Mais la pensée ne se divise pas, ses éléments ne s’évanouissent pas; ils concourent tous à son évolution continue et se consultent encore en se mêlant pour se féconder mutuellement. Or les concepts accumulés ne se reconnaîtraient pas sans la mémoire, et la mémoire ne les retient que par le mot qui offre son symbole à l’idée à laquelle il permet de survivre. Le mathématicien qui pense en dehors de la réalité apparente et qui dénude les concepts à mesure qu’il les rationalise, économise son effort en un langage concentré que le philosophe essaye d’imiter, sans pouvoir éviter les définitions que la précision risque au contraire de prolonger au delà du champ permis à l’entendement. Il lui faudra pourtant les emporter avec lui avant de s’engager dans une méditation préparée, où les mots s’élargiront progressivement pour libérer la pensée pure dont ils auront été les auxiliaires nécessaires.
Catégorie : E-F
Le mandat céleste de l'homme primordial, un entretien avec Jean Hani
Le roi doit, sur un autre plan que l’autorité spirituelle, mais en accord avec elle, aider l’homme à réaliser sa destinée la plus haute. Et ceci va très loin : il s’agit, en principe tout au moins pour tous, et, à coup sûr, pour une élite, de permettre aux membres de la communauté d’atteindre l’état d’«homme parfait», c’est-à-dire, en somme, de récupérer, autant que faire se peut, l’état de l’homme primitif. Le sens final de la royauté, c’est ce qu’on peut appeler la «royauté intérieure» : l’homme est appelé à retrouver, je le répète, l’état primitif, dans lequel il était, par la volonté divine : «roi de la création», «roi du monde», appelé à régner sur le monde mais en régnant d’abord sur lui-même; c’est ce que l’on peut appeler son «mandat céleste».
Henri Atlan & Jean-Pierre Dupuy : Amour, violence, différences
La différence et la non-différence jouent un rôle clé dans l’œuvre et la pensée de René Girard. Il ne s’agit pas simplement de considérations théoriques sur l’origine de la société ou l’interprétation du message des Évangiles. Face à la violence de plus en plus généralisée du monde contemporain, ses réflexions débouchent sur des perspectives qui nous concernent tous. Henri Atlan et Jean-Pierre Dupuy les ont exposées et commentées au cours d’un débat organisé par l’AFCET (Association Française de Cybernétique Économique et Technique) en novembre 1978, dans le cadre du groupe « analyse de système » animé par Jean-Pierre Dupuy.
le Dr M. Engelson : L'Inversion
C’est là que réside la différence fondamentale entre l’ « animal » (qui ne « se voit pas », au sens métaphysique du terme, — qui n’a pas la « conscience de conscience »), entre l’ « homme » (qui « se voit dans le miroir », donc qui croit se voir, mais qui ne perçoit que son image inversée et, par conséquent, factice : « Maia », à laquelle il manque de surcroît une « dimension », du fait de l’inversion subie), enfin le « surhomme » (qui se voit en « réel », dans l’absolu, c’est-à-dire intérieurement, en lui-même, et non extérieurement dans un miroir), réalisant ce stade ultime d’inversion, dont Abellio a donné une si fulgurante analyse.
Du bon usage de l'Apocalypse. Un entretien avec Jean Biès
J’ai constaté depuis longtemps que de nombreux auteurs s’appliquaient à dénoncer l’époque que nous vivons, mais qu’il y en avait fort peu pour proposer des solutions à nos problèmes. Une fois admise la doctrine du temps cyclique situant l’humanité dans une phase inversée et caricaturale de son histoire, il s’est agi pour moi de répondre à la question: Que faire en une telle conjoncture, comment l’assumer aux moindres frais et souffrances possibles ?…
Hélène Barrère : L'éducation et le chemin de la sagesse, connaissance de la vie intérieure
Ceux qui soutiennent la notion d’incompatibilité entre la Sagesse et notre civilisation occidentale pensent que la Sagesse n’est pas adaptée à la modernité car elle ne peut se trouver que dans le retrait du monde. C’est faire peu de cas de la dimension de profondeur chez l’être humain ! Quand il veut se retirer du monde, l’homme peut aussi se « recentrer » en lui-même. Certes, il se doit d’être particulièrement vigilant aujourd’hui, car il n’a pas devant lui le modèle du « Sage », comme il a celui du « Businessman », de « l’athlète » ou du « Jeune cadre dynamique », tous tournés vers le monde extérieur… Mais on voit mal pourquoi l’occidental d’aujourd’hui ne pourrait pas tourner son regard à l’intérieur de lui-même !
