Cependant, tout en s’attachant à démonter les mécanismes du comportement individuel et social de l’homme contemporain, Gurdjieff remet à sa juste place ce qui obnubile tant le praticien des sciences humaines, à savoir le progrès technique, industriel avec ses aléas, ses succès ou ses crises. Il ignore ou lacère les élucubrations théoriques, il pulvérise les apparences. Son histoire de l’humanité se veut essentielle. Que ce soit dans la fresque ou dans le détail, en plan d’ensemble ou en gros plan, elle se situe au niveau des causes originelles. Qu’il s’agisse de faits mondiaux ou de faits divers, quel que soit l’angle d’attaque, la variation du ton – depuis l’injonction solennelle jusqu’à la farce, jusqu’au canular – Gurdjieff s’attache à certains événements, parce qu’ils entrent dans le champ d’une information créatrice.
Catégorie : E-F
Je suis de Sri Nisargadatta Maharaj

Le banyan a une très petite graine, la conception de cet arbre immense est contenue dans cette graine si petite, potentiellement l’arbre est dans cette graine. Allez-vous étudier et planter chaque racine, chaque branche, chaque feuille du banyan ? Non, vous ne vous occuperez que de la graine, vous planterez la graine. Quelle est votre graine ? La connaissance « Je suis ». Cette connaissance est le lien entre vous et ce monde. Examinez cela, scrutez cela. C’est à ce niveau que peut se résoudre tout le problème. Si cette conviction « Je suis » n’est plus là, quel souci peut vous causer le monde ? Cette graine est donc le facteur essentiel. Ce sens du « Je suis », scrutez-le, fouillez-le, ce n’est qu’à ce niveau que vos investigations peuvent aboutir.
Léonel Beudin : Le point : la matérialisation du néant ?
Dans cette étude nous avons essayé, au contraire, de ne faire appel qu’aux faits réels et de ne suivre que ce qu’indique le bon sens, ce vieux bon sens, si décrié actuellement. La logique permet beaucoup de choses. Elle ne porte pas de jugement sur les prémisses qui lui sont fournies. Quelle que soit leur nature, elle en tire des conclusions, paradoxales ou non, avec la plus grande sérénité. Le bon sens est plus pointilleux. Il permet beaucoup moins d’envolées et se fait souvent juge, ce qui le fait considérer comme un frein. Il nous a cependant conduit, dans les pages suivantes, à certaines idées que nous pensons plus saines et qui apportent des réponses plus naturelles aux questions précédentes. Il nous a permis aussi de mieux comprendre les liaisons existant entre l’étendue et les objets qu’elle contient.
Patrice Godart : Champs de cohérence et yoga
Mais il existe aussi un autre mental, plus intérieur, plus profond, qui n’est plus conditionné par l’ego, l’ambition, la vanité, le désir personnel, un mental réceptif, capable de se taire et d’écouter, de s’adapter, de s’élargir et de s’enrichir sans qu’aussitôt il ne se gargarise de sa propre importance. Il travaille dans la nuance, dans la subtilité, cherche à établir toujours de nouvelles relations, se contente souvent de frôler des essences psychiques, comme dirait J. Ravatin, sans aussitôt vouloir les annexer et les mettre en repères. Il sait se mettre à l’écoute, en silence, veille avec soin sur ces effluves d’un autre monde pour qu’elles pénètrent en lui et fécondent mille sensations et pensées qui deviendront à leur tour les germes d’autres expériences et d’autres sensations. Il aime se fondre dans l’objet qu’il interroge et vivre au cœur des êtres et des choses quand d’autres se contenteraient d’un survol rapide à la surface. Pour lui, la diversité du monde ne constitue pas un fardeau de compilation, mais une voie d’enrichissement, de relations illimitées et la source d’une joie toujours renouvelée devant le mystère d’une unité infiniment morcelée et cependant toujours inaltérable.
Olivier Clouzot : Paramètres et lois de la protoanalyse

En prenant conscience de cette présence des fixations dans l’individu et dans l’espèce, nous pouvons à la fois élargir le champ de nos possibilités et acquérir plus de tolérance vis-à-vis de nous-mêmes et vis-à-vis des autres. En apprenant comment fonctionnent des fixations qui nous sont moins spontanément familières, nous voyons en effet s’élargir le clavier de réponses aux différentes situations de la vie – et nous pouvons jouer sur ce clavier. En identifiant chez les autres des comportements auxquels nous avons aussi recours, nous dédramatisons des relations humaines qui sont généralement pour nous la plus grande source d’angoisse et de souffrance. Cette dimension théâtrale de la vie quotidienne peut opérer des miracles : elle réintroduit le jeu et l’humour, ouvre des portes de tendresse et de compassion qui restaient bloquées à cause de notre attitude conflictuelle et crispée par rapport à l’existence.
Daryush Shayegan : Le réel est toujours ailleurs

