Joël André : La science au verso

[…] d’où vient que popu­lairement, le « c’est scientifique » ait ce sous-entendu (ou pouvoir supposé) de mettre fin à la discussion ? Sans doute d’une naïveté propagée par un discours second de la science, l’épistémologie : dis­cours sur la science ou science de la science, selon les prétentions. Longtemps appuyée sur une histoire de la science monolithique, volontiers « laïque et obligatoire », elle a imposé universitairement pendant des décennies une vulgate dont le public a gardé cliché. La science, au fond, comme une galerie de « machines à raisonner iso­lées sur des socles de marbre » (Koestler).

Henry P. Stapp : Conscience et valeurs dans l’univers quantique

La théorie quantique de la conscience, même si elle se trouve encore dans une phase de formulation rudimentaire, est de loin plus naturelle que les approches fondées sur la physique classique. Dans la physique classique l’activité cérébrale est décrite par une collection de variables spatio-temporelles. Par conséquent, une relation entre l’esprit et la matière demande une relation entre des notions totalement dissemblables : une collection de nombres représentant les mouvements des billions de particules est identifiée à une pensée consciente unifiée. Mais la physique classique est essentiellement réductionniste et n’a pas de place naturelle pour des entités holistiques. De plus, l’aspect de « contrôle », qui est l’essence même de la conscience, n’est pas compatible avec la physique classique ; le cours des événements, tel qu’il est décrit par la physique classique, est exactement le même en présence ou en l’absence de la Conscience.

Roger Foucher : S'émerveiller

Et si relativiser, quantifier les représentations à la Newton et à la Boltzmann était associer, réassocier image et son monde dit extérieur et monde dit intérieur, disjoints par eux, au niveau des images mentales et « pour de vrai » ? Et si c’était ne plus séparer : comprendre, percevoir, sentir et être ? Et si c’était commencer d’aimer ce qu’on disait voir, entendre, c’est-à-dire vivre un début d’écologie généralisée qui n’exclurait plus ce qu’on disait le « vide… » et l’inconscient.

Charles Hirsch : Vers une nouvelle conception du réel?

L’idée fondamentale de Bohm est que la réalité ultime, primordiale, constitue une unité par principe indissociable, que la science courante brise en morceaux — les objets — pour la reconstituer ultérieurement et artificiellement. Pour prendre une image simple, supposons que l’univers soit représenté par une poterie et que, pour l’étudier, nous la cassions, en étudions séparément les morceaux, puis recollions ceux-ci pour reconstituer approximativement la poterie : telle est la démarche scientifique habituelle, qui nous fait procéder localement, de proche en proche, mais non globalement. Une telle science, selon Bohm, ne peut découvrir les lois physiques primordiales.

D'où venons-nous? Que sommes-nous ? Où allons-nous? entretien avec Robert Anton Wilson

Tout ce que Nietzsche a attaqué — les idées politiques et religieuses qu’il s’est efforcé de ridiculiser et de mettre en pièces — sont des tentatives pour définir ce que nous sommes et nous maintenir à notre place. Il a essayé de les ébranler pour que nous prenions conscience de ce que nous sommes, de ce que nous devenons et pour nous ouvrir des possibilités. Il était tout à fait disposé — comme moi — à faire entrevoir des possibilités effrayantes, simplement pour faire penser les gens.

Daniel Verney : Quelques hypothèses de recherche à propos du psychisme dans le monde et dans l'homme

La première révolution copernicienne – celle de Copernic – n’a pas consisté uniquement (comme on le répète trop souvent) à remplacer une conception « fausse » du monde physique (centrée sur la Terre) par une conception « vraie » (centrée sur le Soleil), mais à relativiser le géocentrisme de sorte qu’il devint insoutenable en tant que dogme et qu’il apparut enfin comme ce qu’il était, c’est-à-dire un point de vue. Point de vue privilégié, certes, puisqu’il est jusqu’à nouvel ordre celui auquel nous oblige notre situation d’hommes sur la Terre, mais justement point de vue sur une réalité qui n’est pas centrée sur ce point : nous, ou moi.

Le monde comme réseau de relations entretien avec Fritjof Capra

Il n’y a pas de haut et de bas, il n’y a pas de concept plus fondamental que les autres… Le monde est perçu comme un réseau où toutes les parties dépendent des autres parties et aucune n’est plus fondamentale que l’autre. Cette vision nous fait très peur parce qu’elle est très différente de notre tradition scientifique, intellectuelle, philosophique. Mais c’est la vision dominante dans des traditions telles que le Bouddhisme ou le Taoïsme ; beaucoup de traditions mystiques de l’Orient l’ont. C’est ce changement du bâtiment au réseau qui est en train de se produire maintenant.

Oïkos : Klimax

Mais pour qui cherche à la comprendre dans sa maturation historique, son déchaînement actuel, et jusque dans ses tenants et aboutissants, La-Crise économique n’est qu’un détonateur : voyons plutôt du côté de la poudrière. Répercutée à l’instant même par nos moyens de communication, elle frappe à des degrés divers tous les habitants de la terre. Alimentée par l’équation fondamentale de notre physique — l’équivalence fulgurante de la masse et de l’énergie — elle peut en effet faire sauter la planète. Et cette accumulation d’explosifs est comme le symbole d’une humanité qui, ne trouvant plus de limites à son avidité d’avoir, finit par y perdre son être.

Theodore Roszak : Le vol visionnaire expérience et symbole

Mais objectiver la gravitation, c’était la séparer de l’expérience qui lui a millénairement donné son sens. Tout comme la chute des corps, la gravitation ne pouvait plus être rattachée symboliquement à une signification religieuse. Cela donna un caractère étrangement abstrait au débat scientifique sur la gravitation — Newton lui-même s’en inquiétait. Il pouvait formuler mathématiquement la gravitation comme un comportement des choses dans la nature. Mais il ne pouvait s’empêcher de se demander si ce comportement qu’il avait si ingénieusement mesuré ne devait pas avoir quelque réalité substantielle, une base plus solide que celle des mathématiques. Qu’était la gravitation en dehors d’une équation algébrique ?