Au-delà du scientisme, Au-delà de l'occultisme Entretien avec René Alleau
Il ne s’agit pas ici de littérature, mais de l’art par excellence, de « l’art des arts », de l’art de vivre. Vous pouvez constater que c’est aussi le seul qu’aucune université n’enseigne à personne alors qu’il est le plus nécessaire à tous. On éveille une élite intellectuelle à tous les doutes, mais on ne donne à son paléo-psychisme aucune certitude profonde. Et l’on s’étonne de l’aggravation constante de l’angoisse et des troubles mentaux de nos contemporains ! Ce serait plutôt leur équilibre et leur santé qui constitueraient des phénomènes proprement miraculeux. Le fait que tant de jeunes gens cherchent désespérément des issues du côté des sagesses orientales, souvent mal comprises, des mysticismes aberrants ou des drogues les plus redoutables suffit, me semble-t-il, à condamner sans appel toute la pédagogie occidentale contemporaine.
Jean-Charles Pichon: Il s’agit de renverser les croyances
Les dieux sumériens, les dieux tauriques ont tendu à une plus grande universalisation que les dieux géméliques et ils sont arrivés à l’universalisation par cette idée de création qui est quand même commune à tous les hommes ; Jehova, Brahman, et les dieux de justice ont tendu à aller plus loin dans la pénétration de l’humanité et ils y sont arrivés en restreignant la cité à la tribu, à la famille, au foyer. Les dieux d’amour ont encore tendu à une universalisation plus grande et ils y sont arrivés par une restriction de la tribu au couple. Actuellement, si l’on veut aller à une universalisation cosmique, on a l’impression qu’il faudra atteindre à l’individu. C’est l’individu qui doit être au niveau de l’univers, qui doit s’intégrer et se réaliser dans l’univers.
Anne Guisen : Enquêtes sur diverses tentatives d'écoles nouvelles
Que penser de la discipline, de l’effort ? Quelle est la place des valeurs traditionnelles telles que la politesse, le respect de l’adulte ? Car s’il est vrai qu’imposer, sanctionner, forcer l’enfant peut le bloquer, le rebuter, ou, à la limite, engendrer des complexes, il est tout aussi vrai que dans la vie, tout ne lui sera pas permis et il sera également soumis à des limites et des contrariétés. La vie adulte exige des efforts et engendre des frustrations, des échecs, des déceptions. Sans être disciples de Rousseau, nous pensons que l’être humain possède au départ un potentiel positif et négatif. C’est l’éducation et l’influence du milieu qui détermineront son orientation dans un sens ou dans l’autre.
Micheline Flak : Recherche sur le yoga dans l'éducation
Aujourd’hui, les enseignants ont pour lourde tâche de faire entrer dans la tête des élèves des programmes de plus en plus chargés. Or, que fait-on pour perfectionner l’écoute et la mémoire ? Rien. On serine aux enfants : « Mais faites donc attention ! », leur a-t-on appris à se rendre attentifs ? Ils en auraient grand besoin, car la dispersion mentale grandit de rentrée en rentrée. Alors, on voudrait les obliger à se « concentrer ». Les yoguis sourient, car ils savent que la capacité de concentration ne se déclenche pas au doigt et à l’œil. Bien sûr, il y aura toujours des gens pour vous dire qu’ils ont appris tout seul, à nager. Comment ? En se jetant à l’eau.