La plupart des objets communs et quotidiens sont de véritables extensions de la personnalité. Ils jouissent lentement et silencieusement — à notre insu — d’une vie propre, mais nous ne pourrions nous en défaire sans perdre, personnellement, une part de la magie qu’ils détiennent…
Catégorie : M
Aimé Michel : Le théorème de Bell
Le théorème de Bell démontre que l’existence d’objets distincts dans l’univers physique est une illusion [Plus exactement, il fait une prédiction que l’expérience permet de réfuter, montrant que l’existence d’objets distincts est une illusion (Bell savait d’avance qu’il en serait ainsi)]. Par « distincts », il ne faut pas seulement entendre « discontinus », ma feuille de papier n’étant pas le même objet que ma main, etc. : il faut entendre que ce qui peut nous apparaître comme objets infiniment éloignés et sans relations réciproques, par exemple cette étoile et mon œil, en réalité, ne sont pas séparables, qu’ils n’ont pas une localisation telle que l’un est ici, l’autre à des milliards de milliards de kilomètres.
Alain de Benoist : Les dédales du labyrinthe
On a proposé bien des interprétations du labyrinthe : représentation rituelle d’une épreuve initiatique, figuration de l’univers, de la terre, des enfers, symbole des entrailles humaines liées à la divination, « maison » où la Terre-Mère accomplirait chaque année son union sacrée (hieros gamos) avec le Père céleste, etc. On a souligné aussi le fait que le labyrinthe reprend et amplifie le thème de la caverne, qui semble avoir joué un rôle dans la religion depuis le paléolithique. D’autres auteurs ont vu — à plus juste raison — dans le labyrinthe l’« aboutissement » d’un dessin de spirale.
Aimé Michel : L'illumination ou l'œil de l'esprit
Comment l’homme est-il devenu, au moins partiellement, maître de ses représentations, c’est ce que nous ignorons. Mais le préhistorien suit au fil du temps la naissance de cette maîtrise, qui fut longue. Ramasser une pierre qui traîne et la tailler, c’est faire aussi bien que le pic épeiche qui taille une pièce de bois pour y caler sa noix et l’attaquer avec son bec. Aller chercher au loin une certaine qualité de pierre pour en faire plusieurs outils qu’ensuite on portera sur soi, cela suppose la représentation libérée qui est le propre de l’homme. Avant d’aller chercher cette pierre, il a fallu imaginer une longue série d’actes sans en faire aucun.
Jean Markale : Vivre le paganisme
En fait le paganisme n’est jamais mort, puisqu’à partir du moment où le christianisme vainqueur a cru l’éliminer, il est demeuré comme un substrat, comme une pensée parallèle, toujours prête à surgir de l’inconscient. Le paganisme, ce n’est pas l’absence de Dieu, l’absence de sacré, l’absence de rituel. Bien au contraire, c’est à partir de la constatation que le sacré n’est plus dans le christianisme, l’affirmation solennelle d’une transcendance.
Ma Anandamayi : Matri Vani
Le sentiment d’une frustration ne se déclare-t-il pas parce que l’objet désiré n’est pas obtenu ? Quand le désir de quelqu’un reste inassouvi, sans fruit, il est assurément futile de continuer à solliciter la même chose et d’être encore et encore désappointé. Aussi longtemps que persiste le désir, l’impression de frustration et le chagrin ne sont que naturels du point de vue de ce monde. Quoique vous puissiez désirer dans ce monde toujours changeant, vous n’en recevrez que du chagrin, même si un bonheur momentané peut parfois être obtenu. Cherchez CELA en quoi il n’y a aucune souffrance et en quoi tout est obtenu, c’est là le seul devoir de l’homme.
Aimé Michel : L'espace silencieux
la vie une fois apparue évolue-t-elle forcément vers l’intelligence ? Là encore, on ne dispose que d’un cas particulier, mais lui aussi très fort : c’est qu’il y a eu sur la Terre, à plusieurs reprises, plusieurs lignées contemporaines montant vers l’intelligence de type humain. C’est ainsi, par exemple, que l’Homme de Neandertal, étranger pourtant à notre lignée, n’en est pas moins un Homo sapiens. L’Homo sapiens est apparu au moins deux fois.
Odile le Gall : Les rites funéraires: étranges mais signifiants
Il est une pratique qui demeure très vivace dans de nombreux pays, c’est celle des offrandes —offrandes de tous genres : céréales, objets familiers du mort, parfois même de l’argent, des animaux sacrifiés. Jadis, même des humains étaient immolés. En effet, lorsqu’un Inca mourait, des jeûnes rituels, des chants funèbres, des processions avaient lieu et certaines de ses femmes étaient enivrées puis étranglées pour l’accompagner dans l’autre monde…
Aimé Michel : Le crépuscule du matin
On souffre toujours, on meurt toujours seul. Tout se partage, sauf la douleur. L’être le plus tendre et le plus aimé ne peut, quand vous souffrez, que se pencher sur vous et se tordre les mains. Tout son amour ne vous soulage de rien. Et parce que c’est là un état de violence contraire à notre condition et la douleur un désordre, tout patient est à la fois un peu moins et un peu plus qu’un homme, un peu moins par la privation qu’il endure, un peu plus par tout ce qu’il découvre en lui-même d’inconnu en se débattant. L’homme bien portant est un prisonnier paresseux qui rêve sur sa paillasse, ignorant qu’il est en prison. Mais que la prison prenne feu et le paresseux va pour la première fois frapper de son front et palper de ses mains le mur enfin découvert, à la recherche d’une issue.
Aimé Michel : Les sectes : Les religions parallèles
Le « retournement » psychique du chien de Pavlov s’obtient par des moyens qui n’honorent guère la sensibilité de l’expérimentateur : jeûne, sévices divers, stimuli contradictoires et incompréhensibles affolant l’intelligence et l’instinct de l’animal. Ce sont des moyens à la mesure du chien. Les épreuves des soldats observés par Sargant étaient en partie à la mesure du chien qui est en l’homme, et en partie à la mesure de l’homme. Les « retournements » observés se situaient au niveau des épreuves endurées. Dans le cas d’épreuves uniquement physiques, le soldat subissait des névroses plus ou moins « animales ». Les épreuves morales entraînaient des désordres plus typiquement humains, plus profonds, ou, si l’on préfère, d’un niveau plus élevé. Ainsi il semble que la « conversion » se situe au niveau où on la provoque et où l’être qui la subit est capable de la vivre.