C’est là que réside la différence fondamentale entre l’ « animal » (qui ne « se voit pas », au sens métaphysique du terme, — qui n’a pas la « conscience de conscience »), entre l’ « homme » (qui « se voit dans le miroir », donc qui croit se voir, mais qui ne perçoit que son image inversée et, par conséquent, factice : « Maia », à laquelle il manque de surcroît une « dimension », du fait de l’inversion subie), enfin le « surhomme » (qui se voit en « réel », dans l’absolu, c’est-à-dire intérieurement, en lui-même, et non extérieurement dans un miroir), réalisant ce stade ultime d’inversion, dont Abellio a donné une si fulgurante analyse.
Catégorie : E-F
Du bon usage de l'Apocalypse. Un entretien avec Jean Biès
J’ai constaté depuis longtemps que de nombreux auteurs s’appliquaient à dénoncer l’époque que nous vivons, mais qu’il y en avait fort peu pour proposer des solutions à nos problèmes. Une fois admise la doctrine du temps cyclique situant l’humanité dans une phase inversée et caricaturale de son histoire, il s’est agi pour moi de répondre à la question: Que faire en une telle conjoncture, comment l’assumer aux moindres frais et souffrances possibles ?…
Hélène Barrère : L'éducation et le chemin de la sagesse, connaissance de la vie intérieure
Ceux qui soutiennent la notion d’incompatibilité entre la Sagesse et notre civilisation occidentale pensent que la Sagesse n’est pas adaptée à la modernité car elle ne peut se trouver que dans le retrait du monde. C’est faire peu de cas de la dimension de profondeur chez l’être humain ! Quand il veut se retirer du monde, l’homme peut aussi se « recentrer » en lui-même. Certes, il se doit d’être particulièrement vigilant aujourd’hui, car il n’a pas devant lui le modèle du « Sage », comme il a celui du « Businessman », de « l’athlète » ou du « Jeune cadre dynamique », tous tournés vers le monde extérieur… Mais on voit mal pourquoi l’occidental d’aujourd’hui ne pourrait pas tourner son regard à l’intérieur de lui-même !
Au-delà du scientisme, Au-delà de l'occultisme Entretien avec René Alleau
Il ne s’agit pas ici de littérature, mais de l’art par excellence, de « l’art des arts », de l’art de vivre. Vous pouvez constater que c’est aussi le seul qu’aucune université n’enseigne à personne alors qu’il est le plus nécessaire à tous. On éveille une élite intellectuelle à tous les doutes, mais on ne donne à son paléo-psychisme aucune certitude profonde. Et l’on s’étonne de l’aggravation constante de l’angoisse et des troubles mentaux de nos contemporains ! Ce serait plutôt leur équilibre et leur santé qui constitueraient des phénomènes proprement miraculeux. Le fait que tant de jeunes gens cherchent désespérément des issues du côté des sagesses orientales, souvent mal comprises, des mysticismes aberrants ou des drogues les plus redoutables suffit, me semble-t-il, à condamner sans appel toute la pédagogie occidentale contemporaine.
Jean-Charles Pichon: Il s’agit de renverser les croyances
Les dieux sumériens, les dieux tauriques ont tendu à une plus grande universalisation que les dieux géméliques et ils sont arrivés à l’universalisation par cette idée de création qui est quand même commune à tous les hommes ; Jehova, Brahman, et les dieux de justice ont tendu à aller plus loin dans la pénétration de l’humanité et ils y sont arrivés en restreignant la cité à la tribu, à la famille, au foyer. Les dieux d’amour ont encore tendu à une universalisation plus grande et ils y sont arrivés par une restriction de la tribu au couple. Actuellement, si l’on veut aller à une universalisation cosmique, on a l’impression qu’il faudra atteindre à l’individu. C’est l’individu qui doit être au niveau de l’univers, qui doit s’intégrer et se réaliser dans l’univers.