La Tour de Babel devient une réalité non seulement en ce qui concerne les langues — encore que là aussi nous ayons des problèmes quasi insolubles — mais les mentalités. Délire religieux, obsession révolutionnaire, émancipation des femmes, régression vers des utopies de plus en plus fumistes, guerre des étoiles, résurgence des croyances obsolètes, se côtoient les uns les autres dans un kaléidoscope d’opinions, de croyances, et de visions du monde où personne ne sait de quoi il parle, ni quelles sont les prémisses qui fondent tel discours politique plutôt que tel autre. Alors que les souhaits et les espoirs renvoient aux croyances les plus émotivement chargées d’antiques traditions, les structures conceptuelles aptes à les articuler restent celles-là les rejetons les plus tardifs et les plus monstrueux d’une modernité incomprise. L’entre-deux devient en quelque sorte la norme de la vie ; on essaie de comprendre, d’analyser, mais à force d’expliquer les détails et les motivations coupables de part et d’autre, on rate l’essentiel ; à savoir les ruptures historiques qui ont fait de l’Occident un bastion de la modernité et des autres civilisations du monde de grands monuments du passé.
Hubert Reeves : Vérité et conception du monde

L’erreur fondamentale, c’est précisément de penser qu’au niveau de l’interprétation, on peut arriver à une vérité générale en fait, chacun a sa vérité, qui est la bonne pour lui. C’est sa vie, c’est sa façon de vivre, et c’est très important que cela soit développé. C’est son parcours intérieur — dont il aura besoin quand il devra prendre des décisions, puisque notre vie est telle que nous sommes sans cesse confrontés à des situations dans lesquelles nous devons prendre des décisions morales devant la souffrance.
L'homme à l'écoute du cosmos, entretien Alfred A. Tomatis et Christine Hardy

Pour moi, je crois que nous sommes en train de développer délibérément une psychologie de la haine, qui est à l’inverse de la progression et ceci au bénéfice de quelqu’un. Ce quelqu’un, c’est une même synarchie qui dirige tout à l’envers. Les gens n’arrivent jamais à atteindre un plan assez haut pour se rendre compte que celui qui suscite les guerres militaires, de religion ou de partis fait partie d’une même synarchie. Et notre travail c’est de l’éviter. Plus vous chercherez une vérité, plus vous aurez cette synarchie aux trousses. Et nous devons être frappés d’humilité. Je pense qu’à tout moment nous devons nous rappeler que nous ne sommes rien : 80 % d’eau… et quelques sels minéraux. Mais nous devons aussi nous rappeler que nous sommes un rien qui écoute.
le Dalaï Lama : "La connaissance ne peut ignorer la science"

Le bouddhisme a une perception de la réalité du monde qui nous entoure toute différente des hommes de science, des rationalistes. Les choses, les êtres, ont à nos yeux une existence apparente qui nous empêche d’accéder à la connaissance ultime. Prenez cette table. Si l’on cherche à connaître réellement l’objet désigné — la table elle-même — c’est impossible. Si je démonte la table, si j’analyse les qualités de la matière table, si je la décompose, je ne trouverai jamais le tout qu’est la table. En fait, nous faisons, directement en nous, la distinction entre le Tout et les éléments du Tout, de telle sorte que chaque chose nous apparaît comme étant un Tout ou l’élément d’un Tout. En réalité cela n’est pas. Cela ne veut pas dire que la table n’existe pas. Nous l’utilisons bien, nous la fabriquons. Ce mode d’existence-là est conventionnel.
Kyudo: La voie de l'arc, entretien avec Jacques Normand
Héritiers de l’art millénaire des archers chinois, les Japonais l’ont transmuté en une profonde Voie de développement spirituel : le Kyudo, la Voie de l’arc. Fortement marqué de l’empreinte des enseignements Zen et Shinto, le Kyudo demeure actuellement l’Art traditionnel le moins dévoyé, le plus proche de l’esprit du Budo, la Voie du samouraï.