leur entreprise cru­ciale, comme une sorte de divertissement futile ou comme le masque séduisant d’une tentation de puissance susceptible de compromettre ou même de ruiner irrémédiablement tous les résul­tats de leurs efforts antérieurs. Ils pouvaient voir encore dans ces phénomènes, par lesquels ils étaient parfois jetés dans un très cruel embar­ras, les brillantes scories de cette fusion de leur être qui devait les amener à leur transfiguration spirituelle.

Louis-Marie Vincent : Champ morphobiotique – Structure invisible de l'être humain

Je dirais pour conclure que le champ morphogénétique ou morphobiotique tel qu’il vous a été exposé ressemble furieusement à la définition de l’âme que donnait Saint Thomas d’Aquin : Anima Forma Corporis, l’âme est la forme du corps… cette forme que vient remplir une matière. Il est significatif qu’à l’heure où la physique tente de découvrir l’esprit, la théologie catholique tend à retrouver la tradition juive, laquelle n’a jamais considéré l’âme comme strictement immatérielle. Bien entendu, les ressemblances avec d’autres termes tels que : aura, corps éthérique, mots qui nous sont familiers, ne sont pas fortuites.