Anne Guisen : Enquêtes sur diverses tentatives d'écoles nouvelles
Que penser de la discipline, de l’effort ? Quelle est la place des valeurs traditionnelles telles que la politesse, le respect de l’adulte ? Car s’il est vrai qu’imposer, sanctionner, forcer l’enfant peut le bloquer, le rebuter, ou, à la limite, engendrer des complexes, il est tout aussi vrai que dans la vie, tout ne lui sera pas permis et il sera également soumis à des limites et des contrariétés. La vie adulte exige des efforts et engendre des frustrations, des échecs, des déceptions. Sans être disciples de Rousseau, nous pensons que l’être humain possède au départ un potentiel positif et négatif. C’est l’éducation et l’influence du milieu qui détermineront son orientation dans un sens ou dans l’autre.
Micheline Flak : Recherche sur le yoga dans l'éducation
Aujourd’hui, les enseignants ont pour lourde tâche de faire entrer dans la tête des élèves des programmes de plus en plus chargés. Or, que fait-on pour perfectionner l’écoute et la mémoire ? Rien. On serine aux enfants : « Mais faites donc attention ! », leur a-t-on appris à se rendre attentifs ? Ils en auraient grand besoin, car la dispersion mentale grandit de rentrée en rentrée. Alors, on voudrait les obliger à se « concentrer ». Les yoguis sourient, car ils savent que la capacité de concentration ne se déclenche pas au doigt et à l’œil. Bien sûr, il y aura toujours des gens pour vous dire qu’ils ont appris tout seul, à nager. Comment ? En se jetant à l’eau.
Jean Biès : Questions à Arnaud Desjardins
Il est très vrai que nombreux en Occident sont ceux qui n’envisagent la Voie que comme un effort pour avoir l’Être, tout en sauvegardant leur ego. Le soi, l’âtman, ne se conquiert pas, il se révèle comme leur nature ultime à ceux qui se donnent à lui. Combien sont ceux pour qui le yoga, « science sacrée », est la fin de tous les désirs et de toutes les ambitions, le grand sacrifice, l’œuvre de toute une vie, et qui, au lieu de vouloir avoir un maître, veulent être des disciples ? Combien sont ceux qui, au lieu de lire des livres de spiritualité, aspirent à vivre réellement, à mettre en pratique ce qu’ils lisent et se sentent intimement concernés par « l’ignorance » et « l’illusion » dont leur parlent ces livres ?
Paul Chauchard : Du cerveau à la neuropédagogie
Je suis en désaccord avec Descartes qui disait : « Je pense donc je suis », aussi
avec Sartre qui a écrit dans Les mots que, depuis son enfance, il avait horreur de la nature
et qu’il s’enfermait dans une bibliothèque pour lire, penser et écrire. Pour la
neuropédagogie : Je sens donc je suis, j’agis donc je suis, j’imagine donc je suis, je désire
donc je suis ; et le « je » qui apparaît dans ces phrases implique le contrôle cérébral de
tout cela. Et, en vérité, contrôle cérébral signifie volonté. Mais on n’ose plus parler de
« volonté », car nous avons changé la volonté en « volontarisme » qui est une sorte de
force spirituelle pour mater la chair. Comme la volonté est donc une fonction cérébrale, il
s’agit de faire le calme en soi.
René Fouéré : Krishnamurti, L'homme et sa pensée
En dépit de tous ses efforts vers une condition immuable, l’individu s’interroge avec angoisse. Cette chose immortelle qu’il désire, est-ce sa conscience banale ? Hélas ! Si fortement qu’il la veuille corseter, elle n’est que fluctuations. De plus le sommeil, la syncope lui imposent des éclipses évidentes. Il va chercher quelque chose d’invariable au-delà de ces mouvements incessants et de ces interruptions. Alors il imagine — ou plutôt on imagine pour lui — un noyau permanent et abstrait, une âme substantielle, dont la conscience vulgaire est l’expression intermittente. Et, avec l’âme, voici Dieu et ses interprètes infaillibles, les crédos et l’exploitation religieuse; tout cela est entretenu par la soif de l’immortalité individuelle. Voici la foi et la haine du doute, du doute qui crée le sentiment que le moi est un assemblage mal fait, incohérent et précaire. L’individu mécanisé s’endort dans son rêve de survie statique et de permanence…